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CONTRAT DE SOUS-TRAITANCE

4. Gestion de la relation asymétrique :

4.2. Dépendance unilatérale du sous-traitant :

D‟après les travaux sur la dépendance, pouvoir et domination de l‟une des parties est synonyme de dépendance non partagée. Les définitions de la dépendance unilatérale recensées dans la littérature indiquent ce lien entre pouvoir et dépendance unilatérale. Ces définitions sont résumées dans le tableau suivant :

Tableau n°17: Récapitulatif des définitions les plus utilisées de la dépendance unilatérale

Auteurs Définition

ANDERSON E. et WEITZ B., (1989, p.19)293 La capacité d’une partie à faire faire à l’autre ce qu’elle n’aurait pas fait en temps normal

FRAZIER G.C., (1983, p.159)294 ;

FRAZIER G.C. et ANTIA K.D., (1995, p.322)295

Le potentiel d’une entreprise à influencer les croyances, les attitudes et les comportements d’une autre entreprise DWEYER F.R., SHURR P.H. et OH S., (1987, p.14)296 La dépendance de A vis-à-vis de B est importante lorsqu’il

existe un nombre limité d’alternatives

FRAZIER G.C., (1983, p.159) La dépendance unilatérale fait référence au besoin de maintenir la relation pour atteindre les objectifs souhaités.

Source notre recherche

En se basant sur la définition de FRAZIER C.G., (1983, p.159)297, la dépendance non partagée ou unilatérale se définit par notre recherche comme, le besoin de maintenir la relation pour atteindre les objectifs souhaités.

La dépendance se résume alors par la combinaison de trois phénomènes :

292 QUELIN B. (2007) : « L‟externalisation: de l‟opérationnel au stratégique », Revue française de gestion, n°177, pp.113-128.

293

ANDERSON E. et WEITZ B. (1989): « The Use of Pledges to Build and Sustain Commitment in Distribution Channels », Journal of Marketing Research, vol.26, février, pp.18-34.

294 FRAZIER G.C. (1983): « On the Measurement of Inter firm Power in Channel of Distribution », Journal Of Marketing Research, Vol.20, mai, pp.158-166.

295

FRAZIER G.C. et ANTIA K.D. (1995), « Exchange Relationships and Interfirm Pwer in Channel Distribution », Journal of the academy of Marketing Science, Vol.23, n°4, pp.321-326.

296

DWEYER F.R., SCHURR P.H. et OH S. (1987): « Developing Buyer-Seller Relationships », Journal of Marketing, vol. 51, Avril, pp.11-27.

297

FRAZIER G.C. (1983): « On the Measurement of Inter firm Power in Channel of Distribution », Journal Of Marketing Research, Vol.20, mai, pp.158-166.

-le nombre réduit d’alternatives dont dispose la partie dépendante: Ce que GRAND L. et LEYRONAS C., (1998, p.4)298 définissent par « la notion de non substituabilité » relative à la spécificité des actifs et « la notion d’essentialité », lorsque le sous-traitant réalise plus de 30% de son chiffre d‟affaire avec un même client (BAUDRY B., 1995)299

. Selon THOMSON J.D., (1967, p.134)300 et COLOVIC A., (2008, p.49)301, tout client est essentiel à l‟activité du prestataire. A cet effet, nous pouvons conclure qu‟il existe une dépendance, relative et préexistante, du sous-traitant vis-à-vis de son donneur d‟ordres.

-le coût perçu du chargement : Dès lors, l‟anticipation par l‟acheteur des coûts de maintenir une relation de qualité (DWEYER F.R., et al., 1987, p.19)302.

HALLEN L. et al., (1991, p.32)303 soutiennent également l‟idée que les coûts liés à un changement de sous-traitant, notamment en raison des investissements parfois réalisés dans de la relation et difficilement transférables à d‟autres prestataires, nourrissent la dépendance du client. Plus les coûts de transfert sont faibles, plus le donneur d‟ordre peut changer facilement de sous-traitant (DABHOLKAR P.A. et al., 1994, p.168)304.

-le risque perçu du changement (étroitement lié, au manque d‟alternatives) : GANESAN S., (1994, p.15)305 définit ce risque comme le degré auquel un individu ou une organisation ne peut pas anticiper ou prédire avec précision son environnement et souligne que cette incertitude est un facteur de dépendance du client envers ses partenaires. En comparaison avec le coût perçu du changement, le risque perçu du changement fait partie d‟une catégorie d‟éléments « moins tangibles » mais tout aussi importants. Plus les risques sont faibles, plus le donneur d‟ordres risque de partir facilement.

