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Le commerce équitable dans les marchés publics – Selon l'article 60 de la

Section 2 : Le développement durable réincarné en commerce équitable

A) La responsabilité sociale des entreprises (RSE)

75- Le commerce équitable dans les marchés publics – Selon l'article 60 de la

loi du 2 août 2005398, « le commerce équitable s'inscrit dans la stratégie nationale de

développement durable ». La question se pose alors de savoir si la mention « commerce équitable » peut figurer dans la détermination et la passation des marchés publics. Le « commerce équitable », introduit dans le cahier des charges, dans les conditions d'attribution des marchés publics ou dans les critères de sélection, peut constituer un traitement discriminatoire et rompre le jeu de la libre concurrence. La raison de cette discrimination se trouve dans une situation où, par définition, le commerce équitable sert de critère d'exclusion des pratiques non similaires et constituerait donc un critère de sélection et d'attribution du marché public.

Une affaire a récemment été tranchée par la Cour de Justice de l'Union

Européenne399 sur une requête introduite par la Commission européenne400 contre les

Pays-Bas dans un litige relatif à l'attribution d'un marché public de fourniture et de gestion de machines de thé et café. La plainte porte sur la question de la régularité de l'attribution

394 Loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008, précitée note 372.

395 Art. 8 I, al. 3 de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004 sur les contrats de partenariat (JORF n° 141 du 19 juin 2004, p. 10994).

396 Art. 11 f) de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004, précitée note précédente. 397 Art. 3, al. 1er de l'ordonnance n° 2004-559 du 17 juin 2004, précitée note 395. 398 Loi n° 2005-882 du 2 août 2005, précitée note 361.

d'un marché public de fourniture et de gestion de machines à café et de thé dans la

province de Noord-Holland. Cette province des Pays-Bas401 a publié dans son avis d'un

marché public publié au JOUE du 16 août 2008402 qu'elle recherchait un prestataire

d'installation et de gestion de machines de boisson et utilisant d'avantage des cafés ou thés

issus de l'agriculture biologique ou du commerce équitable403. Cette province néerlandaise

mentionne deux attestations de qualités EKO pour distinguer les produits issus de l'agriculture biologique, et l'attestation Max Havelaar pour distinguer les produits issus du commerce équitable dans le cahier des charges portant sur les spécifications techniques,

substantielles et les conditions d'attribution404. Ainsi la province Noord-Holland prend en

compte pour critères d'attribution du marché des critères sociaux de respect de

l'environnement à la lumière des critères de l'attestation Max Havelaar405. Enfin, la

province Noord-Holland prend en compte des caractères de durablilité et la RSE comme étant des exigences de qualité relatives aux services fournis par des soumissionnaires pour

atteindre l'objectif du marché en question406.

Au regard de l'art. 258 du TFUE et par trois moyens407, la Commission reproche

aux Pays-Bas d'avoir manqué à l'obligation prévue par la directive 2004/18/CE408 d'assurer

l'égalité et la transparence dans la détermination, l'attribution et l'exécution du marché 400 Commission, aff. C-368/10, recours introduit le 22 juillet 2010, Commission contre Pays-Bas, JOUE, n°

C-328, 04 septembre 2010, p. 10-11 ; Commission, communiqué de presse n° IP/10/499 du 5 mai 2010

Marchés publics : la Commission a assigné les Pays-Bas devant la Cour de justice au sujet de l’attribution d’un marché portant sur la fourniture de café dans la province de Noord-Holland, non

publiée, http://europa.eu/rapid/pressReleasesAction.do?

reference=IP/10/499&format=HTML&aged=1&language=FR&guiLanguage=fr. Direction générale du marché intérieur de la Commission européenne, Mise en demeure art. 258 (ex 226) n° 2009/4210 du 5 mai 2010, Province of Noord-Holland — procurement of coffee,

http://ec.europa.eu/eu_law/eulaw/decisions/dec_20100505.htm, consultés le 12 novembre 2011. 401 La Commission européenne emploi le nom « Noord-Holland » en néerlandais qui veut dire «

Hollande-du-Nord » ou « Hollande-Septentrionale ». Cette dernière expression est employée par la CJUE.

402 NL-Haarlem, 2008/S-158 213630, Avis de marché. Fourniture. Café, thé et produits connexes, JOUE, S, 158, 16 août 2008, ci-après l'« avis de marché ».

