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Travail des enfants on démographique

Dans le document L’ENFANT EXPLOITÉ (Page 88-92)

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Travail des enfants

88 L‘ENFANT EXPLOITÉ

œuvre par l’Union pour I’étude de la population africaine (UEPA), une enquête relative à l’enfance en circonstances dif- ficiles au Congo, portant sur un échantillon de 407 enfants et jeunes de la rue à Brazzaville, nous a permis de disposer d’infor- mations sur le travail des enfants et la perception des parents, par le biais d’entretiens libres avec les familles et les institutions concernées par le phénomène des enfants de la rue et des enfants travailleurs.

Entre idéologies d’hier et réalités d’aujourd’hui : le poids des stratégies familiales

Une première indication : l’enfant et son univers

Les 6tudes sociologiques et anthropologiques des sociétés traditionnelles africaines consacrent le fait que l’enfant a souvent - sinon töujours

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été considéré comme un atout important dans la régulation du fonctionnement social et économique. a Ne te rends-tu pas compte qu’il vaudrait mieux‘pour moi être mère d’un enfant mort que de ne pas avoir d’enfant du tout ? D : telle est, à ce propos, la réaction désespérée d’une femme venue à l’hôpital pour accoucher, telle que l’a r e p e et la rapporte le Docteur Anne Retel-Laurentin (1979).

La famille congolaise était, par tradition, une institution stable.

Jadis, le nombre de bras au travail constituait le soubassement de la richesse familiale, particulièrement dans les zones rurales. L’enfant s’est inscrit pendant longtemps dans cette logique communautaire qui imposait aux couples l’obligation morale d’en procréer autant que le leur permettait leur organisme. Cette lecture adaptee au . contexte passé s’est étalée dans le temps, trouvant dans Ilintensité - de la demande de main-d’œuvre la justification légitimée d’une fécondité élevée, surtout en zone rurale.

Actuellement, de multiples facteurs commencent à agir comme des forces déstructurantes sur le statut des enfants et les relations de parenté.

Au-delà du schéma associatif qui faisait une large place aux solidarités familiales, la connaissance des réalités sociales permet de constater- que se Iézar“dnt‘les_ modes traditionnels de penser et d’agir.

Désormais, les notions d’assistance, d’entraide et de solidarité communautaires semblent épouser les contours du parasitisme.

Les désajustements économiques actuels paraissent porter les mécanismes d’une évolution critique qui affecte les fondements des structures familiales et va déterminer le type d’insertion des enfants dans la cité.

TRANSITION DÉMOGRAPHIQUE AU CONGO 89 De plus en plus au Congo, certaines manifestations du conflit enfants

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parents apparaissent à la fois comme la dilution de l’autorité et un refus implicite de la responsabilité parentale ; les parents trouvent ainsi une solution transitoire ou même définitive à une série de pressions socio-économiques auxquelles ils doivent faire face-pour nourrir, soigner, éduquer et encadrer les enfants et les jeunes.

Malgré leur résistance au changement. les familles nombreuses ou étendues se lézardent (Locoh, 1988). A Brazzaville, capitale du Congo, l’enfant devient peu 5 peu une charge qu’on abandonne ici, qu’on élève là, qu’on confie ou qu’on oublie tout simplement.

Son image s’étiole et le désir d’avoir des enfants s’aligne progres- sivement sur d’autres types de contingences et de mobiles. Ainsi apparaissent des génériques nouveaux, longtemps inconnus de cet espace : grossesses non désirées, enfants délaissés, enfants en cir- constances difficiles ”, conjoints abandonnés

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en réalité des cas de figure qui esquissent les contours et l’ampleur des boulever- sements à venir, et au travers desquels l’enfant, sans avoir réuni les instruments essentiels de sa personnalité, doit se frayer un passage pour la vie.

