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Au final, un corpus comparant deux groupes

Dans le document Les « captifs » du périurbain ? (Page 165-169)

L’observation de terrain et la constitution d’un corpus

2. Le corpus d’enquête

2.3. Au final, un corpus comparant deux groupes

Ce travail se situe bien du côté des méthodes qualitatives et plus particulièrement compréhensives. Les matériaux recueillis lors de ces entretiens ont fait l’objet d’une analyse thématique : les représentations et les pratiques du lieu de résidence et de l’espace de vie permettaient d’identifier les lieux et les échelles autour desquels se structurent les territoires concrets du vécu. Centrée dans un premier temps sur le parcours biographique de la personne, cette approche compréhensive a permis de repérer dans quelles logiques s’inscrivent les trajectoires individuelles. Elle met, entre autre, en évidence le poids des processus externes dans la formation de ces mobilités résidentielles. Dans un second temps, elle a permis d’envisager : les « itinéraires migratoires et les systèmes de mobilité »36 singuliers à chaque personne pour comprendre les modes d’articulation entre espaces de vie et quotidien.

Le choix d’une méthode qualitative et compréhensive permet lors des premiers entretiens, de tester et d’approfondir les questions et surtout d’identifier les catégories et les mots clés susceptibles de faciliter l’échange. Ils ont permis également d’améliorer la technique d’approche et de présentation de la recherche afin de limiter les refus un peu brutaux et parfois déstabilisants.

Une telle démarche peut être critiquée pour son caractère approximatif, que l’emploi fréquent de quantificateurs relativement flous vient renforcer : « certains », « la majorité »,

« quelques-uns », « presque tous », … Mais il s’agissait avant tout, de saisir de la manière la plus détaillée, les logiques de raisonnement ou de comportements, de recueillir, à partir du discours, des propos susceptibles de faire sens ou de donner du sens à des phénomènes et à des actions de portée plus générale. Afin d’éviter de tomber dans une forme de commentaire littéraire réaliste, le travail d’analyse et d’interprétation consiste alors à agglomérer suffisamment les données singulières accumulées pour qu’elles constituent des figures, ici une figure particulière de l’accession à la propriété en maison individuelle. 38 entretiens ont été réalisés avec des familles qui avaient répondu au questionnaire. Les caractéristiques

35 J.C. KAUFMANN, op. cit., p. 52.

démographiques de ces ménages interrogés sont identiques à celles que le traitement des 75 questionnaires a fait ressortir. La montée en généralité de l’analyse des entretiens s’appuie sur deux sources principales. La première est le savoir acquis de la lecture de précédents travaux qui permet d’identifier alors dans les discours des éléments qui, sous leurs apparences singulières, ont une valeur générale. La deuxième est la confrontation avec un autre corpus d’entretiens réalisés dans le cadre d’un travail conduit par les étudiants du DESS Habitat et politiques d’aménagement, M. ZENDJEBIL et moi-même, sur des lotissements du périurbain aggloméré pour le compte d’une recherche du PUCA. En ce qui concerne ce second ensemble d’entretiens, nous en avons retenus ici 35 afin qu’ils composent de manière pertinente un échantillon témoin susceptible de faciliter la confrontation des analyses aux situations d’accédants à la propriété d’une maison individuelle ayant pu se localiser en plus proche périphérie. Il s’agissait par cette confrontation de mieux spécifier le vécu des périurbains lointains.

Le corpus des « périurbains lointains » (groupe PL) est composé de trente-huit entretiens (dans lesquels le ou la conjoint-e (onze cas) et les enfants (trois cas) sont parfois intervenus), celui des « périurbains agglomérés » (groupe PA) en compte lui trente-quatre.

Si la structure familiale des familles rencontrées en « périurbain lointain » correspond au profil habituel des périurbains (beaucoup de couples avec des enfants), leurs professions renvoient davantage à l’univers des couches inférieures des « classes moyennes » et à celui

Les « périurbains lointains » interrogés sont employés ou agents de maîtrises plutôt qu’ingénieurs ou cadres (Figure 35).

Figure 35 : PCSP des chefs de ménage du groupe PL (en nombre)

0 4 8 12 16

artisan cadre p. inter empl ouvriers sans act

Nombre d'actifs

Source entretiens.

Par ailleurs, ces 38 familles se caractérisent également par le fait que de manière significative seul un des conjoints travaille, le plus souvent l'homme, là où la majorité des ménages périurbains sont bi-actifs (Figure 36).

Figure 36 : Structures professionnelles et familiales dans les deux groupes

0 5 10 15 20 25

Périurbain de l'agglomération

Périurbains lointains

Couples bi-actifs Couples mono-actifs Familles

monoparentales Célibataires

Source entretiens

Ces derniers sont alors souvent composés essentiellement des techniciens ou inclus dans la catégorie des professions intermédiaires. Quand les deux époux sont en activité, ils appartiennent alors le plus souvent aux catégories ouvriers, employés ou agents de maîtrise. A noter qu’un ménage nous a affirmé être, au moment de l’enquête, sans activité (il s’agissait d’une femme au chômage avec deux enfants). Ainsi, au regard des caractéristiques socioprofessionnelles, seuls trois ménages dans ce corpus des « périurbains lointains » apparaissent proche du profil du « périurbain classique » et observé en périurbain aggloméré : des ménages « double-actif » affiliés aux couches moyennes et dont les revenus dépassent les 3 000 euros par mois. Au moment de la négociation du financement, ces ménages étaient pourtant bi-actifs et leur projet intégrait cette situation. Cependant, lorsqu’ils s’installent cette bi-activité tend à ne plus être assurée. Deux raisons peuvent expliquer cette rupture dans la trajectoire professionnelle. Soit l’un des conjoints fait l’expérience du chômage et éprouve des difficultés à se réinsérer correctement sur le marché de l’emploi. Soit la femme s'arrête de travailler à l'occasion d'une maternité, puis démissionne avec l'espoir de retrouver un emploi dans la proximité du domicile. Elle est alors confrontée à la faiblesse de l'emploi local et subit les effets de son éloignement du marché du travail principal, celui de l'agglomération. De fait, la durée de son inactivité s’allonge. De telles situations, on s’en doute, ne peuvent pas rester sans incidences sur les ressources financières du ménage et l’équilibre psychologique des familles.

Quant au logement antérieur de ces « périurbains lointains », outre deux ménages propriétaires, ils étaient tous locataires avant d’arriver dans ces espaces. Pour 17 familles, il s’agissait d’un collectif HLM, pour 12 autres familles d’un collectif dans le parc privé.

Seulement 12 ménages donc, dont les deux anciens propriétaires, avaient une expérience de l’habitat individuel.

Chapitre VII

Une figure de l’accession en maison individuelle plus

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