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Béatriz Céspedes Sastre Maria-Isabel Zarama V. Meyer

Dans le document L’ENFANT EXPLOITÉ (Page 124-136)

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Le présent travail a été motivé par I’

Communauté européenne par un document de la BBC de Londres sur l’exploitation du travail des enfants dans les mines de charbon des communes d’ Angeldpolis et d’ Amaga, au nord-ouest du pays.

Devant la fermeture des mines britanniques, le parlement- proposa un veto à l’achat du charbon colombien, ce qui aurait provoqué une diminution de 20 % des ventes, soit environ 90 millions de dollars : l’emploi d’enfants dans le mines de Colombie avait fourni des arguments pour justifier ce veto des syndicats de mineurs anglais qui se‘ trouveraient en situation de chômage en raison de cette concurrence déloyale. Cette argumentation n’est pourtant guère fondée car, s’il est vrai que les mines. d’exploitation artisanale, dont la production est utilisée dans la consommation domestique, sont essentiellement des exploitations familiales et que les enfants y sont utilisés comme force de travail aux différentes étapes du processus de production, le- charbon d’exportation, lui, provient du Complexe du Cerrejo (où Intercor, société étrangère filiale de I’Exxon, a engagé la moitié de ses ressources), qui n’uti- lise pas le travail des enfants.

Le travail des enfants en Colombie

I1 n’est pas facile de mesurer la part du travail des enfants dans l’activité totale de la nation, en raison du type même des tâches qu’ils réalisent : << travaux invisibles >> l’intérieur de la famille, travaux dans le secteur << informel >>, marginaux et illégaux diffici- lement repérables par les mécanismes du registre statistique.

Cependant, certaines études confirment le haut degré de participa- tion des enfants, aussi bien en ville qu’à la campagne, et montrent une grande différence entre les dispositions de la loi et la réalité.

En ville (73’8 % de la population vit en zone urbaine), et pour l’année 1991, le Département administratif national de statistique

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- I24 L‘ENFANT EXPLOITÉ -

- (DANE) a dénombré 36 500 enfants travailleurs entre 12 et 14 ans dans les sept villes principales (39 96 de vendeurs à la sauvette, 38 % de domestiques, 17 % dans l’industrie manufacturière, et le reste dans la construction, les transports et autres). Toujours d’après le DANE, il y avait 433 839 travailleurs entre 12 et 19 ans .dans les neuf villes les plus importantes du pays.

À la campagne (26’2 % de la popul.ation), il convient de rele- ver la participation considérable des enfants à l’activité- écono- mique. Les enfants y commencent très tôt à collaborer aux’travaux domestiques et aux activités agricoles. D’après les résultats de -l’enquête réalisée par le DANE en 1988, 24 % de la population active des zones rurales était constituée par des jeunes entre 6 et 18 ans ; les enfants entre 6 e t 9 ans représentaient 6 % du total (UNICEF, 1994). Le nombre d’enfants qui travaillaient y oscillait entre 1 259 730 (ceux pour.qui le travail était l’activité principale .-définition simple) et 1 725 057 (ceux pour qui le travail n’était qu’une des activités - définition élargie). L’agriculture est la branche d’activité qui emploie le plus grand nombre d’enfants, suivie par les services dans le cas des filles.

