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I - L'accès à la fonction et l'étape du Consulat de Mer de Nice dans le cursus honorum

Des connaissances juridiques portées par une méthode et une certaine expérience judiciaire doivent permettre le bon accomplissement de la fonction de magistrat. Eu égard à notre période, celle de la Restauration, existe une particularité quant à la formation, théorique et pratique, des magistrats du Consulat. En effet l'occupation française dans les territoires de la Maison de Savoie a pour conséquence que certains de nos magistrats ont reçu une formation dispensée par l'université impériale française et de même certains d'entre eux ont exercé des fonctions publiques au sein d'institutions françaises.

Dans la Maison de Savoie, l'accès à la magistrature est d'abord conditionné par l'obtention d'un diplôme : le candidat doit être titulaire de la laurea en droit, c'est à dire du doctorat236. Ainsi dispose la patente royale du 16 janvier 1730, concernant tout autant la charge de sénateur, que des préfets et des juges. Délivré après cinq années d'étude par les deux grandes Universités du royaume de Piémont-Sardaigne à la Restauration, celles de Turin237 et de Gênes238, le doctorat en droit atteste d'un « savoir technique de haut niveau, indispensable à toute activité de support de l'exercice du pouvoir public239. » Pourtant en fait, on trouve dans le personnel de notre institution des

236 Dans les Etats de la Maison de Savoie, tous les avocats sont titulaires de la laurea. Par comparaison, en France, la simple licence en droit suffit, complétée d'un stage de deux ans chez un avocat. ROUSSELET (M.), Histoire de la

magistrature française des origines à nos jours, Paris, Plon, 1957, p. 240.

237 Sur l'histoire de l'Université de Turin, SOFFIETTI (I.), La fondazione dell'Università di Torino: la bolla di Benedetto

XIII, antipapa. AIMERITO (F.), « L'insegnamento del diritto », Alma Felix Universitas studii taurinensis, lo Studio generale dalle origini al primo Cinquecento, a cura di I. NASO, Turin, 2004. BALANI (D.), Toghe di Stato. La facoltà giuridica dell'Università di Torino e le professioni nel Piemonte del Settecento, Turin, Deputazione Subalpina di Storia

Patria, 1996. Et sur la crise de l'Université de Turin, ROMAGNANI (G.-P.), « L'Università e le istituzioni culturali dopo la Restaurazione (1814-1820) », Ombre e luci della Restaurazione, Actes du colloque, Turin 21-24 octobre 1991, Roma, Uff. Centr. Beni Archivistici, 1997, pp.550-569.

238 Aucun de nos magistrats n'a été diplomé par l'Université de Gênes.

239 AIMERITO (F.), « Droit et société dans l'histoire des professions judiciaires des Etats de la Maison de Savoie : de la monarchie absolue jusqu'à l'unification italienne (XVIe-XIXe siècles) », in Les praticiens du droit du Moyen Âge à

l'époque contemporaine. Approches prosopographiques, Belgique, Canada, France, Italie, Prusse., Actes du colloque de

magistrats ayant simplement obtenu la licence. Il en est par exemple ainsi d'Honoré Garin di Cocconato. Pour ce dernier existe un témoignage intéressant, celui du Comte de Villanova, alors président chef du Consulat, suggérant Garin di Cocconato pour exercer la fonction de substitut du procureur général du commerce, et ce malgré qu'il ne soit pas laureato en droit. Cette dérogation est justement justifiée en l'espèce par la matière commerciale : « [...] poiché le materie commerciali

di terra e di mare non esigono che sia il soggetto laureato e consumato nelle cognizioni puramente legali ma soltanto che ne abbia le prime essenziali notizie, riunite a quella esperienza e pratica delle materie e regole relative al commercio, potrebbe in ogni caso Sua Maestà accordargliene la dispensa con deroga al disposto del §2, Lib. II, tit 5(3?) delle Regie Costituzioni [...]240. »

