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Contribution à l’évolution du retour d’expérience en
tunnel routier vers un outil de compréhension du
comportement humain (usager et exploitant)
Audrey Auboyer
To cite this version:
Audrey Auboyer. Contribution à l’évolution du retour d’expérience en tunnel routier vers un outil de compréhension du comportement humain (usager et exploitant). Sciences de l’Homme et Société. École Nationale Supérieure des Mines de Paris, 2009. Français. �NNT : 2009ENMP1660�. �pastel-00005923�
ED n°432 : Sciences et Métiers de l’Ingénieur
N° attribué par la bibliothèque
I_I_I_I_I_I_I_I_I_I_I
T H E S E
pour obtenir le grade de
DOCTEUR DE L’ECOLE NATIONALE SUPERIEURE DES MINES DE PARIS
Spécialité “Sciences et génie des activités à risques”
présentée et soutenue publiquement par
Audrey AUBOYER
le 25 septembre 2009
CONTRIBUTION A L’EVOLUTION DU RETOUR D’EXPERIENCE EN
TUNNEL ROUTIER POUR AMELIORER LA COMPREHENSION DU
COMPORTEMENT HUMAIN (USAGER ET EXPLOITANT)
Directeur de thèse : Jean-Luc WYBO
Jury
M. BASTIEN Claude
(Université de Provence) ………Rapporteur
M. JACQUES Jean-Marie
(Université de Namur) ……….……..………….……Rapporteur
M. MARTIN Robert
(Université de Lyon)………..…..…...Examinateur
M. VAN ELSLANDE Pierre
(Institut National de la Recherche sur les Transports et leurExaminateur
Audrey Auboyer_Thèse 2009
Remerciements
Ces trois années de recherche ont été marquées par de nombreuses collaborations et rencontres qui ont rendu possible l’aboutissement de mon travail.
Mes remerciements vont tout d’abord aux différents partenaires qui ont porté ce projet et m’ont ouvert de nombreuses portes.
Merci à Jean-Luc Wybo (Mines-ParisTech) pour son savoir, ses idées et ses conseils qui m’ont guidés dans la recherche.
Merci au Centre d’Etude des Tunnels et à la Société Française du Tunnel du Fréjus pour m’avoir fait confiance en me laissant libre de mener à bien ce projet de recherche, en toute indépendance.
Je remercie amicalement Sylvie Lavedrine du CETU pour son aide précieuse et sa disponibilité au quotidien. Merci à Jean-Pierre Margueron et Marc Balmon de la SFTRF pour leur implication dans le projet et pour m’avoir ouvert les portes d’un terrain expérimental remarquable. Un grand merci aux régulateurs et aux opérateurs du PC CESAM pour m’avoir accueillie à leurs côtés et m’avoir fait découvrir la gestion quotidienne d’une autoroute et de ses tunnels.
Merci à l’ensemble du comité de suivi de thèse. Je remercie Robert Martin (LEACM), Thierry Bellet (INRETS) et Alain Noizet (Société Ligeron) pour leur aide dans l’orientation de mes choix.
Je tiens également à remercier les différents exploitants qui m’ont fait partager leur quotidien et qui m’ont fait découvrir les coulisses de l’exploitation des tunnels.
Merci à tous mes collègues qui ont rendu agréables mes passages au centre de recherche, au CETU et à la SFTRF.
Mes derniers remerciements vont à ma famille et mes amis pour avoir accepté mes absences et pour leur soutien tout au long de ces trois années.
Audrey Auboyer_Thèse 2009
Index des abréviations
ACTEURS : Améliorer le Couplage Tunnel – Equipements – Usagers pour Renforcer
la Sécurité
AIEA : Agence Internationale de l’Energie Atomique AIPCR : Association mondiale de la route.
ARIA : Analyse, Recherche et Information sur les Accidents BARPI : Bureau d’Analyse des Risques et Pollutions Industrielles BAU : Bande d’Arrêt d’Urgence
BEA-TT : Bureau d'Enquêtes sur les Accidents de Transport Terrestre BSPP : Brigade des Sapeurs-Pompiers de Paris
CCDSA : Commission Consultative Départementale de Sécurité et d’Accessibilité CCO : Centre de Coordination Opérationnel
CESAM : Centre d’Entretien et de Sécurité de l’Autoroute de la Maurienne CETU : Centre d'Etude des Tunnels
CETUR : Conseils Etudes de Travaux Urbains et Ruraux
CIFRE : Conventions Industrielles de Formation par la Recherche
CNESOR : Commission Nationale d’Evaluation de la Sécurité dans les Ouvrages
Routiers
CNIL : Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés CO : Monoxyde de Carbone
COS : Commandant des Opérations de Secours COURLY : COmmunauté Urbaine de LYon
CRC : Centre de recherche sur les Risques et les Crises
CRS : Compagnies Républicaines de Sécurité de la Police Nationale DAI : Détection Automatique d’Incidents
DREIF : Direction Régionale de l’Equipement en Ile-de-France DIRIF : Direction Interdépartementale des Routes d'Ile-de-France
DPPR : Direction de la Prévention des Risques et Pollutions Industrielles EDA : Etudes Détaillées d'Accidents
ERP : Etablissement Recevant du Public ESD : Etude Spécifique de Danger
GEF : Groupement d’Exploitation du Fréjus GN : Gendarmerie Nationale
GTC : Gestion Technique Centralisée
HEED : High-rise Evacuation Evaluation Database
INRETS : Institut National de la Recherche sur les Transports et leur Sécurité INSEE : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Index des abréviations
LEACM : Laboratoire d’Etude et d’Analyse des Comportements et des Modèles MA : Mécanismes d'Accidents
MCT : Mémoire à Court Terme MLT : Mémoire à Long Terme MRS : Maîtrise des Risques Systèmes PAU : Poste d’Appel d’Urgence PC : Poste de Contrôle
PIS : Plan d’Intervention et de Sécurité PL : Poids Lourd
PMA : Poste Médical Avancé PMV : Panneau à Message Variable
PRV : Point de Regroupement des Victimes PSB : Plan de Secours Binational
PST : Pompier Sécurité Tunnel REX : Retour d’EXpérience
REXAO : Retour d’EXpérience et l’Apprentissage Organisationnel RTE : Réseau Trans-Européen
SAMU : Service d’Aide Médicale Urgente SAV : Signaux d’Affectation de Voie
SDIS : Service Départemental d’Incendie et de Secours
SETRA : Services d’Etudes sur les Transports, les Routes et leurs Aménagements SFTRF : Société Française du Tunnel Routier du Fréjus
TMD : Transport de Marchandises Dangereuses VL : Véhicule Léger
Audrey Auboyer_Thèse 2009
Index des illustrations
Figures
Figure 1 : Modèle « modal » d’Atkinson et Shiffrin (1968, 1972) --- 16
Figure 2 : Modélisation des comportements humains, d’après Martin (2005) ---24
Figure 3 : Modèle SAI de Rabardel et Vérillon (1985), d’après Rabardel (1995) ---30
Figure 4 : Modèle cognitif du conducteur dans le système conducteur – véhicule - environnement, d’après Vollrath et Lemmer (2003) ---40
Figure 5 : Modèle du temps d'évacuation, d’après Proulx (2006) ---48
Figure 6 : Représentation du scénario d’un évènement selon le modèle « nœud papillon » ---79
Figure 7 : Le modèle « tranches de gruyère » de Reason (1990, 1997), d’après Morel (2007) ---80
Figure 8 : La dynamique de la maîtrise des risques : une boucle de progrès, d’après Denis-Remis (2007) ---80