403 La section II, point 1.5, de cet avis décrivait ce marché : Cf.,CJUE, n° C-368/10, 10 mai 2012, précité note 399, point 15.

404 Cf., J. KOKOTT, aff. C-368/10, opt. cit., note 442, points 26 et s.

405 Sous-chapitre 1.3 du cahier des charges et sous-chapitre 1.4 du cahier des charges : Cf.,CJUE, n° C-368/10, 10 mai 2012, précité note 399, points 19 et 20.

406 Section 4 du sous-chapitre 4.4 du cahier des charges : Cf.,CJUE, n° C-368/10, 10 mai 2012, précité note 399, points 21 et s., spécialement points 24, 26, 27, 28 et 29 ; Cf., J. KOKOTT, aff. C-368/10, opt. cit., note 442, points 127 et s., spécialement point 128 et 141.

407 Cf.,CJUE, n° C-368/10, 10 mai 2012, précité note 399, points 45, 46 et 47.

public organisé par la Province Noord-Holland. En effet, la Commission européenne reproche à la province Noord-Holland, d'abord, d'avoir cité les « labels EKO et Max

Havelaar ou du moins des labels fondés sur des critères comparables ou identiques »409, dans les spécifications techniques, rendant les objets du marché opaques, donc discriminatoires, ce qui est contraire à l'article 23 paragraphes 6 et 8 de la directive

2004/18410. Ensuite, au regard de l'article 44 de la directive 2004/18 la Commission

considère non détaillés les critères de durabilité d'achat et de RSE prévus dans le chapitre intitulé « exigence d'aptitude / nivaux minimaux » du cahier des charges du marché en question, comme les « capacités économiques et financières » de l'article 47 et les « capacités techniques et professionnelles » de l'article 48 paragraphe 1 et 2 de la directive 2004/18. Ces exigences non détaillées sont, selon la Commission, contraires à l'esprit de l'article 2 de la directive 2004/18 prévoyant la transparence et la non-discrimination dans

les marchés publics411. Enfin, la Commission reproche à la province Noord-Holland de se

référer aux marques EKO et Max Havelaar ou du moins à des labels fondés sur les mêmes critères, dans les documents prévoyant les conditions d'attribution du marché sans justifier de leur lien avec les objets du marché en cause, en contradiction à l'esprit de l'article 53 paragraphe 1 de la directive précitée.

Répondant à la requête de la Commission et tout en respectant le principe du

contradictoire, la CJUE a rendu un arrêt le 10 mai 2012412. La CJUE affirme l'application

de la directive précitée à ce marché, qui a une valeur estimée de 760 000 euros et ne dépasse pas le seuil fixé par l'article 7 de la directive 2004/18. La CJUE analyse le premier moyen portant sur la régularité de l'introduction de produits issus de l'agriculture biologique et du commerce équitable dans le marché public, puis le troisième, portant sur la régularité de l'introduction de critères sociaux et environnementaux dans les conditions d'attribution de ce marché public et termine par l'examen du deuxième moyen portant sur la régularité de l'introduction des critères de durabilité et de RSE des soumissionnaires dans les conditions d'attribution du marché.

409 Commission, aff. C-368/10, précitée note 400 . 410 Idem.

411 Idem.

Sur le premier moyen, le recours est étudié à la lumière de l'article 23, paragraphes 6 et 8 de la directive 2004/18 relatifs aux spécifications techniques des produits à fournir. Le premier moyen est divisé en deux branches. La CJUE a consacré la première branche à la question de l'utilisation du « label EKO » dans le cadre des spécifications techniques des produits à fournir. La CJUE affirme qu'« aux termes de l’article 23, paragraphe 3, sous b), de la directive 2004/18, les spécifications techniques peuvent être formulées en terme de performances ou d’exigences fonctionnelles, lesquelles peuvent inclure des

caractéristiques environnementales »413. En partant de la considération commune des

parties au conflit, qui affirment que la marque EKO est un « eco-label », et qu'elle présente donc des caractéristiques environnementales, la Cour qualifie l'exigence de café ou thé comportant un eco-label comme une spécification technique d'un objet du marché en question. En vertu des articles 2 et 23 paragraphes 2 et 3, sous b), et la dernière phrase du vingt-neuvième considérant de la directive 2004/18, les spécifications techniques doivent être suffisamment précises, permettant aux soumissionnaires de déterminer l'objet du marché, d'accéder au marché en question sur un pied d'égalité en libre concurrence, et

permettant aux pouvoirs adjudicateurs d'attribuer le marché414. La Cour précise que c'est à

la lumière de cette considération que l'article 23 paragraphe 6 de la directive 2004/18 doit