Que le niveau soit celui de la licence ou du doctorat, la culture et la pédagogie universitaires à l'Université de Turin, sont surtout orientées sur le droit civil et romain, accompagné de droit canon, éventuellement de droit pénal, mais pas de droit commercial. Cela s'explique par un faible développement de l'activité commerciale jusqu'au XVIIIe siècle. Il faut attendre 1835 pour voir le début de l'enseignement officiel d'un droit commercial à l'Université turinoise241. Le droit commercial est alors enseigné en même temps que le droit processuel. C'est le professeur Giovanni Francesco Vachino, « [...] persona giudicata affidabile sul piano politico-culturale »242 qui est chargé de le dispenser. Sur la motivation présidant à enseigner le droit commercial à l'université de Turin, celle-ci pourrait avoir été introduite sur la base des exemples génois et étrangers243 et sous la pression tant du monde universitaire, des praticiens du droit que de la Chambre d'agriculture et de commerce érigée notamment à Turin depuis 1824. Cet enseignement vise ainsi à élargir l'éventail des connaissances des étudiants et est concomitant de l'intérêt grandissant pour les échanges commerciaux à partir de l'époque du règne de Charles-Albert. Remarquons qu'eu égard à la période étudiée dans le cadre de cette étude, peu de nos magistrats244 ont pu bénéficier de cet enseignement. Un peu moins de la moitié de nos magistrats ont été diplomés durant la période napoléonienne245. En effet, le Piémont, conquis par l'armée révolutionnaire française en 1798, voit son chef-lieu Turin être pourvu d'une Académie comprenant quatre facultés dont une de droit. En 1804 Turin devient le

240 ASTO, materie economiche, materie di commercio, magistrato del consolato categorie 1, mazzo 1. (n°103). Lettre du Conte di Villanova, s.d. mais reçue à Turin le 22 octobre 1814.

241 PENE VIDARI (G.- S.), « Nota sull'inizio dell'insegnamento del diritto commerciale all'Università di Torino »,

Bolletino storico-bibliografico subalpino, 1997, XCV, p. 511-531.

242 Ibid., p. 513. Giovanni Francesco Vachino enseigne les Institutions canoniques et fait partie de la Commission de censure di libri e stampe.

243 Ibidem., p. 514.

244 Téodore Uberti a sans doute reçu cet enseignement, étant diplômé de la laurea en 1835.

245 ROMAGNANI (G.-P), Prospero Balbo, intellettuale e uomo di Stato (1762-1837), II: Da Napoleone a Carlo Alberto

siège d'une Ecole de droit246, et suite au décret fondateur de l'Université impériale du 17 mars 1808247, l'Ecole de droit prend officiellement le nom de faculté. Si sur le plan de la structure et de l'organisation, l'Université impériale présente de profondes similitudes avec le système universitaire sarde248, en ce qui concerne en revanche la pédagogie, les enseignants249 doivent mettre à jour leurs connaissances et leurs méthodes. En effet, les codes napoléoniens deviennent le droit positif des pays conquis. A Turin le droit français tient donc une place essentielle dans l'enseignement de la Faculté de droit, à côté du droit romain, qui lui perd corrélativement de son importance250. Sur la forme, la méthode est celle de l'exégèse251, méthode d'interprétation littérale des texte. Quant aux étudiants, en constante augmentation252, qui se destinent à la carrière de la magistrature, le niveau de licence est suffisant. Il en est ainsi pour Louis Guiglia et Charles-Henri Torrini de Fogassieras.

La fonction de magistrat exige donc l'acquisition en amont de connaissances et de méthodes juridiques. Elle exige aussi une pratique préalable, un certain savoir-faire, ce qui conduit à s'interroger sur la place de magistrat au sein du Consulat de Mer de Nice dans le cursus honorum. Contrairement au système français d'Ancien Régime, il n'y a ni inamovibilité, ni vénalité des charges253. Les magistrats de la Maison de Savoie peuvent donc changer de fonction à l'intérieur de leur juridiction et passer d'un tribunal à l'autre. Certains peuvent faire carrière et suivent une sorte de cursus honorum, occupant successivement au cours de celle-ci plusieurs postes en Savoie, en Piémont, à Nice, en Sardaigne, dans les diverses juridictions du royaume, souveraines ou non, comme magistrat du siège ou du parquet254. Le candidat, fort de son diplôme et de ses

246 La loi relative aux Ecoles de droit est publiée le 13 mars 1804 et le décret concernant son organisation le 21 septembre de la même année. VOUTYRAS (A.-M.), « Les facultés de droit dans les départements étrangers de l'Empire napoléonien », in Revue d'Histoire des facultés de droit et de la science juridique, 1992, n°13, p. 128.

247 Ce décret reprend les dispositions régissant les Ecoles de droit, la loi de ventôse an XII et son décret d'application du 4e complémentaire an XII.

