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Introduction

Dans le document Le contrat de gage mobilier (Page 84-186)

III. La désignation de l'objet grevé

1. Introduction

propriétaire grevé et le créancier gagiste, le législateur allemand a institué un tel rapport entre le constituant et le créancier gagiste224 . Ce choix quelque peu sur-prenant a pour conséquence que de nombreux auteurs proposent d'appliquer par analogie les§§ 1214 ss du BGB aux relations entre le créancier gagiste et le pro-priétaire grevé225.

162. En conclusion, 1' on peut affirmer que, ne connaissant pas de rè-gle analogue au§ 1251 II BGB, le droit suisse n'institue pas un trans-fert légal du rapport d'obligation liant le créancier gagiste au consti-tuant. Cette différence dans ces législations ne doit pas être conçue comme une lacune du droit suisse: elle s'explique par la manière fonda-mentalement différente dont le législateur allemand a abordé le pro-blème des obligations réciproques des parties au contrat de gage.

b) La solution du droit italien

163. aa) Le droit italien soumet également le droit de gage mobilier au principe de 1 'accessoriété

226:

ainsi, lorsque la créance garantie est cé-dée, le cessionnaire devient titulaire du droit de gage

227

Cependant, 1 'article 1263 al. 2 du Code civil italien prévoit simultanément que la possession de 1 'objet grevé du gage ne peut pas être transférée au cession-naire sans 1' autorisation du constituant

228.

164. Ainsi donc, dans ce système juridique, si le droit de gage suit bien le sort de la créance, en tant qu'accessoire de celle-ci, l'objet du gage ne peut en revanche pas être remis sans le consentement

229

du

223 Cf. par exemple: STAUDJNGER/WIEGAND, n° 4 ad§ 1215; WESTERMANN, p. 465;

WIELING, p. 698 s.; etc.

224 Cf. supra, n° 153.

225 Cf. les développements de STAUDINGER/WIEGAND, no 4 s. ad § 1215;

WESTERMANN, p. 464 s.; etc.

226 Cf. par exemple: PERLINGIERI, n° 4 ad art. 1263.

227 Cf. art. 1263 al. 1 CC it. Cf. par exemple: CICCARELLO, p. 684; GABRIELLI, p. 70s.; etc.

228 Art. 1263 al. 2 CC it.: <<ll cedente non puà trasferire al cessionario, senza il consenso del costituente, il possesso della casa ricevuta in pegno; in casa di dissenso, il cedente rimane custode del pegno».

229 A savoir, une déclaration unilatérale; cf. PERLINGIERI, no 4 ad art. 1263.

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constituant. En introduisant cette solution, le législateur a entendu tenir compte du rapport de confiance qui se crée entre le constituant et le possesseur du gage

230,

à savoir en principe le créancier gagiste originaire

231:

il ne s'agit donc pas de faire échec au principe de l'accessoriété, mais de protéger les intérêts légitimes du constituant

232.

165. En d'autres termes, l'absence de consentement de la part du cons-tituant n'affecte pas la cession de la créance garantie ou le transfert du droit de gage

233:

seul le transfert de la possession de 1 'objet grevé est visé par 1 'article 1263 al. 2 CC it. Et cette disposition tire la conclusion logique de ce principe: lorsque le constituant refuse de donner son consentement, le cédant reste tenu de 1 'obligation de conserver la chose avec soin

234.

166. bb) La solution du législateur italien est intéressante, notamment en ce qu'elle établit un lien entre la possession du gage et les obliga-tions dont le créancier gagiste est tenu du fait de ce gage

235.

L'on peut cependant regretter que les auteurs ne procèdent pas à 1 'analyse de ce lien et qu'ils renoncent à indiquer quelles en sont les conséquences précises.

230 PERLINGIERI, no 4 ad art. 1263.

23I PERLINGIERI, n° 4 ad art. 1263.