Figure 9 : Les évènements majeurs et la réglementation en tunnel routier depuis 1999, d’après Auboyer et al. (2007) ---85
Figure 10 : Représentation systémique du contexte de la recherche ---94
Figure 11 : Vue d’ensemble de l’itinéraire A43 Maurienne ---99
Figure 12 : Les quatre étapes du processus de REX, adapté de Hadj-Mabrouk (2008) ---110
Figure 13: Articulation des différentes étapes du déroulement du REX, d’après Hadj-Mabrouk et Hamadoui (2008) ---112
Figure 14 : Grille de sélection du niveau de retour d’expérience, d’après Wybo et al. (2005a) ---113
Figure 15 : Types d’évènements et progrès en tunnel routier, d’après Auboyer et al. (2007) ---122
Figure 16 : Récapitulatif de la méthode de recherche et des données collectées ---127
Figure 17 : Les phases de progrès de la sécurité en tunnel routier ---137
Figure 18 : Etude de cas n°1, le scénario ---150
Figure 19 : Etude de cas n°2, situation à t=0 Figure 20 : Etude de cas n°2, situation à t=+10s ---154
Figure 21 : Etude de cas n°2, situation à t=+30s ---155
Figure 22 : Etude de cas n°2, situation à t=+4 ---155
Figure 23 : Etude de cas n°2, situation à t=+55s ---155
Figure 24 : Etude de cas n°2, situation à t=+1m10s ---155
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Index des illustrations
Figure 29 : Etude de cas n°2, situation à t=+5m20s ---157
Figure 30 : Etude de cas n°2, situation à t=+9m00s ---158
Figure 31 : Etude de cas n°2, situation à t=+11m00s ---158
Figure 32 : Etude de cas n°2, situation à t=+12m00s ---158
Figure 33 : Etude de cas n°2, situation à t=+21m00s ---159
Figure 34 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements VL et PL en tunnels selon la nature (%)---166
Figure 35 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements sur l’itinéraire selon le type de panne (%)---166
Figure 36 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements en tunnels selon le type de panne (%)---166
Figure 37 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans le tunnel d’Orelle selon le type de panne (%)---167
Figure 38 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans les tunnels d’Aiguebelle et Hurtières selon le type de panne (%)---167
Figure 39 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans le tunnel d’Orelle selon le sens de circulation (%)---169
Figure 40 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans les tunnels d’Aiguebelle et Hurtières selon le sens de circulation (%)---169
Figure 41 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans le tunnel d’Orelle selon la voie de circulation (%)---169
Figure 42 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans les tunnels d’Aiguebelle et Hurtières selon la voie de circulation (%)---169
Figure 43 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans le tunnel d’Orelle selon les appels des usagers (%)---170
Figure 44 : Base de données 2006-2007, répartition des évènements dans les tunnels d’Aiguebelle et Hurtières selon les appels des usagers (%)---170
Figure 45 : Evènements d’exploitation (incendie), répartition des usagers selon l’âge (%)---173
Figure 46 : Evènements d’exploitation (incendie), fréquence d’utilisation des tunnels des usagers (%)---174
Figure 47 : Exercice tunnel d’Orelle, le scénario ---183
Figure 48 : Exercice tunnel d’Orelle, répartition des usagers selon l'âge (%)---193
Figure 49 : Exercice tunnel d’Orelle, modèle du comportement des usagers en situation d’évacuation ---196
Figure 50 : Exercice tunnel de la Défense, répartition des participants selon l’âge (%)---199
Figure 51 : Exercice tunnel de la Défense, répartition des participants selon l’expérience de la conduite (%)---199
Figure 52 : Exercice tunnel de la Défense, répartition des participants selon la fréquence d’utilisation des tunnels (%)---200
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Index des illustrations
Figure 53 : Etude des représentations mentales, répartition des entretiens selon le
moment de la journée (%)---209
Figure 54 : Etude des représentations mentales, répartition des participants selon les catégories des groupes (%)---213
Figure 55 : Etude des représentations mentales, répartition des usagers non sensibilisés selon la catégorie professionnelle (%)---213
Figure 56 : Etude des représentations mentales, répartition des participants selon l’âge (%)---214
Figure 57 : Etude des représentations mentales, répartition des participants selon le genre (%)---214
Figure 58 : Etude des représentations mentales, répartition du groupe « usagers » selon l’expérience de la conduite (%)---215
Figure 59 : Etude des représentations mentales, exemples de dessin de professionnels ---215
Figure 60 : Etude des représentations mentales, exemples de dessin d’usagers ---215
Figure 61 : Etude des représentations mentales, répartition des dessins des participants selon la prise de vue (%)---216
Figure 62 : Etude des représentations mentales, répartition des dessins des participants selon les éléments de contexte dessinés (%)---216
Figure 63 : Etude des représentations mentales, répartition des dessins des participants selon les équipements statiques de remontée d’informations (%)---217
Figure 64 : Etude des représentations mentales, répartition des dessins des participants selon les équipements de la route (%)---218
Figure 65 : Etude des représentations mentales, répartition des dessins des participants selon les équipements de ventilation et les éléments pour les pompiers (%)---218
Figure 66 : Comparaison des temps nécessaires à l'évacuation et des temps disponibles pour l'évacuation ---228
Figure 67 : Modèle cognitif des usagers en situation d’auto-évacuation ---229
Figure 68 : Schémas d’une issue de secours type proposée (crédits photo CETU) ---229
Figure 69 : Les trois niveaux du partage des connaissances dans le retour d’expérience en tunnel routier ---242
Figure 70 : Exemple d’organisation des réseaux d’acteurs du REX. ---243
Figure 71 : Exemple d’organisation d’un collectif local de REX. ---243
Figure 72 : Proposition d’une échelle de retour d’expérience en tunnel routier ---244
Figure 73 : Exemple d'organisation de dispositif de retour d'expérience ---248
Figure 74 : Les trois étapes d'un exercice de sécurité en tunnel routier ---249
Figure 75 : Evolution et énergie à déployer pour la gestion de la sécurité en tunnel routier ---255
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Index des illustrations
Tableaux
Tableau 1 : Les gestionnaires de voiries routières ---82
Tableau 2 : Situation fin 2007 des tunnels routiers français de plus 300m, d’après Deffayet (2008) ---83
Tableau 3 : Synthèse des principaux éléments de description des tunnels étudiés ---99
