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Gr n°2 -Prod IND (%) (en volume )

CHAPITRE- III : STRATEGIES D 'ACTEURS ET ENJEUX

III- 1- 2- Déstructuration dissolution des entreprises publiques

Les restructurations et autres mesures concernant les entreprises publiques devraient, du moins selon les intentions des pouvoirs publics, entraîner une évolution allant dans le sens de leur confortement en tant qu‟agents économiques de production au lieu de la fonction sociale qu‟elles ont remplie jusque là. Seulement, depuis la promulgation des différentes lois relatives à leur autonomie, leur situation n‟a cessé de se dégrader.

A la fin 1993, le secteur public dans la seule branche bâtiment avec 604 entreprises regroupe 266 000 travailleurs sur un total de 332 000, alors que 987 entreprises employaient, à la fin 1992, 318 940 travailleurs sur un total de 431 000, soit une perte totale de 100 000 emplois dont près de 53 000 par dissolution et compressions d‟effectifs d‟entreprises publiques [différents documents MUCH].

T- n°58 - Répartition des pertes d’emplois selon le type d’entreprise et la branche (1994-2001)

Secteur Agriculture Industrie BTPH Services Total

EPE 1468 24606 98136 31781 155991 % 0,94 15,77 62,91 20,37 100 EPL 1885 11641 64091 25070 102687 % 1,84 11,34 62,41 24,41 100 Privé 420 379 611 195 1605 % 26,17 23,61 38,07 12,15 100 Ensemble 3773 36626 162838 57046 260283 % 1,45 14,07 62,56 21,92 100

Source : Musette, Hammouda, Isli « marché du travail et emploi BIT-2003 Les trois quarts des programmes de logement sont encore réalisés par les entreprises publiques (38 Milliards de DA de production brute) mais celles-ci sont totalement déstructurées.

Le désinvestissement prolongé depuis 1986 a empêché le renouvellement des équipements entraînant une baisse plus accentuée de la production et de la productivité.

Lors de l‟opération restructuration, l‟encadrement de haut niveau a été dispersé et des directions de chantiers ont été érigées en directions générales d‟entreprises avec la création de 500 entreprises locales sans études de rentabilité ni fonds de roulement les mettant déjà en situation de découvert bancaire. Enfin, la perte de leurs moyens d‟études les a privés d‟une meilleure utilisation de leur potentiel.

La permanisation des effectifs s‟est traduite par des ratios masse salariale sur chiffre d‟affaires assez élevés (dans 82% des cas il est supérieur à 50% et dans 36% il est supérieur à 100%).

Tableau- 59 - Ratios masse salariale sur chiffres d’affaires (Échantillon : 79 entreprises) - 1995 -

Ratios Nombre d’entreprises

inférieur à 40% 04 entre 40 et 50% 10 entre 50 et 100% 37 100 et 200 22 supérieur à 200% 06 Total 79

Source : perspectives du secteur de l’habitat (MUCH - févr. 1995).

Sur le plan financier, le non paiement des créances sur l‟Etat et ses démembrements a obligé ces entreprises à recourir au découvert bancaire avec des taux d‟intérêts élevés. En 1993, les créances étaient supérieures au découvert, 27 Milliards de DA contre 23 milliards de DA.

Par ailleurs, leurs systèmes constructifs fortement consommateur de ciment et d‟acier (dont le marché a connu de fortes tensions) se sont trouvés souvent en ruptures de charges limitant des gains de prix ou de délais accentuant les difficultés financières.

Le passage à l‟autonomie des banques et des entreprises des branches en amont de la construction a permis à ces dernières d‟augmenter respectivement les taux d'intérêt et les prix des consommations intermédiaires sans que les entreprises de bâtiment ne puissent les répercuter sur leurs prix de revient.

En 1993, le processus d‟autonomie (lois 1989 et 1990) n‟a toujours pas abouti pour les six grandes entreprises de bâtiment (31 000 emplois à elles seules). Près de 38 autres n‟ont pu être érigées en entreprise autonome (EPA) du fait de leur forte déstructuration.

