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PREAMBULE A LA CONSTRUCTION DU

III.1. C ONSTRUCTION DU MODELE

III.1.1. Objectifs et grandes lignes

L'objectif est ici de construire un modèle QS physique de la µPEMFC. Le point clé de celui-ci sera la prise en compte de son état d'hydratation, et de l'impact de celui-ci sur le point de fonctionnement électrique. Le fait de se restreindre au régime QS théorique idéal suppose que nous sommes affranchis de la considération des régimes transitoires, et des singularités dynamiques décrites au Chapitre II (sauts de spectres, phénomène d'accrochage, dynamique UBF…). Dans ce cadre, l'évocation d'un point de fonctionnement (IFC;VFC) supposera

implicitement que ce point est idéalement et absolument stabilisé, indépendamment des points qui auraient pu le précéder, c'est-à-dire de l'historique de fonctionnement de la µPEMFC. Le régime QS théorique implique aussi que le fait d'imposer la tension ou le courant n'a aucune importance : le point de fonctionnement QS est atteint et défini, quel que soit le chemin par lequel la grandeur électrique laissée libre sera passée. Néanmoins, dans notre cas, et pour les raisons évoquées au Chapitre II, le modèle développé sera orienté "galvanostatique" (courant imposé) dans sa formulation.

D'un point de vue fonctionnel, nous avons vu au Chapitre II que, à consigne électrique donnée, les conditions opératoires affectaient le contenu en eau, et donc la réponse électrique de la µPEMFC. Les entrées du modèle seront donc un point de consigne en courant IFC, et un

jeu de conditions opératoires (TFC; Ta; HRa). Celles-ci définiront un état d'hydratation, et donc

le point de réponse en tension VFC, qui sera donné en sortie.

Les phénomènes physiques entrant en jeu dans le calcul de la sortie en fonction de l'entrée seront modélisés, et donc décrits dans leur ensemble par un jeu de paramètres. L'objectif ultime du modèle est de pouvoir décrire la réponse QS en tension d'une µPEMFC dans n'importe quelle condition opératoire, et ce avec un seul jeu de paramètres. En d'autres termes, ces paramètres devront être assez "essentiels" pour ne pas avoir à varier avec IFC, et avec les

105 Le modèle que nous avons pour objectif de construire sera développé à l'échelle macroscopique. Ainsi, le courant sera considéré comme étant uniforme dans tout le matériau conducteur des électrodes. La température de pile TFC sera elle aussi considérée homogène

dans le volume de la µPEMFC, et décrira la température de tout ce qui est interne à ce système (température des gaz à l'intérieur du milieu poreux, température de l'eau liquide…). De même, le contenu en eau cathodique, dont nous parlons plus précisément au III.1.2.1, sera considéré comme moyen, représentatif de l'ensemble du volume de la cathode, sans distinction ou description spatiale explicite. Cette vision macroscopique des choses est à mettre en lien avec les observations que nous sommes capables de faire sur la µPEMFC. Nous ne pouvons observer, à l'issue de mesures telles que celles décrites par le Chapitre II, qu'un courant résultant, une tension résultante, et des conditions atmosphériques globales. Les phénomènes physiques définissant le comportement de la µPEMFC ne nous sont donc accessibles qu'à une échelle d'observation macroscopique, ou effective. Nous essayons donc, pour les décrire via un modèle, de nous cantonner tant que possible à cette échelle de description. Emprunter trop de voies de description microscopique multiplierait inévitablement le nombre d'éléments constitutifs du modèle invérifiables, ou impossibles à orienter, par l'observation expérimentale réelle à disposition au laboratoire. C'est pourquoi l'échelle macroscopique, et sa description effective des choses, déjà délicate, est préférée dans la première approche de modélisation que constitue cette thèse. Si globalement un modèle effectif donne de bons résultats, il pourra être intéressant d'y plonger plus en profondeur, la démultiplication des détails en résultant pouvant se baser sur le résultat global qu'elle devra finalement décrire.