Tableau 4 : Récapitulatif des évènements d’exploitation analysés ---147
Tableau 5 : Base de données 2006-2007, classification des évènements recensés ----165
Tableau 6 : Base de données 2006-2007, répartition du trafic selon les tunnels ---168
Tableau 7 : Exercice tunnel d’Orelle, répartition des participants dans les véhicules ---183
Tableau 8 : Exercice tunnel de la Défense, répartition des participants dans les véhicules ---186
Tableau 9 : Récapitulatif des exercices avec interviews et/ou observations du comportement des usagers ---190
Tableau 10 : Exercice tunnel d’Orelle, informations recensées dans les communications usagers – opérateurs (%)---198
Tableau 11 : Etude des représentations mentales, répartition des participants selon le groupe ---212
Tableau 12 : Etude des représentations mentales, répartition des participants selon le nombre d’éléments dessinés (%)---216
Tableau 13 : Typologie des évènements en tunnel routier ---240
Audrey Auboyer_Thèse 2009
Sommaire
Remerciements ... I
Index des abréviations ... III
Index des illustrations ... V
Sommaire... IX
Introduction ... 1
PREMIERE PARTIE
Chapitre 1 . Le fondement du comportement humain ... 13
1. Point de vue de la psychologie cognitive ... 13
1.1. Présentation ... 13
1.2. Principaux concepts ... 15
1.3. Un modèle général du fonctionnement cognitif de l’être humain ... 23
2. Point de vue de l’ergonomie cognitive ... 25
2.1. Présentation ... 25
2.2. Principaux concepts ... 27
3. Bilan sur les approches psychologique et ergonomique ... 34
Chapitre 2. Comportement de conduite et comportement d’évacuation 37
1. L’activité de conduite automobile ... 371.1. Conduire : une activité complexe ... 37
1.2. Les modèles de l’activité de conduite ... 39
1.3. La lisibilité de la route et la transgression des règles ... 41
2. Le comportement humain en situation de danger ... 43
2.1. La prise de décision ... 44
2.2. Dans les incendies ... 47
3. Prise en compte du comportement humain en tunnel routier ... 52
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Sommaire
4. Bilan sur les comportements de conduite et d’évacuation ... 63
Chapitre 3. Gestion des risques et système tunnel ... 67
1. Les cindyniques et la gestion des risques ... 67
1.1. Les cindyniques : une science pluridisciplinaire ... 67
1.2. Quelques concepts ... 70
1.3. Modèles pour la compréhension des situations cindyniques et l’intervention ... 78
2. La sécurité et les risques en tunnel routier ... 82
2.1. Gestion et réglementation des tunnels routiers ... 82
2.2. Les risques en tunnel routier ... 87
2.3. La stratégie de sécurité (auto-évacuation des usagers) ... 89
3. Le système tunnel ... 92
3.1. L’approche systémique ... 92
3.2. Un tunnel routier : un système complexe ouvert ... 94
3.3. Présentation du terrain de recherche ... 96
4. Bilan... 100
Chapitre 4. Retour d’expérience et méthode de recherche ... 103
1. Les conceptions du retour d’expérience ... 103
1.1. Le retour d’expérience : outil ou démarche de management ? ... 103
1.2. Des approches propres aux besoins de l’organisation ... 106
1.3. Principes fondamentaux ... 109
1.4. Principaux écueils liés à une démarche de retour d’expérience ... 114
1.5. La méthode REXAO ... 115
2. Le retour d’expérience en tunnel routier ... 117
2.1. Le cadre réglementaire ... 117
2.2. Diagnostic des pratiques ... 118
3. Hypothèses et méthode de recherche ... 123
3.1. Les hypothèses de recherche ... 123
3.2. Une méthode qualitative plutôt que quantitative ... 125
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Sommaire
DEUXIEME PARTIE
Chapitre 5. Analyse d’évènements d’exploitation ... 141
1. Procédures expérimentales ... 141
1.1. Le recueil de témoignages (interview) ... 141
1.2. Autres supports pour le retour d’expérience ... 143
1.3. Récapitulatif des évènements analysés ... 147
1.4. Base de données à partir de quatre tunnels autoroutiers... 148
2. Comportement des usagers à la suite d’incendies ... 149
2.1. Etude de cas n°1 ... 150
2.2. Etude de cas n°2 ... 154
3. Résultats pour la base de données ... 165
3.1. Les facteurs exogènes ... 165
3.2. Les facteurs endogènes ... 170
4. Bilan de l’analyse des évènements d’exploitation ... 173
4.1. Sur le comportement des usagers ... 173
4.2. Sur la base de données ... 177
Chapitre 6. Instrumentation d’exercices de sécurité ... 179
1. Procédure expérimentale ... 179
1.1. Exercices de sécurité et observations de terrain ... 179
1.2. Expérience dans le tunnel d’Orelle ... 182
1.3. Projet RDT et exercice dans le tunnel de la Défense ... 185
1.4. Récapitulatif des autres exercices ... 189
2. Le comportement des usagers au cours des exercices de sécurité ... 192
2.1. Enseignements de l’exercice d’Orelle ... 192
2.2. Enseignements des exercices réalisés avec la DIRIF ... 199
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Sommaire
Chapitre 7. Etude des représentations mentales d’un tunnel routier .... 207
1. Présentation de l’étude ... 207
1.1. Les objectifs ... 207
1.2. La méthode de travail ... 208
2. Résultats... 212
2.1. Le profil des participants ... 212
2.2. Les dessins ... 215
2.3. Exemples ... 215
2.4. Synthèse ... 218
3. Bilan : un décalage de représentation entre les usagers et les professionnels ... 221
Chapitre 8. Bilan et perspectives ... 223
1. Pour l’auto-évacuation des usagers ... 223
1.1. Le fondement du comportement des usagers ... 223
1.2. Modèles d’auto-évacuation et systèmes d’aide à l’évacuation ... 226
1.3. Note sur les propositions d’adaptation ... 233
2. Pour le retour d’expérience ... 235
2.1. Les difficultés rencontrées dans la mise en place du retour d’expérience ... 235
2.2. Principaux leviers d’action ... 238
2.3. Le retour d’expérience sur exercices ... 248
3. Accompagner les changements organisationnels en tunnel routier ... 251
3.1. Discussion ... 251
3.2. Besoin d’une culture partagée ... 257
Conclusion ... 259
Références bibliographiques ... 263
Annexes ... 277
Table des matières ... 359
Résumé ... 371
Audrey Auboyer_Thèse 2009
Introduction
Les individus doivent s’adapter à des systèmes en évolution constante, de plus en plus complexes. Comme le note Wybo, « Cette complexité est souvent liée à l’extension dela technologie et des automatismes qui contrôlent les systèmes, mais elle résulte également de l’augmentation du nombre des intervenants et des relations qui les lient. » (2002, p. 26).
En particulier, le système de transport routier subit de nombreux changements tant du point de vue de ses infrastructures que des moyens de transport et des technologies qui les composent. Les différentes composantes de ce système (route, rails, tunnels, etc.) doivent assurer un niveau de sécurité à leurs utilisateurs (Amberg, 2006).
