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Conclusion du chapitre 1 :

Section 1 : Le contexte tunisien

1.4. Un cadre social plus flexible

1.4.4. La durée du travail

Plusieurs possibilités sont introduites dans le nouveau code: Tout d’abord il existe un

« régime normal » qui prévoit une durée hebdomadaire maximale de 48h, soit un total de 2476 heures par an. Une convention collective peut réduire cette durée à 40 heures par semaine, ce qui revient à 2 080 heures par an. Toutefois, selon l’article 82 du même code (modifié par la loi n° 96-62 du 15 juillet 1996), la durée hebdomadaire de travail « peut être portée, pour certaines entreprises ou certaines catégories de personnel, à 64 heures au maximum afin de tenir compte de la perte de temps résultant de l’interruption du travail ou de la nature du travail et ce, par Arrêté du Ministère chargé des Affaires Sociales ».

1.4.5. Rémunération

Le montant du salaire diffère selon la durée du travail. Depuis 2012, le SMIG45 horaire s’élève à 1,497 dinars tunisiens (DT) (0,71 €46) pour les salariés travaillant 40 heures par semaine et 1,451 DT (0,69 €) pour ceux travaillant 48h par semaine.

45 Les données communiquées par l’INS ne nous permettent pas de savoir s’il s’agit du brut ou du net.

En France, le salaire minimum interprofessionnel de croissance (SMIC) a remplacé le SMIG le 2 janvier 1970. La garantie a donc laissé place à la croissance. La différence entre le SMIC français et le SMIG tunisien n’est pas évidente. Comme le SMIC français, le SMIG tunisien est majoré régulièrement soit au mois de mai (c’était le cas en 1996, 1999, 1995 et 2000), soit en août (1991, 1994, 1998, 1999), en juillet (1997, 2001) en septembre (1996) ou en novembre (1997). N’ayant pas de données plus précises sur le calcul du SMIG tunisien, nous le considèrerons comme l’équivalent du SMIC français.

46 La conversion varie en fonction des taux de change du jour. Celle-ci a été effectuée le 30 avril 2013 sur http://fr.coinmill.com/TND_calculator.html

Le SMIG mensuel47 s’élève donc à 259,47 DT (122,71 €) pour les premiers et 301,80 TND (142,73 €) pour les seconds. Selon certaines sources48, ce dernier SMIG serait passé à 320 DT (151,78 €) le 10 juillet 2012, lors du conseil des ministres.

Comparativement aux SMIG mensuels marocains (209,58 € pour 44h) et algériens (172€

pour 40 heures), le SMIG mensuel tunisien de 2012 (151,78 € pour 48h hebdomadaires) est beaucoup plus intéressant pour les investisseurs nationaux et étrangers.

Aussi, le SMIG tunisien est de loin, plus intéressant pour les investisseurs que celui des pays européens (par exemple, il est 11,86 fois moins cher que celui du Luxembourg) comme le montre le tableau ci-après. Cette situation rend la Tunisie très compétitive. Mais elle accroit la vulnérabilité de ses travailleurs et laisse la porte ouverte à des abus et aux conflits sociaux dans les entreprises.

47 Selon l’INS, « le nombre d'heures de travail par mois pour le régime 40h/semaine est de 173h.333 et 208h pour le régime 48h/semaine »

48 http://www.businessnews.com.tn et http://www.elkasbah.net/tunisie-le-smig-passe-a-320d/

Tableau 4 : Le SMIC en Europe d'après EUROSTAT (201249)

4949 Source : Eurostat (mis à jour le 27 juin 2012), cité par http://lentreprise.lexpress.fr

50 Avant l’augmentation du SMIC prévue le 1er juillet 2012. Lors de cette date, le SMIC horaire brut français a augmenté de 2% passant à 9,40 €, ce qui revient à un montant de 1425,67 € brut mensuels (1 118 nets mensuels).

Selon http://lentreprise.lexpress.fr, ce SMIC horaire a connu une nouvelle majoration de 3 centimes le 1er janvier 2013. Il est passé de 9,40 € à 9,43 € bruts. Le SMIC mensuel brut s’élève donc désormais à 1430,22 € (soit environ 1121 euros nets) pour 35 heures par semaine. Plus d’informations sur http://lentreprise.lexpress.fr/smic-et-smic-horaire-les-montants_11263.html#CDaw5hXtOrQepR8S.99

Par ailleurs, la mise en œuvre du nouveau contexte social s’est accompagné en Tunisie, comme chez ses deux voisins, de la création de structures de formation spécialisées : c’est ainsi que les Instituts Supérieurs de Gestion (ISG) y ont vu le jour. Au Maroc, un réseau d’écoles supérieures de commerce a été développé. En Algérie, un institut de formation au management ainsi que des écoles privées de formation au perfectionnement des entreprises ont vu le jour. Parallèlement, des associations de mangement sont apparues : En Tunisie, l’ARFORGHE, l’association des responsables de formation et de gestion humaine a été créée.

Au Maroc, on a assisté à l’émergence de l’AGEF, l’association de gestionnaires du personnel et de formateurs. En Algérie, l’ALGRH, l’association algérienne de ressources humaines a vu le jour.

En résumé, on peut noter que contrainte comme ses voisins (l’Algérie et le Maroc) à l’ajustement structurel, la Tunisie a dû réécrire les règles régissant les relations professionnelles entre ses travailleurs et les employeurs de ces derniers, afin d’encourager l’économie de marché. Cette politique qui s’est traduite par une plus grande flexibilité au profit des employeurs, a favorisé l’investissement privé et séduit de nombreux investisseurs étrangers. Mais elle a aussi contribué à affaiblir les travailleurs en réduisant considérablement leurs droits et en les exposant à des employeurs peu scrupuleux qui peuvent désormais leur imposer des conditions de travail difficiles voire contestables.

Il est communément admis que le contexte économique et social reflète l’environnement politique d’un pays. Les résultats économiques favorables et encourageants de la Tunisie ainsi que son dynamisme social, laissent imaginer cette société comme une nation prospère qui abrite des individus libres. Les ouvrages touristiques spécialisés la décrivent traditionnellement comme la terre du jasmin et de sable chaud, pays aux « 300 jours de soleil, 1400 kilomètres de plages [et] 3000 ans d’histoires51 ». Au Nord de la Méditerranée comme partout ailleurs, c’est cette image romancée et joyeuse que l’on connait de la Tunisie. Mais qu’en est-il vraiment ? Dans quel contexte politique vivent réellement les Tunisiens ?

51 Touristic-guide.com, cité par Piot (2011)

Selon de nombreux auteurs, la description de la Tunisie faite par les ouvrages touristiques est loin de refléter la réalité.