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Chapitre II : Options et approches méthodologiques

3. Procédures de l’analyse de contenu

3.1 Corpus documentaire : analyse de contenu

L’analyse de notre corpus documentaire, c’est-à-dire d’une part, les textes de recommandations ou de lignes directrices des OI concernant les politiques éducatives et d’autre part, les textes normatifs péruviens relatifs aux réformes étudiées, vise à permettre la comparaison entre les deux parties du corpus afin d’apporter des éléments de discussion à la question de recherche portant sur l’existence ou non d’influences de lignes directrices émises par des OI dans le cadre des réformes qui constituent l’étude de cas de cette recherche.

Pour les deux parties de notre corpus, nous avons procédé de manière similaire.

Toutefois, l’objectif de l’analyse n’est pas tout-à-fait le même pour les deux parties du corpus.

En effet, pour le corpus de recommandations des OI, il s’agit de déceler l’existence d’un modèle (ou de plusieurs modèles) relativement uniforme(s) et promu(s) par les OI en matière d’éducation de base ; il s’agit aussi de mettre au jour d’éventuelles variantes d’un tel modèle, ainsi que des évolutions sur la période couverte par notre étude. Pour le corpus de textes normatifs nationaux, il s’agit de constater des évolutions sur la période couverte par notre étude au niveau des discours relatifs aux réformes étudiées, pour voir ensuite comment se pose la question des influences internationales.

Pour la partie de notre corpus relative aux recommandations des OI, nous avons procédé en groupant les documents par OI émettrice. Une fois effectué le codage de tous les documents d’une OI, nous avons élaboré un schéma représentant les relations et les articulations entre les codes étant apparus à la lecture de ces documents. Pour rappel, les codes sont des symboles, des « étiquettes » attribuées à des segments significatifs de données (ici, des segments de texte),

afin de permettre de les identifier, de les classer, puis d’extraire et de regrouper tous les segments liés à un thème ou une question donnés, afin de rendre possible leur analyse. Ces codes peuvent ensuite être regroupés et triés en utilisant ce qu’Huberman et Miles nomment les

« codes thématiques » - et que nous appellerons « thèmes » - qui permettent de regrouper une grande quantité de données en un nombre plus réduit d’éléments conceptuels plus synthétiques (cf. supra p. 36).

Au cours de ces opérations initiales de codage et de présentation des données, il nous a semblé que les OI pouvaient être rassemblées en quatre groupes tenant des types de discours quelque peu différents : les institutions financières (BM et BID), les institutions onusiennes plus liées au thème du développement (ONU, PNUD et CEPALC), l’UNESCO et ses bureaux (BIE et OREALC), et finalement les organisations régionales américaines (OEA, OEI). Pour chacun de ces groupes, nous avons rassemblé les codes étant apparus à la lecture des documents des OI correspondantes sous un certain nombre de codes thématiques (Huberman &

Miles, 1991), dont les interrelations et les articulations ont à nouveau été représentées sous formes de schémas. Finalement nous avons superposé les quatre schémas ainsi obtenus en utilisant des couleurs pour distinguer les codes thématiques selon les groupes d’OI aux discours desquels ces codes sont liés.

Au chapitre IV (cf. p. 96) se trouve un schéma intitulé « Recommandations des Organisations internationales sur les politiques éducatives (1994-2004) », qui résulte de ce processus de codage et de déconstruction de notre corpus de recommandations et de lignes directrices des OI en matière de politiques éducatives.

En ce qui concerne la seconde partie de notre corpus documentaire, constituée de dix-sept documents représentant l’ensemble des textes normatifs de l’Etat péruvien en matière d’éducation, plus d’autres textes normatifs liés aux questions de décentralisation, en vigueur durant la période couverte par notre étude (cf. p 41, notamment le tableau 1), nous avons suivi une procédure similaire à celle utilisée pour la première partie de notre corpus. Nous avons commencé par coder chacun de ces dix-sept documents à l’aide de codes apparaissant lors de la lecture. Puis, pour chaque document, nous avons élaboré un schéma représentant les relations et les articulations entre ces codes.

Nous avons ensuite rassemblé les documents selon qu’ils traitent directement de l’éducation ou non, ainsi que selon les gouvernements (Fujimori et Paniagua/Toledo) qui les ont promulgués – la Loi générale d’éducation de 1982, en vigueur jusqu’en 2002, a donc été incluse dans le groupe des documents du gouvernement Fujimori. Pour chacun de ces groupes de documents, nous avons dégagé des codes thématiques permettant de regrouper les codes de premier niveau étant apparus à la lecture des documents. Nous avons à nouveau présenté les articulations entre ces codes thématiques à l’aide de représentations graphiques (schémas), que nous avons finalement superposées en utilisant des couleurs pour marquer les convergences et les divergences entre les thèmes liés aux différents groupes de documents. Le schéma résultant de cette démarche de codage et de déconstruction de notre corpus de textes normatifs nationaux se trouve au chapitre V (cf. p. 126), il est intitulé « Politiques éducatives – Pérou (Education de base) 1994 – 2004. »

En nous référant aux principes et aux techniques de l’analyse de contenu décrites plus haut (cf. point 1.2, page 34), nous pouvons définir les deux schémas résultant des processus parallèles de codage et de déconstruction des deux parties de notre corpus documentaires

comme des formats de présentation graphique des résultats de cette étape de notre analyse. Ce sont des cartes représentant les relations et les articulations entre les codes thématiques, qui doivent nous permettre d’avoir une vision d’ensemble des thèmes traités dans les textes constituant notre corpus documentaire, afin de poursuivre notre analyse en articulant la présentation narrative de nos données et la comparaison des deux parties de notre corpus.