La sécurité routière représente un enjeu humain essentiel. Pour améliorer cette
situation, de nombreux auteurs recommandent d’agir sur l’ensemble du système et ses trois composantes : le véhicule - les usagers de la route (dont le conducteur) - la route et son environnement. Cette amélioration passe par la mise en œuvre de méthodes et de techniques gérée par l’ensemble de la communauté routière (services routiers, maîtres d’ouvrages, gestionnaires, etc.). « La sécurité routière […] est un domaine où l’on
progresse constamment par l’expérience, par la capitalisation des connaissances, par l’évaluation des démarches mises en œuvre. » (Chambon, 2008, p. 1)
Le retour d'expérience est un outil relativement récent développé pour améliorer la sécurité des systèmes complexes à risques (aviation, nucléaire, ferroviaire, etc.). Il peut être défini comme l’analyse des mécanismes, de leurs interactions et de leurs influences sur le déroulement de l’événement. Le retour d’expérience intègre le partage des expériences entre les différents acteurs de l’évènement. Il donne matière aux organisations pour progresser dans la gestion des risques et s’applique aussi bien aux situations réelles qu’aux exercices de sécurité.
Depuis plusieurs années, les chercheurs et les professionnels de nombreuses disciplines scientifiques (psychologie, ergonomie, etc.) s’interrogent sur le comportement des personnes face aux situations de danger et aux risques que ces dernières représentent. Ainsi, de nombreux travaux ont été réalisés sur ce sujet et ont permis de réels progrès en matière de sécurité. Pour atteindre un niveau de sécurité élevé dans les systèmes socio-techniques, le retour d’expérience est de plus en plus utilisé. D’après Wybo (2002), le
retour d’expérience est devenu un des moyens d’éclairer, au travers de l’analyse fine des événements et des décisions, les comportements des sous-systèmes technique, humain et organisationnel en présence de situations imprévues.
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Introduction
La sécurité en tunnel routier
Qu'ils soient consécutifs à un accident ou non, en raison de l'espace restreint et du caractère confiné du milieu, les incendies de véhicule en tunnel routier peuvent prendre rapidement des proportions catastrophiques en nombre de vies humaines. Ceci peut être illustré par les incendies du tunnel du Mont-Blanc (France), du tunnel du Tauern (Autriche) et du tunnel du St Gothard (Suisse) qui se sont déroulés entre 1999 et 2001 et qui ont coûté la vie à une soixantaine de personnes.
En 1999, l’incendie du tunnel du Mont-Blanc a particulièrement frappé l’opinion publique et a eu des effets rapides et conséquents sur la manière dont le gouvernement et le législateur français ont décidé de prendre en compte la sécurité dans les tunnels routiers. Depuis août 2000, la réglementation française impose aux exploitants de tunnel routier de plus de 300 mètres des dispositions procédurales et des dispositions techniques.
Pour les premières, les exploitants doivent notamment mettre en place un dispositif
permanent permettant d’enregistrer et d’analyser les évènements significatifs. Les exploitants des tunnels de l’Etat ont également l’obligation d’alimenter une base centrale de données concernant les incidents et les accidents significatifs survenus dans leur(s) ouvrage(s). En outre, les exploitants doivent réaliser au moins une fois par an un exercice de sécurité destiné à évaluer les réponses et la coordination des personnels « exploitant » (y compris des services d’intervention et de secours) face à un événement donné.
Les dispositions techniques reposent entre autres sur les moyens mis à disposition des
usagers dans les tunnels et définissent une stratégie de sécurité basée sur un comportement attendu des usagers, à savoir : donner l’alerte à l’aide des postes d’appel d’urgence, essayer d’éteindre l’incendie et se diriger à pied vers les issues de secours.
L'analyse d’événements majeurs montre qu'en cas de crise, le comportement réel
des usagers diffère nettement de celui présupposé par la réglementation (ils attendent
dans le véhicule, évacuent à bord de leur véhicule, etc.). Ceci est confirmé par les résultats de plusieurs études menées sur le sujet (Boer, 2002 ; Noizet, 2005a). Fort heureusement peu d'évènements majeurs se produisent dans les tunnels routiers. Les événements donnant lieu à des enquêtes judiciaires sont, aujourd'hui, la principale source d'informations sur le comportement du système en cas de crise.
Dans le contexte actuel de l’exploitation des tunnels routiers, le système réglementaire de retour d'expérience, tel qu’il est conçu, ne permet pas d'approfondir les déterminants du comportement des différents acteurs (et des usagers en particulier) en fonction de la situation vécue. A noter que, les exploitants, dont la préoccupation majeure est la sécurité des usagers, soulignent que le système de retour d’expérience existant ne correspond pas suffisamment à leurs besoins.
Par ailleurs, en dehors de ces événements majeurs, le système « tunnel » est régulièrement confronté à des séquences d’évènements potentiellement dangereuses contre lesquelles il réagit positivement permettant ainsi de garder l'équilibre. Ces séquences, non décelées à
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Introduction
fonctionnement des différentes composantes du système et leur capacité à réagir. A ce jour, cette source d'apprentissage n'est pas exploitée à sa juste valeur par manque de méthode et d'organisation.
En 2003, les débats sur la recherche et le suivi de travaux menés sur ce thème ont confirmé la nécessité pour le CETU de progresser dans le domaine de la connaissance du comportement humain. L’importance de ce sujet constitue une préoccupation majeure
tant sur le plan national qu’international. C’est ainsi que le CETU a constitué un thème de recherche prioritaire entourant cette question : le thème 9 « Facteurs humains et
organisationnels de la sécurité. » (2005-2008).
Mise en place du projet de recherche
Dans ce contexte, le Centre d’Etudes des Tunnels (CETU) a mis en place le projet de recherche « Contribution à l’évolution du retour d’expérience en tunnel routier
pour améliorer la compréhension du comportement humain (usager et exploitant). ».
Celui-ci a débuté en mars 2006 dans le cadre d’un contrat CIFRE1 en partenariat avec la
Société Française du Tunnel Routier du Fréjus et de l’autoroute de la Maurienne A43 (SFTRF) et le Centre de recherche sur les Risques et les Crises (CRC, Mines Paris Tech).
Pour les partenaires, l’étude vise à répondre à un besoin d’évolution en matière d’analyse et de compréhension du comportement humain en situation de danger. L’enjeu se situe au niveau de la connaissance du comportement des usagers au cours de différentes situations et en particulier lors d’évènements de type incendie.
Plusieurs éléments ont facilité le travail de recherche pour l’élaboration de la méthode et des outils adaptés pour le retour d’expérience. Les partenaires étaient volontaires dès le début de l’étude. Chacun a donné de son temps et mis à disposition les moyens souhaités. A noter que la SFTRF nous a facilement autorisé l’accès aux postes de contrôles et aux informations importantes, à partir notamment des interviews des usagers et des opérateurs, pour l’analyse des évènements et le partage des expériences.
