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Courbe des départs des Réguliers et Séculiers bretons par décennie

Régulier Séculier

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tout au long du XVIIIe siècle, et dépassant les effectifs réguliers en 1760. Il s’agit désormais d’expliquer comment s’est déroulé ce revirement de situation.

a. Les Réguliers en première ligne (1620-1740)

Les Réguliers sont les seuls en missions jusqu’en 1637, date où le premier séculier, un certain Frère Benoît, prêtre du diocèse de Saint-Malo accompagne les premiers Capucins en Guinée1. Le monopole capucin reste considérable jusqu’à la chute de 1680-1690, ils fournissent encore 54,7 % des religieux envoyés. Parmi les Réguliers, les Capucins font figure de champions de la mission avec 44 % des effectifs réguliers pendant la période moderne et 61 % au XVIIe siècle. Au XVIIe siècle, ils sont suivis par les Carmes qui représentent 20 % de l’effectif. Les Jésuites sont encore assez peu présents et ce jusqu’au début du XVIIIe

siècle. Ce décalage Réguliers-Séculiers est simplement lié au dynamisme des ordres réformés et nouveaux ordres apparus en France au début du XVIIe siècle. Les Capucins arrivèrent dès 1593 en Bretagne et organisèrent le maillage du territoire pendant toute la première moitié du XVIIe siècle2. Recrutant massivement dans la province et inspirés par la tradition franciscaine d’apostolat, les Capucins sont majoritaires dans le mouvement missionnaire. Même les Carmes de la province de Touraine, plus tournés vers une pratique méditative de la religion qui tend à s’opposer à une pratique missionnaire, recrutent aux deux-tiers en Bretagne3

. Comme la plupart des autres ordres, les Récollets avaient une longue tradition d’implantation maritime qui les a conduits à appréhender puis à s’investir dans les missions4

. Ce mouvement de fondations du nouveau clergé régulier marque l’ensemble de la Bretagne au XVIIe

siècle5. Les crises du XVIIe siècle ne sont nullement liées à des problèmes de recrutement mais bien au contexte géopolitique. La ferveur de la mission touche plus facilement les Réguliers investis à la fois dans la mission intérieure contre les ignorants et les hérétiques et la mission extérieure, dans les terres infidèles où se prolonge l’assise territoriale de la province6. La Bretagne n’est que plus sensible à ce mouvement car les missions parcourent son territoire de

1 WILTGEN Ralph, Gold Coast mission history, 1471-1880, Techny, III : Divine World Publication, 1956, p.

39.

2 Fulgence de Goudelin, Capucins bretons (XVIIe-XXe siècles), Roscoff, Couvent des Capucins, 1937

3 BESNARD Antonin… op. cit. Vol. 1, p. 165. 4

MARTIN Hervé, « Les Franciscains bretons et les gens de mer. De Bretagne en Acadie (XVe-début XVIIIe siècle) » Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, Vol.87 n°4, 1980, pp. 641-677.

5 DELUMEAU Jean (dir.), Histoire des… op. cit. pp. 124-125. 6

DESLANDRES Dominique, « Les missions françaises intérieures et lointaines, 1600-1650. Esquisse géo- historique » Mélanges de l’École française de Rome. Italie et Méditerranée, Vol. 109, n°2, 1997, pp. 505-538.

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manière intense1. Mais ces missions « intérieures » ont l’avantage de ne pas faire perdre d’hommes dans la mesure où les hérétiques protestants sont une minorité peu visible dans la Bretagne de l’époque moderne. À la différence des territoires cévenols ou lyonnais, où se concentrent de fortes communautés protestantes, la Bretagne pouvait se permettre d’envoyer ses surplus religieux en mission car le danger d’extension de l’hérésie était faible et que la réforme des catholiques ne nécessitait pas autant de moyens.