être interprété strictement415. En effet, les critères objectifs détaillés d'un éco-label peuvent

être repris ou les spécifications techniques peuvent se référer aux principes figurant dans

le règlement n° 2092/91416 et ses textes modificatifs. Mais la citation d'une marque

reconnue comme un éco-label ne peut valoir qu'à titre de présomption de satisfaction aux

spécifications concernées417. La Cour donne raison à la Commission européenne en

décidant que la citation de la marque EKO, au lieu de déterminer les critères détaillés de l'éco-label dans une spécification technique, rend celle-ci incompatible avec l’article 23, 413 Cf.,CJUE, n° C-368/10, 10 mai 2012, précité note 399, point 61.

414 Ibid., points 62 et 66.

415 Ibid., point 62.

416 Règlement (CEE), n° 2092/91, Conseil, 24 juin 1991, concernant le mode de production biologique de

produits agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires, JOCE, L, 198,

22 juillet 1991, p. 1–15 ; Modifié dernièrement par Règlement (CE), n° 1997/2006, Conseil, 19 décembre 2006, modifiant le règlement (CEE) n° 2092/91 concernant le mode de production biologique de produits

agricoles et sa présentation sur les produits agricoles et les denrées alimentaires , JOCE, L, 379, 28

décembre 2006, p. 1–4 ; Rectifié par JOUE, L, 49, 17 février 2007, p. 34–34. 417 CJUE, n° C-368/10, 10 mai 2012, précité note 399, points 63 et 64.

paragraphe 6, de la directive 2004/18418.

La deuxième branche du premier moyen concerne la question de l'utilisation de la marque Max Havelaar dans le cadre des spécifications techniques relatives au café et au thé à fournir à la lumière de l'article 23 paragraphe 8 de la directive 2004/18. Les Pays-Bas invoquent le fait que le critère de la marque Max Havelaar, mentionnée dans le cahier des charges, constitue des conditions sociales applicables à l’acquisition des produits à fournir dans le cadre de l’exécution du marché litigieux, entrant dans le cadre de la notion

de «conditions d’exécution du marché» au sens de l’article 26 de la directive 2004/18419.

En prenant en compte les critères énumérés dans le cahier des charges de l'avis du marché

en question420, à savoir le fait que le prix payé doive couvrir tous les frais et comprendre

une prime supplémentaire par rapport aux cours du marché, que la production doive faire l’objet d’un préfinancement et que l’importateur doive entretenir des relations commerciales de longue durée avec les producteurs, la Cour considère que ces critères correspondent aux conditions d'acquisition des produits de la marque Max Havelaar par

les soumissionnaires421. La CJUE donne raison aux Pays-Bas et déclare que le respect des

conditions du commerce équitable entre dans les « conditions d'exécution du marché »

relevant donc de l'article 26 de la directive 2004/18422. La CJUE déclare irrecevable la

demande de la Commission européenne sur cette branche puisque la Commission invoque

l'application de l'article 23 paragraphe 8 de la directive 2004/18423.

Sur le troisième moyen relatif à la question de légalité du renvoi aux marques

EKO et Max Havelaar dans les critères d'attribution du marché, la CJUE considère, en se

référant aux conclusions de l'avocat général424, que le service de fourniture de produits

biologiques ou issus du commerce équitable fait partie du marché litigieux425. Par

conséquent, la certification biologique répond à l'intégration de critères environnementaux et l'attestation issue du commerce équitable répond à l'intégration des critères sociaux. La 418 Ibid., point 70. 419 Ibid., point 72. 420 Ibid., point 76. 421 Ibid., point 74. 422 Ibid., point 75. 423 Ibid., points 77 et 78.

