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Administrateurs-directeurs et administrateurs non-directeurs présentent- et doi-vent présenter s'ils entendent assumer le rôle qui leur est réservé au sein de l'organe exécutif- des aptitudes différentes, presque opposées: si la force des

insiders

est dans l'action - ils sont en mesure de devancer la direction grâce à leur

<depth ofunderstanding about the company and its industry [and] involve-ment with and commitinvolve-ment to the objectives of the company's businessesn

263, celle des

outsiders

est dans la réaction -leur

<<.sense of detachment from any encumbe-ring affiliation"

et leur

«hreadth of perspective that brings the larger context into focusn

264 leur permettent de veiller notamment aux intérêts des actionnaires et de jouer le rôle de garde-fou au sein de la société. Les forces des deux catégories d'administrateurs vont de pair avec les faiblesses inhérentes à leur position: les

260 DEMB/NEUBAUER, p. 113.

261 BUSINESSROUNDTABLE, p. 2109.

262 GLAUS, pp. 247 à 258.

263 DEMB/NEUBAUER, p. 101.

264 Ibid.

administrateurs non-directeurs souffrent d'un déficit chronique d'information et d'une connaissance relativement superficielle de la société, les administrateurs-directeurs sont incapables- faute de disposer de la distance nécessaire- d'assurer le contrôle de l'activité sociale qui est le résultat de leur propre activité.

Dans ces conditions, il serait concevable de laisser les administrateurs de chacune des catégories s'occuper des fonctions du conseil pour lesquelles ils sont le mieux armés. Une telle conception se heurte cependant, d'une part, à ce que certains conseils ne comptent pas d'administrateurs-directeurs et, d'autre part, au caractère collégial des décisions du conseil- qui est impératif s'agissant des attributions énumérées à l'art. 716a, al. 1er. Il convient donc de se demander si les deux types d'administrateurs doivent satisfaire à des exigences communes, ou, plus précisé-ment, si les administrateurs de chacune des catégories doivent chercher à acquérir tout ou partie des qualités propres à l'autre catégorie. Selon DRUEY, le principe collégial applicable au sein du conseil d'administration aurait conduit le Tribunal fédéral à exclure, dans l'A TF ZüRCHER265,

<<dass externe Verwaltungsriite [. . .]

mi/der behandelt werden [. . .] als interne»

266A notre sens, cette lecture de l'A TF ZüRCHER ne s'impose pas: les circonstances prises en considération pour la déter-mination de la faute des administrateurs non-directeurs nous laissent au contraire supposer que le standard de diligence applicable aux

insiders

ne vaut pas sans autre pour les

outsiders

267Il apparaît d'ailleurs qu'il n'y aurait guère de sens d'exiger des

outsiders

des qualités en tous points similaires à celles des

insiders

(ou vice-versa); d'une part, les qualités respectives de ces deux catégories

d'adrni-265 ATF ZüRCHER, RO 97 II 403/JT 1973 I 66.

266 DRUEY, Unwirksamkeit, p. 197, curieusement avec un renvoi au considérant du Tribunal fédéral sur la solidarité de l'art. 759 (Haftungssolidaritiit), alors que DRUEY envisage manifestement la question de la Verantwortungssolidaritiit, soit la responsabilité des membres individuels du conseil pour l'action du conseil.

267 Dans cette affaire, concernant une banque, les administrateurs-directeurs avaient détourné le bénéfice d'une opération de la banque à leur profit; pour établir la faute des administrateurs non-directeurs le Tribunal a examiné notamment si ces derniers avaient connaissance de l'opération bancaire, savaient que le bénéfice devait revenir à la banque et avaient pu avoir connaissance du détournement. Le Tribunal a constaté que le réviseur avait rendu le conseil attentif à cette opération (en indiquant qu'elle devait être comptabilisée autrement) et que les administrateurs-directeurs avaient eux-mêmes admis, dans un rapport que les administrateurs non-directeurs avaient vu, avoir comptabilisé l'opération de manière •interne», c'est-à-dire l'avoir camouflée; ce sont ces deux indications qui auraient dû, selon le Tribunal fédéral, inciter les administrateurs non-directeurs à la méfiance (RO 97 II 403/JT 1973 I 66, consid. Sb).

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nistrateurs s'excluent pratiquement et, d'autre part, on ne voit pas réellement l'intérêt d'appeler au conseil des administrateurs des deux types si ces derniers doivent finalement satisfaire aux mêmes exigences. En réalité, la question des exigences «communes» se pose principalement pour les administrateurs qui ne participent pas à la gestion des affaires sociales, étant donné que l'on n'exigera pas des administrateurs-directeurs qu'ils satisfassent à des standards différents pour leur activité et le contrôle de celle-ci (en d'autres termes: si l'activité des

insiders

est conforme au standard légal, la surveillance qu'ils auront exercé le sera aussi; si, en revanche, leur activité ne répond pas

à

ce standard, il ne sera guère utile de leur reprocher encore d'avoir failli lors du contrôle de cette activité).