232 Cf. PERLINGIERI, n° 4 ad art. 1263: «il diritto del creditore-cessionario ad ottenere gli accessori del credita ed a subentrare ne/la situazione creditoria originaria in contra, nellegittimo interesse del costituente il pegno, un ostacolo insuperabile che non è tale perà da costituire una deroga al principio dell'accessorietà ed al cm·attere reale della garanzia [. . .}, attenendo esclusivamente al profila del possesso materiale».

233 ZACCARIA, n° IV ad art. 1263; PERLINGIERI, n° 4 ad art. 1263; CICCARELLO, p. 684.

234 Art. 1263 al. 2, 2e phrase CC it.; cf. supra, note 228. Voir PERLINGIERI, n° 4 ad art. 1263.

235 Il semble bien, en effet, que ce soit l'ensemble des obligations du créancier gagiste dérivant du «rapport de gage» (sur cette notion, voir la définition donnée par RUBJNO et reprise par CICCARELLO, p. 683: <<il rapporta complessivo di pegno camp rende rapporti singoli di varia natura, cioè obbligazioni, diritti potestativi, stati di soggezione in senso tecnico, e puà comprendere anche diritti processuali, ma ilnucleo è costituito da un diritto reale») qui soit rattaché à la possession;

voir, par exemple, CICCARELLO, p. 691. Sur l'obligation de restituer la chose au constituant, voir l'art. 2794 CC it., ainsi que: NAPPI, n° I ad art. 2794; GORLA/

ZANELLI, n° 1 s. ad art. 2794; C!CCARELLO, p. 698 s.

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167. cc) Cela étant, il

y

a lieu de relever que, faute d'une norme com-parable à l'article 1263 al. 2 CC it., cette solution ne peut pas valoir pour le droit suisse: l'on ne saurait instituer autrement que par la voie législative l'exigence du consentement du constituant au transfert de la possession de l'objet grevé d'un droit de gage mobilier au cessionnaire de la créance cédée. En l'état du droit, il découle au contraire de l'arti-cle 170 al. 1 CC qu'en cas de cession de créance la possession de 1' ob-jet est transférée ex lege au cessionnaire

236

ou, à tout le moins, que le cédant a 1 'obligation de transférer la possession à ce dernier

237.

c) Le contrat de gage mobilier comme contrat accessoire

168. aa) On l'a vu, une partie de la doctrine affirme que le contrat de gage mobilier est un contrat accessoire

238 .

Or, la notion de contrat ac-cessoire n'est pas définie par la loi et 1' on ne trouve pas en doctrine d'exposé dogmatique qui y soit dévolu

239.

A notre connaissance, seul le Professeur P. Engel

y

consacre quelques lignes, en indiquant notam-ment que «le contrat accessoire est conditionné par l'existence d'un autre rapport de droit; il a généralement pour but de renforcer la situa-tion du créancier, de lui assurer une sûreté»

240.

L'on soutient d'ailleurs parfois que la clause pénale

241

ou le cautionnement

242

sont des contrats accessoires.

169. Si la loi ne semble pas connaître le contrat accessoire, elle men-tionne en revanche à plusieurs reprises les droits accessoires. Ainsi,

l'ar-23 6 Sic: ZOBL, no 281 ad art. 884. Moins affirmatif: HINDERLING, p. 438 (note 42).

237 Cf. ÛFTINGER/BAER, n° 162 ad art. 884; WIELAND, n° 7 ad art. 884. Voir aussi:

ATF 80 II 109/114, JdT 1955 I 48/51.

238 Cf. supra, n° 136 ss.

239 Ainsi, il est significatif que l'ouvrage de M. Philippe REYMOND intitulé La ces-sion des contrats ne mentionne pas le contrat accessoire.

240 ENGEL, p. 130.

241 Cf. par exemple: ENGEL, p. 130; GAUCH/SCHLUEP/TERCIER, Tome l, no 2491.

Voir cependant: BUCHER, p. 571, pour qui «der Anspruch auf eine Konventiona/-strafe» est un droit accessoire; voir aussi: BECKER, no 2 ad art. 170.

