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Le choix des lieux

Dans le document Les « captifs » du périurbain ? (Page 144-153)

L’observation de terrain et la constitution d’un corpus

1. Les terrains

1.1. Le choix des lieux

Deux grands secteurs ont été définis, au nord et au sud de l’aire urbaine, là où les études statistiques et cartographiques (AUAT) montrent une dominante des profils socioprofessionnels d’employés et d’ouvriers. Ces espaces voient s’installer majoritairement, depuis déjà de nombreuses années, les franges inférieures des classes moyennes (ouvriers et employés, ainsi que quelques professions intermédiaires) que ce soit le long des axes routiers, dans des bourgs ou des communes plus isolées. Ces deux secteurs couvrant un nombre élevé de communes, nous avons décidé de parcourir l’espace à la recherche de signes capables de nous aider à identifier les ménages recherchés : c'est-à-dire des familles aux revenus modestes.

Pour mieux appréhender la teneur des changements susceptibles d’être intervenus depuis leur installation, il fallait trouver des zones pavillonnaires à l’urbanisation assez ancienne mais localisées au moins à une trentaine de kilomètres de la ville de Toulouse. Nous avons recherché des communes comportant des ensembles pavillonnaires au type architectural banal sans qualité particulière en matière d’urbanisme (maisons individuelles de bas de gamme, lotissements à l’agencement minimal, faible quantité, voire absence, d’éléments végétaux paysagers, publics ou privés).

Figure 22 : Repérage des communes enquêtées et distances à la commune de Toulouse

Aire urbaine Unité urbaine Commune enquêtée Infrastructureroutière

35 km

35 km 35 km

30 km 40 km

50 km

50 km

Nous nous sommes ensuite concentrés, dans un premier temps, sur des ensembles pavillonnaires en lotissement ou en opération d’habitat groupé, mis en service au moment de la diffusion des premières mesures de l’accession sociale, c'est-à-dire entre le début et le milieu des années quatre-vingt. S’ajoutait également notre souhait de travailler sur des secteurs d’habitation où toutes les parcelles étaient construites. Les lotissements retenus se sont avérés être tous excentrés par rapport à la commune et mieux reliés aux accès automobiles vers Toulouse qu’à ceux en direction du centre de la commune. Enfin, quelques maisons présentaient des marques visibles de malfaçons ou de non entretien, signes susceptibles d’exprimer des difficultés d’accession.

Dans le même temps, par souci de replacer ce travail dans une perspective plus contemporaine, nous avons également élargi notre terrain vers des communes plus lointaines et plus récemment urbanisées situées aux limites actuelles, tant intérieures qu’extérieures, de l’aire urbaine (Figure 22), afin de rencontrer des familles à l’accession plus récente, aidés par un prêt à taux zéro. Elles habitent des pavillons « isolés », en zone « NB », dans des communes plus rurales.

Dans l’ensemble, nous avons évité les quartiers pavillonnaires présentant des signes extérieurs d’embellissement car c’est la marque d’une revalorisation.

a) Présentation des communes comportant des « ensembles pavillonnaires » : Saint Sulpice-la-Pointe, Le Lherm, Lavernose-Lacasse et Poucharramet

• Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn)

La commune de Saint-Sulpice, située dans le département du Tarn, a été très tôt une destination périurbaine pour les Toulousains. En effet, sa desserte ferroviaire en a fait une commune d’accueil des pavillonnaires dès le début des années soixante-dix, et ce malgré la distance qui la sépare de Toulouse (35 kilomètres). Le tableau ci-dessous montre bien une croissance constante de la population depuis 1962 avec un tassement lors des deux dernières périodes intercensitaires. La tendance s’est complètement inversée depuis l’ouverture de l’autoroute A 68 en 1998 et la desserte de la commune par un échangeur, puisqu’entre les

recensements de 1999 et 2004, la commune a cru, selon son Maire, de plus de 1 000 habitants (6 500 habitants en 2004) et a délivré plus de 200 permis de construire par an (Figure 23).

