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PARTIE 3 Les cadres de l’accueil et de l’accompagnement

3.2 Le cadre normatif

3.2.4 Le hors-cadre

Comme cela a été précisé dès l’introduction de cette troisième partie, le hors-cadre se rapporte, dans cette enquête, aux déviances, c'est-à-dire aux comportements non conformes, qui enfreignent la norme et qui sont perçus, par les accueillants du moins, comme tels.

En découvrant les LVA, les chercheurs ont tous été frappés par la récurrence, dans le discours des accueillants, du terme « violence », une violence le plus souvent associée aux comportements de certains jeunes accueillis, mais aussi à leurs parcours de vie. Violences physiques, verbales, morales ou sexuelles, violences subies ou contre soi, entre jeunes accueillis ou envers les accueillants… Ces violences s’expriment avec une intensité et une fréquence variables selon le LVA considéré. Mais elles font partie de leur histoire. Par extension, cela signifie aussi que la gestion des déviances – dont les violences ne constituent qu’un élément parmi d’autres – fait partie du réel de l’activité des adultes accueillants.

[2.01.2019 - LVA D1] 1er jour de terrain. 19h45. L’heure et demi qui suit est faite d’une discussion

avec Chantal sur les LVA et les enfants qu’elle accueille (bénévolement) avec son mari (responsable permanent). Elle se livre facilement, comme si l’occasion de parler de son vécu au LVA ne se présentait pas tant que ça. Mais bref, l’entame de cette discussion laisse apparaître, en quelques secondes à peine, le mot « violence », un mot qui contraste avec l’impression que j’ai eue, en arrivant ici, d’entrer dans « un petit paradis » : une ferme, des animaux et de l’espace... […] Chantal me raconte des scènes de violence qui se sont passées ici et qui impliquent les jeunes accueillis. Elle me parle également des violences que les jeunes ont eux- mêmes subi par le passé et qui sont souvent la raison de leur placement.

3.2.4.1 Les actes déviants

En écho à la violence des trajectoires familiales et institutionnelles, les enfants et adolescents rencontrés dans l’enquête mettent souvent en acte une « souffrance intense », caractéristique des enfants dits « incasables », identifiée par la recherche (Barreyre et al, 2008). Comme le souligne Chantal, aux actes de violences concrets s’ajoutent la réception et la gestion des histoires de vie des jeunes qui comportent elles aussi des épisodes de violences.

[05.01.2019 - LVA D1] Des scènes de violences au LVA, Pierre m’en a raconté plusieurs, à propos

de plusieurs « gamins », aux yeux de toute sa famille. L’une des plus marquantes est sans aucun doute celle où Ethan a été poursuivi au couteau par un autre jeune. […] Ce dernier n’est plus au LVA aujourd'hui. […] Ce mot « violence » est presque toujours présent dans le discours de Chantal et Pierre. Quand j’ai évoqué ce point avec Théo, leur fils benjamin, il a eu mouvement de tête qui signifiait : « c'est l’évidence ». Incontestablement, la violence de certains enfants placés a touché – et touche encore – la vie de famille de Pierre et Chantal.

La violence est un enjeu constant pour les permanents des LVA, qui peuvent aussi en faire les frais directement. Véronique, la compagne du fondateur du LVA C2 qui passe plusieurs temps au sein du LVA, et qui y a vécu à plein temps il y a quelques années avant de se rapprocher de son lieu de travail, se rappelle des souvenirs concernant un jeune aujourd’hui majeur et sorti de la protection de l’enfance qui continue à entretenir des liens avec les permanents du LVA C2. Elle relate des débuts difficiles à son arrivée, à l’âge de 11 ans, et découvre trois cicatrices blanches sur son avant-bras où il avait planté ses ongles. Elle se souvient qu’ils avaient dû le plaquer au sol, à deux pour le contenir.

Ce qui caractérise aussi les enfants rencontrés au cours de cette enquête dans six LVA aux projets diversifiés, c’est la question des troubles psychiques et du handicap, avec en toile de fond une question récurrente pour l’accompagnement, celle de la médication. Les passages à l’acte violents, qui mettent à mal l’accueil, sont le lot de tous les LVA. Ce qui pose le plus de problème pour le LVA Y, ce sont les jeunes qui ont des problématiques « psy », diagnostiquées ou non.

