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Chapitre 2. Comportement de conduite et comportement d’évacuation

4. Bilan sur les comportements de conduite et d’évacuation

Ce deuxième chapitre a été l’occasion de préciser le cadre théorique qui entoure notre objet de recherche et qui se rapproche progressivement de notre pratique. La définition des concepts théoriques s’est poursuivie et a pris appui sur les connaissances existantes autour du comportement humain « in-situ » : la conduite automobile, l’évacuation en cas d’incendie en bâtiment et en tunnel routier. Ces connaissances donnent des éléments de précision sur notre problématique. Existant peu d’études sur le comportement humain en tunnel routier, nous avons pris comme référence celles menées dans des domaines avancés de la recherche en matière de conduite automobile et d’évacuation face à un incendie.

Lorsqu’un événement survient dans un tunnel routier, l’usager qui emprunte l’ouvrage est à bord de son véhicule. Afin de mieux comprendre le contexte dans lequel il se situe au moment où l’incendie se déclare, nous avons pris pour référence les études modélisant cette activité et en particulier l’approche de l’INRETS qui étudie depuis de nombreuses années ces questions. Elle souligne l’importance de la lisibilité de la route et la met en perspective avec certaines « erreurs » de conduite qui peuvent mener à l’accident. Une étude récente met également en avant l’absence d’intériorisation de la règle dans la transgression de cette dernière (Gaymard, 2006a, 2006b).

Nous avons ensuite développé les concepts utilisés dans les études sur le comportement humain lors de situations de danger qui sont les plus abouties à ce jour sur ce sujet. Des similitudes avec le contexte des tunnels routiers apparaissent. Ces études démontrent que les dispositions de sécurité sont parfois construites sur la base de certains a priori et que le comportement attendu est également différent de celui observé. En effet, en présence d’une sirène d’alarme la réaction et la mise en sécurité des personnes n’est pas immédiate.

Le terme panique devrait être évitée car il est peu représentatif des comportements pendant les situations d’urgence (Proulx, 2001a, 2006 ; Proulx & al., 2006). Les comportements peuvent paraître complexes mais quelques concepts tels l’engagement ou la familiarité aident à prédire les réponses les plus courantes. De même, les caractéristiques des occupants, du bâtiment et de l’événement peuvent être une aide à la compréhension. Ces études nous apprennent également qu’il est difficile pour les usagers d’interrompre leur activité en cours (faire des achats dans un magasin, quitter son travail, quitter une séance de cinéma, etc.). « Dans ces contextes, le simple fonctionnement d'une sirène ne

suffit pas à déclencher l'évacuation. Seul un changement radical de l'environnement fait prendre conscience du basculement de la situation et de la nécessité d'évacuer (arrêter la musique dans un magasin, allumer la lumière et interrompre la diffusion du film dans un cinéma, arrêter un match, etc.). » (Lavedrine & Baudet, 2008, p. 556). Apparaît ici la

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un lieu public, les personnes attendent d'être prises en charge par une autorité et que leur manque de réaction initiale s'explique également par la peur d'avoir une réaction inappropriée par rapport à une situation qui finalement ne s'avèrerait pas catastrophique.

Dans la suite de ce chapitre, nous avons fait le point sur les actions menées auprès des usagers en tunnel routier. Ces dispositifs de communication sont apparus peu homogènes et les consignes étant souvent adaptées à un tunnel en particulier, il y a peu d’homogénéité dans les actions. S’il existe des similitudes par rapport aux démarches précédemment évoquées, le domaine des tunnels routiers est aux prémisses du

questionnement sur les facteurs humains. Les connaissances issues des études sur la

conduite automobile et l’évacuation n’ont pas suffisamment été prises en compte. A l’image de ces contextes, certaines idées préconçues ont rendu difficile l’évolution des démarches. Jusqu’en 2003, pour répondre aux besoins de la société, la démarche de gestion de la sécurité qui a prévalue est celle du contrôle-sanction. N’étant pas aisé pour un ingénieur de mettre en place des méthodes d’analyse et de compréhension issues des sciences humaines, il est apparu aussi bien aux exploitants qu’au CETU la nécessité de traiter cette question. Avant 2006 en France, nous avons identifié quelques projets travaillant sur ces aspects : l’étude menée par la DREIF18 sur la connaissance du comportement des usagers dans les tunnels des voies rapides d’Ile-de-France (CETU, 2005b) et l’étude conduite par l’Université Pierre-Mendès France de Grenoble (Gandit & al., 2009) à laquelle le CETU a contribué.

Les travaux menés sur le comportement des usagers en situation normale ou de crise en tunnel routier dans le cadre du projet ACTEURS ont montré que les sources de connaissances sur ce sujet sont peu nombreuses et peu homogènes d’autant plus qu’il est difficile d’identifier et de prendre contact avec les protagonistes d’un évènement.

Certains personnels « exploitant » sont des observateurs privilégiés des comportements des usagers. Si la masse d’informations collectée au quotidien est importante, les observations des exploitants portent essentiellement sur des comportements jugés inadaptés ou inacceptables. Le manque de cadre de référence pour comprendre les comportements

humains rend difficile leur capitalisation et leur exploitation. Les études concernant les

usagers et leurs comportements sont restreintes et se résument pour la plupart à quelques études opérationnelles (évaluation des inter-distances, de la vitesse, etc.) et à quelques enquêtes réalisées auprès des usagers. Ces études ne s’attachent pas à comprendre les mécanismes psychologiques fondamentaux (perception, représentation, etc.) des usagers en jeu lors d’un événement en tunnel et ainsi ne permettent pas d’expliquer le fondement du comportement des usagers. L’expérience la plus aboutie sur ce sujet est celle du TNO aux Pays-Bas qui s’est attaché à comprendre les comportements des usagers au cours de situations d’accident en tunnel.

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L’analyse du comportement des usagers et de la réaction du système tunnel (infrastructure et exploitant) face à ce comportement aussi bien en situation de routines qu’en situation potentiellement source de danger est un champ prometteur qui s’ouvre pour l’analyse des risques en tunnel et pour l’évolution du niveau de sécurité.

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Chapitre 3. Gestion des risques