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2.2.3.6 Allure des pertes par diffusion des H +

PREAMBULE A LA CONSTRUCTION DU

III. 2.2.3.6 Allure des pertes par diffusion des H +

La Figure III-19 représente l'allure des pertes par diffusion protoniques pour chaque condition opératoire.

𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻+ (𝑉)

Figure III-19: Tracé de 𝜼𝒅𝒊𝒇𝒇𝑯 +

pour chaque (𝑯𝑹𝒂 ; 𝑻𝑭𝑪𝒉𝒚𝒑 )

La première chose à remarquer est l'évolution de la pente à bas courant, à température donnée, des 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻

+

. Cette pente croît avec la sécheresse de l'atmosphère. Or, c'était précisément ce qui

0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 IFC(A)

Série2 Série5 Série3 Série4

Série1 Série6 Série7 Série8

70% ; 30 C 70% ; 45 C 50% ; 30 C50% ; 30 C 30% ; 30 C 10% ; 45 C 10% ; 30 C 30% ; 45 C 0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 IFC(A)

Série2 Série5 Série3 Série4

Série1 Série6 Série7 Série8

70% ; 30 C 70% ; 45 C 50% ; 30 C50% ; 30 C 30% ; 30 C 10% ; 45 C 10% ; 30 C 30% ; 45 C

155 était recherché au Chapitre II, dans lequel nous avions supposé l'existence d'une perte physique 𝜂𝑎𝑠, qui devait répercuter de cette exacte manière l'assèchement plus ou moins fort de la cathode sur la réponse électrique de la µPEMFC. En outre, si l'on regarde l'allure des 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻+

à 30°C dans leur globalité, on constate qu'ils passent par un maximum, pour décroître par la suite. Là encore, c'est ce qui avait été recherché au Chapitre II (Figure II-5), pour expliquer l'existence de courbes de polarisation "plates" aux courants moyens.

Cette observation est très intéressante. En effet, cela signifie qu'en passant par une description, certes macroscopique, mais physique et sans a priori, du transport des protons et de son altération par le contenu en eau du milieu poreux, nous avons débouché sur une perte dont le comportement correspond à ce qui avait été pressenti suite à l'analyse qualitative croisée d'une multitude de mesures.

De plus, ces pertes sont à mettre en regard avec les 𝜂𝛺, présentées Figure III-20.

𝜂𝛺 (𝑉)

Figure III-20: Tracé de 𝜼𝜴pour chaque (𝑯𝑹𝒂 ; 𝑻𝑭𝑪𝒉𝒚𝒑 ) On ne peut que constater les similitudes entre les évolutions de 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻

+

et de 𝜂𝛺, alors que dans le modèle, les deux sont mathématiquement complètement indépendants. Physiquement pourtant, ils sont nécessairement liés, ne serait-ce qu'à cause du 𝐶𝐻0+ de l'Eq.(III-99). Pris constant et égal à 𝐶𝐻𝐸𝑞+, il devrait en réalité dépendre de la quantité de protons que le Nafion est capable de véhiculer jusqu'au point de sortie des H+ donnant lieu à leur diffusion dans l'eau liquide des pores, c'est-à-dire de Rélec. Cela contribue à crédibiliser un peu plus encore ce

modèle de diffusion protonique.

Revenons maintenant sur les pentes négatives des 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻 +

à 30°C, et, pour illustrer le propos qui va suivre, isolons le 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻

+

modélisé à 30% ; 30°C dans la Figure III-21.

0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 IFC(A)

Série2 Série5 Série3 Série4

Série1 Série6 Série7 Série8

70% ; 30 C 70% ; 45 C 50% ; 30 C50% ; 30 C 30% ; 30 C 10% ; 45 C 10% ; 30 C 30% ; 45 C

156 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻

+

(𝑉)

Figure III-21: Tracé de 𝜼𝒅𝒊𝒇𝒇𝑯 +

pour 𝟑𝟎% ; 𝟑𝟎°𝐂

Cette courbe V(I) fait état d'une pente positive, d'un maximum, d'une pente négative, d'un minimum, puis d'une pente positive. Il est "amusant" de constater (Figure III-22) qu'elle ressemble en cela à la caractéristique I(V) d'une diode à effet tunnel, procédant d'un saut d'électrons, là où le transfert des protons devrait théoriquement, via un mécanisme de Grothuss, se faire de la même manière (C.f. III.1.3.1.7).

