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Création de la CEPLAC et reprise de la production (1957-1985)

1.3. La région cacaoyère de Bahia

1.3.2. Histoire de l’exploitation de l’écosystème et du peuplement humain

1.3.2.3. Création de la CEPLAC et reprise de la production (1957-1985)

La situation financière des producteurs ne s’étant pas améliorée, l’Etat décide, sous la pression du lobby des fazendeiros de cacao, une deuxième intervention en 1957, avec la création de la CEPLAC. Dans un premier temps, l’action de la CEPLAC est purement financière et consiste à rééchelonner les dettes des producteurs contractées surtout à partir de la création de l’ICB23. Dans un deuxième temps, la CEPLAC intervient dans le domaine de la

recherche appliquée et crée, en 1962, un laboratoire de recherche du cacao, le Centro de

Pesquisa do Cacau (CEPEC).

Dans les années de 1976 à 1985, le Gouvernement Fédéral, à travers la CEPLAC, met en pratique un programme d’expansion de l’activité cacaoyère qui s’appelait Programa de

Apoio ao Desenvolvimento da Cacauicultura (PROCACAU). Ce programme consistait pour

l´essentiel en des lignes de crédits subventionnés pour financer les investissements dans les

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Decreto Federal n° 22.626, du 7 avril 1933.

22 Decreto Federal n°23.533, du 01 décembre 1933.

23 Il faut souligner que, dans les années 70, la CEPLAC reprend la politique de rééchelonnement des dettes des

fazendas. A cette période, les prix internationaux étaient élevés et les ressources abondantes. Cette période a été nommée période d’or de l’activité cacaoyère à Bahia.

L’objectif du PROCACAU visait à faire du Brésil le premier producteur mondial de cacao grâce à une intensification des systèmes de culture fondée sur l´emploi d´intrants manufacturés (paquet technologique). Avec le PROCACAU, la CEPLAC envisageait le renouvellement de 150.000 ha de cacaoyers. Cependant, le renouvellement était totalement anti-économique à cause de la baisse du prix du cacao sur le marché international. De plus, après le renouvellement des cacaoyers, les producteurs devraient attendre près de 4 ou 5 ans pour que le cacao commence à produire ce qui explique pourquoi de nombreux fazendeiros n’ont pas renouvelé leurs cacaoyers.

Comme conséquence de la politique de la CEPLAC, les surfaces plantées ont été augmentées. Avant les années 1960, 450.000 ha de cacaoyers communs avaient été plantés avec une densité de plantation d’environ 500 à 600 pieds par hectare. A partir de 1960, 150 000 ha de cacao hybride ont été plantés avec une densité supérieure (1100 pieds par ha).

Les nouvelles cacaoyères ont été implantées sur des terres moins propices au cacao que les plantations de la première moitié du siècle, à savoir, en particulier, les terres sableuses des vallées. La technique de plantation adoptée était l’abattis total suivi d’un brûlis. Avant la plantation, on balise soigneusement le terrain (espacement de 3 x 3 mètres). Le cacao n’est plus planté sous forme de graines mais sous forme de plantules de 6 mois environ pour permettre une meilleure implantation. Au cours des premières années, des bananiers apportent l’ombrage nécessaire au cacaoyer puis des arbres exotiques (de l'espèce des érytrines) sont plantés: ce sont des légumineuses qui ont pour fonction d´apporter un ombrage et de fertiliser les sols par la chute de leurs feuilles.

Dans les années 70, le rendement physique des cacaoyères a augmenté grâce à l’utilisation d’intrants chimiques tels qu’engrais, pesticides, fongicides. Pour financer ces nouveaux coûts, des crédits à taux préférentiels sont mis en place chaque année. En effet, les

fazendeiros de la région cacaoyère ont une présence active dans la politique publique au niveau régional et national. Ainsi, les fazendeiros bénéficiaient fréquemment de nouveaux crédits et de nouvelles aides tout en évitant de rembourser leurs emprunts. Les propriétaires de terres s’enrichissent et les revenus dégagés sont investis dans d’autres secteurs (immobiliers, commerce, etc.).

La CEPLAC a été pendant un certain temps financée par les exploitants qui payaient, en 1962, une contribution équivalant à 15% du prix F.O.B (Free on Board) des amendes exportées et 5% du prix FOB des sous produits du cacao exportés (liquer, beurre du cacao, etc). Cette contribution est passée à 10% en 1972 pour les deux catégories.