Face à eux, les Séculiers font pâle figure au XVIIe siècle. Leur progression n’en est pas moins intéressante : en valeur absolue, ils passent de trois en 1630-1660 à douze en 1690-1700, moment où leur part dans les missions atteint le tiers des missionnaires. Comment expliquer ce retard et cette progression ? Il suffit encore de se tourner vers la situation du clergé en France et en Bretagne aux XVIe-XVIIe siècles. Les prêtres séculiers bretons sont nombreux2, certes, mais leur conduite et leur formation laissent à désirer au regard des nouvelles exigences de la Réforme catholique. La médiocrité ambiante du clergé breton ne le pousse pas spontanément à se tourner vers la mission. C’est pour cela que les premiers séculiers à partir font partie de l’élite séculière du temps. Les trois premiers séculiers bretons sont des Lazaristes, premier institut séculier appelé en Bretagne en 1645 par l’évêque de Saint-Malo, Achille de Harlay, et installés à Saint-Méen en 1646 après quelques péripéties3. De 1640 à 1660, ils sont les seuls séculiers à être partis4 puisqu’ils sont les seuls installés en Bretagne à cette époque. Seuls les Sulpiciens s’installent à Nantes en 1649. L’essor séculier constaté en 1660-1670 est à relier à la fondation récente du Séminaire des Missions étrangères à Paris vers 1659 donnant trois religieux en 1660-1670 puis trois autres la décennie suivante. Le recrutement reste fort modeste mais augmente jusqu’en 1690-1700, une décennie après la chute des Réguliers. Les Séculiers permettent ainsi de compenser les pertes enregistrées par les missionnaires réguliers. Mais ils déclinent fortement à leur tour pour ne plus donner que treize missionnaires entre 1700 et 1730, leur part diminuant de 33 % à 12 % entre 1700-1710 et 1720-1730. Plus solides, les couvents reprennent rapidement leur recrutement qui monte en flèche jusqu’en 1740, preuve supplémentaire de leur influence, alors que les Séculiers stagnent au moins jusque dans les années 1730. Le recrutement régulier est à son apogée dans

1 Chez les Lazaristes, on constate que les missions s’étendent principalement dans le diocèse de Saint-Malo dans

les années 1640 et 1650, au même moment que l’installation de la Compagnie en Bretagne. Or, sur ces mêmes décennies, on constate que cinq (peut-être six) sur neuf des lazaristes recrutés sont issus du diocèse. Les missions ont-elles un impact sur le recrutement ? Ou bien doit-on y voir simplement l’effet de nouveauté provoqué par l’implantation du séminaire lazariste dans le diocèse ? LEBRUN François, « Les missions des Lazaristes en Haute-Bretagne au XVIIe siècle » Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, Vol. 89 n°1, 1982.

2 CROIX Alain, La Bretagne aux 16e… op. cit. p. 1157.

3

LEBRUN François, « Les missions des Lazaristes en Haute-Bretagne… art. cit. pp. 16-17.

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les années 1710-1720. Les surplus des couvents peuvent donc se transporter ailleurs grâce à l’autorisation de leurs supérieurs qui ne ressentent pas de besoins intérieurs pressants. Cela pourrait être le cas pour les Ursulines de Basse-Bretagne puisque la vague de départ des années 1720-1740 coïncide avec le pic de recrutement breton des décennies précédentes, lui- même lié à une situation financière saine1. Ce sont les années 1730-1740 qui marquent l’apogée des Réguliers au XVIIIe

siècle en France2.

b. Inversement de tendance : la primauté séculière (1740-1800)

La conjoncture se retourne à partir des années 1740. Les effectifs séculiers avaient déjà doublé de 1720-1730 à 1730-1740 (de 5 à 11). Mais en 1740-1750, la nouveauté n’est pas tant l’augmentation de leur part dans l’effectif total de la décennie, qui atteint 40 %, que l’effondrement des Réguliers de plus de moitié. La chute s’expliquerait par le désintérêt croissant des Réguliers pour la mission. En Bretagne, les Récollets avaient assuré la plus grande part du recrutement pour le XVIIIe siècle, s’offrant même la place des Capucins dont les effectifs chutent dès les années 1670-1680 au point que le Frère Célestin de Bruxelles, rattaché à la province de Bretagne, n’envisageait même pas d’appeler à l’aide la province de Bretagne dont les rangs étaient selon lui trop clairsemés pour soutenir et ses missions extérieures et ses tâches intérieures3… Les effectifs capucins sombrent réellement en 1740, de 17 Capucins en 1730-1740 à un seul la décennie suivante.

