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CHAPITRE 4 : PLACE DU PADDY DANS LE FONCTIONNEMENT DES EXPLOITATIONS

1.2 Les déterminants de la place du paddy dans les systèmes de production

1.2.3 Disponibilité en main d'oeuvre et équipement

a) La main d'oeuvre disponible

La main d'oeuvre est essentiellement familiale, donc liée au nombre de personnes à charge. Les salariés peuvent avoir une fonction générale dans l'unité de production ou des attributions très précises, dont la plus répandue est le gardiennage des boeufs. Les rémunérations sont très variables en valeur et en nature : mise à disposition d'une rizière de surface variable, tonnage de paddy, argent, don d'un zébu. En considérant qu'une rizière en usufruit rapporte 1,5 t/ha, les salaires varient en valeur entre 35 000 et 500 000 Fmg/an avec une moyenne de 135 000 Fmg pour une médiane de 121 000 Fmg. Il semble que les salaires sont plus bas (moins de 75 000 Fmg) parmi les exploitations de classes défavorisées et en zone Est mais cette règle n'est pas stricte. Dans une même exploitation, les bouviers sont souvent mieux rémunérés que les salariés "à tout faire".

L'importance de la main d'oeuvre sur une exploitation a été évaluée par deux critères globaux : La surface de riz cultivée par rapport au nombre d'actifs masculins d'une part (Figure 16), l'essentiel des travaux en rizières (labour, mise en boue, pépinière, pulvérisage, coupe et battage) étant réalisé par les hommes. Les femmes participent plus spécifiquement au repiquage et aux éventuels sarclages, mais dans la mesure du possible ces opérations sont salariées. En revanche, les femmes prennent une part très active dans les opérations de semis et sarclage en cultures pluviales et maraîchères d'où le ratio SAU/ actifs totaux de l’exploitation (Figure 15). Dans notre échantillon, ces ratios sont en moyenne de 1,6 ha par actif total et de 1,5 ha de rizière par actif masculin.

On note une forte variabilité intra-type de la main d'oeuvre mais on peut globalement distinguer deux grands groupes :

• Les exploitations à faible taux de main d'oeuvre disponible totale regroupent notamment les "Gros Riziculteurs" (Type 9). Ceci est à mettre en relation avec l'importance des surfaces et notamment des surfaces en jachère (pâturage) mais les surfaces de riz par travailleur-homme peuvent être importantes ( ratio supérieur à 2 dans la moitié des cas). Les "Riziculteurs-Commerciaux" (Type 11) et certains jeunes disposent également d'un faible taux de main d'oeuvre. Si l'on prend en compte la surface de riz cultivée par actif masculin, la main d'oeuvre est limite ou insuffisante dans les exploitations de type 6 et type 5.

• Un fort taux de main d'oeuvre par rapport aux surfaces cultivées caractérise les "Métayers âgés", (Type 3) et les "Jeunes en Emancipation" (Type 2). Les exploitations à complément de revenu se caractérisent également par une certaine tendance au sous emploi familial, plus ou moins compensé par la double activité saisonnière. Par rapport aux surfaces rizicoles cultivées, la main d'oeuvre masculine n'est vraiment excessive que dans les exploitations "Métayers" (Type 3) où elle est inférieure à 1 ha de rizière/actif homme. Chez les "Jeunes en Emancipation ", le taux d'emploi de la main d'oeuvre masculine est en revanche proche de la moyenne ( 1,3 ha par actif masculin).

Figure 15: Importance de la main d'oeuvre total disponible selon les types d'exploitations

Figure 16: Importance de la main d'oeuvre masculine par rapport aux surfaces

rizicultivées

Surf. cultivée (ha) par actif

Types d'exploitation s 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 5 5,5 6

Surf. rizicultivée (ha) par actif homme

Types d'exploitation s 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 5 5,5 6 + 1 exploitation

b) Une inégale répartition de l'équipement

Le niveau d'équipement a été estimé en équivalent paddy à partir des prix de base suivants: charrue (600 000 Fmg) et charrette (800 000 Fmg) soit respectivement 2400 et 3200 kg de paddy, herse 30 000 Fmg (soit 120 kg), pulvérisateur 200 000 Fmg (800 kg de paddy). Une chaîne complète de matériel revient donc à 11 320 kg de paddy. Dans notre échantillon, la médiane est de 9 320 kg de paddy, le premier quartile de 4 830 kg (ce qui correspondrait à un équipement de 4 boeufs de trait et 1 herse) et le deuxième de 13 810 kg (correspondant à une chaîne complète et 2 boeufs de trait complémentaires).

