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Aller au-delà des apparences

Pb i : représente la probabilité qu’un exploitant ait utilisé la molécule par année où il a cultivé la vigne pendant la

4.3 Extrapolation des constats : les enseignements des études de cas

4.3.4 Aller au-delà des apparences

Pour finir, le GT voudrait souligner que les deux études de cas invitent à la prudence dans tout travail d’extrapolation. Dans tout un ensemble de situations, le travail d’extrapolation peut être nécessaire et utile. Cependant, pour qu’il ne conduise pas à des simplifications trop importantes, à des représentations erronées de la réalité, et éventuellement à des décisions qui pourraient rendre invisibles ou favoriser des expositions, il est nécessaire que ce travail d’extrapolation ne soit fait qu’après s’être assuré que les données disponibles sont suffisantes et représentatives des situations auxquelles on souhaite étendre les constats. Cette remarque vaut particulièrement pour les extrapolations réalisées dans le cadre de dispositifs visant à informer ou mettre en œuvre des politiques publiques. Par exemple, l’étude de cas sur la réentrée en arboriculture conclut qu’il existe peu de données d’expologie dans la littérature scientifique. Ainsi, le déterminant principalement documenté est celui des résidus foliaires délogeables, et leur dissipation dans le temps et de nombreuses tâches de réentrée n’ont pas été observées. On peut légitimement s’interroger sur la pertinence de l’extrapolation des données existantes, notamment dans le processus d’homologation, face à la multitude des situations potentielles. Les investigations conduites dans ces études invitent enfin à la prudence vis-à-vis de certaines pratiques (comme la construction de généralités à partir des dires d’un petit nombre d’experts et/ou d’un nombre limité d’observations ou le non-examen attentif d’idées reçues qui circulent et qui peuvent de prime abord apparaitre comme logiques) qui rendent invisibles certaines expositions, certains de leurs déterminants ou des éléments nécessaires à l’estimation de leur importance. Nos investigations ont ainsi mis en évidence des lacunes, parfois importantes, dans les travaux ou les prescriptions existantes ou des erreurs (par exemple sur les périmètres des populations concernées, sur les tâches exposantes, sur les protections effectivement apportées par les équipements de protection).

4.4 Conclusion

Bien que les travaux menés en France semblent de première importance pour apprécier l’exposition des personnes travaillant dans l’agriculture française, force est de constater que la grande majorité des études disponibles sur le sujet a été générée aux États-Unis et dans une moindre mesure, dans quelques pays européens. La recherche des études épidémiologiques, métrologiques et ergonomiques disponibles à l’échelle internationale, réalisée à l’aide des bases de données Pubmed et Scopus, démontre que les algorithmes sont difficiles à concevoir et qu’ils peuvent conduire à l’identification d’un grand nombre de documents, dont tous ne sont pas pertinents. Ceci pose la question des moyens à mettre en œuvre pour réaliser ces revues et, le cas échéant, des activités de veille qui permettraient d’assurer la mise à jour des connaissances. Dans le domaine spécifique de l’épidémiologie, une approche exploratoire par analyse de résumés pour la littérature internationale, et s’appuyant sur des éléments issus de deux travaux d’expertise collective (INSERM, 2013; Ntzani et al., 2013), a été réalisée pour identifier les principales approches mises en œuvre en matière d’estimation de l’exposition aux pesticides à l’échelon international. En parcourant les résumés de la littérature internationale sur le sujet, il semble que les limites existant dans la littérature en France soient également présentes dans d’autres contextes. En effet, l’objectif premier des études épidémiologiques, quel que soit le pays, est de parvenir à classer au mieux les personnes comme « exposées » ou « non exposées » pour déterminer des risques de maladie. Cette démarche vis-à-vis de l’exposition, même rudimentaire, a effectivement pu suffire pour mettre en évidence des effets de santé. En revanche, pour une recherche de relation dose-effet et la mise en évidence du rôle de substances spécifiques, les études doivent mettre en œuvre des approches plus élaborées. Il apparaît à la lecture des résumés que ces approches n’ont pas nécessairement été les mêmes en fonction des pays, des populations concernées ou encore des effets de santé regardés, sans que l’une ou l’autre de ces approches puisse aujourd’hui être considérée comme une « référence » ou « gold standard ». Ainsi il semble important que les méthodes proposées en France ou à l’étranger pour mesurer les expositions dans les études épidémiologiques puissent être comparées et confrontées. Ces deux expertises ont permis d’identifier plusieurs limites, souvent méthodologiques, pouvant avoir un impact sur la faisabilité de l’extrapolation depuis des données portant sur d’autres pays que la France. Par exemple, les cohortes historiques répertoriées dans l’expertise Inserm n’étaient pas toujours en mesure de distinguer les utilisateurs réels des non utilisateurs, et ne disposaient généralement de données ni sur la nature des pesticides et leurs circonstances d’utilisation ni sur les habitudes de vie ou d’autres facteurs de confusion potentiels. Les cohortes cas-témoins et prospectives soulevaient quant à elles de grandes variabilités dans les outils d’évaluation et des imprécisions sur de nombreuses variables en lien avec la description des activités. D’autres limites en lien avec la période prise en compte par l’ESFA ou en termes de pathologies exclues par l’Inserm, ont justifié une recherche exploratoire afin d’envisager l’extrapolation des constats établis sur la revue de la littérature épidémiologique réalisée en France à la littérature internationale. Une recherche exploratoire a aussi été menée afin de discuter l’extrapolation de la revue de la littérature métrologique réalisée sur la France à la littérature internationale. Les informations générées ont permis de faire certains constats. Par exemple, un nombre limité d’articles rapporte des données d’exposition originales et peu d’entre eux documentent les déterminants de l’exposition. Certaines filières agricoles paraissent moins documentées que d’autres. Les données existantes concernent majoritairement l’exposition des opérateurs lors des activités de traitement et on retrouve peu de descriptions exhaustives des déterminants des expositions et d’analyses critiques de ces déterminants.

Si plusieurs enseignements utiles peuvent être tirés des études de cas, il demeure que, pour l’ensemble, la question de l’extrapolation des informations tirées de la littérature internationale à la situation française requiert une grande prudence. D’une part, les spécificités des situations de travail et des pratiques d’utilisation des pesticides ainsi que les contextes économiques et sociaux

plutôt limité d’études pour certaines situations ou problématiques spécifiques et les incertitudes associées limitent la capacité d’étendre la plupart des conclusions. Cependant, l’analyse des difficultés que posent l’extrapolation des travaux réalisés dans certains espaces géographiques, à certaines époques, et pour certains cultures à d’autres espaces, d’autres périodes ou d’autres cultures, aide à préciser les limites des connaissances disponibles et permet de proposer des pistes d’action pour la recherche dans le contexte de la France. Les études de cas confirment ainsi la nécessité de produire davantage de connaissances sur les expositions professionnelles aux pesticides en agriculture, en situation réelle, dans le contexte français.

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