Figure III-22: Caractéristique d'une diode à effet tunnel ([Bao06])

Bien entendu, les deux phénomènes dont nous parlons n'ont de comparable que les grandes lignes décrivant leur fonctionnement, mais cette observation permet néanmoins de lever la notion de Résistance Différentielle Négative (Negative Differential Resistance, soit "NDR"). La résistance différentielle est une généralisation de la résistance électrique employée dans les cas linéaires par la loi d'Ohm. Elle est définie par :

𝑅𝑑 =𝜕𝑈

𝜕𝐼 (III-127)

Pour la caractéristique de la diode à effet tunnel, comme pour certains de nos 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻 + , la 0.00 0.02 0.04 0.06 0.08 0.10 0.12 0.14 0.0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8 IFC(A)

157 résistance différentielle peut être négative.

La notion de NDR est très importante dans la science des semi-conducteurs ([Bal93], [Yu10]), mais n'en est pas l'exclusivité. Il s'agit même d'un élément de description clé en biophysique ([Cho04],[Lee10]), ou en électrochimie moderne ([Con99], ou [Kri03]), dans la mesure où son apparition et sa forme caractérisent des propriétés dynamiques non linéaires singulières, ou de propriétés de pseudo stabilité complexes. Plus précisément, une NDR peut apparaître comme étant une caractéristique forte, sous certaines conditions, du transport des protons. Par exemple, dans [Cho04], Tom Chou modélise mathématiquement dans le détail le déplacement des protons par un mécanisme de Grothuss, ces travaux se situant dans le cadre de la biophysique. Il considère pour cela, comme nous l'avons fait, une uniformité du potentiel du milieu dans lequel les protons se déplacent. Il apparaît dans son étude que sous certaines conditions, la caractéristique (Flux protonique – Potentiel du milieu) du déplacement des protons fait état d'une NDR, de même allure que celle de la Figure III-19. Dans le cadre de sa représentation, celle-ci est causée par le coût énergétique représenté par l'orientation adéquate des molécules d'eau supportant le transport des protons, grandeur difficile à connecter à notre échelle macroscopique.

Dans [Kri03], les dynamiques non linéaires intervenant dans une cellule électrochimique sont étudiées par le biais d'une classification des différents types de NDR. Quoiqu'il en soit, l'apparition d'une NDR y est globalement associée à l'interaction entre la résistance ohmique de la membrane, et le comportement du condensateur de double couche, autrement dit les deux éléments physiques influençant le transport des protons.

H.K. Lee et al. étudient dans [Lee10] les courbes de polarisations I-V d'un film d'ADN, soumis à différentes humidités relatives. Certaines de celles-ci font état d'une NDR du même type que celle de la Figure III-19. Ils arrivent à montrer que celle-ci est liée au couplage du phénomène de transport des protons intervenant dans l'électrolyse de l'eau provoquée par la mesure, avec la quantité d'eau liquide présente sur l'ADN. Plus précisément, les NDR apparaissent lorsque la situation est la plus humide. Par notre modèle, nous obtenons des résultats similaires, puisque la Figure III-19 montre que les NDR n'apparaissent qu'à 30°C, température pour laquelle la cathode est globalement plus hydratée, et qu'elles sont d'autant plus marquées que l'humidité relative est forte.

En résumé, même si nous n'avons pu que survoler cette littérature très éclectique, nous constatons que la notion de NDR apparaît de manière récurrente, et conforme à ce que nous obtenons pour 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻

+

, lorsqu'il s'agit de transfert protonique, ou de phénomènes comparables dans leur mécanisme. Dans [Lee10], ces NDR apparaissent même dans des conditions climatiques qualitativement comparables aux nôtres.