A la fin 1994, 80% des entreprises publiques qui ont survécu n‟étaient plus en mesure de payer régulièrement les salaires.

Le Comité Opérationnel Sectoriel (C.O.S) sera chargé d‟une vaste opération en vue de redéployer et assainir ces entreprises sur la base des plans de redressement de chacune d‟elles. Cette action s‟apparente beaucoup plus à des déstructurations - dissolutions quand ce n‟est pas une simple fuite en avant avec des coûts financiers et sociaux considérables.

Clôturée à la fin 1995, cette opération pour le secteur a connu les résultats suivant [MHC : mai 1996] supportés par le Trésor Public d‟un total de 49,691 Milliards de DA (plus de 50% de la production brute (BTP) du secteur public) :

 61 - entreprises assainies - 19,030 Milliards ;

 11 - entreprises à contrat courte durée - 8,625 Milliards ;

 12 - entreprises à dissoudre ou à redéployer - 10,436 ;

 6 - entreprises dites stratégiques - 5,600 ;

 Mise en œuvre d‟un volet social :

(Licenciements) touchant 43 000 travailleurs - 6,000.

Les efforts de redressement et d‟assainissement devaient mettre ces entreprises à niveau afin que les règles du marché leurs soient appliquées « sans aucune discrimination avec les entreprises privées de telle sorte qu’elles puissent faire valoir leurs véritables capacités » [Ministère de l‟Habitat - 1996].

En fait toutes les entreprises publiques dont la viabilité est prouvée par le Plan de redressement doivent se recentrer sur leur métier de base (en général gros- œuvre) et externaliser tout le reste des activités périphériques en procédant : à leur filialisation (avec recherche de partenariat); à leur élagage sous forme de micro-entreprise en faveur des travailleurs; à leur privatisation si elles n‟ont pas de relation directe avec le métier de base.

Cette mutation va être l‟une des principales missions du Holding « Bâtiment et Matériaux de construction » dans le cadre de l‟application des textes portant gestion des capitaux marchands de l‟Etat et de la privatisation des entreprises économiques publiques. Les mesures de dissolution seront prononcées par le Holding pour les entreprises dont le redressement ne peut pas être réalisé.

L‟effort de redressement a porté essentiellement sur des mesures d‟assainissement financier insuffisant compte tenu de l‟ampleur de leurs difficultés structurelles et financières. En dehors de leur déficit cumulé, elles ont continué à enregistrer de nouveaux découverts dus aux retards de paiements des créances sur l‟Etat.

L‟opération assainissement de 1992 traite un tableau financier des ressources et des emplois et non la réalité sociale et économique de l‟entreprise. Cette opération est partie du postulat qu‟il existe un actif net positif du bilan mais qui est mal financé c‟est-à-dire par des ressources à court terme. Donc, il y a lieu de transformer ce financement en moyen et long terme par des rachats du Trésor Public contre des obligations ou des titres de participation. En fait, il s‟agit de pertes réelles d‟actifs :

 Soit par la destruction de l‟outil de réalisation (voir la vitesse des réformes des matériels BTP dont les prix sur le marché de l'occasion sont très élevés.)

 Soit par des transferts de ressources et de valeurs (liquidation des stocks de matières et fournitures souvent importées à des prix presque symboliques, vu l‟inflation et la dévaluation du dinar)

 Soit par la présence de portefeuille de créances souvent sans base juridique (ordre de service, commande, reconnaissance de service fait etc.), ou recouvrant imparfaitement les prestations réalisées en termes de prix, quantité etc., (réquisition, travaux pour personnalités ou institutions ...). Le tout est fait au détriment de l‟entreprise et de la collectivité.

D‟autre part, l‟assainissement financier ne traite que le découvert bancaire (le seul souci étant la trésorerie des banques), les échéances de remboursement des crédits d‟investissement et des crédits extérieurs ne sont pas prises en compte. Il en sera de même pour les pertes de change et les dettes d‟exploitation.

