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Les concepts de base pour la maîtrise des projets

La performance des projets pour une organisation

1.2 Les concepts de base pour la maîtrise des projets

Les concepts de base du management des projets d’ingénierie sont utilisés depuis longtemps: spécifications, attribution de responsabilités pour la décision et mise en œuvre, listes des tâches, budget prévisionnel, détermination des techniques et métiers utiles aux projets, planification de la réalisation. Toutefois, Pendant longtemps, il s’agit plus de « pratiques existantes dans un contexte donné que de concepts reconnus liés à un domaine de management » (Garel, 2003b).

- Etablissement de spécifications : Les spécifications sont la description des attentes concernant le résultat du projet. Le maître d’ouvrage des cathédrales du moyen âge finançait des projets dont il avait approuvé la maquette, et payait au fur et à mesure de la réalisation. Boyer (2001) décrit les spécifications fonctionnelles du fort de la Salette à Briançon : « Une « apostille » du chef du Génie d’Embrun datée du 28 mars 1840, fixe quatre objectifs pour l’ouvrage

à construire sur l’emplacement de la redoute de Berwick en 1711 : - Neutraliser la crête Nord-Est qui domine l’ouvrage à 300m, - Interdire le passage de la route d’Italie,

- Commander « le terrain d’attaque du Fort Dauphin, attendu que ce fort devra être pris avant la redoute des Salettes, lorsque celle-ci aura été convenablement organisée. » ;

- Le doter d’une forte défense rapprochée « étant entendu qu’elle obligerait l’ennemi à s’emparer de l’ouvrage avant de pouvoir entreprendre le siège de Briançon ».

- Attribution de responsabilités pour la décision et la mise en œuvre : Il convient de déterminer qui a la responsabilité de décider un projet et de mettre en place les compétences pour le mettre en œuvre ou surveiller sa mise en œuvre.

La codification des métiers de maître d’œuvre et de maître d’ouvrage au Moyen Age en une illustration. Voici un autre exemple concernant la conception des fortifications de Briançon pendant la monarchie de Juillet.

« Dans les Alpes, le Service du Génie au XIXième siècle était articulé en deux échelons :

- la direction du Génie d’Embrun, organe de décision sous l’autorité d’un colonel qui établissait les lignes directrices des projets, décidait des études et des ouvertures de chantier.

- la Chefferie du Génie de Briançon, organe de décision sous l’autorité d’un commandant « Chef du Génie » d’où le nom de chefferie, doté des moyens importants. Plusieurs capitaines sont chargés d’établir les projets et de dresser les plans des ouvrages, véritables « architectes concepteurs » en même temps que « conducteurs de travaux ». (Boyer, 2001)

- Maîtrise et transmission des techniques et métiers utiles aux projets Pour les projets de grandes envergures, des métiers sont définis et la formation des personnes exerçant ses métiers est vérifiée.

Garel (2003b) indique que « le bâtisseur de cathédrales, quant à eux, s’organisent très tôt en professionnels du projet.

Les loges qui tiennent autour du chantier servent à transmettre à la fois les valeurs des métiers entre maîtres, compagnons, apprentis mais aussi les techniques de réalisation des ouvrages. » Les recherches archéologiques

montrent que les bâtisseurs des temples de l’ancienne Egypte étaient aussi organisés en métiers.

- Listes des tâches: La méthode pour établir des devis ou organiser les travaux est identique dans le temps. Il convient de déterminer les tâches à réaliser avec la précision jugée nécessaire.

Certains des devis établis pour la construction du château de Versailles sont conservés, ils vont dans le détail des activités. La forme moderne de la liste des tâches est l’organigramme des tâches

- Budget prévisionnel : Avant d’engager un projet, il convient de vérifier que les fonds nécessaires à sa réalisation seront débloqués, aussi un budget est établi. Le budget est généralement construit à partir de la liste des tâches et leur coût estimé.

- Planification de réalisation. Les étapes de la réalisation sont définies. Le but est à la fois d’organiser le travail, de prévoir les besoins de financement et de vérifier le bon avancement de la réalisation.

Il n’y avait pas de zone de stockage à côté du chantier de construction de l’Empire State Building (1930), le matériel était livré en fur et à mesure qu’il était utilisé sur le chantier, ce qui nécessite une organisation en amont précise et impliquant les fournisseurs.

Ces concepts de bases sont, soit du domaine du management des projets c’est-à-dire des outils, méthodes et techniques utilisés pour décider de réaliser un projet, le caractériser et entreprendre sa réalisation, soit du domaine de la gouvernance de l’organisation pour la détermination des catégories de métiers, de leur place dans la structure hiérarchique ou de l’organisation de la formation du personnel. Les deux champs (management des projets, gouvernance de l’organisation) doivent être abordés pour la recherche de performance des projets.

L’établissement de spécifications, de la liste des tâches, le budget prévisionnel et la planification de la réalisation concernent le management du projet. Ces concepts sont toujours à la base des projets pour lesquels l’objet à réaliser est clairement défini au début du projet. L’arrivée de l’informatique a permis de faciliter les mises à jour et la maîtrise de l’avancement du projet. Morris (1994, page 3) appelle ces concepts de bases « le noyau traditionnel des sujets du

management de projet » (traditionnal core ‘project management’ topic). » Pour Morris, il contient des sujets comme « la planification, la maîtrise des coûts, l’organigramme des tâches, la construction d’équipe »

Le management des projets est complété pas d’autres concepts que Morris qualifie de nouveaux, il cite comme exemples : stratégie, technologie, finance, politique, environnement (Morris, 1994, page 3).

