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Les définitions des principaux concepts du processus de production du

CHAPITRE 2 : CADRE THÉORIQUE ET CONCEPTUEL

2.2. Les définitions des principaux concepts du processus de production du

L’approche théorique privilégiée, ici, est fondée sur les quatre concepts suivants : facteurs de risque, facteurs personnels, facteurs environnementaux et habitudes de vie. La relation entre ces concepts est présentée dans le schéma conceptuel présenté à la page suivante.

Figure 1 : Schématisation conceptuelle de l’approche théorique du PPH

Source : Réseau international sur le Processus de production du handicap; http://www.ripph.qc.ca/mdh-pph/comment-utiliser- mdh-pph/classification-quebecoise-processus-production-du- handicap.

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D’abord, le concept de facteurs de risque renvoie à l’ensemble des facteurs biologiques, des facteurs relatifs à l’environnement physique dans lequel évolue un acteur, à l’organisation sociale et aux comportements individuels qui peuvent compromettre le développement d’un acteur ou porter atteinte à son intégrité physique ou mentale. Ils correspondent à l’ensemble des éléments appartenant à un acteur ou à l’environnement susceptibles de causer une atteinte à l’intégrité organique et aux capacités d’un acteur11. Bien

que confondant, ces facteurs se distinguent des facteurs personnels et environnementaux.

Le concept de facteurs personnels permet d’identifier quelles sont, au niveau organique et au niveau des aptitudes, les fonctionnalités qui sont diminuées ou non chez un acteur. La première dimension de ce concept, soit la dimension organique, réfère à l’intégrité ou la déficience des divers systèmes du corps humain12. Les aptitudes représentent la seconde

dimension de ce concept et renvoient aux capacités et incapacités (limitation des capacités fonctionnelles)13. Les limitations de capacités fonctionnelles (incapacités) sont les

conséquences de la déficience de l’acteur. Elles peuvent se traduire par une incapacité d’acquitter certains rôles sociaux ou certaines tâches que l’acteur pourrait exécuter si sa condition organique était différente. Cependant, les limitations varient énormément en fonction des facteurs environnementaux qui, eux, constituent le troisième concept de l’approche théorique (Fougeyrollas, 1983).

Les facteurs environnementaux permettent de comprendre le rôle des dimensions socioculturelles et physiques dans la situation d’intégration sociale ou de handicap. La dimension socioculturelle concerne l’ensemble de la matrice normative d’une société14.

Quant à la dimension physique, elle correspond à l’ensemble des conditions d’adaptation offertes dans l’environnement (par ex. nature des services et des programmes disponibles pour favoriser l’intégration sociale et aménagement des lieux dans lesquels évolue un acteur)

11 Il appert que la nomenclature proposée par Fougeyrollas (2007) que nous avons retenue pour ce mémoire utilise des concepts

en apparence opposés. D’un point de vue socioconstructiviste, aborder des « causes » et des « influences » peut sembler incongru. Cependant, notre compréhension du PPH rejoint celle d’autres auteurs (ex. Dumont, 2003) qui reconnaissent la facture à la fois socioconstructiviste et écologique du PPH. Nous faisons donc le choix d’utiliser parfois ces termes pour rester fidèle à notre compréhension du modèle.

12 Systèmes nerveux, auriculaire, oculaire, digestif, cardiovasculaire, respiratoire, immunitaire, urinaire, reproducteur, cutané,

musculaire, squelettique et morphologique (Fougeyrollas et ses collègues, 1998).

13 Par exemple, activités intellectuelles, langage, comportements, sens de la perception, activités motrices, respiration,

digestion, excrétion, reproduction et résistance (Fougeyrollas et ses collègues, 1998).

14 Par exemple, décisions politiques, contexte économique, normes sociales, valeurs sociales, rôles sociaux valorisés, attentes

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(Fougeyrollas et ses collègues, 1998). Puisqu’ils déterminent le contexte de vie des acteurs sociaux, les facteurs environnementaux agissent comme facilitateurs ou obstacles à l’intégration sociale de ces mêmes acteurs. Les facilitateurs concernent tout ce qui augmente les possibilités de participation sociale de la personne. À l’inverse, les obstacles concernent tout ce qui risque d’entraver la participation sociale d’un acteur.