Ces schémas sont doublement synthétiques. D’une part ils sont basés sur des codes thématiques, qui regroupent de manière synthétique des codes de premier niveau, à savoir les codes apparus à la lecture de nos documents (Huberman & Miles, 1991). D’autre part, les formats graphiques de présentation des données sont des manières d’organiser l’information de manière compacte et accessible en un coup d’œil afin d’aider à l’établissement de conclusions ou à la poursuite de l'analyse (Huberman & Miles, 1991 ; Mukamurera, 2006).

Lors de l’étape suivante de notre analyse, nous avons procédé à la reconstruction de chacune des deux parties de notre corpus en présentant nos données sous forme narrative, par thème ou par groupe de thèmes tels qu’ils apparaissent dans nos deux schémas. Pour ce faire, nous avons relu tous les textes déjà codés, en enrichissant cette lecture par la comparaison avec l’ensemble des textes associés, ce qui nous a permis d’approfondir notre analyse et de construire notre narration en nous fondant sur les citations les plus représentatives du groupe de textes présenté par rapport au thème examiné.

En effet, dans la reconstruction narrative de la première partie de notre corpus, relative aux recommandations des OI, nous avons, pour chaque thème, analysé et présenté nos données par groupe d’OI, puis dans une perspective chronologique, afin de mettre en évidence les convergences et les divergences dans les discours des différentes OI, ainsi que les éventuelles évolutions dans les discours de ces OI sur la période couverte par notre recherche. Pour la partie de notre corpus comprenant les textes normatifs nationaux, nous avons accordé plus de poids à la perspective chronologique afin de souligner les évolutions au cours de la période couverte par notre recherche, tout en regroupant les documents par types afin de faciliter la comparaison à la fois entre documents et entre types de documents.

Du point de vue de la méthode, notre travail de narration a été orienté par les indications de Magnin (1997) sur les rôles respectifs, dans la narration, des citations et de leur commentaire. Nous avons utilisé les commentaires pour dégager la signification que les citations choisies revêtent en elles-mêmes et pour l’ensemble de la narration, afin d’en souligner, pour le lecteur, les éléments sur lesquels se fonde la progression de notre analyse.

Dans la reconstruction narrative de notre corpus, nous avons accordé une attention particulière au fait que notre récit « doit pouvoir être lu et demeurer compréhensible sans son appareil de citations » (Magnin, 1997, p. 14) – ce qui est particulièrement vrai dans la mesure où, si nos commentaires sont en français, nous avons conservé les citations dans leur langue originale, c’est-à-dire l’espagnol ou l’anglais, rarement le français. C’est aussi pour cette raison, ainsi que pour privilégier, dans notre récit, le travail de l’analyse, que nos interprétations précèdent, à quelque rares exceptions, les citations qu’elles commentent. Ainsi, ces citations ont « le seul statut d'illustration ou de preuve de ce que nous avançons, administration de la preuve dont le lecteur est ainsi immédiatement juge de la pertinence » (Magnin, 1997, p. 15).

Finalement, pour la validation des résultats de l’analyse de notre corpus documentaire, nous avons eu recours à quelques-unes des tactiques décrites par Huberman et Miles (1991). La première est celle du contrôle de la représentativité, que nous avons fait au moment de

constituer nos corpus documentaires, en visant l’exhaustivité dans la nature des textes et pour la période couverte par notre étude, autant en ce qui concerne les recommandations et lignes directrices des OI en matière d’éducation de base que pour les textes normatifs nationaux.

La deuxième tactique de validation des analyses que nous avons utilisée est celle de pondérer les données, en évaluant et en contrôlant leur qualité. En effet, nous avons trouvé dans les documents des OI, comme dans les textes normatifs péruviens, certaines données qui étaient

« meilleures » que d’autres, et celles-ci nous ont servi pour la vérification de nos résultats généraux, par rapport à des données moins consistantes où l’information était moins conséquente. Comme l’indiquent Huberman et Miles : « Si l’on sait que les données sur lesquelles se fonde une conclusion sont plus solides, plus fiables que la moyenne, la conclusion s’en trouve alors renforcée » (1991, p. 428).

La tactique de validation des données que nous avons le plus utilisée est celle, toujours selon Huberman et Miles, d’établir des contrastes et des comparaisons ; en effet nous avons utilisé cette tactique dans l’ensemble de notre corpus documentaire, en contrastant et comparant l’ensemble de nos données : entre les OI, par groupes d’OI, puis entre ces groupes, en agissant de même entre les différents types de documents normatifs nationaux et entre les périodes gouvernementales de la décennie couverte par notre étude.