248 FERRANTE (R.), Codificazione e cultura giuridica, Torino, Giappichelli, 2006, p. 22. C'est notamment le cas au regard du monopole universitaire napoléonien. L'inspecteur général Mathurin Sedillez, chargé par Napoléon de la remise en ordre des facultés de droit « au-delà des Alpes », donne d'ailleurs une bonne appréciation de l'enseignement dispensé à Turin, sauf pour la langue française. Dans une lettre qu'il adresse le 1er septembre 1807 à Prospero Balbo, il en fait même un modèle de la réorganisation des autres facultés de droit de l'Empire. ROMAGNANI (G.-P), Prospero Balbo..., op. cit., pp. 149-150. FERRANTE (R.), Codificazione e cultura giuridica, Torino, Giappichelli, 2006, p. 41 et s.

249 PENE-VIDARI (G.-S.), « I professori di diritto », in L'Università di Torino. Profilo storico e istituzionale, a cura di TRANIELLO (F.), Pluriverso, 1993, pp. 82-91.

250 PENE-VIDARI (G.-S.), « Diritto romano e codificazione. Vicende storiche e questioni di metodo », Rivista di storia

del diritto italiano, LIII-LIV, 1980-81, p. 174-182.

251 REMY (Ph.), « Le rôle de l'exégèse dans l'enseignement du droit au XIXe siècle », Annales d'histoire des Facultés de

droit et de la science juridique, n°2, p. 100.

252 ROMAGNANI (G.-P.), « L'Università e le istituzioni culturali dopo la Restaurazione (1814-1820) », art. cit., p. 552.

253 DIONISOTTI (C.), Storia della magistratura piemontese, 2 T., Turin, 1881, au T. 1, p. 160. Même si on constate des opérations partielles de vente au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle.

254 BOTTIN (M.), « Le Consulat de Mer de Nice 1613-1855 », art. cit., p. 101. Pour exemple, sont données certaines promotions de magistrats au Consulat de Mer de Nice au XVIIIe siècle à la tête d'autres cours souveraines.

connaissances juridiques, doit-il avoir déjà exercé des charges publiques dans les institutions des Etats de la Maison de Savoie avant d'entrer au Consulat de Mer de Nice ? Doit-il être pourvu d'une certaine expérience judiciaire ? Quelle étape représente donc l'entrée comme magistrat au Consulat de Mer de Nice ? quelle place a une fonction exercée au Consulat de Mer de Nice au sein du cursus

honorum des magistrats de la Maison de Savoie ?

Pour répondre à ces questions, il convient d'étudier les carrières de nos magistrats255, avant et après leur arrivée au sein de la juridiction commerciale niçoise. Ces renseignements nous sont principalement fournis par les correspondances échangées concernant le recrutement entre l'autorité centrale à Turin et le régent du Consulat de Mer de Nice ou le président chef du Sénat de Nice256. Bien qu'il ne soit pas possible d'avoir ces informations pour tous les magistrats ayant occupé un poste au sein du Consulat, l'on peut néanmoins affirmer que l'entrée au Consulat représente une étape intermédiaire et sans doute originale à celui qui se destine à la carrière de la magistrature. Aux premiers moments de la Restauration257, lors du rétablissement définitif du Consulat sont pour la plupart recrutées des personnes, qui demeurées fidèles au roi, ont déjà exercé des fonctions judiciaires sous l'Ancien Régime. Mais ces fonctions sont d'avantage celles d'un début de carrière. Sont ainsi par exemple nommés à la fonction de juge légal, Pierre Antoine Cauvin qui exerçait sous l'Ancien Régime la fonction de substitut du procureur général du commerce, et Aigulfe Arnaud di Castelnuovo qui était lui substitut de l'avocat fiscal général du Sénat de Nice. Et en effet, en proportion, sauf pour la fonction de régent, il semble y avoir moins de magistrats aux curriculum

vitae conséquents que de jeunes avocats ayant déjà dû faire leur preuve comme substitut ou

volontaire. Le volontariat258 représente la première voie d'accès, sans doute privilégiée, pour faire carrière dans la magistrature sénatoriale. Il en est ainsi de Joseph Raimondi, admis comme volontaire à l'Uffizio de l'Avocat des pauvres auprès du Sénat de Nice en 1823, puis comme volontaire encore auprès de l'Avocat fiscal général de la même institution en 1825259, pour rentrer au Consulat de Mer de Nice en 1827 d'abord comme substitut du Procureur général du commerce, puis à compter de 1834 comme juge effectif.

