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Conclusions et recommandations du groupe de travail

Pb i : représente la probabilité qu’un exploitant ait utilisé la molécule par année où il a cultivé la vigne pendant la

8 Conclusions et recommandations du groupe de travail

8.1 Conclusions

La question des expositions aux pesticides est centrale dans la compréhension des effets de santé que ces substances sont susceptibles d’entraîner dans les populations humaines, ainsi que dans leur prévention. D’ores et déjà, un faisceau suffisant d’informations existe et invite à prendre des mesures pour réduire les expositions professionnelles aux pesticides dans l’agriculture et à poursuivre les travaux permettant d’approfondir l’évaluation des risques et d’améliorer la prévention. Analyser et mener des actions sur les expositions agricoles aux pesticides nécessite des efforts spécifiques que les travaux menés par le groupe de travail ont permis de préciser. Une première difficulté est rencontrée pour définir et dénombrer avec précision les populations concernées par ces expositions. Des termes aussi simples que « agriculteur » ou « travailleur agricole » recouvrent des populations très différentes en fonction des contextes dans lesquels ils sont utilisés, ce qui peut conduire à des erreurs d’analyse, des malentendus dans le débat social voire des conflits. La notion d’exposition, quant à elle, est au carrefour de plusieurs disciplines aux approches complémentaires mais dont les savoirs d’experts restent fragmentés et le plus souvent cloisonnés.

L’exploration de la littérature scientifique dans le domaine des expositions aux pesticides agricoles a montré la nécessité de renforcer les travaux sur ce thème en France et ceci quelle que soit la discipline. Les quelques études menées depuis les années 2000 dans le cadre de la recherche publique concernent des données métrologiques et ergonomiques de terrain (Tableau de synthèse en section 3 du volume central de ce rapport). Cependant, bon nombre de systèmes de production n’ont fait l’objet d’aucune enquête identifiable dans la littérature (arboriculture, horticulture, maraîchage, élevage…), de même que certaines tâches ou circonstances d’exposition (traitement des bâtiments des exploitations, contact avec des animaux traités). La veille de ces données d’exposition elle-même, notamment à l’échelle internationale, n’est pas organisée et ne facilite pas une approche globale du domaine.

Les difficultés d’accès à l’information pourraient faire croire à l’absence de problème et induire un sentiment de sécurité. Mais elles traduisent avant tout des obstacles dans la mise en œuvre des études, l’absence de cadre institutionnel ou de support de recherche pour un recueil systématique ou ciblé de ces données d’exposition. Certains dispositifs, tels que l’enquête SUMER, le réseau Phyt’attitude, fournissent de manière indirecte quelques éclairages sur les expositions aux pesticides mais peu d’informations sont réellement utilisables dans une optique d’analyse des déterminants ou de prévention. Certaines sources de données statistiques (telles les enquêtes sur les pratiques culturales) permettraient de progresser dans le recensement des situations d’exposition mais elles sont peu valorisées pour ce type d’objectif et d’un accès difficile.

Les auditions menées dans le cadre de ce travail ont confirmé la fragmentation des données disponibles, les difficultés pratiques rencontrées par les acteurs de terrain, ainsi que les écarts entre les pratiques et les préconisations. Les acteurs de terrain paraissent ainsi isolés. Ils ne disposent pas d’un dispositif de conseil intégré prenant en compte la totalité du risque chimique au niveau de l’exploitation. Pourtant le besoin est exprimé de plateformes de connaissances partagées, permettant de disposer d’informations et de supports techniques validés, régulièrement mis à jour et accessibles à l’ensemble des usagers. Les difficultés d’accès à des informations claires et centralisées transfèrent la responsabilité de rechercher et synthétiser un ensemble d’informations fragmentées vers les utilisateurs finaux, de ce fait rendus responsables des problèmes que ces expositions pourraient ultérieurement créer.

Le travail pluridisciplinaire engagé par le groupe de travail a permis : 1) une clarification conceptuelle des notions utilisées dans la question des expositions aux pesticides agricoles, 2) un inventaire des données existantes dans le contexte français, 3) une réflexion approfondie sur les différentes actions (impliquant agronomes, médecins du travail, conseillers) qui pourraient être articulées pour améliorer l’analyse et la prévention des expositions, 4) des avancées méthodologiques en matière de revue interdisciplinaire de la littérature pouvant déboucher sur une première base de connaissances partagée entre acteurs concernés par l’exposition aux pesticides des personnes travaillant dans l’agriculture.