La Colombie a signé la Conventidn internationale des droits de l’enfant et dispose depuis plus de 20 ans d’un Institut national de bien-être-de la famille (ICBF) ; elle a promulgué un Code des mineurs repris par la constitution de 1991, mais le nombre des enfants mineurs qui travaillent ne semble pas-diminuer et les mesures de protection ne semblent pas effectives. L’ouverture économique des gouvernements néolibéraux laisse penser que le travail des enfants tendra à-augmenter‘ avec le développement du secteur informel, la diminution des revenus de la population rurale et des travailleurs urbains et la détérioration de la qualité de l’emploi. L‘emploi intérimaire, d’après certaines études, est passé de 14,8 % e n 1989 à 21’2 % en 1992, et le sous-emploi a augmenté de 13,5 % à 16’8 % pendant la même période (Estrada, 1993). Le secteur informel se développe comme alternative de survivance et il s’agit en général d’un travail auquel toute la Comme beaucoup de pays industrialisés ou en voie de développement, la Colombie a promulgué des lois sur le travail des enfants, conformes aux lignes directrices de la Convention interna- tionale sur les droits de l’enfant approuvée par l’Assemblée des Nations unies en 1989 ; et, bien qu’elle n’ait pas ratifié l’Accord 138 de l’OIT qui oblige les gouvernements à exécuter -des politiques visant à l’abolition du travail des enfants et fixant des normes sur I’âge minimum d’admission à l’emploi, elle a du moins établi une réglementation précise sur le travail d’enfants.

Le Code des mineurs promulgué en 1989 fixe les droits fon- damentaux des mineurs, les actions et les mesures que les autorités

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. famille participe.

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LES MINES DE CHARBON EN COLOMBIE 125 doivent prendre pour faire face aux situations irrégulières. I1 classe comme mineurs en situation irrégulière les enfants qui travaillent sans autorisatio-n, c’est-à-dire les mineurs de moins de 12 ans qui se trouvent dans toute situation d’activité de travail productif et ceux qui, ayant plus de 12 ans et moins de 1 8 ans, exercent des activités interdites par la’loi. Le

interdit, sauf exception (ICBF, 19 Le Code énumère 22 types d

raison des risques sévères qu’ils font courir on permet aux enfants âgés de plus de 14 a

des travaux interdits sous certaines conditions d’entraînem adéquat et de sécurité. Parmi les travaux expressément interdits, peut relever les travaux dans les mines.

La protection de l’enfant qui travaille relève du ministère du Travail et de la Sécurité Sociale qui doit surveiller l’application des normes ‘de protection du travail des enfants. Cependant, d’après les chiffres que donnait le DANE en 1992, le ministère ne contrôlait que 2,% des enfants qui travaillent dans les neuf principales villes du pays. I1 s’occupe de leur orientation juridique, délivre des autorisations de travail, reçoit les plaintes et les réclamations, pratique des visites aux entreprises et ouvre des audiences.

Néanmoins, le nombre de fonctiónnaires spécialisés est tout à fait insuffisant pour faire face à des problèmes aussi CO

oitation du charbon colombien

D’après de récentes analyses économiques, le secteur minier et énergetique a pris beaucoup d’importance ces dernières années dans I’économie nationale, fait qui se reflète dans sa participation au PIB : de 1,27 % en 1980, il est passé à 4,17 % en 1988 et à 4,37 % en 1990. D’après le ministère des Mines et de l’énergie, la Colombie dispose des plus grandes réserves de charbon de I’Amé- rique latine. En 1990, la production annuelle était de -20 O00 tonnes.

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Le recensement minier de 1988 confirmait que 76 %-de mines sont exploitées d’une manière << informelle >> - sans autorisation du m’inistère - et occupent 90 278 personnes dans 764 des’ 1 029 communes du pays. On ne trouve que-28 322 personnes travaillant dans des entreprises minières organisées conformément à la loi, et

12 % d’entre elles sont propriétaires.

ploration des minéraux, permet leur exploitation ratiõnnelle et fixe les conditions de leur l’emploi. Selon ce code, l’exploitation est classée suivant la capacité annuelle d’extraction en petite, moyenne ou grande exploitation. La petite exploitation a une production

Le Code des mines est l’instrument j

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annuelle inférieure à 30000 tonnes ; la moyenne entre 30000 et 50 O00 tonnes et la grande, une production supérieure à 50 O00 tonnes.

L’exploitation du charbon présente des contrastes considé- rables. La grande exploitation (comme celle du Cerrejon dans la Guajira où l’exploitation se fait à ciel ouvert) a une technologie de pointe, des machines modernes et une main-d’aeuvre qualifiée qui jouit de toutes les garanties de la loi.

