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PARTIE I : Contexte de la recherche et apports théoriques

Chapitre 2 : La notion de handicap, un regard historique

2.3. Plusieurs manières de penser la notion de handicap

2.3.4. La classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF)

DU HANDICAP ET DE LA SANTÉ (CIF)

La définition liée à la CIH revêt pour certains un caractère trop médical et trop centré sur l’individu. Pour l’ONU (1993) cité par Fuster et Jeanne (1996) « […] elle ne précise pas assez clairement la manière dont la situation sociale, les attentes de la collectivité et les capacités de l’individu interagissent » (p.14).

D’autres travaux sont venus compléter ou critiquer cette classification. C’est ainsi que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) propose en 2001 une révision nommée Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé (CIF) qui remplace la CIH. Des termes comme déficience, incapacité et désavantage qui caractérisaient la CIH sont abandonnés pour des concepts plus positifs. La CIF se décline en deux parties comprenant chacune deux composantes :

Parties Fonctionnement et handicap Facteurs contextuels

Composantes

Fonctions organiques et structures anatomiques

Facteurs environnementaux

Activités et participation Facteurs personnels

Selon l’OMS (2007), « le fonctionnement d’une personne dans un domaine particulier est déterminé par l’interaction […] entre le problème de santé de la personne et les facteurs contextuels, c’est-à-dire les facteurs environnementaux et personnels » (p. 18). Il y a interaction dynamique entre ces composantes : des interventions sur l’une d’elles peuvent modifier une ou plusieurs autres. Dès lors, le handicap se définit comme le résultat de la relation complexe entre le problème de santé et les facteurs personnels d’une personne, et des facteurs externes qui représentent les circonstances dans lesquelles vit cette personne.

Pour Stiker (2005), la CIF est un compromis intéressant entre une approche individuelle (appelée également modèle médical) et une approche environnementale (situationnelle). Contrairement à la CIH qui restait fixée sur un sujet déficient, la CIF adopte d’une part un vocabulaire positif ; d’autre part, elle insiste sur une relation entre des facteurs différents : plusieurs dimensions sont mises en interaction, comme les activités de la vie quotidienne et la participation sociale, les facteurs environnementaux et les facteurs personnels, les structures organiques et les fonctions anatomiques.

La nouvelle classification (CIF) vise donc à modifier l’environnement dans son sens le plus large afin de le rendre accueillant à toutes et à tous et de permettre la pleine participation de chacun. Cette classification repose dès lors sur l’intégration de deux modèles antagonistes : le modèle médical qui impute le handicap à la personne, et, à l’opposé, le modèle social où le handicap est perçu principalement comme un problème créé par la société selon l’OMS (2001):

Dans le modèle social, le handicap n’est pas un attribut de la personne, mais plutôt en ensemble complexe de situations, dont bon nombre sont créées par l’environnement social. […] la solution au problème exige que des mesures soient prises en termes d’action sociale, et c’est la responsabilité collective de la société dans son ensemble que d’apporter les changements environnementaux nécessaires pour permettre aux personnes handicapées de participer pleinement à tous les aspects de la vie sociale. (p. 21)

2.4. S YNTHÈSE

D’une approche centrée sur la personne en situation de handicap à une saisie plus globalisante, mettant en relation constante la personne et le milieu social, le milieu social face à la personne en situation de handicap, tant d’un point de vue médical que sociologique - répertoriant un réseau d’implications le plus large possible - il est patent que la réflexion des chercheurs s’affine et que celle-ci annonce des modalités d’intégrations plurielles développées ultérieurement.

Nous serions tentée d’ajouter qu’un immense travail reste à faire sur le regard - un regard vrai, débarrassé de tout a priori – de la personne dite normale et de la personne en situation de handicap, chacune dans l’interrelation sensée se réaliser.

On en parle …

C HAPITRE 3

14

: I NTÉGRATION , INTÉGRATIONS

Il est pertinent dès lors de se pencher sur le terme « intégration », tant ce mot est empreint de représentations, de sensibilités et de sens différents suivant les contextes et selon les personnes qui en font usage.

3.1. L’ INTÉGRATION , UN PROCESSUS INTERACTIF

Le terme intégration est largement utilisé aujourd’hui, que ce soit dans les journaux, les textes de loi, certaines conventions ou autres recommandations. On l’entend régulièrement dans le contexte scolaire, à la radio ou à la télévision. Il est utilisé dans divers domaines au sens économique, social, politique, linguistique, scolaire, etc., pour des thématiques plus ou moins voisines, à propos de l’immigration, de la communauté européenne, du handicap. Donc, d’après Abdallah-Pretceille (1992) le terme intégration devrait davantage se décliner au pluriel plutôt qu’au singulier, en fonction des publics cibles, des niveaux d’analyse et d’intervention, de la réalité et des circonstances.

