• Aucun résultat trouvé

L’UE 23 Campo Grande : l’aménagement territorial face à un cadre critique de contrôle des eaux urbaines

2.2. Une approche territoriale et technique en phase avec les tendances contemporaines de gestion urbaine des eaux ?

2.2.1.2. L’UE 23 Campo Grande : l’aménagement territorial face à un cadre critique de contrôle des eaux urbaines

L’UE-23 Campo Grande est localisée dans le quartier populaire du même nom, à la frontière de celui-ci et du quartier de Sítio Novo, dans la plaine sédimentaire au nord de Recife et distant à peine 1,5 km de la mer. Ses limites sont définies par le canal Vasco da Gama au nord-ouest, le fleuve Beberibe au nord-est, l’avenue Luiz Correia de Brito à l’est, l’Estrada de Belém au sud et les rues Voluntários da Pátria et Jandiroba à l’ouest. Outre ces axes de circulation, la rue Jerônimo Vilela à l’ouest croise l’UE-23 dans le sens nord-sud, servant de voie d’intégration de celle-ci avec les quartiers voisins, Arruda au nord et Torreão au sud.

Ces voies étant implantées selon un maillage orthogonal confèrent à la morphologie générale de l’unité une certaine homogénéité (cf. Figure 2-8).

Figure 2-8 : Situation de l’UE-23 Campo Grande, dans Recife (2007)

Source : Élaborée par l’auteur, basée sur des données de l’UGP/Prometrópole et d’une image de Google-earth.

En 2000, environ 10.270 personnes habitaient ce territoire, sur une surface de 99,54 ha, soit une densité démographique de plus de 10.000 hab./km2 (cf. Tableau 2-3). Les sols y sont principalement sablonneux, à l’exception de ceux situés plus proches des berges du canal et du fleuve où l’occupation se fit par le biais de remblais consécutifs et sont constitués d’argiles et d’autres matériels ayant servi à remblayer les terrains. La topographie du local est plaine et uniforme, les cotes des terrains sont basses et ceux-ci sont sujets aux variations du niveau des cours d’eau voisins. Les déclivités sont assez faibles et rendent difficile l’écoulement des

! 149!

eaux, favorisant la multiplication des points de rétention et les inondations pendant la saison des pluies, surtout lorsque, à celles-ci viennent s’ajouter les amplitudes de marées les plus hautes, pendant les mois de juillet et d’août. Les blocs au bord du canal Vasco da Gama sont ceux les plus exposés à ce genre de problème.

Fondé dans les années 1970, l’espace de l’UE-23 fut le fruit de deux modalités d’occupation distinctes, à savoir une occupation planifiée, plus ancienne et concentrée surtout dans le centre et le sud de l’unité d’écoulement; et une autre, spontanée, répandue autour de la première et plus densément occupée aux alentours de la limite nord-est. Ces deux modalités configuraient trois secteurs dont les caractéristiques les différenciaient les uns des autres.

Le premier se localisait dans la portion au nord, à partir de la limite représentée par la rue Cirilino A. de Melo jusqu’au canal Vasco da Gama et abritait une occupation précaire où habitaient des familles pauvres, dans la plupart des cas dans des « maisons de fortune » qui n’atteignaient pas 50 m2 de surface. Le deuxième, délimité par la rue citée précédemment et la rue Dr. Machado, constituait un espace qui possédait de meilleures conditions d’urbanisation que la précédente, avec un habitat qui s’assimilait à ceux des quartiers plus aisés, à l’exception de la surface de lots, plus petite (d’environ 100 m2). Ces deux premiers secteurs se situaient dans la région issue d’une occupation spontanée.

Dans le troisième secteur, dans la portion planifiée de l’UE-23, prédominait une trame de voirie réticulaire, fruit d’un processus formel de lotissement dans les terres voisines de l’Estrada de Belém, principale voie d’accès au quartier de Campo Grande. Les parcelles y installées avaient des surfaces similaires à celles des quartiers formels de Recife, comptant environ 350 m2. La typologie dominante était également comparable à celle des quartiers métropolitains abritant une population de classe moyenne, où la densification par verticalisation de l’habitat n’est pas encore dominante et où les constructions pavillonnaires sont encore prépondérantes. Il s’agissait d’une zone bien intégrée au tissu urbain de la ville de Recife, avec des rues possédant des dimensions conformes aux standards prescrits dans les lois de parcellement.

Pourtant, à l’exception des voies collectrices servant à l’articulation avec l’espace extérieur les voies locales n’étaient pas pavées (cf. Photo 2-16). Cette caractéristique faisait de la circulation et de l’opération des services de transports en commun une tâche difficile, privant ainsi d’accès à ces services une partie considérable des habitants qui était obligée de faire de longs déplacements à pied. Outre le système de transports, ceux d’assainissement de base étaient aussi inégalement distribués et parfois absents dans certaines régions de la portion

« formelle » de l’UE, surtout celle habitée par une population issue de la classe moyenne-basse (touchant au-dessous de cinq salaires minimums).

En ce qui concerne les occupations pauvres, dans la portion nord du territoire de l’UE-23 il existe un carrefour avec les limites de la Zone spéciale d’intérêt social (ZEIS) également appelée Campo Grande. À l’extrémité nord de cette zone se situaient les communautés des favelas Capilé et Saramandaia, aux bords du segment non-rectifié du canal Vasco da Gama.