-L’exploitation moyenne ou semi-mécanique est caractérisée par l’utilisation des machines qui assurent un maximum de pro- duction et la diminution des risques. En général, elle se fait dans des mines souterraines avec un système de ventilation électrique qui empêche l’accumulation des gaz, une extraction avec des explosifs ou au marteau-piqueur, un transport par bandes méca- niques et une assistance technique sur tous les fronts de travail. Les ouvriers disposent de casques métalliques, de bottes et d’équipe- ment de secours. Ils sont affiliés à la Sécurité sociale.

La petite exploitation, caractérisée par des unités de production de propriété individuelle qui possèdent un permis d’exploitation ou en ont fait la demande, ne dispose pas d’une organisation bien claire, ses registres comptables sont précaires mais il y a un mini- mum de contrôle technique. L’extraction manuelle se réalise à l’aide de marteaux-piqueurs, pneus et explosifs. Le chargement est manuel et le transport se fait à dos d’homme ou d’animal, ou bien h l’aide de chargeurs sur des rails d’acier. L’éclairage est composé de lampes à piles et la vidange est faite par des pompes électriques ou par gravité ; la ventilation est assurée par des tunnels ou autres orifices e n guise de bouche d’aération. Les mineurs-ont des

- casques, des bleus et des bottes et peuvent parfois utiliser des plans et compter sur un minimum d’assistance technique.

Les exploitations minières artisanales sont les plus nombreuses et ce sont elles qui emploient des enfants. If s’agit d’une ex- ploitation de subsistance aux techniques rudimentaires et sans sécurité pour les mineurs.. En général, ce sont des explöitations souterraines où l’extraction est faite dans des chambres étayées par des piliers, de façon manuelle, ainsi que le chargement ; le trans- port se fait à dos d’homme ou dans des wagonnets poussés manuellement sur des rails de bois ; I’éclairage est au carbure ; pour éviter les risques d’éboulement, les murs de la mine sont protégés par des poutres de bois. Les tunnels sont creusés dans la montagne, verticalement ou transversalement. Les galeries peuvent

‘avoir une longueur de 150 mètrGs au plus, et leur diamètre varie d’un mètre à un mètre et demi. A l’intérieur de la mine, le travail se fait en position inclinée, l’extraction de charbon s’effectue à l’aide d’une pique. I1 est tiré jusqu’à l’entrée principale oÙ il est ensuite sorti, par le << terciador >> ou dans le chariot. L’exploitation

LES MINES DE CHARBON EN COLOMBIE 127 se fait sans aucune formation professionnelle. La plupart des mines sont illégales, leurs propriétaires n’ont aucun permis du ministère des Mines et de l’énergie.

Participation des enfants et des jeunes à l’extraction du charbon C’est dans l’exploitation de type artisanal qu’on emploie en général les enfants, comme autrefois on employait les femmes. Le travail se fait en famille, la mère réalise des travaux annexes : pré- paration des repas et couture de sacs pour emballer le minerai. Le mineur ne reçoit d’apprentissage que l’observation, dès son enfance, des gestes traditionnels et acquiert seul son .expérience.

I1 y a longtemps que les enfants mineurs travaillent dans les

- mines de charbon. Dans le département de Boyacá, à Tópaga, d’après ce que racontent de vieux mineurs de la région, le travail dans les mines a commencé vers 1941. Saul Hurtado, l’un *des pionniers, affirme que, jusqu’à l’arrivée d’une mission allemande à la recherche de gisements de charbon, l’activité fondamentale de la région était l’agriculture et que l’apprentissage du travail minier s’est fait sur le tas lors de visites que réalisaient les membres de la mission.