298

GRAND L. et LEYRONAS C. (1998) : « Pour une approche renouvelée de la sous-traitance en réseau : de la dépendance à la dépendance croisée ».

299

BAUDRY B. (1995), L’économie des relations interentreprises, La Découverte, Paris.

300

THOMSON J.D. (1967): Organizations in Action, McGraw-Hill, NY.

301

COLOVIC A. (2008) : « La grande transformation des PME Japonaises. Le rôle centrale des compétences », Revue Française de Gestion, n°182, pp45-61.

302 DWEYER F.R., SCHURR P.H. et OH S. (1987): « Developing Buyer-Seller Relationships », Journal of Marketing, vol. 51, April, pp.11-27.

303

HALLEN L. JOHANSON J. et SEYED-MOHAMED N. (1991): « Interfirm adaptation in business Relationships », Journal of Marketing, Vol.55, Avril, pp.29-37.

304

DABHOLKAR P.A. et DAYLE I.T. (1994): « Does Customer Satisfaction Predict Postpurchase Intentions? », Journal of Consumer Satisfaction, Dissatisfaction and Complaining Behavior, Vol.7, pp.161-171.

305

GANESAN S. (1994): « Determinants of long term Orientation in Buyer-Seller Relationships », Journal Of Marketing, Vol.58, Avril, pp.1-19.

DABHOLKAR P.A. et al., (1994)306 résument les relations de dépendance entre deux partenaires en fonction des niveaux possibles d‟asymétrie de pouvoir sous la forme suivante :

Graphique n°20 : « l’impact du pouvoir relatif sur les comportements de négociation »

Source: (DABHOLKAR P.A. et al., 1994, p.168)

Chacune des deux parties peut donc être soumise au pouvoir supérieur de son partenaire et être dépendante de l‟autre.

D‟après les études de KOTABE M., MARTIN X. et DOMOTO H., (2003, p.289)307

,

SUBRAMANI M.R. et VENKATRAMAN N., (2003, p.56)308, les sous-traitants ne

possèdent a priori au début de la relation aucun pouvoir de négociation. Ils sont dominés par les clients qui fixent toutes les règles de la transaction en fonction de leurs motivations et intérêts sans vraiment se soucier des intérêts de leurs prestataires (COLOVIC A., 2008, p.49)309. Dans une situation concurrentielle et à la conclusion du contrat, les clients détiennent un pouvoir de négociation très élevé, et poussent leurs prestataires à bout pour en retirer le maximum de satisfaction. Les relations de sous-traitance asymétrique se caractérisent par la dépendance unilatérale des sous-traitants. Il s‟agit d‟une dépendance non seulement inhérente au pouvoir du donneur d‟ordres mais également une dépendance

306

DABHOLKAR P.A. et DAYLE I.T. (1994): « Does Customer Satisfaction Predict Postpurchase Intentions? », Journal of Consumer Satisfaction, Dissatisfaction and Complaining Behavior, Vol.7, pp.161-171.

307

KOTABE M., MARTIN X. et DOMOTO H. (2003): « Gaining From Vertical Partnerships: Knowledge Transfer, Relationship Duration, and Supplier Performance Improvement in the U.S. and Japanese Automotive Industries », Strategic Management Journal, Vol.24, Iss.4, pp.293.

308

SUBRAMANI M.R. et VENKATRAMAN N. (2003): « Safeguarding Investments in Asymetric Interorganizational Relationships: Theory and Evidence », Academy of Management Journal, Vol.46, pp.46-62.

309

COLOVIC A. (2008) : « La grande transformation des PME Japonaises. Le rôle centrale des compétences », Revue Française de Gestion, n°182, pp45-61.

Perspective

de gain Comportement de coordination

des deux parties

Collective Une partie dirige L’autre partie dirige Individuelle Pouvoir relatif 100% 0%

désirée par le sous-traitant parce qu‟elle rentre dans sa stratégie de développement (MATSUSHIMA S., 2001, p.12)310.