III.1.2. Bilan hydrique

III.1.2.1. Identification de l'objet hydrique définissant

l'hydratation

Comme dit au-dessus, le cœur du model sera le calcul de "l'état d'hydratation" de la µPEMFC. Reste à définir cet état d'hydratation, et à lui associer une grandeur physique quantifiable. Quel objet hydrique varie avec la sollicitation électrique (c'est-à-dire le courant, donc le flux d'eau produite) et les conditions atmosphériques (c'est-à-dire le flux évaporé)?

Les études menées par N. Karst, ainsi que les résultats exposés au Chapitre II, pointent premièrement vers une variation du contenu en eau du Nafion composant une partie des électrodes et la membrane, à travers les mesures de Rélec. Cette grandeur s'est en effet avérée

être un bon indicateur de l'état d'hydratation de la µPEMFC, et être sensible aux conditions opératoires ainsi qu'au courant imposé. Cependant, dans notre étude, nous prendrons Rélec

comme une grandeur mesurée et acquise, qui sera utilisée en tant que telle dans le modèle QS. Un deuxième objet hydrique majeur désigné par les analyses du Chapitre II est le contenu en eau liquide de la cathode. C'est en effet à la cathode que l'eau est produite, et c'est bien cette électrode qui est en contact avec l'atmosphère, et donc qui est la première à en subir l'influence, quant à l'évaporation de son contenu en eau. Celui-ci était d'ailleurs le premier suspect en cause dans l'explication des sauts de spectres, le désignant comme étant le vecteur principal de l'assèchement de la µPEMFC. La première partie du Chapitre II s'attache de plus à montrer que les pertes électriques associées à la cathode, c'est-à-dire les pertes d'activation liées à oxydation de l'O2, et les pertes associées à sa diffusion, ont de fortes chances d'être très sensibles à son contenu en eau (taille de la molécule d'O2 et accession aux sites actifs).

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A contrario, l'hydratation de l'anode est en premier lieu imposée par le flux circulant d'H2 humide, qui est instauré dans toutes les mesures, qui le sera dans l'utilisation finale, et qui reste identique quelles que soient les conditions opératoires.

Même si, par le jeu de l'électro-osmose et de la rétrodiffusion, son contenu en eau pouvait lui aussi dépendre des conditions atmosphériques vues par la cathode, celui-ci aurait par ailleurs beaucoup moins d'impact sur les pertes, en particulier de diffusion de l'H2, qui y sont localisées. Ce n'est donc pas sur le contenu en eau anodique que nous porterons notre étude : nous considérons que même s'il fluctue, il influe en première approximation, peu sur le résultat électrique final.

L'objet hydrique que nous visons est donc bien le contenu en eau de la cathode. Pour définir celui-ci, nous ferons appel à une notion apportée par l'étude des milieux poreux, et de l'influence de leur hydratation : la saturation en eau liquide, notée s.

La saturation en eau liquide d'un système poreux est le ratio entre le volume d'eau liquide qui occupe effectivement les pores (le milieu interstitiel), et le volume total qu'offre théoriquement ce système pour stocker de l'eau liquide (volume de la totalité du milieu interstitiel) :

𝑠 =𝑉𝑙𝑖𝑞𝑢

𝑉𝑡𝑜𝑡 (III-1)

Dans toute la suite, nous désignerons donc par "s" la saturation du système poreux représenté par la cathode de la µPEMFC. La saturation en eau cathodique sera donc une valeur moyenne, décrivant la situation globale de l'ensemble de ce milieu poreux, sans localisation précise. A cet égard, nous considérons en quelque sorte directement l'intégralité de la cathode comme un volume élémentaire représentatif (VER) moyenné, c'est-à-dire que nous la considérons comme homogène du point de vue de sa saturation. La notion de VER est empruntée à la théorie des milieux effectifs, dont l'objet est notamment d'étendre des lois locales à un comportement macroscopique, ou effectif. Le VER en lui-même permet dans ce cadre d'approcher un matériau hétérogène complexe par un matériau homogène simplifié, en le décrivant par un volume assez petit pour rendre compte de ses propriétés microscopiques, indispensables à sa description, mais assez grand pour être représentatif du matériau dans son ensemble. Il est particulièrement utilisé dans l'étude des transferts de masse et de chaleur en milieu poreux. Sa définition peut être complexe et sujette à discussion. Ici, nous supposons donc directement son existence, et l'étendons même à l'ensemble du système représenté par la cathode.