G Les petits propriétaires commencèrent à faire des excavations dans leurs lopins et les premiers tunnels où allait travailler toute la famille commencèrent à apparaître. Au début, on s’éclairaìt avec des bougies, des lampes à pétrole ou on improvisait de becs de gaz ; les femmes et les enfants portaient le charbon sur le dos dans des sacs faits de peau de bœuf. Vers 1945, on commença à utiliser les chariots à roues métalliques et les femmes cessèrent donc de travailler directement dans les mines, mais pas les enfants. Plus tard, avec l’apparition de la roue de caoutchouc, un processus graduel de technification de l’exploitation de charbon -a commencé. Ce n’est qu’à partir de 1970 que l’on a commencé à utiliser l’énergie électrique pour I’éclairage et les pompes pour l’extraction de l’eau’ >>.

Malgré la modernisation du processus, on continue toujours à embaucher des enfants et il est probable que cela continuera tant que l’exploitation artisanale du charbon restera familiale. La technification du travail minier, tout comme la modernisation du travair dans d’autres secteurs de l’économie, impliquerait la réduction et la disparition du travail des enfants et un travail spécialisé d’ouvriers de plus en plus qualifiés.

études, n’est pas une activité exclusive. Au contraire, elle se com- Le travail des enfants, comme le démontrent la plupart ¿les-

Hurtado, I., communication orale (Tópaga, Boyacri, 1994).

128 L‘ENFANT EXPLOITÉ

bine fréquemment avec d’autres tâches : ils s’occupent de leurs petits frères, font divers travaux domestiques et travaillent aussi aux champs et, dans le cas présent, à la mine. Quelquefois, ils vont à I’école.

vaillent dans les mines de charbon et aussi aux champs. Selon un recensement scolaire, réalisé en 1980, tous les enfants travaillaient aux champs et la moitié dans les mines. Des 1200 enfants enquêtés, et dont les âges oscillaient entre 5 et 15 ans, 900 travail- laient dans les mines (Gutierrez, 1989).

À Boyacá, les industries minières et agricoles se développent dans des petites propriétés où la famille unie constitue la force de travail. Le faible développement de l’économie agricole de subsis-

. tance n e permet pas à l’ensemble de la main-d’œuvre disponible de trouver un emploi. La solution est la migration ou l’exploitation minière. Les taux de migration sont très élevés et aggravés par la situation de violence politique que vit le pays. II n’y a donc pas abondance de main-d’œuvre adulte dans certaines régions, et les travailleurs disponibles se consacrent à l’agriculture et à l’exploitation des mines. En ce qui concerne l’agriculture, il s’agit d’une économie de subsistance qui n’est pas nécessairement liée

- au marché; en revanche, l’exploitation des mines permet aux petits propriétaires d’entrer dans le circuit du marché et donc d’obtenir de l’argent, bien que leur situation ne soit pas avantageuse car les conditions de commercialisation les soumettent aux règles imposées par les intermédiaires.

Dans le département d’Antioquía, la grande majorité des travailleurs des mines proviennent du secteur rural. Ils combinent le travail dans les mines avec d’autres activités’: cueillette du café, travail dans des grandes fermes consacrées à l’élevage. Là, les enfants encore tout petits commencent à travailler dans les mines car les conditions de vie des familles sont très précaires et les parents voient dans-’ce travail la possibilité d’augmenter leurs maigres revenus (Ortiz, Roa, 1994).

L’enquête réalis6e par le Bureau du défenseur du peuple montrait que dans toutes les mines visitées, il y avait-une moyenne

- de trois enfants travailleurs entre 13 et 15 ans.. Dans 55 de ces enquête a dénombré 142 enfants qui réalisaient plusieurs

ctivités (Defensoria, 1994).

