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sur la biodiversité

L’article 54 de la loi Grenelle 1 indique que la France soutiendra au plan communautaire l’instauration d’un taux réduit de TVA sur les produits à faible impact sur la biodiversité. Les taux réduits de TVA peuvent s’analyser comme des dépenses fiscales. D’une manière générale, les données Eurostat montrent que la France y a plus souvent recours que les pays voisins de l’UE. Le groupe de travail estime qu’il serait cohérent avec l’article 54 de la loi Grenelle 1 que les taux réduits de TVA bénéficiant à certains produits à fort impact sur la biodiversité (intrants, eau, etc.) soient revus et éventuellement portés au taux normal.

RURALITÉ

12. Ralentir l’artificialisation du foncier rural non bâti

Les usages traditionnels du foncier non bâti rural engendrent, le plus souvent, en France, une rentabilité nette nulle ou négative en termes réels. Outre ses inconvé- nients intrinsèques, cette situation est préoccupante du point de vue de la biodiversité car elle incite les détenteurs de ce type de biens à en changer le statut en les artificialisant, pour tenter d’en tirer un rendement réel positif. A minima, toutes les aides incitant à cette artificialisation devraient être évaluées et revues, dans l’optique de les diminuer. Parallèlement, un allègement des charges pesant sur le foncier rural non bâti permettrait de réduire, ne serait-ce que marginalement, l’écart de rentabilité avec celui du foncier bâti et limiterait donc cette incitation à l’artificialisation.

13.Réviser la structure de taxation des facteurs de production agricole

Historiquement, la PAC s’est construite en se donnant notamment comme but la constitution d’un marché intérieur autosuffisant. Pour fonctionner efficacement et avec des règles de concurrence saines et équilibrées, un marché intérieur suppose des niveaux et structures de charges pas nécessairement identiques mais progressive- ment rapprochés. Or ces niveaux et structures semblent, aujourd’hui encore, trop éloignées d’un État membre à l’autre. Cette situation a été accentuée par les élargissements successifs de l’UE. D’une manière générale, la France pourrait donc soutenir les efforts d’harmonisation relative engagés par la Commission européenne. Plusieurs facteurs sont avancés pour expliquer la moindre compétitivité de l’agriculture française par rapport à certaines de ses concurrentes européennes : structures de production hétérogènes, positionnement par rapport à la demande parfois non optimal, faible taille des industries agroalimentaires investissant donc

insuffisamment en R & D, multitude d’organisations professionnelles ne permettant pas d’exploiter pleinement les économies d’échelle, etc. Il n’appartient pas au groupe de travail d’examiner ces facteurs ni de les hiérarchiser. En revanche, l’un d’entre eux au moins mérite attention, au regard de la présente saisine. La structure des charges agricoles en France semble aujourd’hui défavorable tant à la compétitivité du secteur qu’à la biodiversité. De fait, l’écart de compétitivité de l’agriculture française avec les autres pays de l’UE est aussi dû en partie à un coût du travail et à des charges sociales plus élevées que dans les pays voisins. À l’inverse, les intrants y semblent moins imposés.

Dans le secteur agricole, c’est en France que la durée légale du travail est la plus basse (35 heures contre 40 en Allemagne, Espagne, Pologne, Roumanie, 39 en Italie, 38 aux Pays-Bas, etc.), les cotisations patronales rapportées au salaire brut les plus élevées (41,55 % contre 18,34 % aux Pays-Bas, 23 % en Allemagne, 21,25 % en Espagne, 19,8 % en Pologne, etc.), le salaire horaire minimum légal le plus élevé (8,27 euros contre 3,20 en Espagne, 1,66 en Pologne, 0,66 en Roumanie, entre 4,46 et 6,39 en Allemagne, 8,13 aux Pays-Bas et le salaire moyen le plus élevé (supérieur à 12 euros contre 6 à 9 en Allemagne, moins de 6 en Espagne, Grèce et Portugal, moins de 3 pour les nouveaux États membres)1. À l’inverse, le carburant agricole était beaucoup moins détaxé en Allemagne qu’en France (dépense fiscale respectivement de 450 millions d’euros et 1,26 milliard d’euros)2

. Le constat est plus nuancé pour les charges foncières. La France est, en 2010, le troisième État membre de l’UE par ordre d’importance du poids des charges foncières par rapport à la valeur de la production : 2,23 %, alors qu’il est inférieur à 1 % dans 16 États membres3