Cette situation commence à changer quand, dans les années quatre-vingts (1982), le Gouvernement Fédéral joint le budget de la CEPLAC à celui du Ministère de l´Agriculture. La CEPLAC perd son autonomie financière et doit « se battre » avec d’autres Institutions liées au Ministère de l’Agriculture pour obtenir ses financements. À partir de ce moment là, les barrières opérationnelles dues à la limitation des ressources débouchent sur de graves problèmes pour la CEPLAC.

Fonctionnement de la fazenda de cacao a cette époque

La mise en place de nouvelles pratiques culturales par la CEPLAC modifie le calendrier de travail. Les exploitants commencent à appliquer des produits chimiques dans les champs de cacaoyers pendant le mois d´aôut et début septembre, période pendant laquelle de

nouvelles feuilles apparaisent sur la plante (Figure 1.3). On peut souligner que le cycle du cacau dans l´état de Bahia est marqué par l´existence de deux périodes de cueillette régionalement appelés safra24 et temporão25. La pause pendant laquelle il n´y a pas de cueillette (paradeiro) est consacrée à la réalisation de travaux d’entretien des plantations, à savoir la taille des cacaoyers et la suppression des drageons et des gourmands26. Pendant les mois de janvier et février, on peut cueillir une quantité résiduelle de cabosses de cacao, appelée localement de bonga.

Figure 1.3 : Représentation du cycle du cacao à Bahia et des opérations culturales. Source : Labouret et Gomes, 2002

Les fazendas avaient une partie en pâturages pour les mulets et les chevaux destinés au transport des amandes. En plus du cacao, quelques fazendas possédaient aussi quelques troupeaux de bovins. En fait, l´élevage a toujours été une activité secondaire dans la région et les pâturages n´occupaient que les surfaces moins propices à l´activité cacaoyère. Les propriétaires ne commercialisaient pas le lait qui était consommé sur place (par les administrateurs, les ouvriers agricoles, les familles de travailleurs, les propriétaires, etc.).

Dans les fazendas, un certain nombre de travailleurs reste toute l’année dans l’exploitation. Ils sont payés à la journée pour certains travaux ou en fonction de leur productivité (rémunération à la tâche = na empreita). Ce dernier système est surtout utilisé pour les périodes de l’année où la demande en main-d’œuvre est importante (cueillette et désherbage). Plus les travailleurs sont rapides, plus leur rémunération est élevée.

Sur la fazenda, c’est l’administrateur qui distribue les tâches et décide du mode de rémunération des ouvriers en fonction des travaux à effectuer et de leur urgence. La fazenda est divisée en plusieurs parties et chaque binôme d’ouvriers est responsable de la cueillette

24 La période de cueillette des cabosses de septembre a décembre. 25 La période de cueillette des cabosses d´avril à août.

26 L´annexe 1.2. déc. nov. oct. sept. août juil. juin mai avril mars févr. janv. floraison temporão floraison temporão floraison safra floraison bonga

Nouvelles feuilles

cueillette temporão

cueillette bonga cueillette safra

Désherbage manuel Taille Retrait drageon et gourmands Application d’engrais et fongicidas PARADEIRO

dans une zone. Ces travailleurs peuvent compter sur l´aide d’autres personnes de la famille, ce qui permet aux propriétaires de cueillir tout le cacao mûr sans augmenter les charges sociales. Ainsi, un nombre significatif d’ouvriers reçoit des paiements à la tâche en fonction des besoins. Pour les travaux dans la fazenda, ceux qui ont une grande famille pour les aider sont privilégiés. Les autres ouvriers restent payés à la journée dans les parties les moins productives de la fazenda. En cas de forte demande de main-d´oeuvre, des ouvriers extérieurs peuvent aussi devenir de temporaires empreiteiros dans la fazenda.

Une fois les fèves rassemblées, l’empreiteiro les amène à la caisse de fermentation où l’administrateur mesure la quantité grâce à une caisse dont la taille est la référence pour la

fazenda. La taille de cette caisse et le prix accordé à l’empreiteiro pour l’avoir remplie, sont variables d’une fazenda à l’autre (en fonction du rendement des cacaoyers à l’hectare). Les

empreiteiros reçoivent leur rémunération en fin de semaine. Néanmoins, le propriétaire conserve une partie de ce qui leur est dû jusqu’à la fin de la période de cueillette (le solde) afin que les ouvriers n’abandonnent pas la fazenda et restent jusqu’à la fin des travaux.