Dans ces occupations-là nous trouvions l’habitat le plus précaire de la région, avec des ruelles étroites et l’inexistence de conditions minimales de salubrité (cf. Photo 2-17).

Photo 2-16 : Rues non pavées dans le Secteur 3 subissent les effets des pluies

Photo 2-17 : Ruelle insalubre dans le Secteur 1, Saramandaia

Source : Auteur. Source : Auteur.

En sillonant cet endroit précis, nous pouvions mieux comprendre l’expression employée par Oliveira (2008, cf. Chapitre 1) : là, les « sept plaies de Recife » étaient bien présentes. À cause surtout de la pauvreté de leurs habitants, aucun des blocs, spontanément formés, ne possédait de réseaux réguliers d’alimentation en eau et énergie électrique. Il n'y avait pas de système d’assainissement et les eaux usées étaient déversées directement dans les canaux et dans le Beberibe, augmentant les risques de propagation de maladies par voie hydrique (la dengue, la malaria, la filariose, les maladies cutanées, les gastro-entérites). Les services de ramassage d’ordures ne fonctionnaient pas et l’accumulation de déchets dans les rues et dans les cours d’eau était facilement observable, réduisant ainsi la capacité de drainage, et en potentialisant les risques d’inondation et de prolifération de vecteurs de maladies (cf. Photos 2-18 et 2-19).

De surcroît, la plupart des chefs de foyers trouvaient leur moyen de survie dans l’économie informelle, à l’exemple de la collecte et du triage d’ordures pour vendre ce qui peut être recyclé (cf. Photo 2-20). Leurs revenus étaient au-dessous des trois salaires minimums et les matériels employés pour bâtir leurs « huttes » (du carton, du plastique et du bois) sur des palafittes, étaient souvent trouvés dans des poubelles, étant fragiles et résistant péniblement aux eaux de pluie (cf. Photo 2-21).

151 Photo 2-18 : Ordures déversées dans la

rue, Secteur 1

Photo 2-19 : Ordures déversées dans le fleuve, Secteur 1

Source : Auteur. Source : Auteur.

Photo 2-20 : Palafittes en bois et carton au bord du Beberibe, Secteur 1, Capilé

Photo 2-21 : L’activité informelle de collecte et triage d’ordures, Secteur 1

Source : Auteur. Source : Auteur.

Pourtant, malgré l’occupation plus dense et le cadre de précarité plus grave et évident à Campo Grande, par rapport à l’autre unité d’écoulement choisie pour le développement des projets pilotes (UE-17, Passarinho, dans Olinda), l’UE-23 offrait des espaces libres plus nombreux pour mener les interventions nécessaires à l’amélioration de la qualité de vie dans ce territoire. En vue des relogements des familles dans des situations critiques, ou du remplacement des maisons qui obstruaient les voies de circulation ou les cours d’eau (cf.

Photo 2-22), la disponibilité de ces espaces était une très bonne opportunité. D’ailleurs, ces espaces pouvaient être employés également pour installer des équipements publics de santé, loisir ou éducation, dans une région où ceux-là n’étaient pas abondants.

Même face à ces contraintes, la vie communautaire s’établit dans tous les secteurs de Campo Grande et de liens sociaux qui se sont consolidés, à travers des activités culturelles et d’autres initiatives souvent menées par les habitants eux-mêmes (cf. Photo 2-23). D’ailleurs, les communautés habitant l’UE-23 prennent leurs responsabilités dans la gestion urbaine à l’exemple de leur participation dans le processus de définition des actions de régularisation urbanistique et foncière du PREZEIS-Recife. En effet, depuis les années 1990 elles attendaient le moment « propice » à la mise en œuvre des interventions projetées ; les problèmes ciblés par les habitants sont les mêmes que ceux que nous avons énumérés auparavant, et le contrôle des eaux prennent une place de choix par le biais de la priorisation des solutions pour l’assainissement et le drainage superficiel dans les sollicitations des représentants des habitants auprès du Forum du PREZEIS.

Photo 2-22 : Huttes sur un canal dans la rue Farias Neves, Secteur 1, Capilé

Photo 2-23 : Des enfants apprennent à jouer la samba

Source : Auteur. Source : Auteur.

À Campo Grande les efforts de lutte contre la misère, rencontrée surtout dans le secteur 1, plus précaire, pouvaient être perçus également dans l’initiative de quelques habitants de faire pousser au milieu de la boue et des ruelles de beaux hibiscus et cocotiers (cf. Photo 2-24). De telle sorte que l’extension des interventions nécessaires à l’urbanisation posait une barrière apparemment insurmontable, et que les aspects positifs répertoriés accordaient des possibilités plus larges de solution d’amélioration. Un défi supplémentaire aux gestionnaires du Prometrópole semblait être la définition de la manière la plus efficace d’équilibrer ces deux aspects dans l’apprivoisement des eaux dans cette unité d’écoulement.

153 Photo 2-24 : Un peu de vert dans les ruelles du Secteur 1

Source : Auteur.

2.2.2. Le modèle de gestion du Prometrópole : les limites politiques et territoriales d’une

Outline

Documents relatifs