255 GENTA (E.), Senato e Senatori di Piemonte nel secolo XVIII, Turin, Deputazione subalpina di storia patria, 1983. DIONISOTTI (C.), Storia della magistratura piemontese, 2 T., Turin, Roux e Favale, 1881. SARACENO (P.), Storia

della Magistratura italiana. Le origini. La magistratura del Regno di Sardegna, Roma, Università "La Sapienza" -

Scuola speciale per Archivisti e Bibliotecari, 1993. SCLOPIS (F.), Dell'autorità giudiziaria, Turin, 1842.

256 ASTO, Corte, materie economiche, materie di commercio, magistrato del Consolato, 6 mazzi.

257 En juillet 1814, une organisation même provisoire apparait en effet urgente étant donné « un incaglio tale nelle cause

di commercio, che sono senza numero le indecise [...] ». Une organisation définitive de ladite juridiction commerciale

n'est pas possible pour l'instant, mal potrebbe in ora effettuarsi anche per poter provvedere a tutti gli impiegati secondo

lor anzianità e servizio quando verrà definitivamente perfezionata quella del Senato. ASTO, materie economiche,

materie di commercio, magistrato del consolato categorie 1, mazzo 1 n°102.

258 DECOURT HOLLENDER (B.), « Le volontariat dans les Sénats du royaume de Piémont-Sardaigne sous la Restauration (1814-1848), BSBS, CVII 2009, fasc. II, juillet-décembre, p. 469-522.

Certains membres du Consulat de Mer changent donc de fonction à l'intérieur même de la juridiction. A la mort du procureur général du commerce Jean-Baptiste Verani le 30 mars 1817, c'est l'avocat Joseph Todon, alors juge légal, qui devient chef de l'Uffizio. Pour remplacer Joseph Todon qui décède lui aussi, c'est François Mars, juge légal surnuméraire qui obtient la promotion de juge fixe260. L'exemple de la carrière d'Honoré Garin de Cocconato au sein du Consulat est de même à cet égard remarquable. En effet, commençant par occuper le poste de substitut du procureur général du commerce en 1816, il devient en 1819 juge surnuméraire, pour finir juge fixe à partir de 1821, fonction qu'il occupera jusqu'en 1845.

La démission du sénateur Ignace Milon au poste de juge légal en 1819 est aussi l'occasion de pourvoir à son remplacement261. Est ainsi nommé le sénateur Pierre Facio262, alors qu'un autre sénateur Louis Guiglia en avait également fait la demande. C'est le critère, objectif lui aussi, de l'ancienneté du titre de sénateur qui est ici appliqué. En effet, Pierre Facio est sénateur depuis 1815 alors que Louis Guglia ne l'est que depuis 1818. Remarquons que ce dernier, diplômé par l'Université impériale en 1808, a exercé des charges publiques sous l'occupation française, d'abord comme substitut du procureur impérial puis comme juge au sein du Tribunal de première instance de Nice263. Il en est également ainsi pour Jean-Baptiste Verani et Hilarion Spitalieri de Cessole. Ainsi bien que le gouvernement à la Restauration ait cherché à récompenser la fidélité politique de certains, en les nommant dans les institutions, le souverain Victor-Emmanuel Ier ne s'engage pas pour autant dans une politique d'épuration trop radicale : « la réussite du "buon governo" en dépend264. »

De même, suite à la condamnation du sénateur Cauvin265 à quinze années de prison selon sentence proférée par le Sénat le 26 juin 1820, il faut pourvoir à son remplacement266. Le régent, Spitalieri de Cessole propose trois personnes pour occuper le poste de juge légal fixe devenu vacant. Par

260 ASTO, materie economiche, materie di commercio, magistrato del consolato categorie 1, mazzo 2-5 e).

261 Dans une lettre du 23 octobre 1819, il explique les motifs pour lesquels il souhaiterait être dispensé de sa fonction. D'abord sa mauvaise santé « di maniera che le attuali mie forze non sono al di là di quel che richieda il peso de' gravi

obblighi annessi alla carica di senatore », sa nombreuse famille « la di cui educazione esige ancora in olte indispensabili cure », mais surtout son manque de connaissance des affaires commerciales « Dedicato fin dai primi miei anni allo studio unicamente della civile ordinaria giurisprudenza, mi trovo ora affatto privo delle cognizioni riguardanti gli affari di commercio, cognizioni indispensabili per l'esercizio del sudetto impiego, e che neppure potrei acquistare nell'avanzata mia età d'anni cinquanta nove ». ASTO, materie economiche, materie di commercio, magistrato del consolato categorie

1, mazzo 2-4 h). Il aurait aussi refusé la régence de l'Uffizio de l'Avocat fiscal général. il aurait 36 ans de service.