En outre, de multiples partenaires et associés ont été réunis autour de notre travail de recherche. Compte tenu de la place importante de la psychologie comme angle d’approche, une co-direction a été instaurée avec le Laboratoire d'Etude et d'Analyse du
Comportement et des Modèles (LEACM, Université de Lyon). Notre étude étant
pluridisciplinaire, plusieurs représentants des disciplines concernées ont collaboré à notre recherche et ont participé à un comité de suivi de thèse avec les représentants des partenaires. Ce comité2 visait à assurer le suivi scientifique de l’étude. Il a été l’occasion de faire le point sur les travaux en cours et de valider ou de changer les orientations choisies. Il a également permis de s’assurer que les travaux répondaient tant aux exigences pratiques que théoriques.
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Notre recherche s’est insérée dans une des actions de recherche et de doctrine du thème
9 du CETU : « Retour d’expérience : évolution vers un outil de connaissance du
comportement humain. ». Nous avons également collaboré à deux projets français intégrant
le comportement des usagers : le projet ACTEURS3 et le projet « auto-évacuation » de la DIRIF4. Il a pu se nourrir des résultats issus de ces projets.
Objectifs pratiques de la recherche
Notre recherche s’inscrit dans la perspective de faire évoluer le retour d’expérience en tunnel routier, de l’alimentation d’une base de données vers une boucle de progrès et de partage des expériences intégrant tous les acteurs de la sécurité, pour améliorer la connaissance du système complexe qu’est un tunnel. Elle vise à donner aux exploitants les méthodes et les outils permettant de faire évoluer le retour d’expérience en tunnel routier vers un outil de connaissance et de compréhension du comportement humain (usagers, personnels « exploitant »).
La validation de ces instruments en condition d’exploitation dans plusieurs sites d’exploitation de tunnels routiers a pour objectif de participer à la définition : de nouveaux modes de gestion de l’exploitation prenant en compte les situations dangereuses identifiées, de messages à destination des usagers et de nouvelles formations pour les personnels de l’exploitant.
En pratique, notre action de recherche vise à :
• adapter le retour d’expérience à l’enjeu en définissant une hiérarchisation des évènements conduisant à des investigations idoines à leur potentiel d’apprentissage (typologie des évènements, échelle de retour d’expérience, etc.) ;
• proposer les moyens nécessaires (outil, organisation, formation, etc.) pour analyser le comportement humain en fonction des types d’évènements et mettre en place un processus de vigilance (exploitation au quotidien, vidéo, main courante, etc.).
Cette démarche devra être prise en compte en interne chez l’exploitant dans le cadre de la démarche d’amélioration continue et par le CETU pour diffusion à tous les exploitants sous forme de recommandations, d’outils pédagogiques, etc.. Elle devra contribuer à améliorer la compréhension des évènements, de l’exploitation et de la conception des ouvrages.
Nous allons resituer ces objectifs pratiques par rapport au contexte de la recherche pour préciser l’enjeu et les questions de notre travail.
Problématique et questions de recherche
Afin d’améliorer la sécurité en tunnel routier, les recherches ont été orientées sur les aspects technologiques puis elles ont pris en compte les facteurs humains et
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organisationnels. Comme dans d’autres domaines, le retour d'expérience en tunnel routier a d’abord été élaboré dans une optique « technique » et « quantitative ». Les progrès technologiques ayant permis d’atteindre un niveau de sécurité élevé, il est aujourd’hui
nécessaire d’avoir une démarche qualitative qui inclut les aspects humains et organisationnels.
La gestion de situation de danger en tunnel peut être définie comme une activité complexe aussi bien pour les usagers à bord de leur véhicule que pour le personnel « exploitant »5 intervenant à distance (opérateurs de supervision, etc.) ou sur le terrain (agents routiers, services de secours, etc.). Chaque personne confrontée à ce type de situation doit prélever et prendre en compte de nombreuses informations provenant d’un environnement routier complexe et dynamique (signalisation, trafic, etc.). Cette tâche met en jeu différents facteurs affectifs, cognitifs et la charge mentale de travail varie au cours de l’activité lorsque la personne est confrontée à une situation inattendue en tunnel. L’usager doit passer d’une situation de conduite courante à une situation d’évacuation.
Le développement de méthodes et outils visant à intégrer le comportement humain dans le retour d’expérience doit permettre de mieux comprendre le fondement du comportement des usagers confrontés à une situation de danger en tunnel. Il est également l’occasion d’apporter de nouveaux éléments visant à favoriser et à faciliter l’auto-évacuation en cas d’incendie (adaptation des dispositifs, des consignes de sécurité puis information et formation).
Notre recherche repose sur l’étude psychosociologique et comportementale des acteurs principaux des évènements, en particulier des usagers, lors des incendies en tunnel routier. Il s’agit de modéliser le comportement des usagers à partir des mécanismes psychologiques sous-jacents identifiés. L’étude vise à déterminer des types de comportement variables en fonction de plusieurs facteurs endogènes et exogènes à l’individu. Cette typologie donne des critères objectifs de compréhension pour l’adaptation du système tunnel au comportement des usagers.
L'enjeu de la recherche proposée est de mettre en place les instruments de l'exploitation des séquences potentiellement source d'apprentissage afin de mieux appréhender le processus de représentation mentale des acteurs face à des situations imprévues dans lesquelles ils ne sont a priori pas en mesure de comprendre en temps réel ce qui se passe au sein du système.
A travers notre recherche, il s’agit de :
• déterminer les facteurs psychologiques à prendre en compte pour comprendre le
comportement des usagers confrontés à une situation de danger en tunnel routier, plus particulièrement au moment du basculement entre le comportement de conduite d’un automobiliste et le comportement d’évacuation ;
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• faire évoluer le retour d’expérience existant en intégrant les facteurs humains et
organisationnels via la proposition de méthodes et outils adaptés au contexte tunnel ;
• faire des propositions d’adaptation des dispositifs et stratégies de sécurité à partir
des résultats du retour d’expérience mis en place.
Ces éléments nous amènent à définir notre question générale de recherche :
Comment faire évoluer le retour d’expérience en tunnel routier de l’alimentation d’une base de données réglementaire à une véritable boucle d’apprentissage du comportement humain (usager et personnel « exploitant ») afin de progresser dans le domaine de la sécurité ?
Comme le note Barbier (1998), il convient de fournir une réponse pragmatique à cette question, c’est à dire fondée et applicable sur le terrain pris comme site d’études de cas permettant de formaliser et de tirer des enseignements de cette problématique. Les questions traitées progressivement dans cette recherche, peuvent s’inscrire a posteriori dans trois registres de préoccupations :
• quels sont les facteurs cognitifs et affectifs en jeu dans le comportement des
usagers en situation d’évacuation lors d’un incendie en tunnel ?
• quels sont les méthodes et outils de retour d’expérience permettant d’intégrer
l’analyse du comportement des usagers et plus largement le comportement humain (y compris le personnel « exploitant ») ?
• quels sont les dispositifs et stratégies de sécurité qui permettent de faciliter et
favoriser l’auto-évacuation des usagers ?
C’est par rapport à ces trois registres que nous avons progressivement enrichi la problématique de notre recherche.
