• Aucun résultat trouvé

Paragraphe deuxième : Le divorce pour discorde et les voies traditionnelles de divorce

A. Les différentes voies traditionnelles de divorce

I. Le divorce pour préjudice

Le divorce pour préjudice était l’une des principales voies de divorce, ouvertes à la femme sous l’égide de l’ancien code de statut personnel.

Elle consiste dans le droit de l’épouse souffrant d’un sevice du fait de son époux de demander au juge de prononcer la désunion. Et se fonde sur plusieurs versets coraniques142.

L’application jurisprudentielle du divorce pour préjudice donnait lieu à des anomalies qui l’empêchaient d’atteindre ses objectifs143.

En effet la jurisprudence sous l’ancien code de statut personnel était très exigeante, aussi bien sur le plan procédural que celui de la qualification du préjudice justifiant le divorce.

142- Verset numéro 231 de la sourate de la Vache: « reprenez les conformément à la bien séance ou libérez les conformément à la bienséance. Et ne les retenez pas pour leur préjudicier… » .

- Verset numéro 233 de la sourate de la Vache : « Nul ne doit supporter plus qu’il le peut ; la mère n’a pas à subir de sevices à cause de son fils, ni le père à cause de son fils… ».

- Verset numéro 2 de la sourate Talaq : Divorce « Quand elles atteignent le terme prescrit, retenez les de façon convenable, ou séparez vous de façon convenable… ».

- Verset numéro 6 de la sourate Talaq = Divorce « Faites que elles habitent où vous habitez, selon vos moyens et ne cherchez pas à leur préjudicier… »

143

- Principalement de permettre à l’épouse de se libérer du lien conjugal dans des conditions normales. Ce qui a fait apparaître l’inégalité flagrante entre les époux.

Ainsi, elle soumettait la preuve du préjudice allégué par l’épouse demanderesse de divorce, aux règles générales de preuve144, alors qu’il

s’agit des faits qui se produisent généralement entre les époux dans un cadre fermé et intime, incompatible avec ledit système de preuve. Et ce en dépit des dispositions de droit musulman de rite malékite, qui allégeait145 ce système en autorisant le juge à se baser sur les propos d’un

certains nombre de personnes, contenus dans un acte adoulaire146.

Quant au préjudice requis pour justifier la demande de divorce, et en dépit de la généralité des termes du code de statut personnel en la matière, la jurisprudence exigeait que les faits allégués par l’épouse demanderesse impliquent un dissentiment au point que la vie conjugale soit devenue impossible147. Mais aussi ils ne doivent pas être l’objet

d’une réaction du mari à une faute de l’épouse. Une condition que les juridictions de fond devaient chercher, faute de quoi plusieurs décisions ont été censurées par la cour suprême148.

A cela s’ajoutait la lenteur de la procédure de divorce pour préjudice, en ce sens que la femme demanderesse devait attendre en moyenne entre six à dix ans pour obtenir le divorce149.

144

- Mohamed EL GACHBOUR, Commentaire du code de la famille, dissolution du pacte conjugal, op.cit

- Rajaa NAJI ELMEKKAOUI, La Moudawanah, le référentiel et le conventionnel en harmonie, Tome 2 : la dissolution du mariage, op.cit

145

- IBN ACEME disait dans son poème : TOUHFA, qui récapitulait les règles du rite malékite :

Watabota al idraro bichchohodi Aw bisamàin chaàa fi aloujodi

Le préjudice peut être établi par les témoins, ou même par la commune renommée.

146

- Le lafife est l’acte adoulaire dans lequel les adouls reçoivent les propos d’un nombre de personnes fixé généralement à douze personnes.

147- Un certain nombre de décisions de jurisprudence, Mohamed EL GACHBOUR, op.

cit.

148- Rajaa Naji EL MAKKAOUI, La moudawanah, op.cit, p 192.

149- La moyenne de la durée que nécessitait le traitement d’un dossier de divorce

pour sévices par le tribunal de première instance, à y ajouter des durées similaires devant les cours d’appel et la cour suprême :

Soucieux de cet état de fait, le législateur du nouveau code de la famille a allégé certains de ces effets en essayant d’une part d’élargir la notion du préjudice justifiant le divorce et d’autre part de réduire la lenteur de la procédure.

En effet, il définit le préjudice justifiant le divorce comme tout acte ou comportement infamant ou contraire aux bonnes mœurs, émanant de l’époux, portant un dommage matériel ou moral à l’épouse. La mettant dans l’incapacité de maintenir les liens conjugaux.

De surcroît le législateur du nouveau code qualifie tout manquement à l’une des clauses de l’acte de mariage, comme préjudice justifiant le divorce, tout en réduisant le domaine de l’appréciation du juge. Aussi bien de l’existence du préjudice que de son caractère tout à l’image de la clause résolutoire de plein droit prévue par le code des obligations et contrats.

Sur le plan procédural le nouveau code de la famille prévoit deux innovations. Ainsi, pour pallier le problème de la lenteur, il supprime toutes voies de recours contre les décisions prononçant le divorce, et prescrit au tribunal de trancher le litige dans un délai ne dépassant pas

Année Durée en mois Année Durée en mois

1990 32 1995 36

1991 32 1996 26

1992 31 1997 25

1993 28 1998 27

1994 34 1999 27

Rapporté par : Rajaa NAJI ELMEKKAOUI, La Moudawanah, le référentiel et le conventionnel en harmonie, Tome 2 : la dissolution du mariage, op.cit

six mois150. D’autre part, il considère l’épouse qui ne parvient pas à

prononcer le préjudice allégué, en état de discorde avec son mari151.