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§2 - La compétence judiciaire du Consulat de Mer de Nice

A) Un domaine ambigü de compétence

Les compétences du Consulat sont précisées par les Royales Constitutions dans le premier chapitre consacré au Consulat. Le Consulat de Mer de Nice connaît « à l'exclusion de tout autre Juge de toutes les causes qui concernent le change, le négoce et autres qui appartiennent au commerce non seulement entre les négociants, mais encore entre eux et autres ou leur héritiers »190. Ainsi, deux

188 PENE VIDARI (G.-S.), « Le pays niçois et les travaux du Code de commerce de la Maison de Savoie », art. cit., p. 220. article de la patente.

189 AZUNI (D.-A.), Dizionario..., op. cit., t. IVV°« Tribunale di commercio », §VI. La suite indique ceci : « Quindi non

potranno giudicarsi, da questi tribunali, quelle cause non procedenti dalla negoziazione, benchè agitate tra persone trafficanti, mentre il privilegio di tale giurisdizione non si è introdotto, che in favore del commercio, e della mercatura, non già delle persone che l'eserciscono ».

critères, la matière du litige et la qualité de la personne, sont utilisés de façon concomitante, pour définir la compétence de notre juridiction commerciale.

Concernant la qualité des personnes, les Royales Constitutions, sans définir la qualité de négociant, donnent néanmoins une liste précise et sans doute trop restrictive des personnes justiciables du Consulat. Il s'agit d'abord « des banquiers et ceux qui ont des manufactures de soie, laine, coton, lin, chanvre, chapeaux, cuirs et peaux, des verreries, des fabriques en or et en argent filé, ou autres qui intéressent le commerce du Pays191. » Sont encore négociants, ceux « qui ont des magasins ou boutiques ouvertes pour vendre des marchandises fabriquées dans le Pays ou qui ont été introduites192. » Sont exclues les contestations dont la cause n'est pas commerciale et qui proviennent « de ce qui peut être dû par des particuliers à cause des marchandises, qui leur ont été vendues pour l'usage de leurs familles [...]193. » C'est alors le juge ordinaire qui est compétent. Mais si, dans ces mêmes litiges « [...] le prix des marchandises a été acquitté par le moyen d'une lettre de change tirée par un autre négociant, la connaissance en appartiendra au Consulat194. »

Le Consulat connaît aussi « des gages et salaires des commissionnaires, facteurs, et autres personnes qui sont au service des marchands pour le fait du négoce seulement, comme encore des contestations sur les nolis, voitures et autres dépendances du commerce195. » De même pour « les prêts faits entre banquiers, marchands et négociants, lorsqu'ils ne sont pas faits pour quelque cause particulière et indépendante du commerce, [...] comme aussi des dépôts qui se feront entre leurs mains même par des particuliers [...]196.

Fort de sa position maritime, le Consulat de Mer de Nice est aussi compétent pour connaître des litiges relatifs au commerce maritime et de tout contrat s'y rapportant. L'édit du 15 juillet 1750 pour l'organisation du Consulat de Mer de Nice197, dont les dispositions sont reprises dans les Royales Constitutions de 1770, souligne ses spécificités. Il connaît ainsi « de tous les différens qui naîtront à l'occasion de la construction, armement, équipage, vente, ou adjudication des bâtiments, des conventions entre capitaines ou patrons avec les mariniers, de toutes les causes qui auront quelque connexité avec la navigation, de tous les contrats appartenans aux usages maritimes, comme sociétés, assurances, nolis, de même que de tout ce qui aura quelque relation au négoce 191 Ibid., §13. 192 Ibid., §14. 193 Ibid., §9. 194 Ibid., §15. 195 Ibid., §16. 196 Ibid., §17.