Or la décennie 1740-1750 correspond à un double-mouvement dans le recrutement breton : le clergé régulier masculin est de moins en moins apprécié dans la population qui n’en ressent plus l’utilité et qui se fait plus critique vis-à-vis de sa conduite imparfaite. La chute du recrutement est constatée par la Commission des Réguliers qui épure les couvents de 1768 à 1774 en en supprimant. Les Récollets et Capucins ne sont pas touchés mais accusent des baisses d’effectifs considérables4

. De même le clergé séculier est touché par une baisse des vocations qui se situe vers 1745 pour la Bretagne selon Timothy Tackett5, et s’avère

1 Pour le Léon et la Cornouaille voir PROVOST Georges, « Les Ursulines en Léon et Cornouaille aux XVIIe et

XVIIIe siècles » Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest, Vol. 96 n°3, 1989, pp. 254-255, 258, 268 ; pour le Trégor voir MINOIS Georges, Les religieux… op. cit. pp. 147-149.

2 JULIA Dominique, « Des indicateurs de longue durée » in LE GOFF Jacques, RÉMOND René, Histoire de la

France religieuse, Paris, Le Seuil, 1991, p. 186.

3 WILTGEN Ralph, Gold Coast mission history… op. cit. p. 64. On consultera aussi ce livre pour connaître la

vie mouvementée du Frère Célestin de Bruxelles (pp. 59-66).

4

MINOIS Georges, « Les couvents bretons… » art. cit. Cartes 11

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précoce dans le cas de Tréguier, vers 17101. Les effectifs missionnaires séculiers diminuent mais pas autant que ceux des Réguliers : une division par deux pour les Séculiers contre neuf pour les Réguliers de 1750-1760 à 1760-1770 ! Alors que tous les Séculiers représentaient moins d’un quart des effectifs au XVIIe

siècle, ils en représentent désormais plus de la moitié. L’inversion a définitivement lieu en 1760-1770, moment où les Réguliers se trouvent surpassés, malgré une tentative de redressement bien timide en 1780-1790. La dernière décennie confirme ce changement puisque sur les quinze religieux envoyés en mission, douze religieux sont des séculiers.

Ils sont cependant favorisés par la suppression de la Compagnie de Jésus en France en 1762 et dans la chrétienté en 1773. De 1720 à 1740, les Jésuites avaient envoyé onze individus à chaque décennie, mais les deux décennies suivantes n’en fournissent que six, puis cinq. La Compagnie de Jésus disparaît complètement du panorama de la mission en 1757, date de départ de Jean Lemarchant et Félix-Esprit de Lourmel pour les missions du Levant, derniers Bretons à partir missionner. La chute des effectifs avait débuté avant la suppression de la Compagnie alors même que la province de France recrutait 35,8% de ses effectifs en Bretagne vers 17502 et que le nombre de missionnaires augmentait3. La participation jésuite en moins, les séculiers ne pouvaient que remplacer cette élite missionnaire.

C’est vers le milieu du XVIIIe

siècle que les efforts de formation entrepris au XVIIe siècle se concrétisent ce qui se reflète sur la mission puisqu’en 1740-1750, les religieux séculiers (pas les institutions séculières) envoient huit prêtres en mission ce qui les place juste derrière les Récollets. Ils seront présents par la suite de manière continue ce qui tranche avec le XVIIe siècle où les séculiers étaient quasi-absents ou sujets à problèmes4. Si on considère toute la période 1740-1800, on remarque que les Séculiers ont fourni 21 religieux, plus que les Récollets et Capucins, et autant que les Missions étrangères. Néanmoins ils se placent en deuxième position sur la période puisque leurs effectifs ont été multipliés par trois à la différence de ceux des Réguliers qui ont diminué de moitié environ par rapport à 1700-1740. Rien d’étonnant à voir la mission boudée par les Capucins lorsqu’on sait que la province de

1 MINOIS Georges, La Bretagne… op. cit. pp. 198-200.

2 Le taux s’élève à la moitié si on ajoute la Normandie. LANGLOIS Claude, « Les Jésuites de la province de

France vers 1750 » Dix-huitième siècle, n°8, 1976, pp. 83-84.

3 Ils sont 163 missionnaires jésuites en 1723, 198 en 1734 et 210 en 1754 ; Ibid. p. 79. 4

Georges Camenhen était décrit comme un ivrogne en 1686 tout comme Paul-Pierre Marquer en 1702. La plupart des prêtres servaient comme aumôniers ou comme un clergé de compensation faute de mieux. Cette coupure n’est pas nette car le clergé obéissant existait avant, tout comme les récalcitrants se maintiennent au XVIIIe siècle tel Alexandre-Joseph Roland qui déserte avec son équipage à la Martinique vers 1740 et refuse de partir lorsqu’on le lui enjoint en 1749 à cause de sa conduite scandaleuse.