424 J. KOKOTT, aff. C-368/10, opt. cit., note 442, point 110.

Cour affirme qu'il y a bel et bien un lien entre ces critères d'attributions et l'objet du marché en question. Néanmoins, la Cour insiste sur l'article 23 paragraphe 3 sous b) de la directive 2004/18 pour rappeler l'exigence de précision suffisante des critères d'attribution du marché en question. En effet, la référence aux marques EKO et Max Havelaar ne comble pas l'absence de précision dans la présentation des critères d'attribution

environnementaux et sociaux du marché litigieux426. Autrement-dit, ces critères doivent

être détaillés objectivement. Ces deux marques ne peuvent que jouer un rôle de présomption de la conformité des produits ou services aux critères précités. La Cour déclare alors bien fondé le troisième moyen de la Commission. Autrement dit, la CJUE déclare que les critères environnementaux et sociaux d'attribution le marché public en question ne sont pas conformes à l'article 53 de la directive 2004/18.

Sur le deuxième moyen relatif à la question de la régularité des critères de la

durabilité d'achat et de la RSE, la province Noord-Holland427 considère que « [la manière

dont le soumissionnaire] rempli[t] des critères de durabilité d'achats et de responsabilité sociale des entreprises, [et] contribue à rendre le marché du café plus durable et à rendre la production de café écologiquement, socialement et économiquement responsable », est intégrée dans les critères d'exécution du marché. La Cour donne tort à cette qualification et écarte l'application de l'article 26 de la directive 2004/18. La Cour adopte l'argument de la Commission et décide que l'intitulé «Exigences d’aptitude/niveaux minimaux» sous lequel ces critères figurent, se trouve dans la quatrième section du sous-chapitre 4.4 du cahier des charges et correspond en fait à la terminologie employée notamment dans le titre et le paragraphe 2 de l’article 44 de la directive 2004/18, paragraphe qui renvoie aux articles 47 et 48 de celle-ci, lesquels sont respectivement intitulés «Capacité économique et financière» et «Capacités techniques et/ou professionnelles». Par conséquent les critères d'achat durable et de la RSE ne sont pas à considérer comme des critères d'exécution du marché mais comme des nivaux minimaux de capacité professionnelle exigés par le

pouvoir adjudicateur au sens de l'article 44 paragraphe 2428. Ces niveaux minimaux

doivent être fixés selon les éléments énumérés dans les articles 47, s'agissant des capacités 426 Ibid., points 93, 94 et 96.

427 Ibid., point 99.

économiques et financières, et 48, s'agissant des capacités techniques et professionnelles.

Or, les exigences d'achat durable et de RSE ne se rattachent à aucun de ces éléments429. La

CJUE décide alors que la province Noord-Holland méconnaît les articles 44 paragraphe 2, 47 et 48 de la directive 2004/18 dans sa détermination des conditions de durabilité d'achat

et de RSE430. Ainsi, en suivant le point 146 des conclusions de l'avocat général, la Cour

considère que ces critères ne présentent pas un « degré de clarté, de précision et d’univocité tel que tout soumissionnaire raisonnablement informé et normalement diligent puisse savoir de manière certaine et complète quels sont les critères que recouvrent ces

exigences », conformément à l'article 2 de la directive 2004/18431.

Le développement durable peut bien faire l'objet d'un marché public. Mais la détermination objective de critère écologiques, économiques et sociaux d'un produit ou d'un service est très difficile à présenter. Ce cas d'espèce montre bien que le pouvoir adjudicateur doit respecter le principe de liberté et d'égalité de la concurrence et le principe de transparence du marché public. Ceux-ci imposent que l'objet du marché, les critères d'exécution, d'attribution ou d'exigence minimale de qualité des soumissionnaires soient énumérés de façon objectivement et suffisamment claire pour permettre aux soumissionnaires raisonnablement informés et normalement diligents de savoir de manière certaine et complète quels sont les critères que recouvrent ces exigences. Une marque ou un label écologique ne peut être mentionné que comme exemple de présomption de conformité d'un produit ou d'un service soumis par un candidat. Une marque en tant que telle ne peut pas être un objet du marché, un critère d'attribution ou un critère d'exécution d'un marché public. Des critères d'exécution d'un marché public mal définis par un pouvoir adjudicateur sont sanctionnés par une requalification par les juges. Les conséquences sont dramatiques puisque, dans l'attribution d'un marché public les critères d'attribution, d'exécution et d'exigence minimale de qualité de soumissionnaires sont normalement liés les uns aux autres ainsi qu'à l'objet du marché. C'est la situation à laquelle conduit le deuxième moyen de l'affaire (Commission contre Pays-Bas) à propos du marché public de la province Noord-Holland. En effet, les critères d'achat durable et de 429 Ibid., point 106.