Position de recherche
Notre objet d’étude concerne les interactions entre les usagers, les services « exploitant » et l’environnement tunnel au cours de situations courantes et de situations de danger. Nous cherchons particulièrement à apprécier les facteurs cognitifs et affectifs en jeu dans le comportement des usagers en nous appuyant sur les notions de représentations mentales (connaissance initiale), de perception et d’interprétation ainsi que de prise de décision et d’action. En parallèle, un travail est mené sur les éléments à prendre en compte pour l’évolution du retour d’expérience et des stratégies de sécurité. Il s’agit de proposer les moyens et les axes de vigilance participant à l’amélioration de l’organisation de la gestion des risques en tunnel routier.
Cet objet de recherche est un des premiers de ce type a avoir été mis en place dans le domaine des tunnels. A ce jour dans la littérature, il existe peu de recherches traitant du comportement des usagers, de l’activité des opérateurs de supervision et du retour d’expérience dans ce domaine.
La recherche se nourrit à la fois de données écologiques (« du terrain ») et de données théoriques qui s’enrichissent mutuellement. Pour avoir un regard le plus précis
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pluridisciplinaire. Elle se situe dans le cadre théorique très général de la sécurité des
systèmes complexes. Elle s’appuie sur l’approche systémique et s’inscrit dans une démarche ergonomique. Elle repose plus précisément sur la psychologie cognitive et les cindyniques.
D’après Barbier (1998), il existe une multitude d’appellations : recherche-action, recherche-développement, recherche-appliquée, etc. qui indique une diversité de points de vue pour formaliser le problème de la mise en présence du chercheur et des acteurs de l’organisation en accentuant tel ou tel aspect de l’objectif ou des modalités de cette mise en présence.
Liu (1992, cité par Gatot, 2000, p. 76) définit la recherche-action comme « Une démarche
de recherche fondamentale dans les sciences de l'homme, qui naît de la rencontre entre une volonté de changement et une intention de recherche. Elle poursuit un objectif dual qui consiste à réussir un projet de changement délibéré et ce faisant, faire avancer les connaissances fondamentales dans les sciences de l'homme. Elle s'appuie sur un travail conjoint entre toutes les personnes concernées. ».
La recherche-action permet d'expérimenter en situation réelle. Ce type de démarche
est particulièrement adapté pour des projets qui, comme le notre, ont la particularité d’être complexes compte tenu de la diversité des parties associées à la démarche et de leurs interactions qui génèrent une pluralité dans les objectifs, les demandes, les ressources et les compétences. Ces projets sont caractérisés par l'absence d'un corps de connaissances structuré et sont réalisés avec des intervenants qui souhaitent améliorer leurs méthodes grâce à la recherche. Les résultats d'une recherche-action aboutissent à des réponses aux problèmes de l'organisation, génèrent des propositions par les expérimentations et une formation sur le terrain permettant l'acquisition de compétences individuelles, collectives ainsi que des apports pour la recherche fondamentale.
Notre sujet s’inscrit dans une perspective constructiviste. Nous partons d’observations réalisées au cours d’évènements d’exploitation ou simulés pendant des exercices de sécurité pour reconstruire et modéliser les mécanismes et les interactions sous-jacents au comportement des usagers. Nos modèles s’appuient sur des modèles plus ou moins généraux déjà existants dans les différents domaines et courants théoriques auxquels se rattache notre étude. Comme le remarque Wolff, Sperandio, et Després (2004) pour accéder aux connaissances utilisées par un opérateur humain, il est nécessaire de connaître son activité, à partir d'observations sur le terrain, puis d'effectuer ensuite une représentation de cette activité en la modélisant.
Le constructivisme est un courant de pensée fondé sur l’idée que les connaissances sont acquises par l’apprenant sur la base de sa propre construction mentale. Ce courant s’inscrit dans la théorie de l’apprentissage de Piaget. Il est centré sur les activités cognitives de l’individu qui lui permettent de détecter et d’interpréter les évènements selon leur contexte
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comportement). Nous l’utilisons également comme principe permettant de passer par induction de nos observations de terrain à des principes de relations organisationnelles favorisant la mise en place d’un système de retour d’expérience et l’adaptation des stratégies de sécurité.
L'interaction du sujet observant et de l'objet observé est mise en avant, considérant que la connaissance est un construit plutôt qu'un donné. « La connaissance est donc un processus
avant d'être un résultat, le système observant se construisant en permanence dans et par l'interaction du sujet observant et du phénomène observé. » (Le Moigne, 1994, cité par
Gatot, 2000, p. 79). « Le monde construit par le sujet est un monde empirique, basé sur ses
expériences, et qui ne prétend pas correspondre à une réalité ontologique. » (Von
Glaserfeld, 1988, cité par Gatot, 2000, p. 79).
Procédure empirique
Pour répondre à nos objectifs de recherche, notre démarche expérimentale a été double. Nous avons eu la possibilité de mettre en place plusieurs protocoles expérimentaux basés sur une analyse des représentations mentales des usagers et des professionnels
des tunnels ainsi qu’une analyse comportementale « in situ » à partir des évènements d’exploitation et des exercices de sécurité. Ces procédures sont complémentaires et ont
permis d’enrichir au fil du temps les propositions émises en termes de retour d’expérience et d’auto-évacuation des usagers.
L’analyse comportementale « in situ » porte essentiellement sur le recueil de
témoignages (interview) d’usagers et l’analyse de quelques séquences de vidéosurveillance d’évènements d’exploitation et exercices de sécurité. La méthode des interviews est largement utilisée dans d’autres domaines car elle est la plus appropriée pour comprendre le fondement des réactions des personnes.
Pendant le temps de préparation et de mise en place de celle-ci, l’étude portant sur les
représentations a été menée. Elle concerne l’étude des représentations mentales de l’objet « tunnel » des usagers et des professionnels des tunnels.
Plan du rapport
Le présent rapport se compose de deux parties, chacune étant constituée de quatre chapitres. Dans les quatre premiers chapitres nous allons décrire le cadre théorique et le contexte pratique dans lesquels s'inscrit notre recherche puis, dans les quatre chapitres suivants, nous allons évoquer les principaux éléments de mise en pratique de celle-ci et ses résultats.
La première partie sera consacrée à la définition des principaux concepts en lien avec notre objet de recherche et le contexte particulier des tunnels routiers. D’un
domaine scientifique et d’une étude à l’autre, les termes employés sont les mêmes mais leur définition peut varier en raison du regard qui leur est porté et du contexte d’application dans lequel ils se situent. D’après Pascal (1658) : « Cette véritable méthode qui formerait
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n’avancer jamais aucune proposition qu’on ne démontrât par des vérités déjà connues, c’est-à-dire, en un mot à définir tous les termes et à prouver toutes les propositions. ». (De
l’art de persuader, section 1). Pour circonscrire notre objet d’étude, il nous faut ancrer notre propos dans les disciplines au sein desquelles s’inscrit cette recherche.
Cette première partie vise à donner au lecteur les éléments permettant de comprendre
notre objet de recherche et les orientations choisies pour l’étudier. Celle-ci se veut être
accessible au plus grand nombre de personnes intéressées par les questions que nous traitons et qui, en fonction de leur expérience, ne connaissent pas forcément les trois domaines scientifiques abordés.
