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PARTIE I : Contexte de la recherche et apports théoriques

Chapitre 4 : La formation des enseignantes et des enseignants

4.3. Les besoins de formation des futures enseignantes et enseignants

Passer d’un système exclusif à une structure intégrative ne s’improvise pas, tant les changements liés aux valeurs et aux fondements mêmes de l’école, aux rôles nouveaux de chaque actrice et acteur, aux regards sur la différence et au fonctionnement de la classe sont conséquents. Si la réussite d’un programme intégratif ou inclusif à long terme dépend de plusieurs facteurs interreliés, il n’en reste pas moins que la sensibilisation et la formation des futur-e-s enseignant-e-s est une condition sine qua non à cette réussite.

24 Le terme intégration utilisé dans ce chapitre doit être entendu dans son sens générique. Il englobe de ce fait les deux formes d’intégration réciproques citées et explicitées en section 3.3.1. et 3.6 : l’intégration et l’inclusion.

25 Par degré primaire, on entend les huit premières années de la scolarité telles que définies par l’accord Harmos.

26 COHEP : Conférence des rectrices et recteurs des hautes écoles pédagogiques: voir référence électronique.

4.3.1. F ORMATION LIÉE AUX BESOINS SPÉCIFIQUES

De nombreuses études outre-Atlantique mais également européennes ont cherché à connaître les besoins spécifiques de formation des enseignant-e-s amenés à travailler dans des structures inclusives. Bélanger (2004), citant par exemple Doré, Wagner et Brunet (1996), relève que « les enseignants manquent de confiance en leurs compétences » lorsqu’il est question d’inclusion » (p. 41). Cette auteure cite également une douzaine d’études réalisées entre 1989 et 2003 dans le cadre de l’école primaire montrant que parmi les mesures nécessaires mentionnées par les enseignant-e-s afin de parvenir à une inclusion responsable, on retrouve souvent des besoins déclinés en trois catégories : les besoins de formation, de soutien et de temps.

Lorsqu’on évoque les besoins de formation, il s’agit du développement professionnel, indispensable lors d’un processus de changement d’attitudes. L’on sait que l’attitude de l’enseignant-e a un impact significatif sur les apprentissages, l’estime de soi et la réussite des élèves. De la même façon, l’attitude de l’enseignant-e intégratif ou inclusif aura un impact sur la réussite ou non de l’intégration dans sa classe.

Les enseignant-e-s faisant référence au besoin de soutien s’attendent à obtenir des ressources tant humaines que matérielles, par exemple à travers la possibilité de compter sur des personnes ressources, ou pour des aménagements tels que des adaptations physiques dans la classe et dans l’école, ou que le nombre d’élèves ayant des besoins particuliers intégrés dans la classe soit proportionnel à la réalité.

Quant au besoin de temps, il s’agit d’en allouer hors de la présence des élèves afin que le ou la titulaire puisse le consacrer à des activités de planification ou pour les rencontres indispensables avec les nombreuses actrices et acteurs du réseau.

4.3.2. F ORMATION LIÉE AUX RÔLES SPÉCIFIQUES DES ENSEIGNANTES ET ENSEIGNANTS

Insistant sur la place prépondérante de l’enseignant-e œuvrant dans un contexte inclusif, Beaupré, Bédard, Courchesne, Pomerleau, et Tétreault (2004) recensent quant à elles les nombreux rôles qui lui sont dévolus. Se référant à Collicot (1992), ces auteures (2004) notent en premier lieu le rôle de l’enseignant-e au plan de l’intégration sociale de l’élève dans la classe : « Quand les enseignants soutiennent directement l’intégration sociale, les changements positifs dans les interactions entre les enfants avec et sans incapacités surviennent plus souvent » (p. 60). Aussi leur attitude d’ouverture influence-t-elle celle des élèves ordinaires vis-à-vis de leurs pairs en situation de handicap.

Par ailleurs, la ou le titulaire de la classe doit savoir élaborer des stratégies permettant l’expression de tous les élèves dans la classe, tout comme il doit « structurer la classe de façon que tous les élèves puissent recevoir une éducation appropriée » (Beaupré, Bouchard, Boudreault & Kalubi, 1998, cité par Beaupré & al., 2004, p. 60).

D’autres rôles sont mentionnés encore, telle que la nécessaire adaptation de l’enseignant à chaque élève, ceci au travers de l’individualisation, des objectifs essentiels à atteindre et des principes de l’ergonomie cognitive, postulant que c’est la tâche qui doit s’adapter à l’élève et non l’inverse.