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Touraine a perdu plus de cents sujets entre 1767 et 1790, soit 48% de ses effectifs1. Elle est d’ailleurs la seule province capucine de France à devoir fermer des couvents2

. Les Dominicains n’ont jamais été de grands missionnaires dans le cas breton : leur participation se résumait à un nouvel envoi par décennie entre 1650 et 1780. Ils disparaissent complètement du champ missionnaire après 1780, qui marque la fin du déclin amorcé au XVIIIe siècle. Pendant la Révolution, les Dominicains sortiront en masse de leurs couvents3.

Ce sont les institutions séculières qui ont fourni le plus de religieux pendant la période considérée, alors même que les effectifs séculiers diminuent en nombre, conséquence de l’élévation de niveau du clergé voulue par le Concile de Trente. Ces congrégations constituent sans conteste l’élite du clergé séculier et de la mission. Instituts réformateurs à la tête de la Réforme du XVIIe siècle tels les Lazaristes et Sulpiciens, institut dédié uniquement à la mission étrangère comme le Séminaire des Missions Étrangères ou encore héritiers spirituels des Jésuites, comme les Spiritains4, tous s’activent pour étendre la foi au monde entier, notamment au XVIIIe siècle. Pour tous, le XVIIIe siècle est la période faste de la mission à l’exception des Lazaristes bretons plus impliqués dans la mission au XVIIe

qu’au XVIIIe siècle. Leurs effectifs n’atteignent pas ceux des Réguliers du XVIIe siècle mais leur formation solide vient compenser « l’apostolat de l’exemple » prêché par les Réguliers5. En 1740-1800, la moyenne d’envoi par décennie de ces différents instituts se situe entre un pour les Lazaristes et 3,5 pour les Missions étrangères, ce qui est très loin derrière les Capucins et leurs moyenne de 14 envois par décennie entre 1620 et 1740 et toujours moins que les Jésuites à 4,8 ou même les Carmes à 3,5 pour la même période… Une comparaison qui doit être nuancée par la différence des envois par décennie des séculiers : de 5,4 par décennie en 1620-1740 à 11,3 pour 1740-1800 soit deux fois plus d’envois pour des périodes de longueur différente. Les envois de séculiers étaient donc bien plus concentrés au XVIIIe siècle qu’au siècle précédent. Chaque institut a une chronologie différente qu’on étudiera plus tard. De

1

DOMPNIER Bernard, Enquête… op. cit. p. 275 émettait l’hypothèse d’un manque d’originalité des Capucins qui, par leurs fonctions, devenaient interchangeables avec le clergé séculier rénové. Ils ne répondaient plus non plus aux aspirations des candidats qui se tournaient plutôt vers des ordres réguliers moins austères.

2 LANGLOIS Claude, TACKETT Timothy, VOVELLE Michel (dir.), Atlas de la Révolution… op. cit. p. 54 ; En

France, la famille franciscaine a perdu 40% de ses effectifs passant de 9820 à 6064 membres de 1768 à 1790. Sur la même période les Réguliers ont chuté de 37%, de 27 000 à 17 000 religieux. JULIA Dominique, « Des indicateurs… art. cit. p. 186.

3 DELUMEAU Jean, Le catholicisme entre Luther et Voltaire, Paris, Presses Universitaires de France, 1994 (1ère

éd. 1971), p. 310.

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Claude-François Poullart des Places a été formé chez les Jésuites de Rennes puis à Louis-le-Grand à Paris. Il lia sa congrégation de pauvres écoliers au collège jésuite de Paris. Après sélection des élèves, il leur offre le modèle d’enseignement jésuite s’étalant sur 8 ou 9 ans, insistant sur l’obéissance et l’idéal de pauvreté et d’humilité. COULON Paul, Claude-François Poullart… op. cit. pp. 259-262.

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concert, le pic est atteint pour l’ensemble en 1750-1760, sans et avec les Séculiers, période considérée comme marquant le plein épanouissement de la Réforme catholique.