Le mot intégration implique deux mouvements : intégrer, s’intégrer. Cette double forme, l’une transitive, l’autre pronominale, démontre bien le caractère réciproque de l’intégration, dont l’enjeu se situe à deux niveaux : celui de la personne qui cherche à s’intégrer, et celui de la société qui intègre. Il s’agit d’un processus interactif, au sein duquel l’intégration relève d’un double mouvement et d’une double prise de responsabilités. Or, comme le relève Abdallah-Pretceille (1992), spécialiste du champ de l’immigration, les mentalités actuelles présentent l’intégration sous une forme unidirectionnelle : « Les immigrés doivent s’intégrer et les handicapés doivent être intégrés » (p. 21). Et cette auteure de rejoindre Costa-Lascoux (1991) pour qui « l’intégration ne se décrète pas ; elle se négocie et se construit par des ajustements constants. Elle ne peut être unilatérale » (p. 21).

On retrouve cette conception interactive de l’intégration chez Vaney (1994), qui la définit comme une adaptation réciproque, une interdépendance entre un individu ou un sous-groupe et un groupe. Ce modèle est explicité dans la section 3.3.1.

Vue sous cet angle, l’intégration peut donc se révéler sans la présence d’une personne en situation de handicap, comme le montre Pauchaud Mingrone (1994), pour qui « la tâche spécifique de l’école est l’apprentissage qui, pour se réaliser, a besoin de l’intégration » (p. 14).

14 A partir de ce chapitre les expressions suivantes sont utilisées : personne en situation de handicap, personne avec une déficience intellectuelle, élève à besoins particuliers, élève présentant des difficultés d’apprentissage ou un handicap, déficience intellectuelle, remplaçant les termes à connotation péjorative d’alors.

Pour réaliser cet apprentissage, l’individu a besoin de rencontrer d’autres individus, d’établir un code, de le partager. Il est nécessaire qu’il y ait une interaction entre deux personnes. Il y a lieu d’intégrer différentes façons d’apprendre, de communiquer, de connaître ; pour Fuster et Jeanne (1996), l’apprentissage ne peut s’effectuer sans les interactions, situées au centre du « développement cognitif, affectif et social dans une société hétérogène » (p. 11).

3.2. D E L ’ EXCLUSION AU PRINCIPE D ’ INTÉGRATION

Dans le contexte qui nous intéresse, les notions d’exclusion et d’intégration sont intimement liées à la compréhension de la notion de handicap et aux représentations que la société s’en fait. Nous avons évoqué dans les chapitres précédents les avancées importantes ayant eu cours tout au long du 19ème siècle, marqué par une prise en compte des conditions de vie difficile des personnes en situation de handicap, puis, dès les années 1950, l’émergence de l’éducation spécialisée et le principe d’une assurance-invalidité. Ses subventions prendront fin en 2008, suite à l’adoption par le peuple de la Réforme de la péréquation financière en 2004.

Nous observons que si d’un côté le développement des écoles et classes spécialisées dès 1950 a permis, comme l’évoque Panchaud Mingrone (1994) « de mieux comprendre les différents déficits, de développer des techniques et des savoirs professionnels, de soulager les parents et d’offrir aux enfants outre la scolarité, un dispositif thérapeutique très facile d’accès puisque souvent complètement rattaché à l’institution » ( pp. 157-158), d’un autre côté, un tel système de prise en charge a contribué à développer un système caractérisé par l’exclusion des personnes en situation de handicap, forgeant des attitudes, des croyances ou modes de faire tels que, dans bien des cas, ils ont représenté des freins à l’intégration. Là est le paradoxe : en voulant aider les enfants différents, la société les a pénalisés.

Néanmoins, depuis plusieurs années l’intégration des enfants et adolescents dans les classes ordinaires est régulièrement encouragée, par exemple au travers des « Recommandations à l’intention des cantons » émises par la CDIP en 1985, également à travers la « Loi sur l’égalité pour les handicapés » de 2002 (LHand), ou encore l’ « Accord intercantonal sur la pédagogie spécialisée » élaboré par la CDIP en 2007 et déjà évoqué en section 1.2.

