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CHAPITRE 6 ADAPTATIONS TECHNIQUES AUX CONDITIONS DE RISQUES ET

4.1 Adaptations aux aléas de la campagne

4.1.1 Des problèmes hydriques aux difficultés de trésorerie : des avatars variés

Les adaptations peuvent être rendues nécessaires par des événements de nature variée. Toutes les exploitations ont dû s'adapter à des contraintes hydriques. L'élément hydrique a pu jouer de façon directe à travers ses conséquences sur l'état du milieu ou du peuplement, ou de façon indirecte comme facteur de prolifération de nuisibles ou de perturbation dans l'organisation de la gestion des matériels.

Conformément au programme prévisionnel et face à l’arrivée tardive des pluies, les choix de mise en place chez RB et RZ ont évolué vers le semis sur boue. Cependant, seul NO a préparé une pépinière au delà de la date butoir qu'il s'était fixée. Dans les exploitations du périmètre Imamba-Ivakaka, les difficiles préirrigations des pépinières en début de campagne se sont accompagnées d'attaques d'hétérronichus responsables d'une fonte des semis, et par conséquent d'un manque de plants à repiquer. Les déficits hydriques ont également rendu difficile les labours en début de saison. La plupart des paysans ont commencé les labours dès la première grosse pluie significative. Mais ils ont rapidement dû arrêter faute d'une force de traction suffisante. Ces délais dans la préparation des sols ont pu être directement responsables de retard au repiquage (MA), soit de façon directe soit du fait d'une nécessaire réorganisation du travail entre parcelles d'une même exploitation ou d'un groupe d'entraide (DI). Chez NO, la faible densité de plants en pépinière est liée à la dispersion du semis en pépinière suite à un gros orage tandis que BO a subi une attaque de poux de riz sur ses deux premières pépinières. l’une a été partiellement détruit et ces attaques induit des retards de croissance (repiquage de plants âgés) dans les deux cas. Ainsi, la conduite des pépinières apparaît particulièrement sensible aux incertitudes de début de campagne

L'autre important facteur de perturbation de l'organisation du travail est lié à la gestion de la trésorerie. Certains ont dû de plus s'adapter à des imprévus de trésorerie, liés à des événements familiaux ou sociaux. Ces effets peuvent être direct comme dans le cas de NO ou RZ. Ces deux exploitations ont été contraintes de renoncer au repiquage faute de liquidité suffisante pour payer la main d'oeuvre au repiquage, suite à des dépenses sociales non prévues. Il est vrai que le retard de pluies pour RZ et les problèmes de pépinières ont également pu jouer dans ces ajustements. De la même façon, le repiquage lent chez DI (30 ares/jours) s'explique par une affectation prioritaire des liquidités aux dépenses du ménages et donc à un faible nombre de salariées recrutées.

Tableau 42 : Tableau récapitulatif des types d'ajustements opérés

Imprévus Parcelle Expl° Conséquence ADAPTATION Conséquences sur l'itinéraire technique et le

peuplement

Attaque d'Hétéronnichus en pépinière, liée à un débit insuffisant en début de cycle

Pépinière

MA Manque en plants à repiquer

Semis d'une nouvelle pépinière Achat de plants

Repiquage tardif

Pas de contrôle de la variété ni de l'état des plants au repiquage

Pépinière ED DI Epandage d'urée sur les parties clairsemées

Attaque de poux épineux du

riz (tardivement traitée) Pépinière

BO Destruction partielle d'une pépinière : manque de plants Traitement phytosanitaire (tardif)

Délai de reprise des plants : repiquage tardif de plants âgés Semis sur boue sur une partie de la parcelle

Réorganisation de l'ordre d'implantation des parcelles avec simplification du travail du sol.

Dispersion des semences après semis du fait d'une forte pluie orageuse Pépinière NO Densité finale en pépinière très faible Augmentation de la durée de croissance en pépinière jusqu'à 35 jours pour faciliter la reprise

Délai au repiquage par rapport au calendrier initial.. Choix d'une densité plus lâche. Préférence accordée à la main d'oeuvre familiale pour mieux contrôler les densités de repiquage.

Semis sur boue sur la parcelle F2 Arrivée tardive des pluies ⇒

retard dans la préparation du sol

Parcelle périphérique

NO

Simplification du travail du sol dans la parcelle F2

Parcelle très enherbée avant la levée du riz ⇒ plus d'entretien après le semis

Sol trop dur à travailler avec la force de traction disponible en début de campagne du fait de préirrigation insuffisante Parcelle périphérique NO Semis en sec de la moitié de la parcelle seulement Réorganisation de l'assolement :

semis sur boue Semis sur boue sur la fraction restante

Mauvais taux de germination des plants lis à une préparation sommaire du sol en pépinière

Pépinière KO Fort enherbement et manque de

plants au repiquage

Passage au semis sur boue sur une partie de la parcelle : nécessité d'acheter des semences Insuffisance de liquidité +

arrivée tardive des pluies

Parcelle centrale

RZ Passage au semis sur boue : choix précoce réalisé dès la mi décembre

Arrivée tardive des pluies Ensemble des parcelles

RB Passage au semis sur boue

Sol difficile à travailler en début de campagne du fait de préirrigation insuffisante

Parcelle principale

DI Décalage de l'ordre de travail dans le groupe d'entraide ⇒ priorité accordée à une parcelle mieux irriguée de son fils + au semis

Travail tardif du sol de la parcelle ⇒ repiquage de plants âgés Simplification du travail du sol sur la partie semée en boue (émottage et mise en boue simultanées)

Enfin, les difficultés à mobiliser ces fonds financiers en cas de besoins comme pour l'achat de produit phytosanitaire non prévu (cas de BO qui a dû traiter ses pépinières attaquées) s'accompagnent de délais supplémentaires.