« Il y a des jeunes, ils peuvent faire des dingueries. Cet été, y en a un qui a mis le feu à la grange.

Il a appelé d’un foyer [où il est désormais placé], il s’est excusé, mais c’est pour lui que c’est vraiment dommage […] lui il me dit : "Je regrette, là je suis dans un foyer, on m’interdit rien, mais je ne fais rien d’intéressant". C’était un gars, il aurait pu rester chez lui mais il faisait peur à sa mère. Il était grand, 1m80, 120 kilos, un beau bébé. Il avait déjà amoché plusieurs éducs100 ici. Quand il s’énervait, je lui faisais une clé de bras et je restais sur lui, mais il ne fallait pas le lâcher très tôt. […] Il ramenait du cannabis. Mais quand il s’est fâché, c’est juste parce que je lui avais demandé de faire sa chambre. » (Pascal, permanent, LVA Y).

Enzo, âgé de 13 ans, vit dans l’extension du LVA C2 depuis un an. Sa mère a désigné une famille de sa connaissance pour accueillir Enzo en tant que Tiers digne de confiance (TDC) au moment de son incarcération, un an plus tôt. Enzo relate des maltraitances : « ils me tapaient, me faisaient fumer,

boire ». « J’étais chez des fous […] obligé de dire au juge que je les aimais sinon ils m'auraient tapé ».

La famille refusait de lui donner son traitement, raconte-t-il : « ils disaient c'est pour les fous…. Vous

100 On notera au passage que le permanent nomme les membres de son équipe, « éducateurs » ou « éducs », ce qui n’est pas

le cas dans tous les LVA, où les salariés sont souvent appelés « permanents » ou « assistants-permanents », quand bien même ils peuvent avoir un diplôme d’éducateur (moniteur éducateur ou éducateur spécialisé).

aussi vous êtes fous ! » « Ça m’aide », explique-t-il à propos de son traitement (Enzo, 13 ans, LVA C2-

extension).

L’articulation avec le secteur du soin psychiatrique est souvent pointée comme problématique par nos interlocuteurs. La question du maillage territorial peut aussi ajouter des difficultés. La coordinatrice du réseau Y dans lequel est imbriqué le LVA Y, souligne un déficit de structures adaptées à un public qui aurait évolué et dont les troubles du comportement sont en tous cas évalués différemment aujourd’hui. « Ce qui est compliqué pour nous, c'est que la population a évolué […] avant

c'était des jeunes qui avaient des troubles du comportement, des jeunes qui avaient des problèmes avec l'autorité, qui ne supportaient pas la frustration, aujourd'hui c'est de plus en plus des troubles de la personnalité et c'est beaucoup plus compliqué » (Claire, coordinatrice, Réseau Y).

La spécificité du LVA Y est, selon le permanent, d’accueillir les jeunes « les plus difficiles », des « fugueurs » ou des jeunes « très violents ». Ceux-ci sont repris à la moindre infraction – gros mot ou manquement à l’hygiène – et quelques sanctions sont possibles : une amende prélevée sur l’argent de poche pour avoir fumé, laissé l’eau couler ou l’électricité allumée ; privation du temps de téléphone, de télévision ou de sortie. Pour des faits jugés plus graves, dont les actes de violence et les fugues, les jeunes peuvent être réprimandés par le « directeur éducatif » du réseau Y101. Dans ses crises, l’équipe

du LVA Y raconte que Nathan peut monter sur le toit, attaquer avec un couteau, donner des coups sans s'arrêter. Ces mêmes actes peuvent provoquer une exclusion du LVA vers un autre LVA du réseau, voire, s’ils s’accumulent, à une exclusion définitive de ce même réseau.