242 ENGEL, p. 130; ALAÏ, p. 152. Voir cependant: TERCIER (no 4979), selon lequel

«1 'obligation de la caution>> est un droit accessoire; voir aussi: OSER/

SCHONENBERGER, n° 21 ad art. 492; VON TUHRIPETER, p. 21; VON TUHRIESCHER, p. 354; MÜHL/PETEREIT, n° 85.

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ticle 170 al. 1 CO prévoit que la cession d'une créance emporte en prin-cipe la cession des droits accessoires de celle-ci; ensuite, l'article 178 al. 1 CO pose la règle que les droits accessoires restent sauf exception attachés à la créance nonobstant une reprise de dette; enfin, l'article 114 al. 1 CO précise que 1 'extinction de la créance principale entraîne généralement l'extinction de ses droits accessoires.

170. En se fondant notamment sur ces dispositions

243 ,

la doctrine a élaboré une théorie des droits accessoires: il s'agit là de droits dont le sort juridique est lié à celui du droit principal (généralement, une créance )

244 .

Ce lien entre le droit accessoire et le droit principal est plus ou moins étroit selon le type de droit accessoire en cause: lorsque le droit accessoire sert de garantie à la créance principale

245,

l'accessoriété est réputée plus forte que lorsqu'il ne constitue que le complément

246

de celle-ci

247.

171. Ainsi, les droits de gage

248

sont soumis à une stricte accessoriété: la naissance, 1' existence, le transfert et 1' extinction du gage dépendent de la créance garantie

249 .

Quant aux autres droits accessoires, leur accessoriété est parfois moins absolue, mais il n'en demeure pas moins qu'ils partagent (presque

250)

tous avec les droits

243 Voir également les art. 94 al. 2, 133 et 180 al. 1 CO.

244 AEPLI, n° 16 ad art. 114; BECKER, n° 37 ad art. 164; 0SERISCHONENBERGER, n° 2 ad art. 114; GUHLIKOLLERIDRUEY, p. 272; VON TUHRIPETER, p. 21; ENGEL, p. 437; GAUCH/SCHLUEP/TERCIER, Tome Il, no 1850 ss; SCHOBI, Die Akzessorietiit, p. 25 s.; FOËX, n° 424 ss; ALAÏ, p. 136 ss; W!EGAND, Akzessorietiit, p. 38; etc.

245 Ex.: 1 'hypothèque (art. 824 ss CC).

246 Ex.: les intérêts (cf. notamment l'art. 170 al. 3 CO).

247 AEPLI, n° 20 ad art. 114; 0SER/SCHONENBERGER, no 2 ad art. 114; ALAÏ, p. 137 ss;

W!EGAND, Akzessorietiit, p. 38. Voir aussi: SCHOBI, Die Akzessorietiit, p. 24 s.

248 Certains droits de gage ne sont pas considérés comme des droits accessoires;

voir par exemple, en ce qui concerne la cédule hypothécaire et la lettre de rente:

ZOBL, Syst. T., n° 249; OFT!NGERIBAER, n° !53 ad art. 884; SIMONIUS/SUTTER, p. 161; SCHOBI, Die Akzessorietiit, p. 40 ss; W!EGAND, Akzessorietiit, p. 50. Voir encore STEINAUER, Tome III, n° 2932 et n° 2641 s.

249 Principe dit de l'accessoriété; cf. ZOBL, Syst. T., n° 246; 0FTINGER/BAER, no 149 ad art. 884; STEINAUER, Tome III, no 3079 s.; SIMONIUS/SUTTER, p. 161; RIEMER, p. 119 s.; MüHLIPETEREIT, n° 730 s.; SCHOBI, Die Akzessorietiit, p. 38 ss; FOËX, n° 426; SPRENGER, p. 232; WIEGAND, Akzessorietiit, p. 38; WIEGAND, Kreditsicherung, p. 301 s.; etc.