I1 apparaît alors, particulièrement dans les villes, que la fécondité élevée ne saurait pérenniser, comme par le passé ou à l’instar du milieu rural, un cadre de solidarité forte et équilibrée face au chômage, dans un pays largement scolarisé et urbanisé, où, justement, les enfants et les jeunes (les personnes de moins de vingt ans représentent 55,6 % de la population totale) revendiquent un statut longtemps considéré comme dégradant à Brazzaville : celui de chômeur. Bloquée par un secteur productif. national qui s’épuise, la solidarité de crise, sous-tendue par le jeu du nombre,*

glisse peu à peu vers Üne crise de olidarités et remet en question, chaque jour un peu plus, la so lesse légendaire des familles africaines.

Cette évolution éprouve donc largement les formes de la soli- darité familiale pourtant encore nécessaire à l’équilibre social. La disparition perceptible des manifestations de rapprochement et de consolidation des liens familiaux occasionne inévitablement une détermination confuse de la place de plus en plus controversée de -~

l’enfant dans le réseau familial. L’enfant ou le jeune adolescent a cessé, face à sa situation, d’être uniquement un gamin. I1 apprend, - il travaille, il est devenu un homme avant I’âge.

. Les enfants sont en outre victimes de la survivance d’un sys- tème traditionnel d’héritage qui, malgré l’existence des disposi- tions juridiques légales, bafoue leurs droits légitimes en la matière, les transforme en orphelins démunis et dépossédés: ce qui les contraint dans la plupart des cas à une existence précaire et à un combat inéluctable pour la survie.

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Un deuxième repère : les types de ménages au Congo

Trois principaux types- de ménages subsistent au -Congo : les ménages d’une personne, les ménagës nücléaires (noyau familial composé,du père, de la mère et de leurs enfants) et les ménages élargis. A titre indicatif, en 1984, les ménages d’une seule per- sonne représentaient 13,5 % de l’ensemble des ménages et les ménages nucléaires 37,2 %.

On note I’étiolement des ménages élargis, particulièrement en milieu rural. C’est sans nul doute le résultat du puissant mouvement d’exode rural observé depuis près d’une quarantaine d’années et qui concerne en majeure partie les individus jeunes, aptes à procréer, à travailler et à former un ménage.

Enfin, que ce soit en milieu urbain- ou en zone rurale, la proportion des ménages élargis où le chef de ménage est un homme n’est guère différente de celle où c’est une femme qui assume cette fonction ; dans les ménages nucléaires, c’est le plus souvent l’homme qui sera considéré comme le chef de ménage ; en ce qui concerne les ménages d’une seule personne, au contraire, on rencontre plus de chefs de ménage de sexe féminin que masculin, tout particulièrement -- en . - milieu rural (effet conjugué du veuvage et de la vieillesse). - .

Un dernier signe :

des cheminements matrimoniaux de-plus en plus incertains

Au Congo, on note une augmentation du célibat parmi les chefs de ménage,-surtout dans les villes, En 1984, il apparaît éga- lement que-l 8,7-% des femmes mariées sont chefs de ménage.

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Le plus intéressant est de constater qu’en dix ans, la structure selon I’état matrimonial des chefs de ménage de sexe féminin a considCrablement varié. Souvent, dans les villes, les femmes chefs de ménage qui se déclarent mariées alimentent plutôt les réseaux d’un régime polygamique de fait, soutenu par le développement d’un- phénomène fort répandu : celui -des << bureaux D ou des . a maîtresses >> qui confère à l’homme la possibilité non affichée d’avoir plusieurs concubines, en dehors de son épouse légitime.

Cette .situation émaille fortement, à Brazzaville, les comportements et les cheminements matrimoniaux.

-Les divorces des parents en milieu urbain augurent des perspectives dramatiques pour les enfants issus de ces unions en détresse.

L’environnement ainsi présenté met en exergue des indica-

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significatives sur le mode de constitution des nouveaux ménages au Congo, I’évolution des atti es face au mariage dans

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