Hors, le découvert bancaire a été depuis longtemps pour les entreprises de bâtiment à cause de leurs difficultés structurelles, un facteur de financement de la production, par conséquent, l‟écart de trésorerie n‟est pas prêt d‟être comblé.

L’opération assainissement qui a totalisé à la fin 1998 près de 800 Milliards de DA pour l’ensemble des secteurs publics, en se limitant à couvrir seulement le découvert bancaire, apparaît plus comme une opération de reconstitution de la trésorerie des banques qu’une action sur les structures productives.

Dans le secteur de la construction, la démarche du Holding sera surtout caractérisée par les actions de dissolution.

Peu des 800 entreprises locales survivront ; les entreprises de réalisation d‟envergure nationale ont connu des sorts différents : 22 EPE ont été dissoutes en 1996; 378 d‟entre-elles ont bénéficié du dispositif banque - entreprise dont les résultats n‟ont été guère concluants en raison de la position des banques exigeant, comme préalable à tout démarrage de chantier, la rentabilité prouvée du projet. Ce qui réduira leurs capacités d‟intervention et la possibilité de profiter des mesures d‟accompagnement destinées à leur permettre de préserver leur équilibre de gestion et garantir leur pérennité.

La dissolution de 48 EPE en 1997-98 entraînera la suppression de 40 000 emplois. Les 20 entreprises issues de ce qui restait de viable n‟ont créé que 4 600 emplois et si elles partent avec tous les avantages fiscaux etc. dus à leur statut de nouvelles entreprises, leur productivité 37 200 DA/emploi est loin de celle de 1992 (185 000 DA par emploi) bien que le ratio frais de personnel sur la production ait été ramené à 30% grâce à la dépermanisation des effectifs.

Ainsi la libéralisation des prix à la construction (1995) du logement social, l‟autorisation des achats pour compte par le maître d‟ouvrage en faveur des entreprises en difficulté de trésorerie, la réduction des délais de paiement des travaux etc. non réservées aux seules entreprises publiques, bénéficieront-elles surtout aux entreprises privées qui vont se voir attribuer trois quart de l‟important programme de logements sociaux de 1995.

Ces mesures ont permis le retour, comme entreprise générale, d‟un grand nombre de petites entreprises privées, « génération spontanée », dans la réalisation du logement social. A Sétif, par exemple, 700 micro-entreprises privées se créeront durant le premier trimestre 1995 et près de 998 réaliseront en micro-chantier le programme de la wilaya de 5 000 logements.

Quand la part de l‟outil public était de trois quart dans ces programmes les prix étaient administrés. Fortement déstructurées et déstabilisées par les mesures de rétorsions des banques et des autorités (réduction des plans de charges etc.) et face à la force de négociation acquise par les confédérations du patronat privé dans le secteur, les entreprises publiques ne pourront pas soumissionner, malgré le doublement des enveloppes des prix à la réalisation, pour des opérations de tailles comprises entre deux à six logements par chantier.

Les grosses entreprises privées préexistantes qui avaient déserté le marché du logement social depuis longtemps en s‟investissant dans le marché libre en croissance depuis 1980 (lotissements, coopératives immobilières, promotion privée pour la vente) ou dans les grands travaux d‟équipements publics (moins de tension que le logement et plus rentables) ne soumissionneront pas non plus pour ces petits chantiers, mais monopolisent celui des V.R.D (voies et réseaux) dont les prix seront multipliés par trois et parfois par quatre entre le début 1995 et le deuxième semestre de la même année.

A Sétif ces mêmes gros entrepreneurs s‟uniront au sein d‟une société par action pour s‟accaparer les poches urbaines pour des opérations à forte plus-value immobilière (logements ou centre d‟affaires sur des sites mêmes classés patrimoine archéologique : El Wattan du 3/11/1999).

III-2- Monopole de l’entreprise privée :