Ainsi, le chapitre 1 sera consacré à la présentation non exhaustive des concepts de base issus de la psychologie cognitive et de l’ergonomie cognitive. Ces concepts sont utilisés dans les recherches concernant le comportement de conduite et le comportement d’évacuation face à un danger (en particulier l’incendie) et aident à mieux appréhender les fondements du comportement humain durant ces situations.
Ces recherches seront abordées dans le chapitre 2 avant de faire un état des lieux sur la prise en compte du comportement humain dans le domaine des tunnels routiers.
Dans le chapitre 3, nous évoquerons ces éléments du point de vue des cindyniques et nous présenterons notre terrain d’étude.
Le chapitre 4 sera axé sur la présentation et la définition du retour d’expérience qui constituera le fondement de notre méthode de recherche.
La deuxième partie du rapport s’inscrit dans la perspective d’intégrer au retour
d’expérience les moyens de la connaissance des fondements du comportement humain (usager et exploitant) lors des évènements en tunnel routier. Nous allons évoquer les
différentes études et méthodes d’observation que nous avons mises en place, à partir
des recherches existantes sur le comportement des personnes en situation de danger, et
leurs principaux résultats.
Les chapitres 5 et 6 présentent en particulier les travaux conduits à partir d’une méthode de recueil de témoignage des usagers utilisée à la suite d’événements d’exploitation et au cours d’exercices de sécurité.
Le chapitre 7 est consacré à l’étude conduite sur les représentations mentales dont l’objectif est d’apporter des éléments constructifs pour les besoins du terrain.
Le chapitre 8 sera l’occasion d’évoquer les apports et implications, actuelles et futures, de notre étude qui apporte des éléments objectifs de compréhension du comportement des usagers face à des situations de danger. Des propositions pratiques visant à adapter le retour d’expérience ainsi que les dispositifs de sécurité existants en tunnel routier seront formulées.
Audrey Auboyer_Thèse 2009
Chapitre 1
. Le fondement du
comportement humain
L’étude de l’homme intéresse les chercheurs depuis de nombreux siècles. La définition du cadre théorique entourant notre travail de recherche, débute par la présentation des principaux concepts de la psychologie cognitive puis de l’ergonomie cognitive qui donnent des bases pour appréhender l’activité des usagers aussi bien en situation de conduite automobile qu’en situation d’évacuation. En effet, la psychologie définit les propriétés de base du fonctionnement cognitif et affectif de l’être humain. L’ergonomie reprend les principaux concepts de la psychologie pour les appliquer à l’étude de l’être humain en activité. Nous limitons notre exposé aux concepts en lien avec notre recherche et qui aident à comprendre le fondement du comportement humain en tunnel.1. Point de vue de la psychologie cognitive
1.1. Présentation
1.1.1. De la psychologie en général …
La psychologie est la science qui a pour but d’étudier et de comprendre la structure et le fonctionnement de l’activité mentale et des comportements associés.
Elle étudie les faits psychiques qui concernent la pensée, l’esprit, la vie mentale dans tous leurs aspects (Larousse, 2003). Elle cherche à mettre en évidence les mécanismes psychologiques et à connaître les sentiments, les idées, les comportements.
La psychologie s’articule avec de nombreuses sciences qui étudient l’être humain selon différents points de vue comme la biologie, la linguistique, etc.. Comme toute science, elle a évolué au fil du temps en fonction des connaissances déjà acquises et de celles restant à approfondir. Dans ses premières origines se trouvent la philosophie, la psychiatrie et la psychanalyse.
Au cours du XXe siècle, la psychologie s’est intéressée à d’autres domaines et de nombreux courants théoriques et champs d’intervention se sont développés en fonction des objets couverts par la recherche et la pratique. Il est alors question de psychologie -différentielle, - cognitive, - expérimentale, - sociale, - des organisations, etc.. Dans ces disciplines, l’être humain, plus précisément les processus mentaux et les comportements associés sont étudiés sous des angles différents dont les frontières ne sont pas aussi distinctes en pratique. La psychologie permet de décrire les principes généraux du
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Chapitre 1
La psychologie s’appuie aujourd’hui sur l’approche systémique et ses façons d’aborder un sujet sont de plus en plus pluridisciplinaires. Ces dernières prennent davantage en considération l’être humain dans son ensemble (« la tête et les jambes ») et en
interaction avec son environnement (Fiori, 1995). Pour aider l’homme à mieux agir et
mieux vivre, le comportement humain peut être appréhendé dans une perspective clinique (thérapie, conseil) et/ou dans une perspective de recherche (appliquée versus fondamentale). Comme dans toute science, les connaissances sont établies au moyen d’observations, d’expérimentations et d’analyses.
La psychologie cognitive fournit des cadres de références théoriques pour étudier les interactions et les représentations mentales. La démarche clinique permet de gérer des entretiens individuels, de promouvoir l’écoute et les études de cas particuliers (Lemoine, 2003).
1.1.2. … A la psychologie cognitive en particulier
Pendant la première partie du XXe siècle, le béhaviorisme est un courant dominant en psychologie. Les comportements humain et animal sont étudiés à partir de l’observation de la relation stimulus – réponse (comportement) en laissant de côté ce qui se passe dans le psychisme6 (« boîte noire »). Ce paradigme n’expliquant pas tout du fonctionnement de l’humain et des comportements, les chercheurs vont s’intéresser aux activités mentales (Kozanitis, 2005 ; Dortier, 1997).
La psychologie cognitive s’est développée véritablement à partir des années 50. Comme le remarque Fraisse (1991), elle propose des modèles dérivés du fonctionnement des ordinateurs. En 1956, le système cognitif humain est défini pour la première fois tel un
système naturel de traitement de l’information. Il est considéré comme un intermédiaire
entre des entrées (informations sensorielles) et des sorties (comportements). Dans cette perspective, les processus par lesquels le cerveau « traite l’information » sont comparés aux étapes du traitement des données d’un ordinateur. Comme lui, il possède des capacités de stockage et de traitement de l’information.
Cependant, les fonctions cognitives ne sont sûrement pas toutes calculables, ni programmables comme les fonctions d’un ordinateur. L’homme n’est pas un « homme cognitif désincarné », il existe une part d’affectif chez tout être humain (Damasio, 2001). Son fonctionnement cognitif est influencé par différents facteurs conatifs ou affectifs (motivation, satisfaction, etc.) qui sont importants à considérer pour avoir un point de vue le plus global possible.
Les recherches en psychologie cognitive portent sur l’ensemble des fonctions cognitives (langage, mémoire, perception, attention, représentation, etc.) qui permettent à l’homme d’interagir avec son milieu. Dans l’objectif de dégager les propriétés de base de la cognition humaine, ainsi que des invariants pour une personne ou un groupe de personnes (différences intra- et inter-individuelles), les travaux en psychologie cognitive reposent
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sur l’observation du comportement au cours d’une tâche spécifique. Ils recourent
généralement à la méthode expérimentale sur la base d’études réalisées en laboratoire permettant de contrôler un maximum de variables et de rendre les résultats les plus valides possibles (et applicables au plus grand nombre d’individus possible). Toutefois ceci implique que les sujets ne soient pas étudiés dans leur contexte environnemental.