Durant cette campagne à arrivée d'eau tardive, ce suivi souligne la difficile maîtrise des itinéraires techniques d'implantation même dans les exploitations bénéficiant a priori de bonnes conditions d'irrigation comme celles du périmètre Imamba-Ivakaka. Or, aux incertitudes hydriques s'ajoutent les aléas phytosanitaires ou une difficile maîtrise de la trésorerie au moment crucial de l'implantation, qui correspond aussi à la période de soudure. Quels sont les ajustements réalisés et quelles sont leurs conséquences sur les systèmes de culture ?

4.1.2 Conséquences sur les systèmes de culture

a) Gestion des pépinières et conséquence sur le calendrier d'implantation

Mise en eau difficile des parcelles, croissance et développement lents des plants en pépinière liés à des problèmes hydriques et sanitaires se traduisent par des retards de repiquage par rapport au calendrier prévu. Aucune influence de l'âge des plants sur le rendement n'a été expérimentalement mise en évidence (Feau, 1987), les variétés MK et 2798 se révélant très plastiques. Certains paysans en revanche pensent qu'il existe des différences selon la variété, bien qu'il n'existe pas de consensus sur la variété la plus "rustique". Cependant pratiquement toutes les exploitations ont été confrontées à un problème de manque de plants suite aux différents événements cités.

Plusieurs stratégies apparaissent : nouveaux semis de pépinière lorsque le problème est perçu et évalué suffisamment à temps (MA), semis sur boue sur les surfaces non repiquées, réduction de la densité de repiquage en terme de nombre de brins par touffe d'abord ou de poquets par m². C'est le choix de NO qui se traduit par des densités de repiquage lâches, avec un nombre de plants par poquet faible. Les derniers repiquages de BO, à partir de la pépinière attaquée par les poux du riz sont également moins denses. Le semis sur boue nécessite de disposer de semences, quitte à les acheter. C'est le cas de KO qui n'est même pas en mesure de choisir la variété implantée (la variété achetée est inconnue). L'achat de plants est possible mais reste très onéreux (40 000 Fmg pour un are de pépinière soit environ 20 ares de repiquage). De plus, l'acquéreur ne maîtrise ni la variété, ni l'état des plants : il s'agit des plants excédentaires après repiquage chez des particuliers; ils sont donc en général âgés. Le transport des plants dans un maillage de rizière en pleine saison des pluies est aussi difficile : la proximité de la pépinière des plants achetés est un critère de choix important. En cas de manque de plants, plusieurs options de rechange peuvent être combinées sur une même parcelle. Ces pratiques se traduisent par autant de retard à l'implantation : il faut en effet attendre la reprise des plants après traitement (BO, parcelles G1 et G2), attendre que les plants de la pépinière de "secours" atteignent le stade souhaité (MA, parcelle C1), identifier, acheter et transporter des plants (MA, C3). Pour maximiser le taux de reprise, NO préfère repiquer des plants un peu plus âgés que ce qu'il avait initialement prévu (30 jours au lieu de 20 jours).

L'état des plants au repiquage peut être contrôlé par les pratiques de fertilisation. La date d'apport d'urée (toujours après le 15ème jour) et la dose dépendent de l'état de la pépinière, et de la date du repiquage prévue. Cette date est estimée en fonction de l'état de l'avancement des travaux. Ainsi BO augmente la dose d'urée (18 N/ha) par rapport à la première pépinière

afin d'accélérer la croissance des plants et permettre un repiquage légèrement avancé pour compenser le retard pris dans l'autre pépinière. L'apport d'azote vise également à pallier des accidents dans la croissance et le développement des plants ou à compenser un semis peu homogène : épandage privilégié de l'azote dans les zones clairsemées (ED), sur les plants les plus tardivement semés, sur les plants attaqués par les poux du riz afin d'accélérer la reprise... La conduite de l'eau en pépinière permet également de contrôler la croissance des plants et/ou de limiter les conséquences de différents événements: les attaques d'Hétéronnichus sont liées à une irrigation insuffisante. En cas d'orage menaçant sur semis ou jeunes plants , la parcelle est submergée puis drainée le lendemain afin d'éviter la dispersion des plants (ED). Il y a donc un véritable pilotage de la pépinière au moyen de la fertilisation minérale et de l'irrigation. Ce pilotage permet d'ajuster l’état des plants en pépinières en fonction de l'évolution de la campagne, des ajustements dans la répartition du matériel sur les parcelles personnelles ou des dépendants.

b) Réorganisation de l'affectation et des assolements

L'arrivée tardive de l'eau et les difficultés de maîtrise de la pépinière ont pu s'accompagner d'une réorganisation de l'affectation des équipements et de la main d'oeuvre sur la sole de riz de l'exploitation voire sur celle du groupe d'entraide. Ainsi l'ordre d'implantation des parcelle chez BO est-il modifié. Chez DI, c'est l'ensemble de l'organisation du travail du groupe d'entraide qui est modifié avec les priorités de travail. Les ajustements ne concernent pas seulement l'ordre de travail mais aussi le type de travail effectué. Certaines parcelles peuvent être "sacrifiées" en terme de travail du sol ou d'implantation pour ne pas pénaliser une autre parcelle trop tardive. Aussi la parcelle F2 de NO ne bénéficie-t-elle que d'un semis sur labour humide (pas d'émottage). L'émottage est supprimé. Enfin, l'assolement, c'est à dire les choix de mise en place entre parcelles peut être modifié pour compenser soit des retards soit une implantation non réussie (NO).