Cela pourrait signifier que notre modèle de transport protonique parvient, en couplant variation de la quantité d'eau contenue par le milieu poreux, et diffusion Fickienne, à attribuer un rôle plus ou moins limitant aux protons (ce qui n'est pas classique), donnant au passage aux pertes associées un comportement similaire à ce qui semble être caractérisé par la littérature dédiée. Cela contribue à conforter notre modèle, augmentant la probabilité que celui-ci soit au moins sur la bonne voie.

Un autre point intéressant est que l'apparition d'une NDR dans un système peut impliquer que celui-ci soit soumis à un régime de bi-stabilité (Cf. [Kri03]), ou de multi-stabilité. C'est concrètement dans cette situation que nous sommes : la Figure III-21 montre que, sur une

158

certaine gamme de tensions, pour un 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻 +

donné, il existe plusieurs valeurs stables, par construction, de 𝐼𝐹𝐶. La diffusion des protons est donc multi-stable. La thèse de Mathias Gérard [Ger10] fait d'ailleurs également écho à la notion de NDR et de multi-stabilité dans ses résultats, dans le cadre de l'étude du comportement d'une PEMFC H2/air en conditions de faibles stœchiométries (p71).

Cela nous ramène directement au phénomène "d'accrochage" étudié expérimentalement au II.3.1.1 du Chapitre II. Celui-ci montrait que, à partir d'une très faible différence de conditions hydriques initiales, la même procédure de démarrage, constituée d'une alternance de paliers (0V-100mV), pouvait donner des profils de réponse en courant très différents. Le même constat avait été fait sur le tracé de courbes QS potentiostatiques à 5 points, donc faisant état d'un grand écart de tension entre chaque palier, qui, dans des conditions opératoires en apparence similaires, pouvaient donner des résultats très différents.

Il avait alors été dit que ce phénomène de disparité des résultats possibles donnait la très nette impression de procéder d'un "accrochage", c'est-à-dire que, sous l'impulsion d'un fort écart de tension, le courant pouvait parfois passer au-dessus d'un "seuil", cela se jouant à peu de choses, et "accrocher" de plus fortes valeurs, pour s'y stabiliser. En regardant la Figure III-21, on peut maintenant proposer une explication.

En mode potentiostatique, on impose les pertes en tension. Celles-ci répondant à certaines lois de variations en fonction du courant, il en résulte un 𝐼𝐹𝐶 donné. En imposant un fort écart de tensions V1-V2 à la µPEMFC, on peut occasionner un petit dépassement de courant (Cf. Figure II-35 au Chapitre II), dû aux dynamiques internes. Or le 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓 ,2𝐻

+

, fixé par V2, peut potentiellement, sous certaines conditions opératoires, guider la µPEMFC vers plusieurs valeurs de courant stables. Selon l'amplitude du dépassement de 𝐼𝐹𝐶, il est possible que celui- ci se dirige vers l'une ou l'autre de ces valeurs stables.

La disparité en apparence presque chaotique de la réponse de la µPEMFC à des stimulis potentiostatiques brutaux serait alors imposée par la quantité d'eau dans le milieu poreux, et par la diffusion protonique qu'elle autorise. Il serait intéressant de tester cette hypothèse en étudiant la reproductibilité des procédures de démarrage sous diverses conditions opératoires. Si elle est vraie, alors :

● Dans des conditions imposées sèches, la reproductibilité devrait être meilleure que dans des conditions plus humides.

● Un profil de démarrage galvanostatique devrait donner des résultats plus reproductibles. En résumé, la description physique que le modèle QS fait de la diffusion des protons, par le fait qu'elle introduit naturellement une NDR, permet d'apporter une explication au phénomène d'accrochage, via la notion de multi-stabilité amenée par celle de NDR. Celui-ci serait alors du aux propriétés de l'interaction entre la quantité d'eau et la qualité de la diffusion protonique.