Il ne saurait être question d'imposer aux administrateurs non-directeurs d'abandon-ner leur rôle «réactif•• au profit d'un rôle actif qu'ils ne sont pas en mesure d'assu-mer vu leur éloignement de l'entreprise. Même si la haute direction fait partie des compétences intransmissibles et inaliénables du conseil d'administration (art. 716a, al. 1er, ch. 1) et que les administrateurs non-directeurs doivent décider en dernier ressort des objectifs stratégiques à poursuivre par la société (ou par-ticiper à la décision lorsque le conseil comprend également des administrateurs-directeurs), il n'est guère réaliste d'exiger d'eux qu'ils élaborent eux-mêmes les stratégies de la société; ils pourront tout au plus proposer des idées qui doivent être développées par ceux qui connaissent suffisamment l'entreprise:

«Ohne jeden Zweifel kommen zahlreiche Impulse auch fiir die Oberleitung a us dem Manage-ment. Es ist die Geschiiftsleitung, welche die finanziellen Dinge handhabt und die Organisationsvorschliige erarbeitet [. .. ]. Die endgültige Beschlussgestaltung und der Entscheid aber-

das

und

nur

das ist das essentielle

Minimum

der Un-übertragbarkeit -liegen immer und allein beim Verwaltungsrat>•

268

Il est, en revanche, essentiel que tout administrateur non-directeur accède à l'infor-mation indispensable à la réalisation de ses fonctions. A cet égard, il convient, d'une part, de déterminer les informations qui doivent être considérées indispen-sables et, d'autre part, dès lors que l'information des

outsiders

est le plus souvent une information de seconde main, de se demander dans quelle mesure ceux-ci sont tenus de vérifier la justesse des renseignements qui leur sont communiqués.

268 BôCKLI, Kemkompetenzen, p. 19 (souligné par nous).

Pour ce qui est du premier point, les administrateurs non-directeurs doivent veiller à ce que les informations qui sont mises à leur disposition leur permettent effecti-vement d'assumer les fonctions d'administration et, en particulier, les attributions intransmissibles et inaliénables énumérées à l'art. 716a, al. ler269Si, dans la doc-trine juridique, aucun auteur n'a,

à

notre connaissance, établi de «catalogue de l'information essentielle du conseil et des administrateurs» et que la jurisprudence n'a pas eu beaucoup d'occasions pour préciser le contenu de cette notion270, on trouve diverses énumérations des informations nécessaires au conseil et à ses membres dans la littérature économique. SPRÜNGLI suggère ainsi que ces derniers doivent obtenir des rapports réguliers dans lesquels il est fait état de la situation économique générale et de celle de la branche de l'entreprise exploitée par la société, des opportunités et risques du marché ainsi que de l'évolution de l'entre-prise elle-même (dans les domaines du personnel, de la production, du finance-ment) et des résultats de cette dernière (bénéfice et rentabilité). Selon cet auteur, les administrateurs doivent par ailleurs disposer des données-clef suivantes :

chiffre d'affaires, part de marché, couverture des frais par groupe de produit ou par produit;

nombre de travailleurs, frais de personnel, productivité du personnel, degré de fluctuation;

quantités produites, stocks, frais de matériel, degré d'utilisation de la capacité de production et rotation des stocks;

engagements (y compris informations sur les principaux créanciers), créances (y compris informations sur les principaux débiteurs),

269 Voir notamment en ce sens DIETRICH, pp. 56/57.

270 Dans l'ATF T., le Tribunal fédéral affirme que le président du conseil d'administration (qui ne participait pas à la gestion courante) aurait dû se renseigner sur les «hiingigen Verbindlich-keiten und deren Bedeutung [. . .]. Er musste wissen, dass und wievief AHV-Beitriige noch zu bezahfen waren, und er hiitte dafiir sorgen müssen, dass mit den LOhnen auch die Beitriige bezahft werden• (RO 109 V 86, consid. 6). Ces exigences vont manifestement trop loin et ne s'expliquent vraisemblablement qu'au vu de l'état de faits particulier de l'affaire soumise au Tribunal fédéral: la société concernée n'avait pas payé de cotisations A VS pendant quatre ans (voir également la glose in SAS/SAG 1985 p. 111, concernant le caractère excessif de la jurispru-dence du Tribunal fédéral des assurances relativement aux cotisations AVS). Une telle exigence ne saurait en tout état être admise pour tous les administrateurs non-directeurs.