En outre, l’enseignant-e doit être ouvert à l’enseignement à niveaux multiples faisant appel à des méthodes différentes de présentation et d’évaluation.

Un autre rôle important est celui qui consiste à agir comme partenaire avec les parents en établissant des formes de communication adaptées à leurs préférences. De plus, Beaupré et al. (2004) précisent :

l’enseignant qui reçoit un élève en situation d’inclusion a aussi un rôle d’informateur à jouer, en lien avec le milieu fréquenté antérieurement par l’élève. Il doit s’informer sur les interventions qui ont fonctionné, transmettre des informations et trouver les ressources nécessaires pour répondre aux besoins de l’élève. (p. 62)

Enfin, d’autres auteurs dont Attifeld (1985), cité par les mêmes auteures (2004), soutiennent que les titulaires doivent être les coordonnateurs du plan d’intervention.

4.3.3. F ORMATION LIÉE AUX CONDITIONS DE RÉUSSITE DE L ’ INTÉGRATION

Certains chercheurs se sont interrogés sur les conditions essentielles à la réussite de l’intégration. Goupil et Boutin (1983), cité par Debeurme et Nootens (2004), classent ces conditions en deux grandes catégories, néanmoins très liées dans les faits : l’organisation de l’environnement scolaire (la classe et l’école), et les acteurs de l’intégration.

Sous organisation de l’environnement scolaire, Doré et al. (1996), cité par Debeurme et Nootens (2004) soulignent que l’adaptation des programmes en vigueur voire l’élaboration de programmes particuliers, également l’adaptation du matériel utilisé en classe et des méthodes d’enseignement permettant une meilleure participation de l’élève en difficultés sont autant d’éléments essentiels à la réussite de l’intégration.

Pour Parent et al. (1993), cité par les mêmes auteures (2004), la deuxième catégorie comprenant les actrices et acteurs de l’intégration est composée des enseignant-e-s et d’autres spécialistes, ainsi que de la direction jouant « un rôle primordial dans la maximisation des effets positifs de l’intégration » (p. 48).

Pour ces chercheurs comme pour d’autres, une intégration bien pensée est vouée à l’échec sans ces ressources humaines. C’est à eux donc qu’il revient de soutenir aussi bien l’élève intégré que le responsable de la classe intégrante.

L’intégration d’élèves à besoins particuliers demande aux milieux scolaires, en particulier aux enseignant-e-s des classes intégratives, d’apporter des changements parfois significatifs dans leurs pratiques quotidiennes.

Ces modifications contraintes par le caractère nouveau de l’intégration scolaire pourraient, chez certaines personnes, générer des phénomènes de résistance au changement importants, dont les conséquences

pourraient être douloureuses pour tous les acteurs. Aussi, connaître les réactions éventuelles des enseignant-e-s s’avère être utile, non pas dans une perspective de jugement, mais afin de les préparer à leurs nouveaux rôles, de les accompagner voire de les sortir de leur isolement. Dans cette perspective, la formation initiale et continue du personnel éducatif s’avère une nouvelle fois indispensable.

4.3.4. F ORMATION LIÉE À L ’ ATTITUDE DE L ’ ENSEIGNANTE ET DE L ’ ENSEIGNANT

A l’instar des chercheuses déjà évoquées ci-dessus, d’autres encore insistent sur l’importance de l’attitude de l’enseignant-e en tant que condition essentielle à la réussite de l’intégration ou de l’inclusion des élèves en situation de handicap ; cette attitude « dépend elle-même des conditions dans lesquelles l’enseignant est amené à la réaliser » (Debeurme & Nootens, 2004, p. 42). Pour Doré et al. (1996) cité par Debeurme et Nootens, l’attitude serait une « prédisposition ou un état mental qui incite un individu à réagir de façon favorable ou pas, à un autre individu ou à une situation » (p. 48). Doré et al. notent toutefois que peu de chercheurs ayant traité de la thématique de l’intégration ont clairement défini ce terme.

Néanmoins, Shapiro (1999) cité par Bélanger (2004) précise que l’attitude possède trois composantes reliées entre elles : une composante émotive caractérisée par la présence de sentiments positifs ou négatifs, une composante cognitive liée aux croyances, enfin une composante comportementale caractérisée par les agissements de l’individu. Aussi l’attitude de l’enseignant guiderait-elle ses comportements et ses actions dans sa pratique et « influencerait même l’efficacité de son enseignement en milieu hétérogène » (Stanovich & Jordan, 1998, cité par Debeurme & Nootens, 2004, p. 48).