maritime198. » Le Consulat de Nice connaît aussi « des prises maritimes et de tout ce qui pourra en dépendre, tant en cas de représailles que d'armement en course, ou de piraterie ; comme encore des jets, déchargements de navires faits dans les dangers de bourrasque et des cas de naufrage et en conséquence des effets trouvés sur la plage, ou flottans sur l'eau, pêchés à fond, ou autrement enlevés, ou cachés au préjudice de ceux qui ont fait naufrage199. » Il aura encore « la connaissance de toutes les causes qui peuvent survenir en fait de contrebande et fraude dans l'importation, ou exportation par mer de marchandises défendues, comme encore des causes qui peuvent concerner le droit d'ancrage, d'hôtelage et de tous autres relatifs au droit de Villefranche : il aura aussi la connaissance de tous les délits commis en mer, ou dans nos ports et plages200. »

Relativement au port franc, le Consulat « ayant la surintendance du Port franc » est chargé « de veiller attentivement à l'observation des privilèges et des autres dispositions qui le concernent »201. Depuis l'édit du 12 mars 1749, il peut connaitre en dernier ressort de tous les litiges relatifs à une cause de commerce ou de marchandises entre négociants, marchands, patrons, marins, condottieri, passagers202. L'édit du 29 février 1828 dispose que les Consulats de Turin et de Nice sont compétents en matière de faillite. Dans les autres provinces dans lesquelles il n'y a pas de Consulats, cette faculté est exercée par les tribunaux de préfecture203.

Le Consulat est compétent pour toutes les affaires dérivant du commerce et du trafic, tant de terre que de mer, cela est généralement établi et ne pose pas de difficulté. L'ambiguité ou le doute regarde surtout, comme le souligne Azuni, la qualité de négociant ou de marchand, qualité qui n'est pas définie204 par les Royales Constitutions.

198 Leggi e Costituzioni..., op. cit., L. II, tit. 16, chap. 1, § 26.

199 Ibid., §27.

200 Ibid., §28.

201 Leggi e Costituzioni..., op. cit., L. II, tit. 16, chap. 1, §29.

202 Article 31 de l'édit cité, dans DUBOIN (F.-A.), Raccolta..., op. cit., L. III, vol. 4, p. 840 : « Il Magistrato del

Consolato della Città di Nizza, avrà la sopraintendenza e protezione del Portofranco per l'osservanza de' privilegii del medesimo, e la cognizione inappellabilmente di tutte le liti, che per causa di negozio o mercatura insorgeranno fra negozianti, mercanti, patroni, marinari, condottieri, passaggieri e fra questi, ed altri [...] ».

203 Article 2 de la patente : « Nella provincia di Torino, ed in quella di Nizza continueranno ad essere in pieno vigore le

attribuzioni date dalle generali Costituzioni ai Consolati nei casi di fallimenti. Nelle altre provincie, in cui sono sia un Tribunale di commercio, queste attribuzioni, nei casi di fallimenti, insieme colla facoltà che concediamo al Prefetto d'interporsi per un amichevole componimento, speterranno ai Tribunali di Prefettura : ma se si tratterà di delitto, che importi piena maggiore del carcere, dopo l'istruttoria, che ne spetterà al Tribunale, la causa sarà giudicata da quel Magistrato a cui sono devolute le appellazioni secondo il prescritto dell'articolo 18 dell'Editto del 27 di settembre 1822 ».

204 Sans doute appartient-il à la doctrine de fournir une telle définition. On peut se reporter à celle d'AZUNI,..., op. cit., t. IV, V°« Tribunale di commercio », §10 p. 139. Il définit le négociant ou le marchand comme celui qui exerce les affaires de commerce et d'échange, achetant et revendant des marchandises pour en tirer un profit. De même il émet et reçoit des lettres de change pour faire face à ses obligations « e mischiandosi con frequenti atti negli affari di commercio. Questi

atti pero non sono senza termine ed illimitati, ma bastano esser tali che concludano un uso, una frequenza, un'abituazione, un solito, che dalle azioni, e da un corso limitato di tempo siasi indotto : cosicchè per quanta forza possano avere, o testimoni, o altre giustificazioni addotte per provare un taluno la qualità di negoziante, o mercante, non minore la debbono avere i contratti, e gli atti mercantili ben ponderati dal giudice, dal di cui arbitrio dee dipendere lo

Le Consulat étant compétent, il doit procéder d'une certaine manière.