250 Sur les exceptions, voir SCHOBI, Die Akzessorietiit, pp. 13 s. et 24 s.

LE CONTRAT DE GAGE MOBILIER

de gage une caractéristique commune: leur naissance dépend du droit principal

251

172. bb) Cela étant, l'on peut se demander s'il est possible d'appli-quer à un contrat dit accessoire les principes dégagés à propos des droits accessoires. Et, si la réponse devait être positive, il conviendrait égale-ment de déterminer quelles règles légales régissant les droits accessoires peuvent être appliquées aux contrats accessoires.

173. En l'état, il importe de noter que, pour mériter l'appellation de contrat accessoire, le contrat de gage mobilier devrait dépendre, à tout le moins en ce qui concerne sa prise d'effets, du principal. Et puisqu'il a pour objet de fournir une garantie, l'on pourrait ajouter que l' exis-tence, le transfert et l'extinction du contrat de gage mobilier accessoire devraient également être liés au principal.

174. cc) Cependant, avant d'élucider ces questions, il conviendrait naturellement de déterminer quel est ce «principal» duquell' on entend faire dépendre la naissance du contrat de gage mobilier, voire l'exis-tence, le transfert et l'extinction de celui-ci.

175. Or, les tenants de la théorie du contrat de gage mobilier acces-soire ne s'accordent pas sur l'identité du «principal»: pour C. Wieland, il s'agit de l'«actejuridique d'où découle» la créance garantie

252;

le Professeur Engel semble être du même avis

253

D. Zobl, en revanche, indique tantôt que le contrat de gage mobilier est l'accessoire du droit de gage lui-même

254 ,

tantôt qu'il dépend de la créance garantie

255

176. Cette incertitude est regrettable: si tant est quel 'on veuille consi-dérer que le contrat de gage est un accessoire, du moins devrait-on s'en-tendre avec précision sur le droit ou le rapport juridique dont il est censé suivre le sort. Mais cette incertitude est également significative: il sem-ble bien, en effet, qu'une confusion s'est installée entre la nature acces-soire du contrat de gage et le gage lui-même.

251 AEPLI, n° 20 ad art. 114; SCHÔBI, Die Akzessorietiit, pp. Il ss et 24 s.

252 WIELAND, n° 3 ad art. 884.

253 ENGEL, p. 130.

254 ZOBL, n° 292c et 341 ad art. 884.

25 5 ZOBL, n° 280 et 341 ad art. 884. Voir aussi: ROSSEL/MENTHA, n° 1633.

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177. Ainsi, P. Engel se fonde sur l'aÎ.'ticle 884 CC pour affirmer que le contrat de gage mobilier est un contrat accessoire

256;

or, cette disposi-tion ne mendisposi-tionne pas le contrat de gage

257,

mais est consacrée au nan-tissement en général. Quant à Rossel/Mentha, ils semblent considérer que le nantissement est un contrat

258;

dès lors, leur affirmation que «le gage est[ .. .] un contrat accessoire»

259

peut être comprise comme si-gnifiant non pas tant que le contrat de gage, mais bien le nantissement, est un accessoire.

178. Cette confusion probable est à vrai dire compréhensible: tant le nantissement que le gage sur les créances et autres droits sont des droits accessoires de la créance garantie

260:

la naissance, 1' existence, le trans-fert et 1 'extinction du droit de gage mobilier dépendent, pour 1 'essen-tiel, de la créance garantie

261.

179. Il en résulte que seuls les développements de D. ZobF

62

et de C. Wieland

263

sont tout à fait dépourvus d'ambiguïté sur le caractère accessoire du contrat de gage mobilier. Cette conclusion n'est néan-moins pas suffisante puisque la lecture de ces auteurs ne permet pas de déterminer avec certitude quel est le principal auquel le contrat de gage serait rattaché

264.

