LA DÉLIMITATION DE LA PROBLÉMATIQUE
6.2 Délimitation des pistes d’exploration et du questionnement
Nous précisons ici l’évolution de notre questionnement et des modalités de recherche, en intégrant la problématique identifiée précédemment aux objectifs initiaux de la thèse, ainsi qu’à notre cadre théorique et méthodologique. Nous présentons initialement une synthèse des premiers résultats de la recherche portant sur les dimensions extrinsèques de l’activité des conseillers et candidats.
6.2.1 Synthèse des premiers résultats de la recherche
Par rapport au premier objectif de la thèse : connaître la nature et les enjeux principaux de l’information‐conseil initiale et individuelle, l’exploration de la littérature dans ce domaine, ainsi que certains éléments de l’étude préalable auprès du DQA de Genève, nous ont permis de préciser les éléments généraux suivants.
‐ L’information‐conseil en validation des acquis de l’expérience est partie intégrante des politiques et des pratiques concernant l’orientation tout au long de la vie. Elle se caractérise par une complexité spécifique, dérivant des multiples implications de l’évolution des pratiques de reconnaissance et validation des acquis de l’expérience dans le temps, et dans ses différentes localisations géographiques.
‐ L’activité des professionnels dans ce domaine présente des dimensions à la fois innovantes et enracinées dans les pratiques professionnelles initiales, et en particulier se caractérise par la convocation de différentes formes d’intervention, en temps contraint, qui recouvrent en partie celles d’autres professionnels actifs dans les procédures de validation.
‐ Les pratiques d’information‐conseil du DQA de Genève, tout en ayant des éléments communs avec celles présentes en France, s’en différencient d’abord par la moindre diffusion des procédures de VAE sur le territoire suisse, par une structuration plus forte de la procédure au niveau national et une moindre complexité du système de formation professionnelle, ainsi que par le rôle de l’information‐conseil tout au long de la procédure de VAE et de son suivi. De plus, par rapport aux pratiques françaises, l’activité du DQA n’est pas axée de façon prioritaire sur une information générale relative à la VAE, qui est souvent effectuée par d’autres instances de l’orientation et du conseil, mais elle est davantage réalisée envers des candidats qui envisagent de façon opérationnelle une démarche de validation. Cela entraîne une différence par rapport aux formes d’intervention : si en France l’analyse des besoins est particulièrement présente, au DQA de Genève ce sont plutôt les pratiques d’évaluation pronostique qui se manifestent.
‐ Pour ce qui concerne les caractéristiques spécifiques des situations d’entretien d’accueil (SEA) du DQA de Genève, nous avons identifié une structure et une présentation de contenus qui synthétise l’ensemble de la procédure de validation, de façon à ce que, comme nous l’avons déjà signalé, toutes ses étapes sont évoquées ou partiellement expérimentées lors de la SEA. Nous avons aussi précisé une série de problématiques
typiques concernant les possibilités d’implication des candidats dans la procédure, ainsi que la dimension asymétrique du cadre participatif entre conseillers et candidats. Cette asymétrie tient aux rôles réciproques, au temps de prise de parole, au type de savoirs échangés, ainsi qu’à la prévisibilité plus ou moins réduite du déroulement de la SEA même.
‐ Enfin, comme signalé auparavant, nous avons repéré une conjonction d’éléments qui permet de formuler l’hypothèse qu’informer et conseiller sur la validation des acquis de l’expérience engage une problématique spécifique, concernant les modes de signification de l’inconnu. Nous mettons en lien cette problématique avec deux autres hypothèses complémentaires : (a) les difficultés dans les processus d’anticipation de l’avenir, qui se manifestent dans le vécu des candidats ; (b) l’importance des offres de compréhension de type iconique disposées dans les SEA par les conseillers, que nous considérons comme des tentatives spontanées de dépassement des difficultés de signification et d’anticipation manifestées par les candidats, ainsi que des difficultés de description de la VAE de la part des conseillers.
6.2.2 Une double exploration pour saisir la dimension intrinsèque de l’activité
Nous explorons la problématique précisée auparavant dans deux directions : d’une part en investiguant au niveau conceptuel les liens entre les modes de signification de l’inconnu, le processus d’anticipation et les dimensions iconiques de la signification (en particulier les significations métaphoriques) ; d’autre part en prenant en compte au niveau empirique, les dimensions intrinsèques de la dynamique de signification, ou cours d’expérience, des conseillers et candidats impliqués dans la SEA, ainsi que leur articulation. Cette double exploration est présentée dans les Parties 2 et 3 de la thèse.
Pour ce qui concerne l’exploration conceptuelle, à partir des prémisses de notre positionnement théorique, nous allons préciser les différents éléments de la théorie du signe de Peirce en identifiant comment dans celle‐ci, sont posées les questions de la compréhension de l’inconnu, de l’anticipation (et donc du rapport au temps et à l’avenir) et de modes iconiques de la signification. Cette perspective est articulée : (a) avec la théorie de la métaphore conceptuelle, proposée par Lakoff et Johnson, ce qui nous permet de spécifier certains éléments de cette forme d’iconicité ; (b) avec la conception de l’activité signe de Theureau, et de l’ensemble du cadre d’analyse sémio‐logique du cours d’expérience, à
l’intérieur duquel est soulignée la dimension essentielle de l’anticipation, dans la dynamique de la signification.
Lors de l’exploration empirique, en nous appuyant sur les éléments ressortant de l’exploration conceptuelle précédente, nous allons décrire les dynamiques de signification émergeant des cours d’expérience individuels des acteurs impliqués dans les SEA, ainsi que quelques éléments de leur articulation, en répondant ainsi au deuxième objectif de la thèse.
Cela est réalisé en nous focalisant sur quatre cas emblématiques de ces situations, qui ont été choisis à partir d’une première analyse d’une palette plus étendue de SEA. Les questions plus détaillées qui guident l’analyse empirique sont précisées en début de la Partie 3 de la thèse, é la suite de l’exploration conceptuelle mentionnée auparavant.
L’apport de l’ensemble de ces éléments permet, dans la quatrième partie de ce document, de répondre aux derniers objectifs de la thèse : l’identification des éléments des dispositifs d’information‐conseil initiale qui peuvent répondre de façon pertinente aux besoins des candidats d’une VAE ; ce qui ouvre sur la possibilité de : donner des indications concernant la conception d’environnements de formation pour les conseillers en ce domaine.