Depuis, les années 1990, il est reconnu, qu’outre l’utilisation de méthodes et d’outils, le chef de projet doit avoir des compétences de relations humaines : communication, leadership, négociation, décryptage des attentes réelles des parties prenantes. Les anglo-saxons parlent des aspects « soft » du management de projet.

1.3 Emergence d’un besoin d’une meilleure maîtrise de la performance des projets

Depuis les années 1970, l’environnement économique des entreprises évolue rapidement. Nous sommes passés d’une production de masse pour des besoins nationaux dans un environnement économique stable dans les années 1950, à une production mondialisée et diversifiée dans un environnement économique instable depuis les années 1980.

Les produits sont commercialisés pendant une période plus courte. Les entreprises doivent évoluer pour s’adapter un contexte toujours changeant, développer des produits plus rapidement, prendre en compte les nouvelles technologies et souvent avoir une production plus diversifiée. Pour gérer tous ces changements, les entreprises sont amenées à réaliser de plus en plus de projets et des projets de plus en plus variés.

Dans un environnement concurrentiel, la réussite de ses projets impacte sur la performance de l’entreprise. Cependant, en 2008, seulement 32% des projets informatiques était terminés dans les délais, le budget et avec les caractéristiques spécifiées. (Standish Group, 2009). Les entreprises ont besoin de méthodes pour mieux maîtriser les projets informatiques. Deux des principaux référentiels du management de projet, le CMMI et le PMBOK étaient dans leurs modèles initiaux destinés à améliorer la maîtrise du développement de logiciel, avant que leur domaine d’application soit étendu à tous les projets.

Les entreprises ont cherché à mieux gérer les interactions entre les projets : sélection d’un projet plutôt qu’un autre, répartition des ressources entre les projets, réutilisation des connaissances acquises sur un projet dans un autre. Dans la base de données COMPENDEX, le pourcentage de publications liées à un mot clé concernant le management multiprojet parmi les publications concernant les projets a été multiplié par 3 au début des années 1990 (Voir annexe A)

Les autres organisations comme les administrations ou les associations sont aussi concernées par l’augmentation du nombre de projets et la performance de leur projet. Bien que ces structures ne soient pas dans un environnement concurrentiel et que la pression économique peut être moindre, elles doivent aussi s’adapter à leur environnement. Par ailleurs, le champ d’application des méthodes de management de projet s’est élargi. Dans les années 1950, les méthodes de management de projet étaient centrées sur la maîtrise des coûts et des délais des projets de grande envergure et se basant sur un cahier des charges du produit attendu précis (Morris, 1994). Aujourd’hui, les entreprises gèrent en projet des activités plus variées parfois ne concernant que quelques personnes. Les changements de structure organisationnelle des entreprises incluant une évolution des pratiques des individus sont maintenant gérés en projets. La manière de définir les attendus du projet n’est plus toujours « de réaliser, dans des coûts et des délais requis, un produit spécifié dans un cahier des charges » : les buts du projet sont plus ou moins clairs, plus ou moins tangibles, la réussite du projet plus ou moins facile à évaluer, la solution à développer par le projet est plus ou moins bien défini au départ, le projet est plus ou moins impacté par son contexte (Crawford & Pollack, 2004). Les questions que se pose dans une direction d’entreprise sont par exemple :

- Quel produit faut-il développer pour augmenter le bénéfice ?

- Comment choisir les projets qui sont réellement utiles à l’entreprise ?

- Comment raccourcir les délais de mise sur le marché pour arriver avant les concurrents ? - Comment réorganiser la production pour diminuer les coûts ?

- Comment mieux anticiper les résultats des projets ? - Comment diminuer le coût de réalisation des projets ?

- Comment donner de la flexibilité aux projets de manière à en faire évoluer le contenu ? - Comment mieux maîtriser les risques ?

Le choix des projets à entreprendre, la mise au point de leur contenu et la maîtrise de leur déroulement sont des préoccupations de nombreuses organisations. Ces préoccupations concernent la stratégie à appliquer aux projets ainsi que la manière de la mettre en œuvre. La finalité recherchée est l’amélioration de la performance de l’organisation Des organisations, comme les administrations, qui sous-traitent la réalisation de leur projet ont eu besoin de critères pour garantir la capacité du sous-traitant à réaliser les projets. Des méthodes à destination des organisations se sont développées principalement depuis une quinzaine d’années sur ce thème. Une étude systématique autour du mot clé « maturity model » entre 1988 et 2006 a permis de déterminer 118 méthodes différentes ayant fait l’objet d’au moins d’une publication (Voir annexe B).

Cependant les discussions entre pairs dans les groupements de professionnels de management de projet (Afitep, Chapitre Ile-de-France du PMI ou Groupe de travail de l’Afnor) permettent de savoir que les structures organisationnelles installées dans le but d’améliorer la performance des projets ne se maintiennent pas toujours dans la durée et parfois même ne donnent pas les résultats escomptés. En particulier, les principaux outils ou méthodes pour la maîtrise des projets par l’organisation demandent une implication très forte de la direction de l’organisation qui n’est pas toujours possible sur le long terme pour des projets à enjeux moyens.

Une nouvelle méthode pour rechercher la performance des projets serait nécessaire plus particulièrement pour les organisations qui mènent des projets internes.

Pour cela, il convient de commencer par un état de l’art des approches pour la performance des projets d’une organisation, de manière à confirmer le besoin et déterminer les problématiques de recherche associées. C’est l’objet de cette partie.

1.4 Périmètre de l’état de l’art de la partie 1

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