En effet, à l‟instar du modèle pyramidal japonais, le prestataire est motivé par le développement et la fidélisation d‟un client important susceptible de lui faciliter son entrée dans l‟industrie et sécuriser son étape de démarrage par la réduction des barrières à l‟entrée (AOKI M., 1988) ; (GARVEY G., 1995). Dans le cadre d‟une collaboration avec un donneur d‟ordre important, le sous-traitant peut compter sur sa réputation sur les marchés pour se procurer les ressources nécessaires à son développement (GARVEY G., 1995, p.388)311. Réduire l‟incertitude est probablement l‟objectif le plus important des petites et moyennes entreprises, dans la mesure où leur volume et le type d‟activité ne permettent pas des économies substantielles, alors que l‟incertitude est un facteur de stress majeur qui peut nuire à leur survie (SAINT-PIERRE R.A. et MATHIEU 2004, p.4)312. Elles essayent de dépendre d‟un client important capable de leur assurer une réputation, un accès au marché et un support financier importants à leur développement (MORITA H. et NAKAHARA H., 2004, p.391)313. Les entreprises prestataires cherchent à avoir un plus grand contact avec le marché pour acquérir des connaissances spécifiques sur le besoins de ces derniers ce qui augmente la capacité d‟assimilation et ainsi augmente la probabilité du succès de l‟innovation (PALMBERG C., 2006, p.1264)314. D‟autant plus que les firmes dépendantes affichent une notoriété moins élevée. La faiblesse de la valeur ajoutée incorporée dans les produits ainsi qu‟un niveau d‟investissement plus faible, font qu‟elles affichent un prix plus compétitif qui leur permet d‟accéder au marché international (REJEB N. et GHORBEL A., 2004, p.12)315. C‟est le cas des sous-traitants orientés vers la minimisation des coûts. Le début de la relation est généralement caractérisé par une dépendance asymétrique ou unilatérale. Au niveau de laquelle, le sous-traitant subi, et exécute les exigences du client. Avec les pressions que les grands donneurs d‟ordres

310

Selon les termes de MATSUSHIMA S., (2001, p.12) : « La relation de sous-traitance a été principalement celle des keiretsu où la PME dépend absolument de son client pour son existence ».

MATSUSHIMA S. (2001) : « Creation and development of small and medium enterprise policies in postwar Japan », Entreprises et histoire, n° 28, décembre 2001, pp.11-19.

311 GARVEY G. (1995): « Why Reputation Favors Joint Ventures over Vertical and Horizontal Integration: A Simple Model », Journal of Economic Behavior and Organization, vol.28, pp.387-397.

312

SAINT-PIERRE J. et MATHIEU C. (2004) : « Innovation de produits et performance : une étude exploratoire de la situation des PME canadiennes », Association Internationale de Recherche en Entrepreneuriat et PME 7ème Congrès International Francophone en Entrepreneuriat et PME, Montpellier, 27, 28 et 29 Octobre 2004.

313

MORITA H. et NAKAHARA H., (2004): « Impacts of the information technology revolution on Japanese manufacturer–supplier relationships », J. Japanese Int. Economies, vol.18, pp.390–415.

314

PALMBERG C. (2006): « The sources and success of innovations -Determinants of commercialisation and break-even times », Technovation, vol.26, pp.1253–1267.

315

REJEB N. et GHORBEL A. (2004) : L‟impact de la nouvelle relation de traitance sur la performance des sous-traitants : application au cas des industries mécaniques et électriques en Tunisie,13ème conférence de l‟AIMS Normandie, Vallée de Seine, 2, 3, 4 juin 2004.

exercent sur leurs sous-traitants, une petite entreprise ayant développé des relations commerciales avec quelques grands clients est alors davantage incitée à allouer les ressources nécessaires à l‟innovation dans le but de satisfaire leurs exigences de qualité, de coûts et de développement de produits (RAYMOND L. et SAINT-PIERRE J., 2004)316. Selon HANNA V. et WALSH K., (2002, p.203)317, les motivations du prestataire reviennent principalement à améliorer sa position dans la chaîne d‟approvisionnement. Cependant, le prestataire doit faire des efforts pour satisfaire son client. Il est tenu de prouver son expertise de l‟industrie et sa connaissance des aspects techniques. Ses certifications et sa méthodologie sont déterminantes dans la décision de le retenir ou non. Il doit également, selon QUELIN B., (2007, p.126)318 « maîtriser les formes adaptées de management des connaissances, détenir une capacité prouvée de créativité organisationnelle, et une solide réputation d’intégration culturelle ».