Le bilan de la participation à la mission durant la période moderne est sans appel. Les Séculiers ont déclassé les Réguliers dans les missions. On remarque que la situation du recrutement interne à la Bretagne a joué sur le recrutement des missions, bien plus que les circonstances militaires et diplomatiques qui font plus varier les départs que les vocations. De plus, le caractère international des ordres religieux a favorisé le départ de leurs membres, alors que les Séculiers se trouvaient confinés à un cadre national, jusqu’à leur intégration par la papauté et la Propagande via la création du séminaire des Missions Étrangères et la progressive appropriation des missions par l’État qui envoyait dans ses colonies ses propres ressortissants.

La « crise de vocation » et la « déchristianisation » du XVIIIe siècle sont une nouvelle fois à nuancer1. Bien que les Réguliers sombrent dans les abysses tant dans la mission que dans la pastorale, les Séculiers tiennent le choc, malgré une crise de vocation au XVIIIe siècle que vient compenser le nouvel esprit conféré par la Réforme catholique au prêtre, modèle idéal de la spiritualité. On passe en somme d’une élite missionnaire à une autre. La Révolution a perturbé les mécanismes normaux de la mission mais elle laisse apercevoir les tendances qui marqueront le XIXe siècle, à savoir la primauté des Séculiers dans la mission2.

La nuance temporelle et des statuts doit être complétée par une analyse spatio- temporelle puisque chaque diocèse, chaque paroisse même, n’a pas participé avec la même intensité au mouvement missionnaire.

3. D’une géographie missionnaire à l’autre : perspectives diocésaines

Précédemment étudiées, les caractéristiques du recrutement sur le territoire breton ont le même défaut de généralisation que la courbe des départs : la perspective spatio-temporelle s’impose pour cerner comment le recrutement évolue dans le temps et si les diocèses – et les évêques - participent de la même façon aux missions durant les deux siècles qui nous intéressent.

1 JULIA Dominique, « Des indicateurs de longue durée » in LE GOFF Jacques, RÉMOND René, Histoire de la

France religieuse, Paris, Le Seuil, 1991, pp. 183-207 ; DELUMEAU Jean, Le catholicisme… op. cit. pp. 312-3

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a. Une participation des diocèses variable dans le temps

Considérations générales de participation

Le graphique qui a été dressé pour cette analyse contient 443 données1. Il permet de saisir la part jouée par les diocèses dans le temps tout en incluant les effectifs engagés. Tous les missionnaires ne sont pas représentés du fait de l’absence d’informations pour le diocèse ou de date de départ ce qui explique l’exclusion de 120 d’entre eux2. Le corpus reste suffisant pour appréhender les différences dans le temps sans trop d’erreurs3. On étudiera les diocèses selon leur participation à l’effort général pour replacer leur participation dans le temps et revoir les simples considérations présentées plus haut.

Le diocèse de Rennes, premier fournisseur de missionnaires de Bretagne ne se distingue dans aucune période particulière même si sa participation la plus forte se remarque au XVIIe siècle. Il fournit régulièrement des missionnaires ce qui lui permet au XVIIe siècle de fournir parmi les neuf diocèses entre 20 et 30% de missionnaires extérieurs.

Saint-Malo est le deuxième diocèse fournisseur de missionnaires. Troisième pour le XVIIe siècle, il reste bien représenté dès 1640-1650 lorsqu’il donne sept missionnaires soit 22 % de l’effectif total. Il est plus présent encore en 1660-1670 avec treize missionnaires et 37 % de l’effectif de la décennie. Bien présent au XVIIe

siècle et peut-être au XVIe, si les missionnaires partis avec Cartier étaient bien Malouins, le diocèse rayonne réellement au XVIIIe siècle puisqu’il passe premier sur le siècle avec quarante missionnaires, devant Rennes qui en donne trois de moins. Pendant la période, il donne de 15 à 37% des effectifs selon les décennies soit 1/5e pour tout le XVIIIe siècle.

Le diocèse de Nantes s’illustre au XVIIe siècle, accusant un net déclin au XVIIIe. Déjà en 1516, c’étaient deux Franciscains du couvent de Clisson qu’on destinait aux missions portugaises. De 1620 à 1640, les missionnaires du diocèse de Nantes représentent la moitié des Bretons envoyés. Au XVIIe siècle, il donne plus que les diocèses de Quimper et Vannes réunis. À partir de 1700, le diocèse devient presque inexistant sur la scène missionnaire bretonne à l’exception de la décennie 1750-1760. Au XVIIIe