Figure 23 : Variation de la population de Saint-Sulpice-la-Pointe

0 1000 2000 3000 4000 5000 6000

1962 1968 1975 1982 1990 1999

Population

Source: INSEE

La croissance significative de Saint-Sulpice s’explique par l’arrivée de migrants venus essentiellement de l’agglomération toulousaine. Cette population nouvelle est majoritairement

« pavillonnaire » : en 1990, 68,3 % des logements de la commune sont ainsi des maisons individuelles, et 40 % d’entre elles sont postérieures à 1982. Ce bourg, malgré l’importance de sa population, se trouve cependant aujourd’hui dans une situation charnière du fait de sa structure peu dense, de la mobilité de ses habitants qui travaillent essentiellement dans le bassin d’emploi toulousain (plus de 40 % au recensement de 1999) et de l’existence à proximité d’un réseau de petites villes ou de bourgs (Rabastens, Lavaur, Bessières et Montastruc). La commune dispose néanmoins d’un bon niveau d’équipements d’enseignement à la fois publics et privés regroupant groupes scolaires et collèges, d’équipements sportifs et d’équipements socio-culturels : un musée, une médiathèque, un cinéma et plus de 50 associations. De plus, suite à l’amélioration de sa desserte, elle profite d’une position centrale, entre Albi et Toulouse, favorable à un développement économique qui semble s’enclencher.

Cet ensemble d’éléments paraît susceptible d’accélérer la mutation économique et sociale de la commune.

Une des particularités de Saint Sulpice est sa desserte ferroviaire. En effet, les horaires sont nombreux, avec un train en moyenne toutes les 7 minutes entre 6h22 et 9h05 et toutes les 25 minutes entre 18h00 et 20h30. Cette fréquence, dont l’amélioration est projetée (doublement de la voie ferrée et augmentation du cadencement), accentue son caractère de banlieue

résidentielle toulousaine. Pour un agent immobilier de la commune, « la présence de la gare et la proximité de l'autoroute ont pour effet de faire monter les prix sur le marché immobilier ».

Il considère qu'actuellement 80 % des achats de maison sont contractés par des toulousains de couche moyenne, dont certains élargissent leur périmètre de recherche à des communes voisines moins chères et ayant plus de caractère. Un autre agent immobilier confirme cette tendance et souligne l’augmentation des prix, de l’ordre de 25 %, depuis la mise en service de l’autoroute. D’après lui « c’est depuis toujours des employés, des ouvriers et quelques cadres moyens et professions intermédiaires qui viennent ici parce que c’est moins cher qu’en banlieue toulousaine ». Il remarque cependant que les ménages sont « aujourd’hui plus attachés à la proximité de l’autoroute, pour leur localisation, que par le passé, où c’était la gare ».

Le lotissement que nous avons sélectionné, dit du Vacayrial, émane d’une volonté communale. Il a fait l’objet d’une Zone d’Aménagement Différée en 1978, les premières maisons sont construites dès 1979. C'est un lotissement municipal de 165 lots sur une superficie de terrain de plus de 15 hectares. La somme des lots viabilisés est proche des 11 hectares et ils étaient destinés, dans un premier temps, à recevoir exclusivement des maisons individuelles. Sa gestion est, dès le départ, prise en main par la municipalité. Aucune association n’a vu le jour. Les premiers prix, fixés par délibération du Conseil Municipal le 10 juin 1978, sont de 49 F TTC le m². La grande majorité des parcelles vendues au début des années quatre-vingt, l’a été à 120 F TTC le m²27. Les superficies des lots oscillent entre 331m² et 939m², la plupart se situant entre 500 et 800 m². On observe une assez grande diversité dans la qualité architecturale des constructions, entre un secteur ouest plus ancien et a priori plus cossu, aux constructions artisanales, et un secteur est plus récent, d’apparence plus modeste, aux maisons principalement industrielles.

