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DEUXIEME PARTIE

6.2. Francophonie en Algérie

6.2.2. Changement linguistique

La langue est conçue, selon la perspective structuraliste de la linguistique contemporaine comme « un système où tout se tient ». Comme on souscrit que « la langue est une structure qui résiste fortement au changement ». Néanmoins, Weinreich, Labov et Herzog ; antagonistes de cette conception qui a confiné, au second plan, l’étude du changement linguistique du champ d’étude de la langue. En effet, en marginalisant les conditions historiques, géographiques et sociologiques (conditions « externes » au développement d'une langue selon les structuralistes), on a écarté l'essentiel du problème.

1 Ibid.

2 Ibid.

3 Ibid.

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Celui-ci se situe sur le plan de « facteurs « internes » (besoins nouveaux en communication, besoins expressifs, etc.) au langage »1.

De plus, les antagonistes (dont les noms sont cités ci-dessus) remettent en question l’homogénéité de la structure de la langue, face au fait de rapporter la diversité langagière existante aux aléas de la performance des locuteurs. Etant donné qu’au sein de la communication entre locuteurs, la langue passe d’un état à un autre. Raison pour laquelle Weinreich, Labov et Herzog ont proposé un modèle constitué de deux postulats : « 10 la langue est un objet qui possède une hétérogénéité ordonnée et, corollaire, 20 l’état de langue fonctionne comme déterminant ses propres changements »2. Soulignons sous ces deux postulats proposés donc, que la variation linguistique est un élément indissociablement constitutif à la langue ; elle permet la transition entre deux états de langue.

Pour plus de clarification au processus proposé ci-dessus, Thibault résume qu’« un locuteur introduit dans son parler une forme qui alterne avec une ou plusieurs autres ; elles sont toutes régies par une règle variable de type probabiliste. La nouvelle forme se diffuse chez d'autres locuteurs et son emploi acquiert éventuellement une signification sociale. Le changement est constaté lorsque la règle cesse d'être variable et qu'une restructuration des règles catégoriques s'est opérée. »3. De ce fait, nous approuvons que la langue ainsi que la société sont en perpétuel changement et, par conséquence, en évolution permanente. Une telle constatation nous indique donc, que le changement linguistique implique, logiquement, la variation sociale.

A partir du modèle proposé par Weinreich, Labov et Herzog à propos de la conception du changement linguistique, plusieurs questions relatives ont été soulevées : Quelles sont les contraintes relevant d’une grammaire universelle qui balisent le trajet de l’innovation ? Comment les formes nouvelles s’enchâssent-elles dans la structure linguistique et sociale ? Quel rôle l’évaluation sociale joue-t-elle dans leur cheminement ? Comment s’effectue la transition d’un état de langue à un autre ? Pourquoi tel changement se produit dans telle langue et pas dans telle autre ? Parler du changement linguistique se résume souvent à faire l'état des modifications plus ou moins rapides qu'une langue subit tout au long de son histoire.

Cependant, si ce changement s'inscrit dans un programme historique, dans des études diachroniques, les variations synchroniques sont les principales sources d'un état de langue

1 BAYLON Christian, Sociolinguistique, société, langue et discours, Ed : Nathan, Paris, 1996, p. 101

2 THIBAULDT Pierrette, changement linguistique, p. 65, in : MOREAU Marie-Louise (éd.), sociolinguistique concepts de base, Op. cit.

3 Ibid.

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donné. En d'autres termes ; « le changement linguistique ne peut s'observer qu'en synchronie »1. Seulement, comment peut-on alors observer ce dernier à partir de données synchroniques ?

En émettant son hypothèse, Thibault suppose que « si un changement est en train de se produire, il se manifestera par des différences de comportement entre les diverses générations d’une communauté linguistique »2. On tranchera donc, entre cette période « synchronique » ; durant laquelle s’effectue le changement linguistique : appelée temps apparent, et la période constituant le parcours historique du changement au sein de la communauté : appelée temps réel. L’observation de ce dernier stipule qu’il y ait des décennies de différence entre les productions, elles peuvent être réalisées par le biais de documents écrits et sonores.

Contrairement au temps apparent, où il suffit d’obtenir des échantillons d'individus d'une même communauté linguistique, répartis selon divers facteurs comme les classes sociales, l'âge, le sexe, l'ethnicité, etc. afin de l’observer.

6.2.3. Néofrancophonie

Par le terme de « néofrancophonie », on désigne un phénomène de « vernacularisation du français dans des couches de la nouvelle bourgeoisie urbaine d’origine hindoue, musulmane ou créole, qui adoptent le français comme langue familiale par un choix assez volontariste. »3. En réalité, ce concept de « néofrancophonie » a vu le jour lorsqu’on s’est focalisé sur la situation sociolinguistique du français à l’île Maurice. Dans cette situation, on assiste à la coexistence de trois types de francophones ; le premier type est celui dont le français est sa langue maternelle « locuteurs endolingues », le deuxième type : les locuteurs exolingues sont ceux qui ont appris le français comme deuxième ou troisième langue.

Cependant, du deuxième type de francophones (locuteurs exolingues) nait un troisième groupe de locuteurs qui ont acquis le français comme première langue (voir langue maternelle). Autrement dit par Baggioni, «la pratique du français en famille, chez des parents qui l’avaient appris comme deuxième ou troisième langue, favorise son acquisition comme première langue par les enfants. »4. En effet ; dans ce troisième cas de locuteurs, il arrive souvent qu’ils soient en « voie de promotion sociale » et en parallèle, en stade de

1 BAYLON Christian, Sociolinguistique, société, langue et discours, Op. Cit, p. 101

2 THIBAULT Pierrette, Op. Cit.

3 Daniel BAGGIONI, Néofrancophonie, p214, in : MOREAU Marie-Louise (éd.), sociolinguistique concepts de base, Op. cit .

4 Ibid.

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réorganisation linguistique : ce qui donne naissance, par conséquence, à un répertoire réadapté à la nouvelle génération.