Pour conclure, les pertes par diffusion protoniques, point clé et sensible du modèle, se comportent de manière particulière (il y a notamment existence, selon les conditions opératoires, d'une NDR, notion non triviale), et sont construites à partir d'hypothèses fortes. En ce sens, il était légitime de questionner leur validité. Sans que cela ne prouve rien de manière absolue, nous avons vu au cours de ce paragraphe que beaucoup d'éléments d'origines diverses semblent venir soutenir la construction et la réponse apportée par notre modèle de transport protonique qui, sans compter qu'il parvient à décrire le comportement de la µPEMFC, apporte sous sa forme actuelle des réponses concrètes à des questions posées par l'expérimentation.

159 III.2.2.3.7. Evocation du mécanisme à étape d'électrosorption des H+

Les pertes 𝜂𝑑𝑖𝑓𝑓𝐻 +

(𝑠) ont néanmoins de fortes chances d'être insuffisantes pour décrire l'apport en protons au lieu de la réaction et leur aspect potentiellement limitant. Cela s'est vu par le biais de l'apparition d'une dépendance à la température de 𝐼00. Leurs non linéarités paraissent assez bonnes, quoique parfois approximatives dans les bas courants, mais leur valeur moyenne semble être insuffisamment sensible à la température. A ce titre, nous avions évoqué au III.2.2.3.2 la possible existence d'une perte 𝜂𝜃𝐻

+

supplémentaire.

Une piste sérieuse à ce sujet, et vers laquelle le Chapitre IV et le Chapitre V pointeront sérieusement, serait l'intercalation dans le mécanisme réactionnel d'une étape d'électrosorption des ions H+. Ce type d'étape fait en effet intervenir l'information de la nécessité qu'ont les protons à s'associer à des sites superficiels libres, présents à l'interface électrode/électrolyte, pour former des adsorbats neutres, avant de pouvoir intervenir dans l'étape finale de la réaction d'électrode.

Cette étape d'électrosorption pourra alors être limitante, dans la mesure où un site superficiel déjà occupé par un adsorbat ne pourra accueillir un nouveau proton. Le facteur limitant sera alors le taux de recouvrement des sites superficiels, souvent noté "𝜃".

A ce titre, l'étape peut introduire une perte 𝜂𝜃𝐻 +

, telle que décrite par H. Li et al. dans [Zha08] (Part2).

A l'égard d'une telle perte, même si nous n'avons malheureusement pas pu nous plonger dans le détail de la théorie, plusieurs choses intéressantes, très intuitives, sont à noter :

● 𝜂𝜃𝐻 +

est définie par le taux de recouvrement 𝜃, qui lui-même est défini par des isothermes (isothermes de Frumkin, isothermes de Langmuir). Celles-ci pourraient contenir l'information de l'offset des pertes avec la température que nous recherchons.

● La description rigoureuse d'un tel mécanisme, par exemple via la représentation de Volmer- Heyrovsky (Cf. [Dia96], p285), conduit à des courbes courant-tensions contenant des NDR ([Dia96], p172), plus ou moins marquées selon la qualité de l'activation. L'introduction dans le modèle des limitations induites par un mécanisme d'électrosorption pourrait donc être complémentaire de la description diffusive que nous avons faite de l'apport en protons, et y apporter les informations manquantes.

Nous verrons, dans le cadre de l'analyse petit signal du Chapitre IV, que quelques éléments forts viendront appuyer cette intuition (manque d'un 𝜂𝜃𝐻

+

, ou de manière plus générale, d'un 𝜂𝜃, dans le modèle), tout en appuyant la nécessité d'une description des pertes par diffusion protonique d'autre part. Nous n'avons cependant pas eu le temps d'explorer en profondeur cette voie et ses implications, d'où l'aspect très général de ce paragraphe : il s'agit avant tout d'une piste de réflexion. Pour plus de détails sur les mécanismes l'électrosorption et sur leur impact sur la réponse QS, mais aussi petit signal, d'un composant électrochimique, le lecteur pourra se référer à [Dia96], [Zha08], ou à [Dia02].

III.2.3. Test du modèle sur les courbes UBF