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2. CORPUS, METHODES DE COLLECTE ET METHODES D’ANALYSE

2.3. Corpus d’enseignants de langue, méthode de collecte et d’analyse

2.3.1. Constitution du corpus d’enseignants de langues (Corpus 3)

Dès que nous avons circonscrit notre terrain d’études, nous avons choisi un petit groupe d’enseignants de langues que nous avions l’intention d’interviewer. Nous devons faire tout de suite la remarque que nos informateurs sont en fait toutes des informatrices, du fait que la grande majorité des enseignants de langues à l’URILM sont de sexe féminin. Nous parlerons désormais d’enseignantes qui sont 6 au total et qui se répartissent comme suit :

- 4 enseignantes de français :

1) Aigul, 30-35 ans, d’origine kazakh, maîtrise 4 langues (kazakh, russe, français, anglais) ; 2) Dina, 30-40 ans, d’origine kazakh, maîtrise 3 langues (kazakh, russe, français) ;

3) Gaukhar, 20-30 ans, maîtrise 4 langues (kazakh, russe, français, turc) ;

4) Zarina, 30-40 ans, d’origine ouïgoure maîtrise 4 langues (kazakh, russe, français, turc).

- 2 enseignantes d’anglais :

1) Saule, 30-40 ans, d’origine kazakhe, maîtrise 3 langues (kazakh, russe et anglais) ; 2) Assel, 20-30 ans, d’origine kazakhe maîtrise 3 langues (kazakh, russe et anglais).

Si nous avons décidé d’interroger à la fois les enseignants de la langue française et ceux de la langue anglaise, c’est pour voir en quoi le changement du statut de la langue à enseigner a eu des effets sur les méthodes d’enseignement pratiquées par les enseignantes mais aussi sur leur perception de leur propre

Contenus

-Linguistique (lexique, grammaire, phonétique) -Socio-culturel

-Notionnels/thématiques -Iconographique

Evaluation/ Autoévaluation

Présence de tests (type de niveau, de progrès, de contrôle, d'auto-évaluation); Présence de schémas ou guides docimologiques (outils pour la conduite des tests et l'appréciation des résultats);

Fréquence de l'évolution en fin d'unité, en fin de partie, de manuel etc., bilan en fin unité, bilan en fin d'année;

Evaluation initiale, rappel; Exercices de révision;

statut de professeur (valorisation ou dévalorisation) en regard du nouveau statut de leur langue dans l’institution. Nous voudrions en effet savoir si, selon le statut de la langue qu’elles enseignent, elles ont bénéficié ou non d’un soutien institutionnel, voire financier, si les comportements de leurs pairs, de leurs publics d’étudiants, etc. avaient changé.

2.3.2. Démarche, méthode et raisons du choix

Pour notre premier corpus, nous avons donc choisi de mener un certain nombre d’entretiens auprès des enseignants de français comme deuxième langue étrangère ou LE2 et d’anglais comme première LE1 et deuxième langue étrangère LE2 à l’URILM

L’un des outils principaux choisi est l’entretien dont nous allons tout d’abord en définir les caractéristiques. Selon de nombreux chercheurs, l’entretien est souvent utilisé dans les sciences sociales depuis les années 30 et beaucoup pratiqué par les sociologues, les psychologues comme moyen privilégié d’interroger des microprocessus sociaux. Il permet de recueillir des données qualitatives et subjectives de la vie sociale. A travers l’entretien, le sociologue essaie de s’imprégner du sens que les acteurs donnent à leur pratique. Le défi consiste ensuite à dépasser les simples énoncés individuels pour faire émerger, à partir d’extraits particulièrement éclairants, des aspects fondamentaux qui aident à comprendre le phénomène ou le groupe social étudié. Très souvent, l’entretien est un outil privilégié qui permet de collecter et d’obtenir rapidement des informations importantes.

Blanchet251 en donne la définition suivante:

L’entretien permet d’étudier les faits dont la parole est le vecteur principal (étude d’actions passées, de savoir sociaux, des systèmes de valeurs et de normes) ou encore d’étudier le fait de parole lui-même (analyses de structures discursives, des phénomènes de persuasion, argumentation, implication)

Les entretiens peuvent être utilisés dans les sciences sociales par les chercheurs auprès de catégories différentes d’acteurs : par exemple des enseignants, élèves, parents d'élèves, administrateurs, etc. Il faut savoir qu’en anthropologie ou en (micro) sociologie il existe trois techniques d’entretiens, à savoir l’interview non directive (ou compréhensive) centrée, l’entretien structuré ou directif et l’entretien semi-directif. Nous avons retenu, pour notre part, l’entretien semi-directif parce qu’il permet aux participants de s’exprimer relativement librement sur des questions préétablies, listées dans un guide d’entretien.

251 Blanchet, 1985 cité in Mialaret, 2004: 52

Nous déclinerons ci-après les raisons du choix de l’entretien semi-directif:

1- Cette méthode nous permet de poser des questions directes et indirectes aux enseignants et ceux-ci peuvent développer leurs réponses, ce sont des questions ni ouvertes ni fermées. En général, le chercheur dispose d’un certain nombre de thèmes ou de questions guidées, relativement ouvertes, sur lesquels il souhaite que l’interviewé réponde. Mais il ne pose pas forcément toutes les questions dans l’ordre dans lequel il les a notées et sous leur formulation exacte. Il y a davantage de liberté pour le chercheur mais aussi pour l’enquêté/e. Autant que possible, le chercheur laisse venir l’interviewé/e afin que celui-ci puisse parler ouvertement, dans les mots qu’il souhaite et dans l’ordre qui lui convient. Le chercheur essaie simplement de recentrer l’entretien sur les thèmes qui l’intéressent quand l’entretien s’en écarte, et de poser les questions auxquelles l’interviewé ne répond pas spontanément.