430 Ibid., point 108.

RSE sont trop mal définis pour qu'ils soient acceptés comme critères d'exécution du marché tout en respectant le principe de développement durable. La CJUE requalifie ces critères comme des niveaux minimaux de capacité professionnelle exigés. Cette requalification a pour effet que la structure d'organisation du marché en question n'est plus cohérente. Par conséquent, le marché public litigieux n'est pas conforme dans son ensemble aux dispositions de la directive 2004/18.

Nous pouvons regretter que cet arrêt de la CJUE du 10 mai 2012 – très attendu – n'ait pas résolu la question que nous nous posons, c'est-à-dire la question de savoir si le commerce équitable peut entrer dans les conditions d'un marché public. En effet, la province Noord-Holland souhaitait intégrer le commerce équitable à côté de l'agriculture biologique dans ce marché public. Paradoxalement, la CJUE a retenu la qualification de l'agriculture biologique comme un objet du marché en question. Ce n'est pas le cas pour le commerce équitable, alors que l'introduction de ces deux concepts dans le marché en

question est faite simultanément432. En effet, la référence aux marques EKO pour

l'agriculture biologique et Max Havelaar pour le commerce équitable est faite au même

point de l'avis et au même chapitre dans les cahiers des charges du marché litigieux433. La

cause de l'absence de la qualification du commerce équitable parmi les objets du marché se trouve dans la prise de position de la province Noord-Holland et dans les critères sociaux de la marque Max Havelaar, énumérés dans le cahier des charges du marché en question. Les Pays-Bas affirment que le critère de la marque Max Havelaar mentionnée dans le cahier des charges constitue des conditions sociales applicables à l’acquisition des produits à fournir dans le cadre de l’exécution du marché litigieux au sens de l’article 26

de la directive 2004/18434. S'appuyant sur les conclusions de l'avocat général, Mme

KOKOTT, la CJUE n'a considéré que l'aspect social du commerce équitable pour

répondre à la requête de la Commission435. En effet, la CJUE considère que les quatre

critères sociaux énumérés dans le cahier des charges436, à savoir que le prix payé doive

couvrir tous les frais, qu'il doive comprendre une prime supplémentaire par rapport aux 432 Ibid., point 53.

433 Idem.

434 Cf., note 111, point 72.

435 J. KOKOTT, aff. C-368/10, opt. cit., note 442, points 78, 79, 80, 84 et s, 110 et 139. 436 CJUE, n° C-368/10, 10 mai 2012, précité note 399, point 76.

cours du marché, que la production doive faire l’objet d’un préfinancement et que l’importateur doive entretenir des relations commerciales de longue durée avec les producteurs, relèvent de la politique d'achat des soumissionnaires et qu'il ne répond pas aux spécifications caractéristiques des produits au sens de l'annexe VI point I sous b) de

la directive 2004/18437. Par conséquent, les critères sociaux, selon l'expression de la cour,

ne font pas l'objet du marché public en question. Selon la CJUE et l'avocat général, les spécifications caractéristiques s'apprécient par rapport aux caractères intrinsèques du produit même. Par ailleurs, nous pouvons constater que la CJUE n'a pas essayé de chercher à savoir si le commerce équitable peut faire l'objet du marché public avant d'écarter la marque Max Havelaar du champ d'application de l'article 23 de la directive 2004/18 comme elle l'a fait pour l'agriculture biologique avec la marque EKO, puisque l'avis du marché en question a bien annoncé que les deux concepts font partie de son objet. La CJUE aurait dû s'investir plus dans sa recherche sur la notion de « commerce équitable » avant de classer ces quatre critères dans les conditions d'exécution du

marché438. Outre des préoccupations sociales, le concept de commerce équitable

comprend des préoccupations économiques et écologiques439. En effet, le commerce

équitable favorise la préservation de l'environnement en limitant l'usage d'engrais chimiques et de pesticides, assure une juste rémunération ou un juste salaire aux petits