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Conclusion partie B : « Trop de label tue le label »

L’alimentation est un bien « sacré/nécessaire/indispensable » pour les individus, impactant leur santé et leurs conditions de vie. Les produits agricoles ont donc une « valeur » particulière comparativement aux autres produits. De ce fait, ils font l’objet d’une attention spécifique qui se traduit notamment par un renforcement des attentes (distribution, consommateurs, institutions).

L’émergence de référentiels, labels, certifications, étaient censés « ré-assurer » les filières, garantir la qualité des produits, promouvoir des comportements vertueux socialement et écologiquement. Or il apparaît que leur diversité, leur organisation et leur contenu sont source de confusion et de remise en cause. Bien qu’ils favorisent une plus grande transparence quant aux règles appliquées, ils ne permettent pas réellement de considérer la contribution de l’ensemble des acteurs de la chaîne de production au processus de développement durable. En effet, l’attention est portée essentiellement sur le producteur et non sur l’organisation de la filière (répartition de la valeur ajoutée, dépendance). Elle est également portée sur celui qui détient le label et non pas sur le reste de la communauté (déséquilibres, inégalités). Elle est enfin portée sur un acteur en particulier et non pas sur un système (approche statique).

CONCLUSION CHAPITRE 2 : DES FILIERES ETUDIEES, ENCADREES, CERTIFIEES, MAIS FINALEMENT QUELLE « SOUTENABILITE » ?

Les filières agricoles revêtent une importance particulière au regard des enjeux dont elles sont porteuses, à la fois en termes de bien-être des populations ainsi que de qualité des écosystèmes. Elles font face à des défis majeurs.

D’une part, du fait du rapport particulier des populations vis-à-vis des produits agricoles, ces derniers sont l’objet d’une attention et d’une exigence sociétale croissante quant à leur qualité, qu’elle soit gustative, sanitaire, mais aussi environnementale et sociale. L’accroissement des instruments de régulation conditionne dorénavant l’accès aux marchés et impose de présenter certains critères de développement durable.

D’autre part, puisqu’elles vont devoir nourrir une population de plus en plus importante, ce qui va impliquer une intensification des cultures, s’accompagnant nécessairement d’un accroissement de ressources (eau, énergie, bois) et d’émissions en tout genre. L’enjeu est de pouvoir concevoir des systèmes innovants afin de réaliser ces objectifs tout en tenant compte des contraintes existantes.

Il existe un très grand nombre de référentiels (privés ou institutionnels) ayant pour ambition d’évaluer la qualité des systèmes agricoles et de réorienter les pratiques et les marchés vers des produits plus « durables ». Mais aucun ne parvient à saisir réellement la complexité multidimensionnelle de ces filières. Parce que les enjeux sont importants et parce que la société le réclame, il convient de pouvoir évaluer de façon plus fiable les impacts de ces filières.

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UNE EVALUATION MULTICRITERE DES IMPACTS

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e par le contexte actuel de crise écologique et sociale, de nombreux acteurs sociaux, les gouvernements et une multitude d'entreprises privées demandent de l'aide pour réorienter leurs activités dans une direction durable (Missimer et al. 2010). Ils accordent un intérêt croissant à l’évaluation sociale et environnementale des activités humaines (cf. Chapitre 1) car les méthodes d’évaluation jouent un rôle majeur dans cette réorientation des activités humaines. Elles agissent en aidant à résoudre les problèmes, ou par la prise de conscience et l’apport de nouveaux éclairages, qui permettent de poser différemment les problèmes.

Il existe une grande diversité de méthodes, avec des champs d’application et des outils différents selon l’objectif recherché. Si l'accent est mis sur un projet ou une action, on peut utiliser l’évaluation d’impact (environnemental and social impact assessment) ou la méthode des effets en économie. Si l’on s’intéresse aux organisations, on peut appliquer des outils relevant de l’empreinte sociale (audit social) et environnementale (Bilan Carbone®). Pour les collectivités, on peut appliquer des méthodes telles que la recherche-action participative (RAP) ou des groupes de discussion (focus group). L'approche impliquant des produits ou des services est appelée Analyse du Cycle de Vie (ACV) (Macombe et al. 2013).

L’ACV consiste à évaluer les impacts d’un produit et/ou d’un service tout au long de son cycle de vie, depuis la production des matières premières jusqu’au traitement en fin de vie. C’est une approche « du berceau à la tombe » (« craddle to grave »). Elle se veut être un outil d’aide à la décision dans une perspective de complexité croissante des chaînes de production (mondialisation, technologie, etc.).

Dans ce chapitre il s’agit de faire état de la littérature ayant adopté une logique cycle de vie mais dont la portée s’avère moins étendue que celle de l’ACV.

Dans un premier temps, il convient donc de présenter ces travaux précurseurs tels que l’analyse filière et les écobilans énergétiques, qui adoptent le même principe mais qui s’avèrent insuffisants pour caractériser un produit dans toutes ses dimensions (A).

L’ACV s’étant imposée progressivement comme méthode de référence pour l’évaluation des impacts environnementaux, de par sa capacité à appréhender les phénomènes complexes, en proposant une analyse multicritère et globale, cette méthode est présentée dans un second temps (B).

A. DES TRAVAUX PRECURSEURS

Que ce soit par rapport à la problématique de globalisation des chaînes de production, ou celle des préoccupations environnementales, les scientifiques ont cherché à appréhender ces processus de production de façon globale à la fois en science de gestion et sciences économiques, et en sciences environnementales, afin d’avoir une représentation de ces évolutions en termes de création et de répartition de richesses, de coûts de production, d’organisation et de rapport d’influence, ou encore de contribution aux externalités environnementales. L’objectif est d’identifier les goulets d’étranglement ou les points critiques ainsi que les marges de progrès.

En sciences économiques et en sciences de gestion, les approches reposent sur le concept de filière (A.1), en sciences environnementales, les approches font appel à la notion d’écobilan (A.2).