La continuité de la relation dans le cas d‟une dépendance unilatérale des prestataires vis-à-vis des clients entraîne le renouvellement de la transaction parce que le client est satisfait de sa première transaction. D‟autant plus que le prestataire dépendant sera plus à même de faire des efforts sincères pour développer et nourrir des liens de travail forts avec son partenaire. Cependant, le client évite de prendre le risque de changer de prestataire en supportant des frais de transfert sachant que le risque d‟insatisfaction vis-à-vis du nouveau prestataire est plus élevé que celui qu‟il encourt s‟il reste dans la même relation. La continuité de la relation dépend de l‟aversion au risque perçue par le client vis-à-vis du changement de prestataire et par rapport aux coûts supportés lors du changement (BOZZO C., 2000, p.153)319. Dans ce cas la dépendance unilatérale des prestataires vis-à-vis du donneur d‟ordre présente une phase assez critique au cours de laquelle le prestataire peut voir son donneur d‟ordres satisfait partir chez un nouveau concurrent plus compétitif.

316 RAYMOND L. et SAINT-PIERRE J. (2004): « Customer dependency in manufacturing SMEs : implications for R&D and performance », Journal Of Small Business and Entreprise Development.

317

HANNA V. et WALSH K. (2002): « Small firm networks: a successful approach to innovation? », R&D Management, Vol.32, n°.3, pp.201-207.

318

QUELIN B. (2007) : « L‟externalisation: de l‟opérationnel au stratégique », Revue française de gestion, n°177, pp.113-128, 2007.

319

BOZZO C. (2000) : Modélisation du comportement d’achat en milieu industriel : fidélité, rétention, Inertie, Université de droit, d‟économie et des sciences d‟Aix-Marseille, Institut d‟Administration des Entreprises, 2000.

SECTION 2 : DYNAMIQUE DE LINNOVATION ET CONVENTION ENTRE LES

ACTEURS :

La théorie néo-institutionnelle ne prend pas en considération le rôle de la dynamique de l‟innovation dans l‟optimisation de la relation contractuelle de sous-traitance. Nous avons alors essayé dans ce travail doctoral, d‟analyser les changements organisationnels causés lorsque le contrat de sous-traitant met en jeu des agents innovants.

En effet, l‟industrie textile habillement s‟est inscrite dans une stratégie d‟innovation partagée. Chaque acteur tend à se spécialiser dans une activité et d‟y innover. Les donneurs d‟ordres essayent de se concentrer sur la distribution, le marketing et le benchmarking en étant de plus en plus proche du consommateur final et en offrant un produit original innovant qui réuni coût et qualité. D‟un autre côté, les sous-traitants s‟adaptent à cette innovation et doivent offrir un service et une production qui permettent de satisfaire les nouvelles exigences des donneurs d‟ordres. Les deux parties innovent pour aboutir à une offre compétitive.

L‟innovation des sous-traitants est un phénomène nouveau, surtout pour le secteur textile habillement réputé pour sa faible valeur ajoutée. Dans ce secteur, l‟innovation a toujours relevé du domaine des donneurs d‟ordres des pays développés détenant un plus grand pouvoir financier mais aussi des compétences et ressources rares dans les pays en développement. Avec la généralisation de l‟externalisation et la dynamique de l‟innovation, le donneur d‟ordres se retrouve contraint de céder de plus en plus de responsabilité au sous-traitant pour pouvoir se concentrer sur le cœur du métier et garantir sa compétitivité et sa survie dans un environnement de plus en plus concurrentiel.

L‟approche de l‟innovation partagée se place au cœur de cette thèse (§1), la dynamique de l‟innovation et la spécialisation des parties de la relation présente un levier des problèmes contractuels (§2). En effet, l‟asymétrie d‟information ainsi que le différentiel des ressources et compétences deviennent de plus en plus élevés en fonction de la dynamique de l‟innovation du sous-traitant. La sous-traitance évolue d‟une approche contractuelle vers une approche relationnelle basée sur une convention entre le donneur d‟ordres et le sous-traitant (§3). A défaut de contrôle, la confiance et l‟engagement sont alors les nouveaux mécanismes de gestion. La sous-traitance asymétrique tend vers la coopération. Elle évolue.

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