Cela correspond à l'échelle macroscopique à laquelle nous nous plaçons, et paraît adapté à la très petite taille réelle de ce volume cathodique : le comportement effectif aura des chances d'être proche du comportement "local" (cette approche serait bien plus difficilement soutenable dans une PEMFC dont la cathode ferait état d'une forte épaisseur et d'une grande surface, les hétérogénéités du contenu en eau pouvant alors être très grandes, et avoir une très forte influence sur le résultat).

Dans cette optique macroscopique, nous ne nous intéresserons donc pas au déplacement de l'eau liquide au sein du milieu poreux. Cela explique pourquoi dans la suite, la loi d'écoulement capillaire de Darcy n'est pas utilisée.

Enfin, selon la sollicitation électrique IFC, et les conditions opératoires imposées, s variera,

impactera les pertes électriques, et donc VFC. Nous raisonnerons en ce sens de manière

107 réponse électrique.

III.1.2.2. Formulation du bilan hydrique à la cathode

Nous voulons donc savoir en premier lieu comment varie la quantité d'eau dans le milieu poreux de la cathode. Imaginons que la µPEMFC soit en fonctionnement, sous un IFC donné

et sous des conditions opératoires fixées.

Entre un instant " 𝑡 " et un instant quasi consécutif " 𝑡 + 𝑑𝑡 ", le nombre de moles d'eau liquide contenu par le système cathodique passera de 𝑛𝐻𝑙2𝑂 𝑡 à 𝑛𝐻𝑙2𝑂 𝑡 + 𝑑𝑡 sous l'influence d'un flux molaire global d'eau liquide entrante, noté 𝐽+(𝑡), et d'un flux molaire global d'eau liquide sortante noté 𝐽−(𝑡), pendant un temps 𝑑𝑡.

Ceci peut se traduire mathématiquement par l'équation (III-2) : 𝑛𝐻𝑙2𝑂 𝑡 + 𝑑𝑡 = 𝑛𝐻𝑙2𝑂 𝑡 + 𝐽+(𝑡). 𝑑𝑡 − 𝐽(𝑡). 𝑑𝑡

(III-2)

Ceci étant dit, comme cela a été évoqué au début du Chapitre II, l'eau liquide pourra être apportée à la cathode :

-Par 𝐽𝐻2𝑂

𝑝𝑟𝑜𝑑, le flux produit par la réduction de l'O

2 à la cathode. -Par 𝐽𝐻2𝑂

𝐸𝑂 , le flux électro-osmotique induit par la circulation des protons de l'anode vers la cathode.

L'eau liquide pourra être évacuée de la cathode : -Par 𝐽𝐻2𝑂

𝐸𝑣 , le flux évaporé vers l'atmosphère.

-Par 𝐽𝐻𝑅𝑑2𝑂, le flux rétrodiffusé de la cathode vers l'anode en réponse à un assèchement de cette dernière.

Cependant, nous avons vu que l'anode était approvisionnée en eau, et régulée hydriquement, par la circulation du flux d'H2 humide. Les multiples études menées par N. Karst nous laissent supposer qu'en ces conditions, l'anode ne souffre pas d'assèchement. Il y a donc de fortes chances pour que, dans la majorité des cas de figure, même en la présence d'un flux électro osmotique conséquent, la rétrodiffusion soit faible, l'assèchement de l'anode étant compensé par l'humidité de l'H2 y affluant. Nous négligerons donc ce flux rétrodiffusé.

Ainsi, il vient : 𝐽+(𝑡) = 𝐽 𝐻2𝑂 𝑝𝑟𝑜𝑑 + 𝐽 𝐻2𝑂 𝐸𝑂 (III-3) 𝐽−(𝑡) = 𝐽 𝐻2𝑂 𝐸𝑣 (III-4)

Avant de continuer, nous allons d'ores et déjà exprimer simplement 𝐽𝐻2𝑂

𝐸𝑂 . Celui-ci est en effet corrélé au flux molaire de protons circulant de l'anode vers la cathode, qui est le double du flux molaire d'eau produite. Chaque proton pourra néanmoins éventuellement entraîner un cortège plus ou moins volumineux de molécules d'eau. La modélisation des phénomènes de transport dans la membrane, très complexes, n'étant pas notre objectif, nous allons simplifier la corrélation entre 𝐽𝐻2𝑂