Outre ces diverses recommandations et lois spécifiques, la Confédération helvétique tient compte de plusieurs déclarations et conventions internationales en matière d’éducation intégrative adoptées par les Nations Unies. Ces textes n’ont pour la plupart qu’une valeur de recommandation. En voici quelques exemples :

- Déclaration des droits de l’enfant de 1959

- Déclaration des droits du déficient mental de 1971 - Déclaration des droits des personnes handicapées de 1975 - Convention sur les droits de l’enfant de 1989

- Déclaration mondiale sur l’éducation pour tous, ou Déclaration de Jomtien, de 1990

- Règles universelles pour l’égalisation des chances des personnes handicapées de 1993

- Enfin, sous l’égide le l’UNESCO, la déclaration de Salamanque et le Cadre d’action pour l’éducation et les besoins spéciaux de 1994.

Le 20ème siècle est donc marqué par le passage d’une conception basée sur un principe d’exclusion de l’enfant et de l’adulte différents à une nouvelle approche qui préconise leur intégration tant sociale que professionnelle. Nous avons évoqué également, dans les pages précédentes, que ce nouveau regard sur la différence est aussi l’aboutissement d’un long cheminement dont les actrices et acteurs sont pour la plus grande partie les personnes touchées personnellement, c’est-à-dire les parents d’ « enfants pas comme les autres », favorisant la naissance de nombreux mouvements en faveur de l’intégration. Nous nous référons une nouvelle fois à l’annexe 2 pour montrer comment s’est opéré en Italie, dans les années soixante, ce passage d’une école séparative à une école intégrative.

Néanmoins, malgré ces avancées positives en termes de nouvelles approches du handicap et le nombre non négligeable de déclarations y relatives, nous constatons que, dans notre pays, elles n’ont pas encore eu l’impact qu’elles auraient dû ou pu avoir. L’intégration est encore loin d’être réalisée partout, ce qui suscite les interrogations suivantes :

- Quelles en sont les raisons ?

- Quels sont les freins à une telle application ?

- Aujourd’hui, lorsqu’on évoque l’« intégration scolaire » ou l’« intégration d’élèves à besoins particuliers dans les classes ordinaires », de quoi parle-t-on exactement ?

3.3. I NTÉGRATION SCOLAIRE , UN TERME POLYSÉMIQUE

Malgré divers mouvements en faveur de l’intégration de toute personne dans la communauté, concrétisés actuellement par la mise en place du concordat sur la pédagogie spécialisée dans les cantons suisses15 à l’échelle scolaire, l’intégration d’élèves à besoins particuliers dans les classes ordinaires suscite de nos jours diverses réactions et questions marquant l’engouement mais aussi certaines peurs et craintes des personnes concernées. A ce propos, De Carlo-Bonvin (2004) relève une certaine confusion terminologique : « Dans le milieu des professionnels de l’éducation et de la pédagogie spécialisée, le terme ‘intégration’ est devenu une notion passe-partout, véhiculant une connotation positive malgré un certain flou terminologique » (p. 10). Dès lors, nous pouvons analyser le mot intégration comme un terme polysémique par les variétés de situations vécues et de pratiques mises en œuvre lorsqu’il s’agit d’accueillir l’autre, le différent, dans une classe ordinaire. On peut ainsi observer plusieurs modèles d’intégration correspondant à des places différentes prises par la personne intégrée et la société d’accueil, dépendant des lois en vigueur, de leur application, de la réalité du terrain, de la formation des

15 Voir chapitre 1.

e-s voire de leur ouverture à la différence. En référence à Vaney et Debruères (2002), quatre types de modèles, ne répondant ni aux mêmes objectifs, ni aux mêmes besoins, sont répertoriés dans les pratiques d’intégration scolaire : l’insertion, l’assimilation, l’intégration et l’inclusion.

3.3.1. Q UATRE MODÈLES D ’ INTÉGRATION

La première forme d’intégration est l’insertion, ou intégration physique, que Vaney (1994) définit ainsi :

« C’est l’intercalation, l’introduction d’un élément dans un autre sans visées participatives, communicatives ou adaptatives » (p. 3). Pour l’individu dit intégré, il s’agit uniquement d’être parmi les autres, la communauté d’accueil ne se préoccupant pas de ses besoins spécifiques. Dans la situation d’insertion, « les rôles de la personne sont différents de ceux de ses pairs, les appuis et adaptations sont inexistants ou peu importants » (INSIEME, 2002, p. 8). Dans la classe, cela correspond par exemple à un élève qui, assis au fond de la classe, pratique une activité de dessin pendant que ses pairs sont occupés à un problème de mathématiques. Même si l’élève a une place, même s’il est admis, il n’est pas encore intégré puisqu’il n’y a pas d’adaptation réciproque. Gremion et Paratte (2009) précisent :