La psychologie cognitive nous aide à comprendre les bases du fonctionnement cognitif et affectif dans le comportement des personnes pendant la conduite d’un véhicule routier et de l’évacuation face à une situation de danger. En effet, ces tâches mettent en jeu la perception, l’attention, les représentations, les connaissances, l’anticipation, etc.. Nous allons décrire ces principaux concepts de l’approche cognitive qui seront reprises lorsque nous aborderons l’ergonomie puis l’activité de conduite automobile et l’évacuation lors de situations de danger.
1.2. Principaux concepts
Les modèles développés en psychologie cognitive ont pour rôle de décrire le fonctionnement du système cognitif humain afin de le comprendre dans son ensemble et ses spécificités. Le modèle du traitement de l’information ou modèle « modal » d’Atkinson et Shiffrin, développé dans les années 70 est une base pour comprendre le fonctionnement de l’activité cognitive, via des structures mnésiques, ainsi que la construction de paradigmes et de modèles récents. Nous allons en présenter les principes généraux avant d’aborder d’autres modèles et concepts sur lesquels repose notre recherche.
1.2.1. La mémoire humaine
1.2.1.1. Le modèle d’Atkinston et Shiffrin (1968, 1972)
Dans le modèle du traitement de l’information d’Atkinson et Shiffrin, l’architecture générale du système cognitif est composée de trois systèmes mnésiques principaux qui possèdent leurs propres capacités de traitement et de stockage de l’information : deux systèmes de stockage transitoire de l’information (la Mémoire Sensorielle et la Mémoire à Court Terme) et un système de stockage permanent (la Mémoire à Long Terme).
Dans ce modèle, l’activité cognitive est décrite comme une séquence d’étapes du traitement de l’information. L’intérêt est porté sur la manière dont l’information est saisie, traitée, stockée et récupérée en mémoire pour élaborer une réponse (comportement) (Figure 1). STIMULUS Son, lumière… MEMOIRE SENSORIELLE K K K K Tactile Auditif Visuel
MEMOIRE A LONG TERME MLT
Connaissances Permanentes
MEMOIRE A COURT TERME MCT Processus de contrôle : Encodage Récupération Auto-répétition Décision
Audrey Auboyer_Thèse 2009 Chapitre 1
Figure 1 : Modèle « modal » d’Atkinson et Shiffrin (1968, 1972)
Les organes des sens (œil, peau, etc.) reçoivent une multitude de stimulations
provenant de l’environnement. Les informations sensorielles sont enregistrées pendant quelques fractions de secondes en mémoire sensorielle. Chaque modalité sensorielle (vue, olfaction, toucher, etc.) a son propre registre, le temps de conservation de l’information varie d’une modalité à une autre.
La mémoire sensorielle dépend de la mémoire de travail, elle est très sensible aux
interférences attentionnelles. Si l’information est l’objet d’une attention particulière, elle est identifiée et introduite en MCT. Sinon elle est désintégrée ou elle disparaît.
La mémoire à court terme a des capacités de stockage limitées, l’empan mnésique
est de 7 +/- 2 éléments. Un trop grand nombre d’informations devant être traité au même moment peut entraîner une saturation des capacités de stockage. Dans cette structure, l’information est l’objet de plusieurs processus de contrôle :
• encodage : responsable du transfert en MLT ;
• récupération : activation et transfert en MCT de l’information emmagasinée en
MLT ;
• autorépétition : « répétition mentale », permet le maintien de l’information en
MCT ;
• décision : mise en œuvre de la réponse (comportement) face au stimulus.
Les informations peuvent disparaître sous l’influence de deux effets : la dégradation temporelle et l’interférence avec des informations récemment incorporées.
La mémoire à long terme possède des capacités de stockage (durée et volume)
potentiellement illimitées mais l’information peut être momentanément ou potentiellement inaccessible. Elle contient l’ensemble des connaissances acquises par le sujet tout au long de sa vie.
Ce modèle est une base pour comprendre le fonctionnement de l’activité cognitive, via des structures mnésiques, ainsi que la construction de paradigmes et de modèles récents. A partir des limites qu’il présente (perspective bottum-up et séquentiel7
de l’information, non prise en compte de l’attention), de nouvelles conceptions sur le fonctionnement cognitif de l’homme apparaissent.
1.2.1.2. Evolution du modèle
Dans le modèle modal, la mémoire à court terme est avant tout une structure de stockage. Le modèle de mémoire de travail de Baddeley et Hitch (1974) insiste plus sur la notion de traitement, tout en conservant l’idée de stockage et en ajoutant celle de ressources attentionnelles. La mémoire de travail est un système hiérarchisé en
plusieurs sous-systèmes articulés entre eux :
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• l’administrateur central : sa tâche principale réside dans le contrôle de l’attention.
Il sélectionne, coordonne et contrôle les opérations de traitement de deux autres sous-systèmes ;
• la boucle phonologique : stocke les informations verbales (auditives ou visuelles) ;
• le calepin visuo-spatial : les représentations visuelles et/ou spatiales y sont
construites, stockées et transformées.
Dans le cadre de l’ergonomie, cette notion de mémoire de travail sera reprise sous le concept de mémoire opérationnelle.
A travers l’évolution des recherches, la mémoire à long terme est l’objet de
plusieurs distinctions sur la base de leur contenu (type de connaissances). Les
informations y sont stockées sous la forme de représentations de notre environnement et de nous-mêmes.
• mémoire épisodique : souvenirs et expériences personnels, opposée à la
• mémoire sémantique : connaissances générales sur le monde ;
• mémoire déclarative : connaissances verbalisables (faits), opposée à une
• mémoire procédurale : « savoirs-faire » ou habilités sensori-motrices.
Selon Jacques (2007), les comportements peuvent être appréhendés à partir du concept de « schémas ». Un schéma est une structure de connaissances élaborée par l'expérience
et/ou par socialisation et stockée dans la mémoire. Un schéma est constitué de
composantes et des relations entre ces composantes. Les processus de catégorisation divisent l'expérience en éléments et placent ces éléments dans des catégories. Ces processus sont fondamentaux pour la perception, la pensée, le langage et l'action car ils allègent la mémoire et la perception de détails. Les schémas contiennent deux types de connaissances : un savoir déclaratif et un savoir procédural.
Les schémas comportent donc des souvenirs personnels (mémoire épisodique) ainsi que des concepts et des règles culturelles et sociales (mémoire sémantique). Ils guident, parfois inconsciemment, les attentes, les actions, ainsi que l'interprétation et le stockage des informations. Ils donnent des cadres de référence et contribuent à la simplification et à l'organisation des informations. Par ailleurs, les schémas procurent une capacité de prédiction et de contrôle du monde social. Ils peuvent aussi faciliter le rappel d'informations.
Les différentes activités des usagers analysées ainsi que nos méthodes de recherche font appel aux mémoires énoncées.