2- D’après Blanchet et Gotman (2007), l’entretien, comme technique d’enquête, est né aussi de la nécessité d’établir un rapport suffisamment égalitaire entre l’enquêteur et l’enquêté pour que ce dernier ne se sente pas, comme dans un interrogatoire, contraint de donner des informations. D’après eux, l’entretien qui modifie les rapports entre intervieweur et interviewé modifie aussi la nature de l’information produite. D’une information qui constituait une réponse ponctuelle à une question directe de l’enquêteur, on est passé à une réponse-discours obtenue par des interventions indirectes de l’enquêteur252

.

La caractéristique principale de l’entretien est qu’il constitue un fait de parole :

Un entretien, d’après Labov et Fanshel (1977), est un speech event (évènement de parole) dans lequel une personne A obtient une information d’une personne B, information qui était contenue dans la biographie de B.253

En raison des questions que nous nous sommes posées et des objectifs que nous nous sommes fixés, nous avons privilégié l’entretien semi-directif, parce qu’il prend en compte la parole des acteurs de l’institution que nous allons interviewer, soit des enseignants de langues de l’URILM, tout en permettant de nous appuyer sur un canevas de questions ciblées que nous pouvons préalablement soumettre à la connaissance de nos interlocuteurs.

252

Blanchet et Gotman, 2010 : 7

2.3.3. Constitution d’un guide d’entretien pour nos enseignants de langues

Pour nous, l’entretien semi-directif est devenu un outil qui nous permet, à travers les témoignages des enseignants des deux langues (anglais et français), d’obtenir des informations pertinentes.

Nous rappelons que, pour notre premier corpus, nous avons donc choisi de mener un certain nombre d’entretiens auprès des enseignants de français comme deuxième langue étrangère ou LE2 et d’anglais comme première LE1 et deuxième langue étrangère LE2 à l’URILM. Nous l’avons évoqué plus haut, l’anglais est devenu récemment la première langue étrangère officielle dans toutes les institutions au Kazakhstan, du primaire jusqu’au tertiaire, et le français est conséquemment devenu la deuxième langue étrangère à caractère optionnel. Mais ces apprentissages viennent aussi après le kazakh et le russe, deux langues officielles maîtrisées à des degrés différents par chaque individu qui souvent parle une autre langue à la maison dans la famille ou dans leur entourage social immédiat. Dans ce contexte, nous avons posé des questions (voir ci-après) pour connaître la situation de la langue française à l’URILM, et plus largement au Kazakhstan, dans le cadre des restructurations des cursus selon les principes de Bologne et l’introduction du CECR dans les programmes, méthodes et pratiques.

Pour mener à bien ce recueil de données, nous avons élaboré un guide d’entretien. Notre questionnaire était identique pour tous les professeurs interviewés. Les questions d’entretiens pour les professeurs de français étaient en français, tandis qu’elles ont été traduites en russe pour les professeurs d’anglais254.

Le canevas de questions255 comprend huit parties, comme suit:

- dans la première partie, les questions nous permettent de collecter des éléments sociobiographiques de base de nos informants (lieu de naissance, âge, état civil, etc.) ;

- dans la deuxième partie, certaines questions concernent des langues apprises et pratiquées au sein de la famille, avec les amis, les voisins, au travail (ex. avec les administratifs, les collègues, les élèves); - la troisième partie de notre entretien s’intéresse à la mobilité de l’enseignant et les programmes de séjour ou formations linguistiques proposés par à l’URILM dont ils ont ou auraient pu bénéficier;

- dans la quatrième partie, les questions portent sur la formation universitaire et le parcours académique de l’enseignant;

- la cinquième partie comporte des questions sur le parcours et l’expérience professionnelle de l’enseignant ;

- la sixième partie porte sur leurs perceptions des apprenants, de leurs langues, de leurs expériences de mobilité, leurs modalités d’apprentissage des langues, etc.

254

C’est nous qui en avons fait la traduction 255 Voir guide d’entretien en annexe

- la septième partie contient des questions sur leur perception des nouveaux programmes d’étude en langues selon Bologne;

- la huitième partie s’intéresse aux démarches méthodologiques utilisées pour l’enseignement du français LE2 avec des questions portant sur les manuels utilisés, les méthodologies, les pratiques, la prise en compte ou non du bagage linguistique des étudiants, etc. ;

- une question ouverte à la fin porte sur les expériences positives mais aussi les expériences difficiles rencontrées par l’enseignant dans leur enseignement du français comme LE2 ou l’anglais comme première ou deuxième langue étrangère, dans le cadre des nouveaux programmes d’études.

Ci-dessous un exemple de nos questions concernant le parcours en langues de nos interviewés : Parcours linguistique, expérience des langues de l’enseignant-e (capital linguistique) :

• Quelle(s) est/sont votre/vos langue(s) maternelle(s) ou première(s)? où ? quand ? comment les avez- vous apprises ?

• Quelle(s) est /sont votre/vos langue(s) seconde(s) ? où ? quand ? comment les avez-vous apprises ? • Quelles langue(s) étrangère(s) avez-vous apprises ? où ? quand ? comment les avez-vous apprises? • Quelle(s) langue(s) pratiquez-vous le plus au quotidien ? avec qui ? dans quels endroits ?

• Quelle(s) langue pratiquez-vous avec votre famille ? vos amis ? vos voisins ?

• Quelle(s) langue(s) pratiquez-vous au travail ? avec les administratifs ? avec vos collègues ? vos élèves ?

• Pratiquez-vous les langues étrangères ? où ? à quelle(s) occasion(s) ? • Vous définissez-vous bilingue, trilingue, plurilingue ?

Extrait de canevas de questions de notre entretien256