Dans le département de Boyacá, par exemple, les

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de travail des-enfants mineurs

n rapport présenté par le Défenseur du peuple, pour du minerai dans les endroits les plus profonds et enfants, pour leur petite taille et

- étroits des galeries, on préfè

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LES MINES DE CHARBON EN COLOMBIE

leur agilité. Ils travaillent dans une ambiance humide, extrêmement chaude, contaminée, sans ventilation, et sont exposés aux vapeurs toxiques et à 1’émanation constante de particules qui affectent les poumons. Les fonctionnaires chargés de la visite sont descendus jusqu’à 200 mètres de profondeur, mais l’on sait qu’il y a des galeries à plus de 300 mètres sous terre ; la lumière n’y arrive pas, l’air manque et le risque est réel de mourir dans un éboulement en raison des conditions techniques de l’exploitation, ou victime d’explosions provoquées par la concentration de méthane qui s’enflamme avec une étincelle. Le risque d’inondation est égale- men t fréquent.

Les enfants commencent tout petits à travailler dans les mines, certains dès six ans. On dit que l’enfant est prêt à travailler quand il est capable de saisir des objets et de les traîner derrière lui.

Les plus petits se chargent des travaux en plein air : séparer le charbon, porter le bois, les outils, l’eau et la nourriture. Les plus grands font des travaux qui exigent plus de résistance. Le travail souterrain est réalisé par des enfants de 12 à 14 ans, bien que, comme nous l’avons déjà signalé, il y en ait de tous les âges.

D’après les recensements réalisés par les comités municipaux de défense des enfants travailleurs dans la région d’Amaga et Ange- Iópolis au mois de février, entre 50 %-et 60 % des enfants travail- lent comme arrastradores. Le classement suivant, correspondant aux travaux réalisés par les enfants mineurs, a été réalisé dans la région d’Angelópolis, et nous l’avons révisé en le confrontant aux observations qui se rapportent à d’autres régions du pays :

Achicador : évacue l’eau des mines pour éviter les inondations.

Arrastrador: transporte le charbon de l’intérieur de la mine à Ia surface en traînant une lame de métal attachée à ses épau les.

Arriero : conduit la mule qui transporte le charbon empaqueté lorsque la mine se trouve loin de la route.

Asoleador : se charge du lavage, du séchage et de l’entretien des sacs.

Barretero : extrait le charbon des- mines avec une pique. On l’appelle aussi piquero.

Carretillero : transporte le charbon dans des charrettes remplies des paniers, du fond de la mine jusqu’à son entrée.

Ce travail se fait à deux, l’un des enfants traîne la charrette et l’autre la pousse en la soulevant.

conduit une yoiture électrique pour porter jusqu’à . l’entrée de la mine, le charbon empaqueté.

de fibre à la sortie de la mine.

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Cochero :

Empacador : emballe le charbon dans des grands sacs de corde ou .

- 130 L‘ENFANT EXPLOITÉ

Garitero : Paleador :

porte le casse-croûte aux mineurs.

se charge de ramasser à la pelle les morceaux -de charbon éparpillés sur le .sol et de les mettre dans les chariots ou dans les sacs.

extrait le charbon des mines avec une pique. On l’appelle aussi barretero.

porte sur son dos le charbon dans des sacs de fibre

- attachés sur la tête ou la poitrine.

Normalement la journée de travail dans les mines va de 1 h ou 2 h du matin jusqu’à 8 h ou 9 h, pour que les enfants puissent aller à l’éCole et, ensuite, aux travaux des champs. Cet horaire est choisi en raison du manque de ventilation et du fait que la température de la mine est plus supportable au point du jour.

- Dans une étude sur la région de Boyacá, on a relevé que 55 % - des enfants faisaient des travaux nocturnes dans la mine et 45 % des travaux hors de la mine dans la journée (Gutierrez, 1989).

Selon cette étude, la journée se répartit comme suit pour la plupart des enfants : de 1 h à 7 h du matin, travail dans la mine ; de 8 h à midi, école, et de 2 h à 6 h, travaux domestiques et agricoles, soit

1 O heures de travail et 4 heures d’études.

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-Suivant les régions et les conditions particulières des enfants, il peut y avoir des variations. Dans une étude réalisée en Antioquía, on peut lire le témoignage suivant : << Je partais au travail à 4 h du matin et je finissais à 1 1 h. Nous travaillions à l’aube pour avoir un peu de temps l’après midi pour nous reposer et être capable-de nous lever le lendemain à l’aube

...