Pour Yann, permanent fondateur du LVA M, l’enjeu de l’accompagnement dans ce LVA spécialisé dans l’accueil d’adolescentes avec troubles psychiques, est justement de prévenir les violences des jeunes. Il alerte l’enquêteur sur la personnalité d’une des jeunes accueillies :

« Elle aime bien faire du mal, au fond, elle n'est que comme ça, elle va se rapprocher de toi et

après, faut faire gaffe car elle va vouloir te faire du mal. Je la connais bien et j'ai une relation particulière avec elle car elle est là depuis quasi 5 ans »102.

À plusieurs kilomètres de là, Kheira (LVA Y), 15 ans, confie à l’enquêtrice : « Quand j'arrive dans un

foyer, au début je fais la gentille et après je leur plante un couteau dans le dos, quand ils ne s'y attendent pas ».

Au LVA M, le chercheur a lui aussi relevé que l’expérience vécue des jeunes est marquée par des passages à l’acte violents, comme ont pu nous le raconter les permanents ou les assistants-permanents (et non les jeunes directement).

Yann évoque en entretien d’explicitation des heurts avec Joséphine, âgée de 16 ans, possiblement précurseurs de violence.

« Dans ces cas-là, elle claque la porte, c’est-à-dire qu’elle claque, elle rouvre, elle re-claque puis

elle rouvre, elle re-claque. […] C’est vraiment et c’est pas le petit claquage, ça tremble de partout quoi, donc à ce moment-là, on sait pas où on bascule ». (Yann, permanent, LVA M, EDE).

Ces passages à l’acte violents (automutilation au couteau, brisure de porte vitrée, coups portés sur un assistant-permanent) conduisent à la mise à l’écart temporaire des jeunes qui en sont les auteurs. La vie collective apporte son lot d’énervements et de chamailleries qui peuvent souvent aller jusqu’à

101 Rappelons ici que le LVA Y est inscrit dans un réseau de LVA coordonné par un siège social.

des coups, voire des blessures. Dans ce contexte et pour ces jeunes, c’est souvent le rappel à l’ordre par le permanent ou la permanente, et non par les assistants-permanents, qui est le plus suivi d’effets. Un système de sanctions pour non-participation à la vie collective et/ou d’interdictions « d’écran » est mis en place dans certains LVA pour les jeunes concernés, en fonction de la gravité de l’incident. Chantal, depuis qu’Ethan a volé de l’argent au couple, « ferme les portes à clés »103. Par ce geste, elle

redessine la frontière physique et symbolique entre les jeunes accueillis et les adultes accueillants. Elle impose une nouvelle norme, en réaction à une situation qui ne s’était jamais produite. Le cadre normatif vise, entre autres, à contenir, prévenir ou sanctionner les actes déviants, ici le vol. À travers cet exemple, nous voulons simplement dire que ce cadre a une histoire, une histoire non figée, faite de la succession des situations – déviantes ou non104 – dans lesquelles accueillants et accueillis ont été

engagés.

Comme on peut le constater, les actes déviants sont presque toujours suivis d’un rappel à l’ordre, précisément pour le maintenir ou le rétablir. L’on pourrait penser qu’à chaque acte déviant correspond systématiquement une réprimande ou une sanction bien précise, déterminée à l’avance. En réalité, les réactions des adultes accueillants se font aussi, et peut-être davantage – sur le vif. Ils peuvent alors, sur l’instant, mobiliser leur expérience accumulée auprès des jeunes – leur « capital éducatif »105

pourrait-on dire - pour adapter leur réponse aux situations déviantes auxquelles ils doivent faire face.

« Un nouveau, quand il arrive, surtout si c'est un fugueur, je dors la porte ouverte. Ça, c'est clair. Parfois même, on mettait une chaise au milieu du couloir et on restait là, une nuit, deux nuits, trois nuits. Après il est fatigué, il lâche l'affaire. Ou alors, une éduc’ se met au milieu, les portes des chambres sont ouvertes et elle leur lit des histoires. Bon c'est vrai que le lendemain t'es pas opérationnel. Mais sur la longue, ça paie. » (Pascal, permanent, LVA Y).