La réussite de l’insertion dépend avant tout de l’élève inséré et de sa capacité à s’adapter au milieu dans lequel il se trouve. Si ce modèle peut être considéré comme un premier pas pour le développement de projets intégratifs, il n’est pas suffisant à leur réalisation. (p. 162)

On parle d’assimilation lorsque l’élève est accueilli dans une classe ordinaire et invité à participer aux mêmes activités que ses camarades. Gremion et Paratte (2009) le conçoivent ainsi : « L’élève est accepté pour peu qu’il n’ait pas besoin d’aide spécifique et qu’il se comporte comme les autres » (p. 162). Il n’y a pas d’adaptations réciproques étant attendu que la condition d’intégration est d’être capable de faire comme les autres. Pour Abdallah-Pretceille (1992), « l’assimilation se comprend comme une des modalités du processus d’acculturation qui aboutit à l’abandon des schèmes culturels d’origine et à l’adoption de nouveaux modèles culturels. Au terme de cette évolution, l’identité originelle se trouve dissoute au profit d’une identité d’adoption acquise » (p. 17). L’assimilation, que l’on soit dans le champ de l’immigration comme dans celui des situations de handicap, révèle un processus d’indifférence à la différence. Dans les deux cas, une place est faite à l’individu, mais il doit porter seul la responsabilité de l’adaptation. Dans la classe par exemple, cette forme d’accueil indifférent à la différence se manifeste par une normalisation des rôles ; le milieu ne se modifie pas, aucune adaptation n’est apportée ; l’élève en situation de handicap doit ressembler à ses pairs ; il a les mêmes fonctions, les mêmes rôles, les mêmes programmes que les autres.

Si les deux premiers modèles sont caractérisés par une adaptation unidirectionnelle de l’élève à son nouveau contexte, il y a adaptations réciproques dans les deux modèles suivants. Ainsi Vaney (1994) parle-t-il d’intégration lorsqu’il y a adaptation réciproque et interdépendance entre un individu (ou un sous groupe) et un groupe. Cet auteur poursuit : « Nous savons qu’il ne peut y avoir d’intégration sans que l’individu et le groupe intégrant ne modifient significativement leurs comportements et/ou adaptent

leurs valeurs et leurs règles. En d’autres termes, chacun des éléments se transforme, s’enrichit au contact de l’autre » (p. 3). Cette définition de l’intégration comporte ainsi deux notions centrales : un ajustement mutuel de chaque élément au contact de l’autre, et un enrichissement, un apport réciproque des uns envers les autres au travers de l’interdépendance. Il s’agit ici d’une recherche d’équilibre, dans un milieu où l’enfant est différent parmi les autres. Selon Sarrasin (2007) citant Vaney (1997), « l’intégration constitue donc un équilibre à atteindre entre le droit à la différence et le droit à la ressemblance » (p. 26). Dans ce cas de figure, l’élève intégré joue tantôt des rôles semblables à ceux de ses pairs, tantôt des rôles différents. Pour répondre aux besoins de cet élève, l’enseignante ou l’enseignant, moyennant des aides, adapte si nécessaire les structures et l’organisation de la classe, tout comme le matériel scolaire voire le programme, ajustant ainsi les exigences à ses compétences. Pour Gremion et Paratte (2009), « ce modèle dépend, bien entendu, de l’intérêt de l’école mais également de celui de l’enseignant-e et de sa capacité à porter une attention particulière à l’élève intégré » (p. 162). Dans ce modèle, la différence n’est plus indifférente, toutefois, elle reste visible et « demeure un risque possible de stigmatisation et un poids pour l’élève intégré qui aura probablement besoin de retrouver ses pairs dans un espace ressource » (Gremion

& Paratte, 2009, p. 162).

Les années 1990 voient le développement d’un nouveau concept appelé pédagogie de l’inclusion. Ce quatrième modèle est développé en section 3.6.

3.4. P LUSIEURS NIVEAUX D ’ INTÉGRATION

Pour Vaney (1994), distinguer des niveaux d’intégration revient à préciser la qualité de l’intégration.

Rappelons que cet auteur entend l’intégration comme l’adaptation réciproque et l’interdépendance entre un individu ou un sous-groupe et un groupe. Aussi est-il amené à distinguer le domaine d’intégration en tant qu’espace, cadre où se réalise l’intégration, et le niveau d’intégration, qualifiant la qualité d’intégration atteinte dans des domaines divers tels que la famille, l’école, le quartier. Il rappelle en outre que « l’intégration étant un processus, et non un état, sa qualité varie selon les espaces et le temps, sa (re)construction est permanente » (p. 4). S’inspirant des travaux de Söder (Suède), Vaney propose de distinguer trois niveaux ou qualité d’intégration : intégrations physique, fonctionnelle et sociale.