𝑝𝑟𝑜𝑑 et 𝐽 𝐻2𝑂

𝐸𝑂 , en la modélisant par un coefficient adimensionnel de transport électro osmotique net et constant : 𝜉. Nous aurons alors :

𝐽𝐻𝐸𝑂2𝑂 = 2𝜉𝐽𝐻𝑝𝑟𝑜𝑑2𝑂 (III-5)

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modélisation hydrique focalisée sur la cathode. On peut la retrouver par exemple dans [Wan01]. Pour avoir un ordre d'idée, 𝜉 prend en général des valeurs comprises entre 0.3 et 0.5. A la suite de cette simplification, nous obtenons donc :

𝐽+(𝑡) = (1 + 2𝜉)𝐽 𝐻2𝑂 𝑝𝑟𝑜𝑑

(III-6)

Le bilan présenté à l'Eq. (III-3) devient alors : 𝑛𝐻𝑙2𝑂 𝑡 + 𝑑𝑡 = 𝑛 𝐻2𝑂 𝑙 𝑡 + (1 + 2𝜉)𝐽 𝐻2𝑂 𝑝𝑟𝑜𝑑𝑑𝑡 − 𝐽 𝐻2𝑂 𝐸𝑣 𝑑𝑡 (III-7) Soit : 𝑑𝑛𝐻𝑙2𝑂(𝑡) 𝑑𝑡 = (1 + 2𝜉)𝐽𝐻2𝑂 𝑝𝑟𝑜𝑑 − 𝐽 𝐻2𝑂 𝐸𝑣 (III-8)

Or, nous travaillons en régime quasistatique : dans ce cadre, la quantité d'eau présente dans la cathode est stabilisée et ne varie pas. Nous avons donc:

𝑑𝑛𝐻𝑙2𝑂(𝑡)

𝑑𝑡 = 0 ⇒ 𝐽𝐻2𝑂

𝐸𝑣 = (1 + 2𝜉)𝐽 𝐻2𝑂

𝑝𝑟𝑜𝑑 (III-9)

L'hypothèse du régime quasistatique atteint nous donne de plus accès à la connaissance de 𝐽𝐻𝑝𝑟𝑜𝑑2𝑂 . En vertu de la loi de Faraday, exprimée pour un flux molaire (mol.s-1):

𝐽𝐻𝑝𝑟𝑜𝑑2𝑂 = 𝐼𝐹𝐶

2ℱ (III-10)

Nous verrons de plus au III.1.3.1.1 que la prise en compte des phénomènes de crossover, et de l'existence de réactions parasites, sera faite sous la forme d'un courant interne 𝐼𝑛, exprimé en ampère. Nous reviendrons sur sa construction lors de la description du modèle électrique, mais tiendrons dorénavant compte de son existence. Tel qu'il sera défini, l'existence du courant interne imposera d'écrire:

𝐽𝐻𝑝𝑟𝑜𝑑2𝑂 = 𝐼𝐹𝐶 + 𝐼𝑛

2ℱ (III-11)

Nous obtenons donc, finalement :

𝐽𝐻𝐸𝑣2𝑂 = (1 + 2𝜉)𝐼𝐹𝐶 + 𝐼𝑛

2ℱ (III-12)

A partir de ce point, il doit être gardé à l'esprit que c'est bien s, associé à𝐼𝐹𝐶 et aux conditions atmosphériques, qui est recherché dans ce bilan hydrique. Ce sont les théories associées aux transferts de matière en milieux poreux qui vont nous permettre d'aboutir. En effet, comme nous allons le voir dans la suite, 𝐽𝐻𝐸𝑣2𝑂 dépend de s. Nous allons donc exprimer cette dépendance explicitement, pour ensuite retourner l'Eq. (III-12), et obtenir une expression littérale quasistatique de s. Il nous faut pour cela nous intéresser de près à la modélisation de l'évaporation en milieu poreux.

III.1.2.3. Modélisation de l'évaporation en milieu poreux