Certains accueillants, comme Marc, témoignent d’une forme de « désenchantement ». Aujourd’hui permanent une semaine sur deux au LVA C1, il revient sur son expérience passée de permanent responsable d’un LVA :

« Finalement, tu peux pas faire grand-chose. Non, parce que tu as sept ados de 13 à 18 ans, filles

et garçons, avec des histoires à gérer de vol, de viol, de violence, d’absentéisme scolaire, le shit, les fugues… Des jeunes virés des deux seuls collèges du coin et donc déscolarisés, et qui restent là. Il y a eu aussi de chouettes histoires, mais on se rappelle surtout celles qui nous ont pourri la vie. » (Marc, permanent de maison 3, LVA C1)

Une forme d’usure professionnelle se lit aussi dans la remise en cause de l’utilité du travail des permanents auprès des jeunes accueillis : « On en a bavé. Ma famille en a bavé. À quoi ça a servi tout

ça ? Je me pose la question. » (Pierre, permanent, LVA D1). « Est-ce qu’on est pas finalement une usine à clodos ? », se demande Yann, permanent du LVA M.

3.2.4.2 Une certaine distance

Certaines déviances – sexuelles notamment – peuvent être plus insidieuses ou plus difficilement identifiables par les adultes accueillants. Elles leur demandent une connaissance fine des jeunes

103 La porte principale qui donne à l’extérieur du bâtiment principal et celle qui sépare le LVA de l’espace commun : salon/salle

à manger/cuisine.

104 Repensons aux rituels de la vie quotidienne, point développé plus haut.

105 Inspiré des recherches de Pierre Bourdieu (1994), et dans la continuité des travaux de David Mahut (2017), le capital éducatif

désigne, dans le cadre de cette enquête, l’ensemble des ressources, des normes et des valeurs éducatives dont est porteur un individu et qui sont le résultat de sa socialisation (familiale, scolaire et professionnelle).

concernés. Ces déviances – soupçonnées ou confirmées – leur demandent aussi une réflexivité et une attention constantes sur les rapports que ces jeunes entretiennent avec les différents acteurs du LVA (jeunes et adultes).

[03.04.2019 - LVA C1] Marc [permanent] en profite pour dire à Quentin [accueilli] qu’il est hors

de question qu’il se blottisse contre qui que ce soit. De fait, Quentin n’a pas le droit de toucher les enfants à cause de ses pulsions. Il est d’ailleurs le seul à qui on ne fait pas la bise. « Il a un

traitement pour ça, me dit Sylvie, responsable éducative du LVA. Mais même, il aurait tendance à le faire encore, à aller sur les autres. Donc il faut être hyper vigilant ».

La limite entre le cadre et le hors-cadre définit les comportements qui sont acceptés et ceux qui ne le sont pas. Cette limite s’applique tout autant aux accueillis qu’aux accueillants. Il reste que c'est le groupe des adultes accueillants qui fixe, en grande partie, cette frontière entre ce qui est prescrit (ce qui est « bien ») et ce qui est proscrit (ce qui est « mal »). « Le caractère déviant ou non d’un acte dépend […] de la manière dont les autres réagissent. » (Becker, 1985, p. 35). Autrement dit, pour qu’un acte déviant le soit, il doit être considéré comme tel. Sans entrer dans les détails, nous voudrions simplement montrer que les termes de « normalité » et de « déviance » changent de contenu aussi selon « la culture » du LVA considéré, les conduisant à instaurer, ou pas, une certaine distance. Les adultes accueillants sont unanimes pour dire qu’entre eux et certains jeunes, des rapports affectifs se sont créés. Pris dans un rapport quotidien et de longue durée, plusieurs accueillants et accueillis développent des liens qui se rapprochent de ce que l’on pourrait observer dans une famille lambda ; ne serait-ce qu’à travers la pratique (courante mais non systématique) du bisou ou du câlin. Pour autant, les accueillants se fixent des limites : « la mission des LVA, c'est de protéger les enfants,

mais il ne faut pas oublier de se protéger » (Christophe, mari de la directrice, LVA D2). Cet interlocuteur

précise qu’il prend toute une série de précautions « pour éviter les emmerdes », comme il dit. Par exemple :

