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ÉTALEMENT URBAIN ET ARTIFICIALISATION DES SOLS

34.Principes généraux

Le rythme de l’artificialisation de l’espace et de l’étalement urbain constitue une des causes d’érosion de la biodiversité française les plus évidentes. De façon unanime, le groupe de travail considère que ce rythme n’est pas soutenable. De nombreux soutiens publics ont facilité et continuent de favoriser ces tendances. On trouvera plus loin, dans la seconde partie, plusieurs recommandations de réformes précises et concrètes, dont beaucoup semblent possibles à court terme. Pour le moyen terme, plusieurs pistes de réforme mériteraient d’être approfondies :

• dans le logement social, une réorientation partielle des aides à la pierre vers les aides à la personne pourrait s’avérer moins dommageable à la biodiversité ; • des mutations sociologiques profondes, comme l’allongement de la durée de vie,

la géométrie variable de la cellule familiale (familles monoparentales/ recomposées), mais également des évolutions d’organisation économique (télétravail, auto- entrepreneuriat, etc.) ont des impacts importants sur la typologie des logements utiles. Ces mutations appellent à une plus grande flexibilité des logements pour leur permettre d’être adaptables à moindre coût aux différents parcours de vie personnels et professionnels, de moins en moins linéaires. Le logement modulaire pourrait fournir une solution parmi d’autres à ce besoin. Par « modulaire », le groupe de travail entend des logements dont certaines pièces peuvent être réordonnancées ou autonomisées car ces aménagements ont été prévus à la conception. Il peut également s’agir de logements extensibles par l’acquisition d’une pièce supplémentaire, soit au même étage, soit à un niveau inférieur ou supérieur. Il y a là, dans des proportions qui restent à évaluer, une piste pour économiser l’espace car des logements adaptables à moindre coût aux besoins de leurs occupants pourraient voir leur usage fortement prolongé. Cela va dans le sens d’un urbanisme plus dense, mixte et fonctionnel et peut faciliter le réaménagement urbain en ville même, matérialisant ainsi le concept de « ville sur la ville », propre à limiter l’artificialisation d’espaces naturels et agricoles. Le groupe de travail considère donc que le logement modulaire pourrait être encouragé de trois façons au moins :

− en matière de recherche tout d’abord, notamment dans le cadre du programme d’investissements découlant du Grand Emprunt et consacré à la ville du futur ; − en réfléchissant à d’éventuelles modifications du code de l’urbanisme

permettant, le moment venu et le cas échéant, de faciliter l’implantation de logements modulaires en certains lieux ;

− en ciblant un certain nombre d’incitations fiscales sur ce type de logements, et notamment en favorisant les copropriétés qui ont accepté d’adopter un règlement prévoyant et organisant la modularité des logements ;

• la construction de logements neufs individuels en zone d’étalement urbain tend à être plus rentable en termes de promotion immobilière que la rénovation urbaine ou que la densification par construction de logements neufs en intra-urbain, notamment dans les centres-villes. C’est d’autant plus vrai qu’une partie notable des coûts collectifs importants de l’étalement urbain ne sont supportés ni par les promoteurs immobiliers ni par les accédants à la propriété. La réduction de ce différentiel de coûts serait souhaitable. Toutefois, à moyen terme, le groupe de travail estime que doit être examinée la possibilité de subordonner les autorisations de construire en zone à urbaniser (« zone AU ») à la construction préalable dans les « dents creuses » de l’agglomération ou, au minimum, à un engagement simultané du promoteur de construction de logements neufs en intra-urbain ou de rénovation urbaine.

35. Fiscalité des propriétés publiques

Une grande partie de l’artificialisation de l’espace résulte de l’action de l’État ou des collectivités territoriales. Or les propriétés publiques sont, d’une manière générale, peu fiscalisées1

:

• sont exonérés de TFB les immeubles de l’État, des régions, des départements, des communes, des établissements publics de coopération intercommunale, des syndicats mixtes et des ententes intercommunales, les voies publiques, les ports autonomes, etc. ;

• sont exonérés de TDCAUE, TDENS et TLE (regroupées dans la taxe d’aména- gement à partir de 2012) les constructions affectées à un service public ou d’utilité publique, notamment édifiées par l’État, les collectivités locales et leurs groupements, les établissements publics, les mutuelles, etc. ;

• sont exonérés de CET les services et organismes de l’État, les régions, les départements, les communes (ou leurs groupements) et leurs régies non dotées de la personnalité morale pour leurs activités présentant un caractère essentiel- lement culturel, éducatif, sanitaire, social, sportif ou artistique, les grands ports maritimes, les ports autonomes, les ports gérés par des collectivités territoriales, des établissements publics ou des sociétés d’économie mixte ;

• sont exonérées de TFNB les voies publiques (les routes nationales, les chemins départementaux, les voies communales, y compris les places publiques servant aux foires et marchés, etc., alors que les terrains occupés par des chemins de fer sont soumis à la taxe). Cette exonération constitue une forme de subventions déguisées à la route par rapport au fer : elle minore son coût malgré ses externalités en matière de biodiversité (imperméabilisation, effet de coupure, collision avec des espèces animales, effets des polluants atmosphériques sur la végétation alentour, etc.)

Du point de vue des finances publiques, il semble contre-intuitif que l’État et les collectivités territoriales acquittent des taxes assises sur des bases qu’elles se verseraient à elles-mêmes. Pourtant, du point de vue économique et environnemental, cela conduit à minorer le coût de ces équipements, parfois facteurs d’étalement

(1) TFB : taxe sur le foncier bâti ; TDCAUE : taxe départementale pour le financement des conseils d’architecture d’urbanisme et de l’environnement ; TDENS : taxe départementale des espaces naturels sensibles ; TLE : taxe locale d’équipement ; CET : cotisation économique territoriale ; TFNB : taxe sur le foncier non bâti.

urbain et cela n’incite guère l’État et les collectivités territoriales à un usage économe et rationnel de l’espace qui serait conforme à son caractère fini, à sa rareté croissante, aux conflits d’usage ascendants qu’il engendre, à la RGPP, à la thématique de l’État exemplaire et à l’esprit du Grenelle. Par ailleurs, l’État et les collectivités territoriales ne peuvent s’exempter entièrement des contraintes qu’ils imposent en la matière aux professionnels et aux ménages. D’autant que plusieurs équipements mentionnés ci- dessus semblent passibles, en principe, de certaines de ces taxes mais bénéficient d’une exonération de fait, en vertu de la doctrine administrative (par exemple, la TFB pour les ports autonomes, Cour administrative d’appel, Douai, 20 décembre 2001). Le groupe de travail n’a pas trouvé de solution entièrement satisfaisante à cette question mais il a tenu à attirer l’attention des pouvoirs publics sur son importance croissante dans un contexte d’espace rare.

Plusieurs pistes mériteraient d’être explorées : veiller à ce que les équipements publics et collectifs donnent l’exemple en matière de densité urbaine, au besoin en créant des surCOS1

à leur profit, bonifier ou pénaliser les administrations selon leurs décisions d’implantation de nouveaux locaux administratifs et équipements d’accueil du public en fonction de la distance par rapport aux TCSP2 et aux centres-villes, etc.

36.Intégrer un critère de biodiversité dans le calcul de la dotation

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