180. dd) On le voit, l'affirmation selon laquelle le contrat de gage mobilier est un contrat accessoire est la source de nombreuses ques-tions non résolues. D'une part, il n'est pas certain que le droit suisse connaisse la notion de contrat accessoire. D'autre part, l'on peut se demander si certains partisans apparents de cette théorie n'entendaient

256 ENGEL, p. 130.

257 Cf. supra, n° 120.

258 Cf. ROSSELIMENTHA, n° 1633: «Le nantissement qui est la forme du gage mobi-lier en droit suisse, est l'un de ces contrats qu'on appelle, en doctrine, synallag-matiques imparfaits».

259 ROSSEL/MENTHA, n° 1633.

260 ZOBL, Syst. T., n° 246 et n° 279 ad art. 884; ÜFTINGER/BAER, n° 149 ss ad art. 884; LEEMANN, n° 30 ad art. 884; WIELAND, no 7 ad art. 884; STEINAUER, Tome Ill, n° 3079; SCHÔBI, Die Akzessorietiit, p. 45 s.; ALAÏ, p. 144; WIEGAND, Akzessorietiit, p. 38 s.; WIEGAND, Kreditsicherung, p. 301; etc.

261 Pour le surplus, voir infra, no 599.

262 Cf. supra, note 166.

263 Cf. supra, note 166.

264 Cf. supra, no 175.

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pas plutôt se référer au caractère accessoire du gage lui-même. Enfin et en tout état de cause, l'on ne s'accorde pas sur la question de savoir à quel droit (ou rapport de droit) principal il convient de rattacher ce contrat accessoire.

181. ee) Quoi qu'il en soit, il importe de relever que le contrat de gage mobilier ne saurait être qualifié de contrat accessoire. En particulier, l'on ne voit pas que la prise d'effets du contrat puisse dépendre de l'exis-tence de la créance à garantir

265

sans que les parties en soient conve-nues ainsi: 1 'article 1 al. 1 CO ne prévoit-il pas que

«le contrat est par-fait lorsque les parties ont, réciproquement et d'une manière concordante,

manifesté leur volonté»?

182.

C'est le lieu de souligner qu'il n'est pas rare que le contrat de gage soit conclu alors que la créance destinée à être garantie n'est pas encore née266 .

183. Mais c'est principalement en raison des conséquences néfastes de 1' accessoriété du contrat de gage en cas de cession de la créance garan-tie qu'il convient de rejeter cette théorie. En premier lieu, une telle accessoriété porterait atteinte au principe de la relativité des conven-tions: le contrat passé entre le constituant et le créancier gagiste serait opposable au cessionnaire de la créance

267.

184. Ensuite, cette accessoriété aurait pour conséquence un affaiblis-sement de la notion de droit réel, puisque 1 'acquéreur du gage mobilier (cessionnaire de la créance garantie) deviendrait titulaire d'un droit réel aux attributs plus ou moins étendus, selon la convention que les parties originelles au contrat avaient passée

268.

L'on mesure 1 'insécurité juridi-que qui peut résulter du fait juridi-que la position juridijuridi-que acquise par le cessionnaire ne correspond pas nécessairement à ce à quoi il est en droit de s'attendre en acquérant un droit défini par la loi, mais est au contraire redessinée par une convention à laquelle il n'était pas partie et qui lui est au surplus opposable.

185. Par ailleurs, la reprise du contrat en cas de cession de la créance garantie s'effectuerait en l'absence d'une base légale claire, ce qui est

265 Sur le lien que les parties ont la faculté de créer entre le contrat de gage mobilier et la créance garantie, voir infra, n° 602.