D (Ortiz, Roa, 1994).

Dans I’étude- sur Bpyacá, citée plus haut, on peut relever les impressions d’un petit mineur sur l’éducation et le. travail dans la mine: << J’me lève à minuit, j’avale un café, j’m’en vais à la mjne où j’travaille jusqu’à 7 h du matin. L’après midi, j’vais à I’école de -2 h à 6 h. Après, à la maison, j’aide un peu, jusqu’à 8 h.

J’aimerais bien travailler plus dans la mine pour gagner plus -d’argent. L’éCole, ça sert à rien. >> (Gutierrez,. 1989). __

Lorsque les enfants touchent un salaire, c’est sur la base d’un contrat verbal dont les conditions sont imposées par le propriétaire de la mine. En général, le travail est payé à la pièce, c’est-à-dire en fonction de la quantité de charbon extraite au cours d’une journée de travail. La plupart des enfants n e -gagnent -même pas le salaire minimum, qui équivaut à 120. dollars. Ils reçoivent en moyenne 50 O00 pesos, c’est-à-dire environ 60 dollars. Dans les régions de Boyacá et Cundinamarca, régions de petites propriétés, les enfants travaillent en général avec leurs parents sans aucune rémunération.

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L’État n’exerçant aucun contrôle sur les formes d’embauche et la majorité des mines où travaillent les enfants étant illégales,

. .LES MINES DE CHARBON EN COLOMBIE 131

ceux-ci -n’ont évidemment aucun type de- prestations

n’ont ni vacances, ni allocations de transport ou d’alimentation, et pas non plus de services médicaux. Comme dans presque to cas de travaildes enfants, la législation est lettre morte.

Santé et éducation

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I

La santé des enfants travailleurs de ces régions est marquée par la présence de parasites, de carences nutritionnelles en calories et en protéines, par l’anémie, l’avitaminose, et des dents abîmées. Le travail dans les mines provoque des maladies infectieuses : pha- ryngite, amygdalite, sinusite, grippe, maladies pulmonaires et sili- cose. Les maladies de la peau et les traumatismes des mains et du visage sont permanents. Les déformations des os sont. fréquentes au bout d’un certain nombre d’années de travail.

I1

convient aussi d’analyser le problème de la fréquentation de l’école, le niveay de scolarité des enfants, ainsi que l’attitude des parents et de I’Etat face à l’éducation..L’entrée précoce de I’en- fant dans le monde du travail provoque chez lui apathie indif- férence à I’éducation, dans la mesure où il n’y a-pas‘dans son environnement de possibilités de progrès et ù I’éducation est -donc vue plus comme une perte de temps-que mme un investis:

-sement. <<Pour être un homme, il faut travail1 sinon, quand on arrive à I’âge adulte, on sait rien faire et on a beaucoup de mal à subsister’ >>. Bien qu a constitution garantisse I’éducation gratuite et obligatoire, d la pratique, les moyens d’application de la loi n’existënt pas et il n’y a pas non plus de programmes conçus en fonction des différents milieux: Les niveaux de désertion scolaire dans-ces zones sont don

ne va-au delà de l’école primaire, Tópaga : proppsition pour I’Cli

Tópaga est à quatre heur petite commune de Boyacá, de 5 O00

environ, exploite de manière artisanale le charbon minéral. I1 y a - tout juste deux ans encore, 150 à 200 enfants, dont certains âgés . de moins d e 12 ans, étaient occupés dans les conditions décrites plus haut : outre les travaux des champs et les travaux domestiques pour la plupart, et fréquentation de I’école pour quelques-uns d’entre eux: ils travaillaient dans les mines pour se faire quelques sous, leur permettant de s’acheter des vêtements et de participer aux dépenses de la maison.

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Alvarez, F., communication onle (Tópaga, Boyacd, 1994).

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Dans le document L’ENFANT EXPLOITÉ (Page 124-136)