L’intégration physique consiste uniquement à être parmi les autres, sans avoir nécessairement des échanges ou des activités communes, avec néanmoins une distance physique moindre entre la personne en situation de handicap et la personne valide. Dans les faits, on observe ce premier niveau d’intégration par exemple lors de l’aménagement d’une classe spéciale dans une école ordinaire, ou bien lorsqu’un enfant présentant un handicap est assis au fond de la classe, occupé seul à une activité, sans échange ni participation à la vie de la classe.

Le deuxième niveau est l’intégration fonctionnelle, que Vaney (1994) définit comme « la réalisation d’activités avec les autres, le développement d’échanges, l’utilisation de matériel ou d’équipement en

commun » (p. 4). A l’école, l’élève réalise les mêmes disciplines que ses pairs, néanmoins les tâches sont généralement adaptées selon leur niveau de difficulté.

Quant à l’intégration sociale, elle implique de « participer à la vie d’un groupe, d’y jouer des rôles sociaux16 valorisés, d’établir des liens réguliers et spontanés, d’être perçu comme faisant partie du groupe et d’en avoir le sentiment » (Vaney, 1994, p. 4). Il s’agit du niveau d’intégration le plus élevé17 qui « n’est pas facile à atteindre, que l’on soit handicapé ou non. Les valeurs d’un groupe, d’une société, auront bien sûr une grande influence et à l’école le rôle de l’enseignant est prépondérant » (Vaney & Debruères, 2002, p. 9). Dès lors, ces auteurs proposent de distinguer

les espaces d’intégration (milieux scolaire, familial, résidentiel, professionnel, de loisirs, etc), les activités (mathématiques, activités créatrices, gymnastique, etc.) et la qualité d’intégration. […].

Donc l’intégration scolaire est un espace, et l’intégration sociale est un niveau (une qualité d’intégration). Ce sont deux concepts qui ne se comparent pas car ils ne sont pas de même nature.

(p. 9)

Bonjour et Lapeyre (2000, pp. 98-99) recensent quant à eux trois logiques d’intégration : la première, plus ancienne mais toujours d’actualité, appelée intégration à visée réadaptative ; la seconde logique, inverse voire réactionnelle, d’euphémisation, et la troisième, plus récente, celle de l’accessibilisation.

La première de ces logiques correspond à la société orthopédique du début du 20ème siècle, marquée par une volonté d’intégrer selon des normes, dans une communauté dite normale. Cette volonté se heurte toutefois à des questions fondamentales liées à la définition de la norme. D’après Bonjour et Lapeyre (2000) « la norme, elle, est éminemment culturelle et doit être sans cesse interrogée pour ne pas être naturalisée » (p. 99). Cette logique visant à définir le handicap, à le contrôler, va à l’inverse du but recherché en considérant les individus concernés comme un groupe ou une entité sociale marqués, spécifiés. Elle a donné lieu à une logique inverse, celle de l’euphémisation, cherchant à banaliser voire à minimiser le handicap. Dans cette conception, les désavantages et les difficultés de la personne handicapée ne sont pas considérés, ils deviennent même des avantages. Pour ces auteurs, cette conception de l’intégration liée à une logique de normalisation ou de « surnormalisation » n’est pas plus soutenable que la première, ni les besoins réels de l’individu, ni ses spécificités ne sont pris en compte. La troisième

La première de ces logiques correspond à la société orthopédique du début du 20ème siècle, marquée par une volonté d’intégrer selon des normes, dans une communauté dite normale. Cette volonté se heurte toutefois à des questions fondamentales liées à la définition de la norme. D’après Bonjour et Lapeyre (2000) « la norme, elle, est éminemment culturelle et doit être sans cesse interrogée pour ne pas être naturalisée » (p. 99). Cette logique visant à définir le handicap, à le contrôler, va à l’inverse du but recherché en considérant les individus concernés comme un groupe ou une entité sociale marqués, spécifiés. Elle a donné lieu à une logique inverse, celle de l’euphémisation, cherchant à banaliser voire à minimiser le handicap. Dans cette conception, les désavantages et les difficultés de la personne handicapée ne sont pas considérés, ils deviennent même des avantages. Pour ces auteurs, cette conception de l’intégration liée à une logique de normalisation ou de « surnormalisation » n’est pas plus soutenable que la première, ni les besoins réels de l’individu, ni ses spécificités ne sont pris en compte. La troisième