266 Cf. infra, no 614.

267 Cf. supra, n° 137 et 141.

268 Cf. supra, n° 142.

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quelque peu surprenant pour un transfert censé s'effectuer ex lege. Ce d'autant que ce transfert «légal» s'insère particulièrement mal dans no-tre droit positif: si la reprise de dette

269

et le transfert d'un contrat

270

supposent le consentement du cocontractant, 1' on voit difficilement comment il en irait autrement in casu.

186. Enfin, il ne faut pas non plus oublier que le transfert ex lege du contrat de gage mobilier en cas de cession de la créance peut avoir des conséquences qui ne sont pas souhaitées par les parties originelles au contrat. Ainsi, le constituant peut avoir conféré un gage omnibus

271

à son cocontractant en raison du rapport particulier qui les unit et n'être pas prêt à ce que cette position privilégiée soit transférée à un tiers. De même, le constituant qui consent à inclure dans le contrat de gage mobi-lier une clause autorisant la réalisation de gré à gré de 1 'objet grevé (par exemple, un bijou )

272,

parce que le créancier gagiste est un connaisseur et que 1 'on peut dès lors s'attendre à ce qu'il ne réalise pas la chose à vil prix, peut légitimement souhaiter que cette faculté ne soit pas exercée par le cessionnaire de la créance cédée, qui n'a par hypothèse aucune connaissance particulière en la matière.

187. Il apparaît ainsi clairement que la nature accessoire du contrat de gage met doublement à malle principe de la relativité des conventions lors de la cession de la créance garantie: d'une part, elle a pour consé-quence que des droits purement personnels du constituant deviennent opposables à l'acquéreur du gage et, simultanément, elle élève quasi-ment au rang de droit réel des facultés réservées au créancier originel, qui ne devaient valoir qu'inter partes.

188. ft) On le voit, les questions soulevées par l'accessoriété du contrat de gage mobilier peuvent fort bien rester ouvertes: il n'est pas néces-saire de rechercher plus avant quel est le droit (ou le rapport de droit)

«principal» auquel le contrat de gage devrait être rattaché. Il s'impose bien plutôt d'écarter cette construction juridique, qui est d'ailleurs dé-pourvue de base légale.

269 Cf. art. 176 CO.

270 Cf. supra, no 145 s.

271 Sur cette notion, voir infra, n° 652.

272 Cf. infra, n° 826 s.

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3. Le rattachementpropter rem a) Introduction

189. aa) Les solutions qui viennent d'être envisagées

273

ont toutes trois été rejetées parce qu'elles reposaient sur des prémisses inconnues du droit suisse. Il n'en demeure pas moins que le problème du lien entre la créance garantie et les obligations découlant du contrat de gage doit être résolu: il importe de déterminer quel est le sort des obligations des parties, notamment celles du créancier gagiste, en cas de cession de la créance garantie.

190. bb) La recherche d'une solution harmonieuse s'impose d'autant plus que les obligations de garde et de restitution incombant au créan-cier gagiste sont des obligations légales

274:

si le législateur a pris le soin d'imposer ces devoirs au créancier gagiste, l'on peut admettre qu'il convient que les qualités de créancier gagiste et de débiteur de ces obli-gations ne soient pas séparées en cas de transfert du gage. Or, c'est précisément cette dernière réflexion qui constitue la clef du problème posé.

b) Le rattachementpropter rem des obligations légales du créancier gagiste

191. aa) Les obligations de garde et de restitution incombent selon la loi au «créanciem

275.

Il en découle logiquement que le législateur a en-tendu imposer ces obligations non pas à une personne déterminée, mais au créancier gagiste: la qualité de débiteur de ces obligations est ainsi rattachée à celle de créancier gagiste.

273 274

Cf. supra, no 153 ss, 163 ss et 168 ss.

Cf. supra, n° 112.

275 Art. 889 al. 1 CC: «Le créancier doit restituer la chose à l'ayant droit ... »;

art. 886 CC: <<Le propriétaire peut constituer un droit de gage subséquent, à la

art. 886 CC: <<Le propriétaire peut constituer un droit de gage subséquent, à la

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