8.2 Recommandations

Plusieurs travaux d’expertise collective menés ces dernières années, tels que ceux de l’INSERM (2013) ou de l’EFSA (Ntzani et al., 2013), concluent à des relations entre la survenue de maladies chroniques (cancers, maladies neurologiques, troubles de la croissance et de la reproduction…) et l’exposition professionnelle aux pesticides agricoles, sur la base de données épidémiologiques, toxicologiques et mécanistiques disponibles. Ces mêmes travaux soulignent la difficulté de caractériser avec précision l’exposition des individus tout au long de leur vie ou à des périodes données, en particulier pour des substances actives spécifiques. Malgré la réglementation, dont les exigences se sont accrues au cours des dernières décennies (notamment suite aux directives et règlements européens de 2009 sur les pesticides), la question des risques aigus et chroniques pour la santé des populations humaines demeure donc importante pour la santé publique. La réalité de ces expositions est peu contestée. Elle est notamment documentée par certaines études de terrain visant à mesurer les quantités de pesticides présentes sur la peau des travailleurs, dans l’air qu’ils inhalent ou dans les matrices biologiques (plasma, urines) à la suite de tâches exposantes. C’est pourquoi, bien que les données sur ces expositions restent aujourd’hui fragmentaires et nécessitent d’être consolidées de manière à établir avec plus de justesse les liens avec la santé, les travaux conduits par le GT l’amènent à proposer des recommandations en vue d’améliorer les procédures d'évaluation des risques et, d’ores et déjà, à prendre des mesures pour réduire l’exposition aux pesticides des personnes travaillant en agriculture.

Plusieurs des recommandations qui suivent visent à faciliter la mise en œuvre d'interventions collectives notamment en ayant des modalités d'évaluation des risques mieux documentées, les plus transparentes possible, qui permettent de construire des diagnostics partagés entre acteurs. Toutefois, il ne nous appartenait pas de décider de la forme institutionnelle précise de ces dispositifs. Ce faisant, nous n'avons pas traité de façon séparée les DROM-COM, bien que ceux-ci fassent l'objet de nombreuses spécificités concernant les filières de production, les pratiques et l’organisation institutionnelle (notamment pour les dispositifs de prévention).

Conformément à l’autosaisine à laquelle le groupe de travail a répondu, les recommandations qui suivent concernent spécifiquement les expositions professionnelles en agriculture. Il convient néanmoins de noter qu’en plus d’être un milieu de travail, l'exploitation agricole est souvent un milieu de vie qui implique l’exposition potentielle aux pesticides de tous les membres de la famille. Par ailleurs, d’autres secteurs professionnels sont soumis à des expositions aux pesticides. Des réflexions sur les caractéristiques et spécificités des expositions dans ces autres populations seraient également nécessaires dans un objectif de connaissance et de prévention mais n’ont pas été menées dans le cadre de ce travail.

Cette expertise n’a pas traité non plus des expositions de la population générale aux pesticides agricoles, notamment par le biais de la consommation de résidus dans l’eau de boisson ou les aliments ou encore par diffusion des pesticides à proximité des zones traitées. La réduction de ces autres types d’expositions nécessiterait des recherches complémentaires même si la portée de plusieurs des thèmes abordés ici dépasse la question des seules expositions professionnelles. Enfin, l’analyse par le groupe de travail ne visait pas à caractériser les expositions à l’échelle des substances actives ou des familles de pesticides. Il s’agissait d’envisager la question de manière globale, d’un point de vue pluridisciplinaire. Aussi, les constats et recommandations qui suivent ont

une portée générale et n’envisagent pas les cas particuliers de certaines substances ou circonstances spécifiques d’exposition si ce n’est à titre d’illustration.

Les recommandations du groupe, dont certaines sont détaillées dans le corps du rapport, ne sont pas hiérarchisées et concernent huit grands domaines : la réduction de l’usage des pesticides, la production de données d’exposition, l’accessibilité et la capitalisation des informations disponibles, l’environnement technique des expositions, le conseil, la formation, les procédures de mise sur le marché et la complexité réglementaires.

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