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CHAPITRE 1 : PROBLÉMATIQUE DE RECHERCHE

1.7 Modèle d’analyse intégré

1.7.2 Instances décisionnelles

1.7.2.1 Conseil d’administration/Actionnaires/Investisseurs

L’autorité du conseil d’administration est grande au sein de la plupart des entreprises, car selon la loi, il est la plus haute autorité d’une entreprise (Bergeron, 2006 : 213). En comité les membres « […] participent à la révision des priorités, de la mission, des objectifs et des plans stratégiques de l’entreprise, puis ils sont appelés à les approuver.

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[…] ils assurent la concordance entre les attentes des actionnaires, les plans de l’entreprise et le rendement » (Thain et Leighton, 1992 : 29). C’est pourquoi la qualité des membres composant le comité d’administration (et la tête dirigeante) est primordiale pour la pérennité de l’entreprise. En somme, la firme est généralement dépendante du sens des affaires et de la pertinence des dirigeants qui mettent en place la planification stratégique. Celle-ci peut se définir comme « le processus de choix qui fixe les grandes orientations, la trajectoire à suivre et les moyens à allouer pour prendre un avantage décisif sur la concurrence […] » (Gervais et Herriau, 2011 : 18).

Toutefois, l’élément le plus intéressant pour la partie syndicale dans le cadre d’un conflit de travail est la composition de ce conseil d’administration. En effet, les membres ont souvent des activités autres que leur poste au sein du conseil. Par exemple, un membre peut être le dirigeant d’une autre firme qui a ses propres sources de dépendance et celles- ci peuvent être complètement différentes de celles de l’employeur (Juravich, 2007 : 29). Ces composantes peuvent donc être, elles aussi, utilisées par la partie syndicale lors de la mise en place de ses moyens de pression. C’est pourquoi il est pertinent pour les syndicats de chercher à recueillir le maximum d’informations sur les membres du conseil, les entreprises auxquelles ils sont liés et l’importance de celles-ci (autant en elles-mêmes que pour l’employeur ciblé), etc. Ce processus est le même dans le cas d’une entreprise où il n’y a pas de comité. En somme, tout comme avec les membres de la direction, l’analyse du conseil d’administration permet de trouver de possibles points de vulnérabilité des membres et d’accumuler des renseignements pouvant être utiles au cours d’un conflit de travail.

Le potentiel de dépendance est le même en ce qui concerne les actionnaires/investisseurs puisque ceux-ci recherchent un bénéfice en retour de l’investissement injecté. Ainsi, plus la firme est en croissance et offre des possibilités de profits, plus il est aisé de trouver des gens intéressés à investir ou à acheter des actions (donc plusieurs solutions de rechange pour l’employeur). Le contraire est aussi vrai et c’est pourquoi l’entreprise se doit de toujours chercher à progresser si elle ne veut pas prendre le risque d’irriter les actionnaires et les investisseurs. L’importance de la dépendance se modifie selon la position dans laquelle se trouve l’entreprise. Lorsqu’elle est dans une situation nécessitant

45 des fonds supplémentaires, l’impact de la dépendance fluctue selon la nécessité d’obtenir rapidement ces fonds. Toutefois, cette même dépendance diminuera fortement lorsque ces fonds seront trouvés.

Cependant, comme expliquée précédemment, la venue d’actionnaires/investisseurs amène aussi une obligation de résultat envers ceux-ci. Cette obligation touche autant les aspects financiers que décisionnels par l’importance des votes des actionnaires (même lorsque la majorité des votes est détenue par un actionnaire majoritaire). À ce sujet,

Industrie Canada rappelle :

Aux termes de la LCSA (Loi canadienne sur les sociétés par actions), en l’absence d’une convention des actionnaires, le conseil d’administration contrôle la gestion de la société. Puisque les administrateurs sont élus par les actionnaires au moyen d’une résolution ordinaire, si l’un des actionnaires détient plus de 50 pour cent des droits de vote, il peut décider à lui seul des personnes qui siégeront au conseil. Dans une petite société, les actionnaires minoritaires (ceux détenant moins de 50 pour cent des actions de la société) ne se sentiront peut-être pas bien représentés par un conseil d’administration élu par un actionnaire majoritaire. Afin de mieux protéger leur investissement dans la société, il pourrait donc leur paraître judicieux de négocier une convention des actionnaires (En ligne).

Concernant la nature d’une convention des actionnaires, elle est définie comme : Une entente conclue par quelques actionnaires ou tous les actionnaires d’une société. La convention doit être écrite et doit être signée par les actionnaires qui y adhèrent. […] La LCSA permet aux actionnaires de conclure des accords écrits qui limitent les pouvoirs des administrateurs à gérer ou à surveiller en entier ou en partie la gestion de la société. Toutefois, si les actionnaires endossent les mêmes droits, pouvoirs et tâches que les administrateurs, ils endossent aussi les mêmes responsabilités (Industrie Canada : En ligne).

C’est pourquoi il existe toujours une dépendance de l’entreprise envers ses actionnaires/investisseurs, mais celle-ci devient de moindre importance lorsque la situation économique de l’entreprise est positive et en accord avec les prévisions budgétaires. Toutefois, un conflit de travail de longue durée pourra refroidir la venue d’investisseurs ou encourager les actionnaires à vendre des actions afin de diminuer les risques de perte. Si cette situation se produit, la valeur marchande de l’organisation se

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retrouvera en descente, ce qui pourra engendrer un impact sur la majorité des éléments formant l’employeur selon Juravich.

En somme, pour ces trois composantes, la dimension de la dépendance qui sera sollicitée lors d’un conflit de travail sera particulièrement celle de l’engagement de l’employeur. Comme expliqué plus tôt, si la partie syndicale commence à s’intéresser et exercer de la pression sur les entreprises et autres obligations des membres du conseil d’administration, ceux-ci devront réfléchir à leur engagement envers l’employeur. En effet, ils devront s’interroger sur ce qui est le plus profitable pour eux entre l’entreprise et leurs activités connexes. Ce choix sera lié directement avec leur positionnement en cas de conflit de travail.

Le même processus de réflexion vaut pour les actionnaires et les investisseurs. En effet, l’entreprise dépend de la présence des investisseurs et des actionnaires pour le financement de l’entreprise, d’où un engagement de l’employeur envers cette tierce partie. Les actionnaires et autres investisseurs ont un impact sur la valeur de l’entreprise, car si, par exemple, ils venaient à vendre leurs titres en même temps (dans le cas des actionnaires) ou à cesser leurs investissements (pour les investisseurs), la valeur des actions chutera ce qui diminuera les fonds de l’employeur. Ainsi, en cas de conflit de travail, ceux-ci devront décider ce qui est profitable entre rester liés économiquement à l’entreprise ou se retirer (que ce soit par la vente d’actions ou en cessant d’investir dans l’organisation). En somme, le comportement de la partie syndicale a un impact sur ces composantes et c’est ainsi qu’elle peut exploiter le lien de dépendance entre l’entreprise et ce tiers. Le niveau d’engagement de l’employeur est important, car les personnes ayant investi depuis longtemps dans l’organisation seront plus susceptibles de rester engagées avec l’employeur en dépit du comportement de la partie syndicale. Les investisseurs et actionnaires récents, quant à eux, auront une tendance plus volatile et il y a risque plus élevé qu’ils placent leurs fonds ailleurs plus rapidement.