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F AVORISER L ’ ALLIANCE SUR LE TRAITEMENT ENTRE LE PATIENT ET LES SOIGNANTS

III. LES RECOMMANDATIONS DE LA MISSION

5  F AVORISER L ’ ALLIANCE SUR LE TRAITEMENT ENTRE LE PATIENT ET LES SOIGNANTS

Les conséquences économiques de la non-observance des traitements sont de deux natures : - une dépense vaine à court terme, due au gaspillage de ressources entrainé par un

mauvais usage ou un non usage du traitement (médicaments achetés mais pas pris, dispositif médical insuffisamment ou pas du tout utilisé) ;

- une dépense à moyen ou long terme, entraînée par la prise en charge de complications qui auraient pu être évitées.

Les quelques études réalisées sur ces conséquences économiques montrent que c’est plutôt la part des dépense due à la prise en charge des complications entraînées par une non-observance qui est de loin la plus importante.

La prévention de ces complications est l’objectif que doit se donner l’autorité publique, parce que celles-ci menacent la santé des personnes, parce qu’elles représentent un coût important pour la collectivité. Cette prévention doit pouvoir s’appuyer sur la mise en œuvre de programmes d’ETP et d’accompagnement, et sur les dispositifs de télé-suivi permis par les progrès techniques.

Cette prévention des complications d’un mauvais usage des traitements s’appuie sur quatre types de moyens :

- la relation soignante qui, pour être de qualité, doit soutenir le patient et lui apporter les informations et explications nécessaires à une bonne compréhension de sa pathologie, des contraintes et effets de son traitement ;

- les programmes d’ETP et d’accompagnement destinés à développer et soutenir les capacités des patients à prendre en charge leur traitement ;

- un accompagnement dans le cadre d’un télé-suivi du patient pour soutenir les patients et coordonner au mieux les soins nécessaires ;

- des soins liant traitement et télé-suivi-accompagnement pour leur assurer un niveau satisfaisant de sécurité et de qualité.

Dans tous les cas, le patient ne fait l’objet d’aucune sanction financière en cas de non-observance de son traitement. Il est fait le pari que de la qualité de l’accompagnement du patient dépendra le degré d’observance du traitement. La mesure de l’observance est donc ici un indicateur utilisé pour évaluer la qualité de la relation soignante et de l’accompagnement, et pour leur fixer des objectifs d’amélioration. Le télé-suivi permet de cibler l’accompagnement et d’en améliorer la qualité.

Quand les risques pour le patient lié à une non-observance sont importants, entraînant des dépenses évitables, la mission recommande de prendre les dispositions suivantes :

L’accompagnement est mis en œuvre avec l’accord implicite du patient, en dehors de tout dispositif de télé-suivi, selon une logique de « disease management »

Dans les cas où les risques lié à une non-observance sont importants, pour une pathologie relevant d’une prise en charge en ALD, l’accompagnement devrait automatiquement faire partie des dispositions inscrites dans le protocole de soins ALD.

Les critères de sélection de ces situations devront faire l’objet d’une formalisation établie par l’assurance maladie, après avis de la HAS.

Cet accompagnement n’est pas ici lié à un dispositif de télé-suivi. Après information faite au médecin traitant, il pourra prendre la forme de rappels par courrier ou par téléphone, faits au patient pour l’informer des nécessités de son traitement et l’inciter à en observer la prescription, à effectuer les examens de contrôle éventuels. Il pourra aussi conduire, à l’occasion de contacts avec le patient, dans le cadre de son hospitalisation, à fixer les rendez-vous nécessaires après son retour à domicile.

Le patient reste libre de rejeter cet accompagnement quand il le souhaitera. L’opérateur chargé de l’accompagnement en informera alors le médecin. Le médecin traitant et le patient pourront alors réapprécier un éventuel meilleur niveau d’alliance sur le traitement à suivre.

Ces accompagnements pourraient être réalisés par l’offre actuellement gérée par l’assurance maladie dans le cadre de SOPHIA ou de PRADO, reconfigurés plus strictement sur ce type de mission. Mais, à terme, si cette forme d’accompagnement engagé avec l’accord implicite du patient se révèle efficace, il serait souhaitable d’avoir recours à des opérateurs externes, capable d’offrir un accompagnement au contenu plus large, conformément aux recommandations de la mission IGAS de 2006 : « Améliorer la prise en charge des malades chroniques : les enseignements des expériences étrangères de disease management »146.

Recommandation n°16 : Dans des situations médicales définies par l’assurance maladie, une mesure d’accompagnement est à inscrire dans le protocole de soins ALD.

Le soin peut comprendre de façon indissociable le traitement et le télé-suivi-accompagnement

Trois raisons, pas forcément cumulatives, peuvent le justifier :

- l’existence d’une question de sécurité dans la prise du traitement147, mieux gérée avec la mise en place d’un télé-suivi-accompagnement ;

- la qualité du traitement susceptible d’exiger des ajustements sans délai ;

- le risque de complications sévères en cas de mauvaise utilisation du traitement, entraînant des dépenses évitables.