Situé au sud-est du centre-ville, c'est-à-dire à l’époque de sa construction aux confins de la commune, le lotissement du Vacayrial se trouve aujourd’hui à mi-chemin du centre-ville et de l’entrée de l’autoroute. Cette situation actuelle tend à transformer sa composition sociale et suscite opportunités et méfiances aux yeux des résidents. Autrefois en bout de ville, il est

27 49 F = 7,47 €, 120 F = 18,29 €

aujourd’hui en cours d’incorporation du fait de la forte croissance de la commune depuis deux ans et de la construction de deux autres lotissements dans la continuité.

• Lavernose-Lacasse.

La commune de Lavernose-Lacasse, située à 35 kilomètres au sud de Toulouse, est en forte croissance depuis les années quatre-vingt, et plus particulièrement depuis l’ouverture de l’autoroute A 64. Au dernier recensement elle comptait 1 944 habitants (Figure 24).

Figure 24 : Variation de la population à Lavernose-Lacasse

0 500 1000 1500 2000 2500

1982 1990 1999

Population

Source : INSEE

La commune disposant de peu de services et de quelques commerces, la majorité de la population a pour habitude de se rendre dans la ville voisine de Muret.

L’urbanisation s’est effectuée dès le départ sous la forme de lotissement, un premier, au lieu-dit les Amourettes, à mi-distance des deux noyaux villageois de Lavernose et de Lacasse et un second, au lieu-dit les Graves, à 1 kilomètre au sud-ouest du cœur villageois de Lavernose. C’est ce dernier ensemble pavillonnaire qui a été retenu. Dans leur ensemble ces deux lotissements ne bénéficient pas d’une bonne image et sont alors perçus comme des échecs par la commune, dont l’urbanisation s’est ensuite développée sous une forme plus dispersée. Le changement récent de municipalité et l’intégration de la commune au sein de la communauté d’agglomération du Muretain ont pour conséquence un nouveau mode d’urbanisation : « il faut redonner une unité à la commune, arrêter qu’elle se disperse » (adjoint chargé à l’urbanisme).

Ce lotissement privé, de vingt-sept pavillons, commencé au début des années quatre-vingt, comporte des lots allant de 544 m² à 1 092 m². Il est raccordé au réseau viaire de la commune par la rue Edmond Lasalle (nom actuel du lotissement) au départ de l’avenue des Pyrénées qui mène au village. Cette artère centrale se boucle sur elle-même. Le lotissement est en impasse et suite à la faillite du promoteur, il ne sera pas achevé selon les plans, en particulier dans l’aménagement d’un espace vert et dans la plantation d’arbres le long de la voirie. Les riverains tenteront de reprendre la gestion du lotissement mais en vain, il sera alors placé sous la tutelle d’un syndic avant d’être intégré au domaine communal à la fin de l’année 1996.

• Poucharramet.

La commune de Poucharramet est située à la même distance de Toulouse que Lavernose-Lacasse, un peu plus à l’ouest en direction de Rieumes. Moins accessible par l’autoroute, elle se trouve également à l’écart de la départementale 23 en direction de Seysses et de Toulouse.

La population s’établit à 680 habitants au recensement de 1999, ce qui en fait un petit bourg à l’apparence encore agricole. Sa croissance est moins forte que celle des autres communes de la zone mais elle est restée continue (Figure 25).

Figure 25 : Variation de la population de Poucharramet

580 600 620 640 660 680 700

1982 1990 1999

Population

Source : INSEE

Du fait de sa taille, la commune ne dispose que de quelques services et commerces et reste sous l’influence du bourg voisin. Outre le lotissement que nous avons étudié, l’urbanisation s’est essentiellement faite sur le mode du mitage et s’est accélérée depuis le recensement de 1999, en particulier en direction du lac de Rieumes.

L’entrée de Poucharramet dans la zone d’influence de Toulouse s’est manifestée par la création en 1979 d’un lotissement communal de 10 lots d’environ chacun 1000 m². Situé à environ un kilomètre du centre du village, il est installé sur une ancienne décharge municipale et derrière le cimetière. Cette implantation particulière n’a pas été sans effet sur son devenir.