262 ASTO, materie economiche, materie di commercio, magistrato del consolato categorie 1, mazzo 2-4 l).

263 ASTO, Materie giuridiche. Per categorie. Senato di Nizza, mazzo 1, fasc. 20.

264 DECOURT HOLLENDER (B.), « Aspects de la magistrature sénatoriale du royaume de Piémont-Sardaigne au XIXe siècle (1814-1860) », RSDI, à paraître, p.12.

265 Sur cette affaire opposant les magistrats Cauvin et Giacobi, ADAM, 3 J 31. TOMBACCINI VILLEFRANQUE (S.), « Duels et duellistes à Nice sous la Restauration », Nice Historique, janvier-mars 2005, pp. 12-29.

ordre d'ancienneté, le sénateur conte Andreis de Cimiez, le sénateur Louis Guiglia et enfin le cavalier Honoré Garin di Cocconato, juge légal surnuméraire, lequel n'est pas sénateur. Malgré cela, pour le régent, la préférence doit être donnée à ce dernier. Les raisons qu'il invoque sont très intéressantes pour comprendre la présence de sénateurs au sein de l'institution commerciale niçoise. En effet, il indique en substance, qu'avant 1792 le Consulat était composé en partie de membres du Sénat et en partie de juges légaux. Dans l'organisation provisoire donnée au Consulat en 1815, lui seul fut admis à faire parti du Consulat, étant dans le même temps membre du Sénat. Lorsque S.M. a daigné lui confier la régence du Consulat, fut nommé à sa place le Sénateur cavalier Milon, celui-ci s'excusant de ne pouvoir remplir la fonction, c'est le sénateur Facelui-cio, le plus ancelui-cien des membres du Sénat qui occupa ce poste.

Spitalieri de Cessole précise alors, qu'à son avis, les sentences du Consulat étant définitives et assimilées à celles des magistrats suprêmes, il serait opportun de se rapprocher de l'ancien système, en admettant au moins trois sénateurs siégeant au Sénat, d'autant plus que la personne qui doit être remplacée est décorée du titre de sénateur. Selon ce système donc, c'est le Comte de Cimella qui devrait occuper le poste, étant le plus ancien. Celui-ci étant membre du Magistrat de Santé267 et largement occupé pour remplir à bien cette tâche, il ne pourrait cumuler les trois fonctions. Viennent ensuite par ordre d'ancienneté le sénateur Louis Guiglia, puis Honoré Garin di Cocconato, occupant le poste de juge légal surnuméraire et qui depuis l'absence de Cauvinau Consulat, soit le 4 février 1818, en a exercé de fait la fonction. Il serait préférable, précise le régent, de choisir un sénateur « per dare maggior auge e dignità al magistrato » mais finalement c'est Garin di Cocconato, qui est choisi pour remplacer le juge Cauvin, selon nomination par le Prince en date du 27 novembre 1821.

Comme on peut le remarquer, Sénat et Consulat entretiennent des liens très étroits, le personnel est en partie commun : le sénateur occupe des fonctions de juge au Consulat et le président-chef du Sénat est aussi, en même temps, celui du Consulat du moins à partir de 1833. Il faut ajouter que selon les Royales Constitutions, la juridiction est renforcée pour les affaires graves par la présence de sénateurs268.

Si l'on porte maintenant le regard sur les fonctions exercées par les magistrats après leur passage au Consulat de Mer de Nice, on remarque que certains d'entre eux, une fois accompli leur fonction au

267 MALAUSSENA (J.), Le Magistrat de la Santé et la protection sanitaire à Nice au XIXe siècle, thèse de droit, Nice,

1983 et de la même auteur, « La politique sanitaire à Nice au XIXe siècle. Magistrat de la Santé et épidémies », Nice

historique, 1994, n°1, p. 4-13.

268 Leggi e Costituzioni..., op. cit., L. II, tit. 16, chap. 2, §13 : « Dans les Consulats de Turin et de Nice, les procès seront jugés par cinq juges, lorsqu'il s'agira de délits qui doivent être punis de la peine de mort, ou des galères ; on prendra à cet effet dans le Sénat les adjoints nécessaires et la sentence ne pourra être exécutée qu'après que le Sénat aura délibéré sur sa