Le quatrième concept, les habitudes de vie, comprend l’ensemble des activités quotidiennes, des activités domestiques et l’ensemble des rôles sociaux valorisés par la culture dans laquelle un acteur social, évolue selon son âge, son genre, ses identités sociales et personnelles (Fougeyrollas et Roy, 1996 et Réseau international sur le processus de production du handicap, 2013). Elles se subdivisent en douze domaines répartis en deux dimensions : les activités courantes (la nutrition, les conditions corporelles, les soins personnels, la communication, l’habitation, et les déplacements) et les rôles sociaux (les responsabilités, les relations interpersonnelles, la communauté, l’éducation, le travail, les loisirs) (Fougeyrollas et ses collègues, 1998 et Réseau international sur le processus de production du handicap, 2013). Les habitudes de vie permettent aux acteurs de survivre et assurent leur épanouissement (Fougeyrollas et Roy, 1996 et Réseau international sur le processus de production du handicap, 2013). L’intégration sociale ou la production de handicap se perçoivent dans la congruence (ou non) entre l’adoption d’habitudes de vie par un acteur et les attentes sociales entretenues envers ce même acteur. C’est pourquoi Fougeyrollas (1983) maintient que la situation de handicap est indépendante de la déficience de la personne. Elle serait plutôt produite par les discours, les pratiques normatives, les politiques, les attentes sociales et les interventions de l’état. Les tenants de l’approche du PPH conçoivent que se sont essentiellement les facteurs environnementaux qui érigent les conditions d’intégration sociale. C’est pourquoi, selon Fougeyrollas (1983), la situation de handicap peut être remédiée par « les interventions faites sur le milieu pour connaître et éliminer les obstacles organisationnels et normatifs qui règlementent l’exclusion sociale » (Fougeyrollas, 1983, 196).

Le Réseau international sur le Processus de production du handicap (2015) et Patrick Fougeyrollas (2010) présentent l’approche théorique du PPH (figure 1, page 28) comme un

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modèle de développement humain, appuyé sur certains des concepts du paradigme écologique du développement. Ce modèle de développement humain postule l’existence d’une dialectique en vertu de laquelle l’environnement influence l’individu qui, lui, influence également l’environnement. Plus précisément, on considère que les facteurs personnels propres à un individu influencent de façon unique ses réponses comportementales à divers facteurs environnementaux et qu’en retour, l’environnement fournit une réponse à ces comportements. Ces deux grands systèmes (l’individu et l’environnement) sont prétendus être dynamiques dans le temps, capables d’interinfluence et d’adaptation mutuelle, et ce, via des interactions entre les deux.

Dans la foulée de l’approche théorique du PPH, je postule d’emblée que la démarche de réinsertion sociale des prisonniers vieillissants sera directement tributaire de l’interaction entre les facteurs personnels de ceux-ci (ces derniers ayant d’abord subi l’influence de facteurs de risque inhérents à l’incarcération) et des facteurs environnementaux. À cet égard, la recension des écrits a déjà permis d’identifier différents facteurs de risque relatifs au fait de vieillir incarcéré (vieillissement biologique prématuré, institutionnalisation, prévalence de maladies physiques et mentales élevée, pauvreté, isolement social, etc.). Plus spécifiquement, j’ai mis en évidence deux choses au plan des facteurs personnels des prisonniers vieillissants: 1) ils ont des déficiences organiques plus importantes que les jeunes adultes incarcérés et que les citoyens du même âge ayant vieilli en communauté et 2) ils ont des incapacités au niveau des aptitudes plus importantes que ces mêmes groupes d’individus. La démarche de réinsertion sociale devrait viser à potentialiser à la fois les facteurs personnels et environnementaux pour augmenter les occasions de participation sociale de la personne vieillissante autant après sa libération que pendant son incarcération.

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