Le poids des maisons a affaissé le terrain qui se retrouve aujourd’hui en contrebas du cimetière et des terrains agricoles, ce qui pose un problème d’évacuation des eaux usées et de stabilité des constructions. La structure du lotissement est composée d’une seule rue, la rue des Graves, qui est reliée d’un côté à la rue de la Tuilerie, en direction du village, et de l’autre à la route du Guerrier, en direction de Rieumes. Les parcelles se répartissent de part et d’autre de la rue.

• Le Lherm.

La commune du Lherm est située à 33 kilomètres au sud de Toulouse, elle était peuplée de 2 565 habitants en 1999 (Figure 26). Plus proche de Toulouse que ces voisines (Lavernose Lacasse et Poucharramet), son urbanisation s’est faite plus tôt, dans les années soixante-dix, sur le mode de grandes parcelles. Dans les années soixante-dix et quatre-vingt, celles-ci ont été divisées et de nombreux petits lotissements se sont développés sur la commune de manière un peu anarchique. Aujourd’hui, la municipalité essaye de ressouder ces morceaux.

Figure 26 : Variation de la population du Lherm

0 500 1000 1500 2000 2500 3000

1982 1990 1999

Population

Source : INSEE

Le lotissement étudié est en fait le plus récent de trois opérations localisées côte à côte et aménagées par la commune : « Versailles » de 1979 à 1984, comportant 31 maisons ;

« Trianon » de 1981 à 1985 avec 31 maisons et « L’Orangerie » de 1983 à 1985 avec 38 maisons. Du fait d’une volonté municipale de densifier la commune, ces ensembles pavillonnaires tendent aujourd’hui à s’agglomérer au tissu urbain. Parallèlement à cette incorporation infra-communale, se dessine celle de la commune elle-même à l’agglomération toulousaine. Deux situations qui, nous le verrons, ne sont pas sans incidences sur les représentations et le vécu des familles rencontrés.

Contrairement aux deux communes précédentes, celle du Lherm apparaît comme plutôt bien équipée en services et commerces.

b) Présentation des communes comportant des pavillons « isolés » : Bessens, Larra et Saint-Julien

Ces trois communes, toutes situées à plus de quarante kilomètres de Toulouse, sont de petite taille. Seule Larra, commune la plus proche de l’agglomération (à 40 kilomètres au nord ouest de Toulouse), compte à peine plus de 1 000 habitants. Saint-Julien, bien qu’étant la commune étudiée la plus éloignée (à 55 kilomètres au sud de Toulouse) est cependant la plus proche d’un échangeur autoroutier, celui de Saint-Elix-le-Château à 4 kilomètres. La commune de Bessens se trouve, quant à elle, dans le département du Tarn-et-Garonne, à 50 kilomètres de Toulouse au nord. Peuplée de 644 habitants, cette commune est en forte croissance du fait de sa situation : sur la N. 113, à 6 kilomètres de la nationale 20. Elle bénéficie de l’influence de Toulouse comme de celle de Montauban.

Figure 27 : Variation de la population des trois communes de Larra, Saint-Julien et Bessens

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Ces communes se sont urbanisées jusqu’à présent sous la forme de pavillons isolés. Seul Larra a mis en place depuis 2001 un programme de logements sociaux individuels en continuité du noyau villageois. Toutes les trois possèdent peu de services et de commerces et sont sous influence de leurs bourgs voisins ; Grenade pour Larra, Verdun sur Garonne pour Bessens et Cazères pour Saint-Julien.

Les ménages rencontrés se trouvent dans des zones d’urbanisation éloignées des noyaux villageois. Ceux de Larra et de Saint-Julien sont situés à 1 kilomètre, au nord-ouest de celui-ci pour la première et au sud pour la seconde. Pour Bessens, la zone étudiée se trouve à 3 kilomètres du centre, de l’autre côté du canal latéral et de la voie ferrée, en direction de la nationale 20. Cette zone, assise sur le hameau de Lapeyrière, comporte un tiers de la population du village.

Dans l’ensemble les parcelles ne sont pas inférieures à 2 000 m² et les dates de construction sont assez variées. Ces communes subissent toutes, depuis le recensement de 1999, un développement de la construction individuelle et en particulier dans les secteurs étudiés.

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