« Je fais en sorte de ne jamais être seul avec un jeune dans sa chambre. Ça peut aller tellement vite dans notre société. Il suffit d’un mensonge, d’un geste mal compris. Après, c'est ta parole contre celle du jeune. Et là… »

La posture de cet enquêté vis-à-vis des jeunes est à l’opposé de celle décrite par Pierre, le permanent du LVA D1 :

[16.02.2019 - LVA D1] 15h45, environ. Pierre et moi sommes dans sa voiture. […] Plusieurs

thèmes de discussion sont abordés, et notamment celui de l’attitude des hommes adultes face aux filles accueillies. Je lui demande alors s’il prend des précautions à ce sujet. Prenant exemple sur les filles qu’il a été amené à accueillir durant sa carrière, il me répond : « Ah pas du tout. Je

m’occupais de tout : de leurs règles, leurs grossesses, des moyens de contraception... J’en ai douché une qui était défoncée au shit un jour, je les voyais en soutien-gorge, je les amenais chez le médecin… Non, je ne prenais pas de précautions particulières. Mais j’ai toujours respecté leur intimité. Il ne s’agit pas de ça en fait. Je pense qu’avoir un interdit de ce type, c'est mettre un tabou, et c'est justement ce qui peut créer des problèmes. »

Il y a, chez Christophe et Pierre, deux façons d’appréhender le rapport aux jeunes accueillis : le premier adopte d’emblée une certaine « distance », le second évoque des situations concrètes où se jouent au contraire de la « proximité ». Chacun se place de manière à être en adéquation avec l’image qu’il se fait de sa place, ni trop loin ni trop près d’autrui, mais dans un espace-temps social qui délimite

et contient la zone d’activités participatives des sujets qui correspond à ce que ces acteurs sont en capacité de réaliser à la fois individuellement et collectivement pour répondre à un besoin » (Paquelin, 2011, p. 566).

La proximité de genre entre accueilli et accueillant est ici déterminante comme nous l’avons vu. Didier, permanent du LVA C2, s’interdit certains sujets et contacts, quand Nathalie, qui vient en journée, ou Véronique, sa compagne, peuvent plus facilement se les autoriser avec les filles accueillies. Pour les femmes permanentes, la question se pose d’ailleurs moins en termes de genre qu’en termes d’âge. On ne verra pas Didier embrasser les filles dans leur lit, comme le font certaines permanentes des LVA de l’enquête qui distribuent des bisous et des câlins réclamés par les enfants, surtout petits, filles ou garçons, au moment du coucher.

Cette question de distance (qui sépare) et de proximité (qui relie) est travaillée par les adultes- accueillants que nous avons rencontrés. Les réponses apportées sont multiples et varient d’un adulte accueillant à l’autre, voire d’un LVA à l’autre106. Ici, la conception des LVA, plutôt familiale ou plutôt

institutionnelle, entre probablement en jeu dans la définition de cette distance-proximité entre jeunes et adultes. Et l’on pourrait logiquement penser que, comparativement à une conception institutionnelle des LVA, une conception familiale de ceux-ci implique des rapports de proximité plus prononcés. Mais les données à ce sujet montrent que la distinction entre les deux types de LVA est floue. En effet, tous combinent des logiques d’action familiales et professionnelles dans lesquelles se développent des liens affectifs. Cette hybridation des logiques est une caractéristique commune aux LVA investigués.

La notion de distance-proximité a quelque chose à voir avec ce que les adultes accueillants s’autorisent ou non à faire avec les jeunes. Certes, les LVA disposent a priori d’une plus grande autonomie d’action par rapport aux établissements d’accueil classiques (les MECS par exemple). Mais il ne faut pas oublier que leur intervention auprès des jeunes s’inscrit elle aussi dans le cadre plus large de la protection de l’enfance. Cette dernière vise, rappelons-le, « à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation »107. À bien des égards, ce cadre-

là – qui repose sur une législation bien élaborée – détermine la ligne de conduite des adultes accueillants, les actions autorisées et les actions interdites. De ce fait, l’autonomie des accueillants, dans l’élaboration du cadre normatif de l’accueil des jeunes, est une autonomie relative. Et c’est

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