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Partie A Les travertins anthropiques : état de la question et nouvelle définition.

A. I.1.2 La définition actuelle.

« Purely descriptive definitions, irrespective of their origin, may be so broad as to have little value »

A. Pentecost (2005)

Les dépôts carbonatés continentaux que sont les travertins et les tufs calcaires affichent une certaine diversité quant à leur définition, leur environnement et condition de dépôt, leur morphologie, leur géométrie et leur sé-

dimentologie de faciès. Une brève définition des travertins et des tufs calcaires est fournie par Mitchell (1985) lorsqu’il décrit des dépôts formés par évaporation d’une eau de source ou de rivière. Fouke et al. (2000) propo- sent également une définition très large englobant tous les carbonates non-marins qui précipitent à proximité de sources, rivières, lacs ou grottes.

Classés parmi les formations superficielles du domaine karstique en relation avec un substrat calcaire (Campy et Macaire, 2003), les travertins et tufs calcaires ont fait l’objet de nombreuses publications scientifiques au cours des dernières décennies, engendrant une diversité dans leur définition, dénomination ou appellation. Parmi les carbonates continentaux, les travertins et tufs sont généralement définis comme des dépôts de source (Pomerol et al., 2005), mais peuvent également définir les dépôts de rivières ou de cours d’eau peu profonds et à petites cascades, où ils se forment par précipitation des carbonates activée par les turbulences et une perte en CO2 (Foucault et Raoult, 1985). Le terme tuf devient tout de même ambigu puisqu’il peut également désigner une roche volcanique (le tuf volcanique) formée par accumulation de projections volcaniques (Foucault et Raoul, 1985), correspondant au tufa, bien connu dans certaines régions italiennes. C’est pourquoi l‘adjectif « calcaire » est généralement ajouté au terme « tuf » pour désigner les dépôts carbonatés de source ou de rivière (calcaerous tufas). Ainsi, plus généralement, travertins et tufs calcaires sont des formations sédimentaires issues de la précipitation de carbonates dissous dans les eaux continentales.

Les critères séparant les travertins des tufs calcaires sont encore flous dans la littérature, et trouver une défi-

nition précise de chacun des deux termes, souvent utilisés conjointement, reste compliqué. Une certaine

confusion entre les différents termes définissant ces dépôts carbonatés continentaux règne depuis des dizaines d’années, comme le faisait déjà remarquer Fénelon (1968).

Une première distinction par Vaudour (1981) sépare les tufs, formations de type poreux, vacuolaire, cohérent mais tendre et d’aspect détritique, contrairement aux travertins, qui présentent des faciès indurées et compacts. En reprenant et en simplifiant ce discours, les travertins sont des roches dures et cohérentes tandis que les tufs sont tendres et poreux.

Certains auteurs vont s’appuyer sur la température de l’eau de précipitation, d’autres sur les contextes et les processus hydrologiques et géologiques et/ou sur les processus de formation. Riding (1991) est un des pre- miers à faire intervenir la température de l’eau de précipitation pour définir les travertins et classe ceux-ci parmi les formes de carbonates d’origine microbienne, tandis que Glover et Robertson (2003) définissent simplement les travertins comme des dépôts d’eau chaude (t >20°C).

De récentes études ont montré que ces concrétions carbonatées peuvent être classées en fonction de leur envi- ronnement de dépôt (Ford et Pedley, 1992 ; Pentecost, 1995). Les travertins sont des dépôts liés à une activité hydrothermale, à l’inverse des tufs calcaires qui proviennent, eux, d’eaux douces (source ou rivière) où vont précipiter les carbonates en équilibre avec les températures de surface ambiantes. Ces différents environne- ments de dépôt vont engendrer des caractères pétrographiques et des signatures géochimiques différentes entre les deux types. Cette différenciation est reprise par Gandin et Capezzuoli (2008), qui proposent une

confrontation entre tufs calcaires et travertins basée sur les caractéristiques pétrographiques et géochimiques, et sur les caractères génétiques de ces dépôts.

Parallèlement à cette nomenclature, certains travaux concernant les dépôts carbonatés continentaux regroupent sous l’appellation travertin un certain nombre de types de roches carbonatées continentales. C’est le cas de la publication de Pentecost (2005) qui regroupe, sous le même terme travertin, l’ensemble des dépôts carbonatés continentaux précipitant autour d’une source, le long des ruisseaux et des rivières, et occasionnellement dans certains lacs. En premier lieu, cet auteur classe les travertins en fonction de la charge et l’origine du CO2 dis- sous dans l’eau de précipitation et distingue ainsi les « travertins météogènes » et les « travertins thermogènes ». Sont inclus également les dépôts endokartsiques, c.-à-d. les spéléothèmes*, que l’auteur définit en tant que « hypogean travertine ». Etant données les relations existant entre le milieu karstique et les travertins, ces der- niers et les concrétions de grotte peuvent être intégrés dans une même chaîne de redistribution du carbonate de calcium mis en solution dans les massifs karstiques. Il est alors possible d’envisager les concrétions de grotte comme des formations carbonatées internes, et les travertins comme des formations carbonatées externes.

Enfin, et plus généralement mais certainement d’une manière scientifiquement inexacte, les travertins peuvent être assimilés aux autres constructions carbonatées d’origine biologique (p. ex. les récifs coralliens) et être ainsi considérés comme des biohermes continentaux (Riser, 1999).

Dans notre étude, la distinction entre les travertins, correspondant à des dépôts de source chaude, et les tufs calcaires, dépôts carbonatés dont la précipitation se fait à partir d’une eau douce et en contact direct avec l’air ambiant, sera préservée. Cependant, afin de simplifier et clarifier l’écriture de ce manuscrit et de notre

discours, il sera utilisé ici le terme travertins s.l. (c.-à-d. travertins au sens large du terme) pour désigner conjointement les travertins et tufs calcaires. Lorsque nous devrons séparer les deux types de dépôts, chacun des termes sera employé distinctement.