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liquidités, positions en devises, dépenses pour investissements, frais de financement, frais de leasing, intérêts produits;

cash-flow, bénéfice, rentabilité271

De l'avis de GLAUS, l'information du conseil et des administrateurs doit englober les procès-verbaux des dernières séances du conseil et de son comité, l'ordre du jour définitif pour chaque séance et la documentation relative à ces séances, ainsi qu'un <<Standard

Report Package»

comprenant notamment des informations finan-cières comparatives relatives à la marche des affaires (bilans et comptes de résultat périodiques à jour, résultats de la période écoulée, prévisions pour la période en cours, indications sur la structure de la fortune sociale, la structure du capital, les liquidités, les revenus et le carnet de commandes), des informations prospec-tives (planification stratégique sur 3 à 5 ans, prévisions relatives au bénéfice, aux liquidités, au chiffre d'affaires et aux investissements), des informations rela-tives au marché, au produit et au champ d'activité (parts de marché, rentabilité, développement du chiffre d'affaires, cash-flow, structure des coûts,

retum on investment),

des informations destinées à être communiquées aux actionnaires et analystes financiers (les bilans intermédiaires et rapports de gestion), un rapport sur la marche des affaires et des rapports spéciaux concernant les affaires d'impor-tance stratégique, telles que fusions et acquisitions, financement de la société, décisions relatives à des produits, litiges, etc.272 Si l'on peut sans doute exiger des administrateurs non-directeurs plus versés dans la gestion d'entreprise qu'ils requièrent des informations aussi détaillées, il nous paraît justifié d'admettre que les administrateurs (non-directeurs) qui sont appelés au conseil d'administration en raison de leur spécialisation particulière se satisfassent d'indications plus géné-rales (rapports sur la situation de la société et les projets de celle-ci, comptes relatifs à la période écoulée et prévisions à court, moyen et long terme, documen-tation permettant de préparer les points de l'ordre du jour des séances du conseil, procès-verbaux des séances écoulées)273

211 SPRÜNGLI, pp. 184 à 187. Cette énumération est inspirée de CHINI, pp. 176ss.

272 GLAUS, p. 229. Cette liste est inspirée de MAURER Richard S., Director Information Systems:

The Advance Information Package, Minutes and Corporate Reports, in MAIT AR Edward P.IBALL Michael (éd.), Handbook for Corporate Directors, New York & al., 1985, chap. 8.

273 Voir au sujet de la situation particulière de ces administrateurs, ci-dessus, pp. 49 ss.

S'agissant de l'obligation de vérifier les informations de seconde main, les admi-nistrateurs sont en principe en droit de se fier aux renseignements qui leur sont fournis; ce droit trouve cependant ses limites là où un renseignement est manifes-tement bizarre ou peu digne de confiance: le Tribunal fédéral - qui a rappelé à plusieurs reprises que les administrateurs devaient lire d'un oeil critique les rapports qui leur sont soumis274 - a ainsi précisé que les administrateurs non-direc-teurs d'une banque devaient s'étonner (et faire des vérifications supplémentaires) lorsqu'on leur présente des opérations qui ont été comptabilisées de manière

«interne» (et non de manière «externe») et lorsque le réviseur a rendu le conseil d'administration attentif à la comptabilisation irrégulière d'une opération275

2. Responsabilité pour le choix d'un modèle de conseil et la sélection des administrateurs

Si l'on se fonde sur le critère de la participation à la gestion, la composition adé-quate du conseil dépend du choix d'un modèle de conseil adapté aux circonstances, de l'organisation interne du conseil- institution du président et de comités, mise en place d'un système d'information entre le conseil et la direction et d'un système interne au conseil- et, enfin, de la sélection d'administrateurs disposant des quali-tés personnelles requises276. Le respect des exigences par les administrateurs individuels est, lui, fonction des qualités personnelles des administrateurs et de leur information277

Si l'assemblée générale autorise le conseil d'administration à déléguer ses fonc-tions à ses membres et à des tiers, le choix du modèle de conseil et son organisa-tion interne relèvent principalement de la compétence de l'organe exécutif, com-pétence dont nous étudierons plus en détailles conditions et conséquences ci-après278. Pour toutes les questions ayant trait à la sélection des administrateurs,

274 Voir notamment ATF ZÜRCHER, RO 97 II 403/JT 1973 1 66, consid. Sb, avec références à HIRSCH, Responsabilité, p. 261, et BAR, Verantwortlichkeit, p. 487.

275 Voir ATF ZüRCHER, RO 97 II 403/JT 1973166, consid. Sb.

276 Voir ci-dessus, pp. 7S ss.

277 C'est-à-dire des connaissances requises et de la force de caractère.

278 Voir ci-dessous, pp. 203 ss.

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c'est en revanche l'assemblée générale qui est compétente. A ce sujet, nous pou-vons donc renvoyer aux développements relatifs aux compétences des adminis-trateurs qui trouvent application mutatis mutandis279

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