146 Rapport IGAS RM 2006-136P. Septembre 2006. Pierre-Louis BRAS, Gilles DUHAMEL, Etienne GRASS, qui considérait que « le scénario le plus pertinent [pour développer des actions de disease management] paraît être le recours à des prestataires externes ; les caisses d’assurance maladie ne jouerait pas un rôle d’opérateur mais d’acheteur. Il s’agit de susciter concurrence et émulation afin de garantir la possibilité d’évaluer et de sanctionner les résultats voire de partager le risque financier avec les opérateurs ».

147 Médicamenteux ou opéré par un dispositif médical.

Un exemple : le traitement de l’apnée du sommeil par des appareils à PPC.

Le soin dans ce cas comprendrait, de façon indissociable, le traitement (l’emploi de l’appareil à PPC) et le télé-suivi-accompagnement parce que :

- sa qualité sera ainsi meilleure148,

- le risque de complications sévères dues à une non-observance sera limité, Conséquences pour la personne malade :

En acceptant un soin utilisant un traitement par appareil à PPC, le patient accepte un tout indissociable, comprenant le télé-suivi-accompagnement. Un contrat thérapeutique scelle cet accord, l’alliance établie entre le patient et le médecin traitant. Le service de télé-suivi-accompagnement est cosignataire de ce contrat.

A tout moment la personne malade peut renoncer à ce soin. L’équipement sera alors retiré.

Le patient et son médecin traitant chercheront une autre forme de prise en charge sur laquelle une alliance thérapeutique entre eux sera possible.

Le patient peut choisir le service de télé-suivi-accompagnement qui lui convient le mieux. A tout moment il peut en changer. Le nouveau service informe alors le médecin traitant de ce changement.

Conséquences pour le service de télé-suivi-accompagnement :

Les services apportés font l’objet d’une rémunération sous la forme d’un forfait financé par l’assurance maladie.

Le tarif de ce forfait est modulé en fonction du niveau d’observance obtenu pour les patients pris en charge et de la fidélisation de la clientèle149.

Décision d’arrêt de la prise en charge :

Il ne peut être décidé d’arrêter la prise en charge d’un traitement par PPC au motif que le patient serait mal observant.

Le patient peut décider bien sûr, à tout moment, de cesser le soin qui lui a été prescrit pour traiter son problème de santé.

En cas de non-utilisation de l’appareil à PPC, la prise en charge peut-être arrêtée, après avis du médecin traitant.

Les critères de non-utilisation d’un traitement, en l’occurrence l’appareil à PPC, sont fixés par voie réglementaire.

Recommandation n°17 : Le traitement peut être indissociable d’un dispositif de télé-suivi-accompagnement. La loi doit en fixer le principe. Un texte réglementaire en précisera les conditions.

148 Grâce aux données transmises, le service d’accompagnement procédera rapidement à la recherche de solutions techniques rendant plus supportable le traitement, empêchant qu’il soit abandonné ou mal suivi. Ce service apportera aussi conseils et soutiens qui aideront le patient à mieux accepter les inconvénients du traitement.

149 Rien n’empêche bien sûr de concevoir d’autres facteurs supplémentaires pour moduler les tarifs, par exemple en combinant avec une régulation prix-volumes.

Proposition de texte de loi Commentaires

« La personne malade et son médecin ont l’objectif commun d’établir une alliance sur le soin pris en charge par l’assurance maladie ».

La loi de 2002 reconnaît les droits des patients, notamment celui d’obtenir du médecin toutes les informations sur sa pathologie et son traitement, nécessaires à l’établissement de son consentement aux soins.

Il convient d’en compléter les dispositions en affirmant la nécessité, pour le patient comme pour le médecin, de rechercher entre eux une alliance thérapeutique sans laquelle la prise en charge d’une pathologie n’est pas possible.

Cela permettrait de se tourner vers le médecin pour l’inciter à établir une alliance thérapeutique solide avec la personne malade.

Cela permettrait aussi de se tourner vers le patient pour attendre de lui qu’il s’engage dans une alliance thérapeutique avec son médecin.

« Un soin remboursé par l’assurance maladie peut lier le traitement à un télé-suivi-accompagnement, quand sa qualité en dépend, lorsque des risques de sécurité d’emploi existent, quand les conséquences pour la santé du malade sont importantes. La liste de ces soins sera fixée par voie réglementaire, après avis de la HAS ».

Les soins pris en charge par l’assurance maladie doivent être de qualité, et être dispensés en toute sécurité pour le patient. La solidarité collective ne saurait être mobilisée pour des soins qui ne viseraient pas à cette qualité et sécurité.

« La prise en charge par l’assurance maladie d’un soin comprenant un dispositif médical connecté et un accompagnement peut être arrêtée, après avis du médecin traitant, en cas de non-utilisation par le patient de l’équipement ».

Rien ne peut justifier qu’un dispositif médical mis à la disposition d’un patient dans le cadre de ses soins pris en charge par l’assurance maladie ne soit pas utilisé. Il faut en revanche s’entendre sur les critères de non-utilisation, et aucune décision d’arrêt de la prise en charge ne doit se prendre sans avis médical.

« Un décret précise les conditions selon lesquelles est appréciée la non-utilisation d’un dispositif médical connecté pris en charge par l’assurance maladie ».