Un indice d'équipement a été calculé en rapportant le capital d'équipement en équivalent paddy à la surface totale cultivée et à la surface de riz cultivée. L'optimum d'équipement (4 boeufs de traits, charrue, charrette, herse, pulvérisateur manuel pour 5 ha) se situe à 2500 kg Eq paddy d'équipement/ha de riz cultivé.

Ces indices permettent de mettre en évidence les contraintes et potentialités en matière d'équipement. Les jeunes ménages (Type 1, Type 6, Type 8), les "Métayers" (Type 3), les "Gros riziculteurs" (Type 9), les "Doubles Actifs à revenus saisonniers" (Type 12) sont sous équipés par rapport à la surface totale. Au contraire, les exploitations de types "Somalac" (Type 5), "Riziculteurs-Cultivateurs" (Type 7), "Jeunes en Emancipation" (Type 2) présentent une bonne adéquation surface/équipement bien qu'elle corresponde à des caractéristiques différentes. Pour le Type 2, il s'agit d'un capital d'équipement faible rapporté à un foncier limité tandis que pour les exploitations de Type 5, 7 le rapport traduit une autonomie en équipement réelle. En dehors des exploitations de Type 13, le suréquipement traduit généralement une étape de transition entre deux types de fonctionnement.

Mais il faut distinguer la disponibilité en équipement par rapport aux surfaces rizicultivées qui permettent de dégager des exploitations insuffisamment équipées pour la mise en valeur des rizières (Type 1, Type 6, Type 8). Ce sous-équipement peut cependant être associé à de

bons résultats économiques et à un fort taux de paddy vendu (Type 6). Comment ces exploitations parviennent-elles à mettre en valeur leur foncier ? Dans quelles conditions ?

Figure 17: Capital d'équipement en Equivalent paddy (Kg de paddy) en fonction des surfaces cultivées selon les types d'exploitations

Capital d'équipement / surface rizicultivée

Kg de paddy/ha (x 1000) Ty pes d'ex ploitations 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20

Capital d'équipement / surface Totale cultivée

Kg de paddy/ha (x 1000) Ty pes d'ex ploitations 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 1.3 Conclusion :

La prise en compte des potentialités des exploitations (taux d'équipement et de main d'oeuvre en fonction de la superficie rizicole disponible, et des autres ressources financières potentielles) ne permet pas de rendre compte complètement de la diversité des résultats globaux observés. La stabilité de la part du riz dans les revenus semble lié à un seuil de 30 ares de rizières par personne à charge. Cette norme de 30 ares est cependant assez élevée : elle correspond à des rendements moyens très faibles par rapport aux rendements déclarés. Ce seuil de sécurité élevé est cohérent avec un risque de déficit alimentaire important dans cette région pourtant excédentaire en paddy, phénomène qui a été souligné par différents auteurs (Funel et al, 1984, Azam et al, 1993). Comment expliquer ces besoins élevés en paddy, correspondant au double des besoins vivriers ? Il s'agit donc d'étudier de façon plus détaillée les modalités de gestion du paddy et la place de cette production dans la trésorerie des exploitations.

2 LE DEVENIR DU PADDY DANS LES EXPLOITATIONS

Sur les onze exploitations, un suivi des pratiques de gestion du paddy a été réalisé durant la campagne 92/93, en relevant les entrées (achat de paddy ou de riz) et les sorties (vente, don en nature) sur un pas de temps hebdomadaire d'octobre à juin puis de façon mensuelle de juin à septembre. La consommation de paddy a été évaluée sur une base hebdomadaire à partir du nombre de vata55

de paddy (ou de kapoaka56

de riz blanc) nécessaires pour les trois repas

55

Unité de volume. 1 vata correspond à 13 kg de Makalioka.

56

journaliers, à partir d'une semaine en période "normale" et d'une semaine au moment des travaux période de soudure, puis rapportée à une année calendaire (octobre 93/octobre 94), d'après les déclarations du chef de famille. Tous les trois ou quatre mois, un recensement des stocks restant permettaient de vérifier l'adéquation entre les flux déclarés et la réalité des pratiques.

Ces différents éléments ont permis de reconstruire l'évolution des stocks de paddy dans les onze exploitations au cours de l'année 92/93 (Figure 18 et Figure 19).

L'analyse de ces graphes permet de dégager deux points essentiels :

• l'existence d'une période de "soudure", de déficit en paddy dans huit des onze cas suivis. Ces exploitations ont donc du développer des stratégies de compensation du déficit vivrier. • Les ressources tirées de la vente du paddy ou du riz sont affectées à différentes fonctions dans la gestion de la trésorerie qui vont du financement des activités agricoles en général à celui de la soudure ou des besoins financiers du ménage.