. Par exemple, en Allemagne, le produit total de l’équivalent de la TFNB (taxe sur le foncier non bâti) s’élevait en 2008 à 354 millions d’euros alors qu’il était près de quatre fois supérieur en France (1,32 milliard d’euros). Mais le prix de la terre agricole, que ce soit à l’achat ou à la location, est en France parmi les plus bas d’Europe. Cette situation, en partie due au statut du fermage, entraîne trois conséquences qui jouent dans des directions différentes. Elle limite le poids des charges foncières pour l’agriculture (la conséquence pour la biodiversité peut être positive, neutre ou négative car cela dépend du type d’agriculture pratiqué). Elle rend moins chère et donc plus rentable la construction de bâtiments, logements et autres équipements sur des terres agricoles (conséquences dommageables pour la biodiversité). Elle contribue à la très faible rentabilité du foncier rural non bâti locatif ce qui constitue une incitation à son changement de destination (artificialisation), pour bénéficier d’un rendement plus élevé (conséquences dommageables pour la biodiversité).

Une partie de la fiscalité relative aux intrants étant encadrée par l’UE (TVA, accises minima sur l’énergie), les éventuelles réformes dans ce domaine devraient se faire dans un cadre communautaire, sans que l’agriculture française soit défavorisée. Mais, tendanciellement, les régimes dérogatoires des intrants en France deviendront probablement de plus en plus difficiles à justifier au regard des objectifs des politiques internationales, européennes et nationales dans les domaines de l’énergie, du climat, de la biodiversité, de l’eau, aux normes plus strictes.

(1) Dionis du Séjour J. (2011). Rapport fait au nom de la Commission des Affaires économiques sur la proposition de loi visant à renforcer durablement la compétitivité de l’agriculture française, n° 3198, Assemblée nationale.

(2) Cour des comptes (2011). (3) Eurostat.

Une piste à approfondir est donc une révision de la structure de taxation des facteurs de production en agriculture, avec augmentation de la fiscalité sur les intrants potentiellement négatifs pour la biodiversité dès lors qu’ils sont utilisés de façon excessive ou inappropriée (engrais, produits de traitement des cultures, eau) et baisse des charges sociales et de la fiscalité sur le foncier non bâti. Bien conduite, une telle révision, sans nuire à la compétitivité si elle est opérée sur le principe de la stricte compensation, aurait l’avantage d’encourager la protection de la biodiversité (même s’il apparaît difficile de calculer à ce stade ce gain en matière de biodiversité, et d’environnement de façon plus générale), de favoriser l’emploi agricole et peut-être de limiter la conversion des terres agricoles à d’autres usages non agricoles. Dans une optique dynamique, elle serait également positive en encou- rageant une évolution vers des pratiques et des systèmes plus économes en intrants chimiques et en eau, plus intensives en travail.

14.Privilégier une écofiscalité incitative

Dans le domaine de l’agriculture comme ailleurs, il convient de privilégier une véritable écofiscalité incitative et non une fiscalité budgétaire à but de rendement.

Une telle fiscalité vise à inciter à des changements de comportements, de pratiques, de systèmes, d’utilisation d’intrants. Elle suppose des conditions d’emploi strictes : une base précisément définie, une élasticité-prix importante à moyen terme et, si possible, à court terme, des produits ou des pratiques de substitution, une possibilité de report de la charge fiscale en amont ou en aval – voire une redistribution du produit de la taxe au sein même du secteur –, une introduction progressive accompagnée d’explications et de pédagogie. Ce type d’écofiscalité donne de bons résultats : en témoignent les exemples de la TGAP lessives en fonction de la teneur en phosphates, de la RPLP suisse1, de la taxe sur les NOx en Suède, de la tarification de l’eau en Israël, etc. Le groupe de travail recommande que soient identifiées, dès maintenant, avec la profession, les assiettes sur lesquelles et les conditions dans lesquelles ce type de fiscalité pourrait être introduit ou accentué dans le secteur agricole, parallèlement à la baisse des charges sociales évoquée ci-dessus, sous réserve d’acceptabilité par l’UE. En outre, le renchérissement de l’usage de ces produits serait de nature à stimuler les efforts de R & D destinés à économiser les intrants objets de ces mesures.

En matière de produits phytosanitaires, en dehors des substances interdites, une fiscalité différenciée pourrait, par exemple, être introduite entre deux produits à l’efficacité équivalente mais ayant un effet différent sur la biodiversité.

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