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discours d’enseignement des sciences

3. Autres spécificités relevées dans les discours d’enseignement

Nous relevons d’autres éléments de langage propres et spécifiques à chacun des enseignants au cours de la conduite de leur séance, qui nous semblent « significatifs » car révélateurs d’un point de vue particulier sur l’acquisition du savoir scientifique. Nous nous intéressons notamment à l’utilisation des verbes voir, regarder, observer et montrer qui dénotent une volonté de prendre appui sur le réel pour asseoir un savoir. Nous relevons aussi les occurrences des termes relatifs aux verbes apprendre, comprendre, expliquer et réfléchir qui semblent, eux, indiquer davantage, chez les enseignants, une volonté de faire construire des savoirs à partir de l’activité réflexive et explicative, dans la mesure où nous postulons qu’expliquer c’est aussi comprendre. Puis nous nous intéressons encore à l’emploi du verbe faire qui dénote, à notre avis, une assimilation de « l’agir » et de « l’apprendre » dans les discours d’enseignement.

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3.1. Particularités du vocabulaire employé par M1

Nous avons rassemblé dans le tableau 18, les extraits de corpus relatifs à l’emploi du vocabulaire que nous venons de caractériser, dans le discours d’enseignement de M1 :

vo ir o b se rv er r egard er - m o n trer

- pour voir pour observer les feuilles et il fallait les/dessiner (6/8) - en pique comme un ovale vous avez vu ?

- vous savez hier on a vu la sève euh orange dans la chélidoine (37)

- on pourra aller observer les feuilles à l'extérieur une autre fois et on regardera si on a des feuilles palmées ou pas

- regarde/on va le faire avec notre doigt pour bien comprendre après on re regardera la feuille (156)

- ça faudra bien observer / vous pouvez l'observer ça (207)

- vous avez vu comment comme on a mis une dans la terre ? (211)

- ben peut-être que vous allez m'en montrer / est-ce que vous pouvez m'en montrer (49) - je vais vous montrer quelque chose aussi (163)

ça s’ ap p ell e on ap p elle

- vous savez comment ça s'appelle ces traits ?

- autour y a des petites nervures ça s'appelle les nervures (41) nous on appelle ça des dents (129) - ça ça s'appelle le lim:be (175)

- cette petite tige vous savez comment ça s'appelle ? (177)

- ça s'appelle/le pétiole (179)

- comment on appelle une feuille où il y a des petites:: pointes (189) - comment on appelle les petits:: tuyaux (191)

- comment on appelle la petit’ tige (193)

faire

- qu'est-ce que tu savais pas faire dans les feuilles (15)

- je peux faire une au milieu et les petites qui sont placées autour / - on va le faire avec notre doigt pour bien comprendre (156)

- on va faire un p’tit dessin on va faire un p’tit dessin/ on va faire comme Gabriel (163) - c'est vous qui allez l’faire (165)

- on peut pas tout apprendre le même jour (209)

Tableau 18 : Éléments de vocabulaire repérés dans le discours de M1 en sciences (sur 442 échanges)

Le discours de l’enseignante est marqué par l’emploi répété de formules du type ça s’appelle ou on appelle qui montre qu’elle accorde un intérêt particulier à nommer l’objet d’étude, ses composantes et ses caractéristiques de manière exacte. Elle utilise l’observation au service de cet objectif. Il s’agit pour elle de faire constater une réalité qu’elle montre et décrit aux élèves pour leur permettre d’y associer un nom ou pour lui attribuer une de ses caractéristiques formelles. Nous remarquons aussi un emploi répété du verbe faire, qui montre une focalisation sur l’agir, centré sur la réalisation du dessin des feuilles. Les deux seuls emplois des verbes comprendre et apprendre sont exclusivement associés à la réalisation de ces dessins.

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3.2. Particularité du vocabulaire employé par M2

Le tableau 19 rassemble les extraits de corpus relatifs à l’emploi du vocabulaire caractérisant l’orientation prise par M2 pour conduire son activité d’enseignement :

Tableau 19 : Élément de vocabulaire relevés dans le discours de M2 en sciences (sur 318 échanges)

Comme nous le voyons, l’emploi du verbe voir au même titre que le verbe remarquer est utilisé par M2 (dans le tableau 19 ci-dessus) en association avec le verbe comprendre (ex : MAIT 53) dans le cadre d’opérations de tissage. Il s’agit pour elle de faire prendre conscience aux élèves que le raisonnement en cours découle de leurs observations antérieures et de ce qu’ils connaissent déjà. En effet, on constate que l’aboutissement du raisonnement, verbalisé par l’emploi des verbes comprendre, apprendre ou expliquer (cf. tableau 19) est explicite (ex : MAIT 316). De la même façon, la focalisation sur le nom de l’animal (par l’utilisation de on appelle ça ne vise pas seulement à faire apprendre des mots exacts aux élèves, mais à expliciter le nom de la catégorie comme conséquence du raisonnement effectué. Nous notons

vo ir -o b se rv er - re gard er - re m ar q u er - m o n trer

- n'empêche qu'ils se déplacent/ on a vu quand on les avait sur nos bureaux (28) - parc'qu'on avait vu qu’ils avaient des p'tites pattes (32)

- il se déplace avec ses pattes/en mêm’temps on a remarqué qu'il avait six pattes//je vais d'ailleurs passer vous montrer /vous regarderez enfin bon vous avez déjà beaucoup

regardé/alors/vos remarques là-dessus qu'est-c'que vous êtes en train de comprendre/on a vu

qu'ils faisaient d'la soie/qu'est-c'que c'est la soie on m'le raconte (53)

- on l'voit bien là (76)

- d'accord ok tout l'monde l'a vu/ils font des fils de soie//hein /on en voit beaucoup quoi d'autre ? (78)

- tu as vu ça? (80)

- comment tu sais ça/ où tu l'as vu (144)

- ben non vous allez voir qu’il y a d’autres exemples de métamorphoses où ç'est:= c'est pas un insecte (256)

- c'est c'qui explique/que/ ce soi-disant ver à soie ait eu six pattes on avait vu qu'il y avait six pattes (316) co mp re n d re ap p re n d re exp liqu er - fl éch

ir - qu’est-ce que vous êtes en train de - tout l’monde avait bien compris (168) - Qu’est-ce que tu viens d’comprendre (53) apprendre (170)

- maintenant on comprend mieux pourquoi ils ont six pattes ? (286) - c'est c'qui explique/que/ ce soi-disant ver à soie ait eu six pattes (316)

- réfléchis avec ta tête (223)

a s’ ap p ell e o n a p p elle ça

- la boule de soie ça s'appelle= (111)

- c'est p't être pour ça qu'tas dit tout à l'heure ils sont d'la même famille que les vers/mais non du coup/en fait on appelle ça des vers à soie mais on devrait appeler ça des chenilles à soie (301)

183 d’ailleurs dans les interventions de M2 une utilisation des verbes apprendre, comprendre et réfléchir que nous ne retrouvons pas dans le discours d’enseignement de M1 et de M3.

3.3. Particularités du vocabulaire employé par M3

Le tableau 20 rassemble les extraits de corpus relatifs à l’emploi du vocabulaire caractérisant l’orientation prise par M3 pour conduire son activité d’enseignement :

Tableau 20 : Eléments de vocabulaire relevés dans le discours de M3 en sciences (sur 216 échanges)

M3 utilise les verbes voir et montrer pour illustrer et acter la réalité d’un phénomène dont le constat atteste. Il s’agit pour l’enseignant d’attirer l’attention des élèves sur l’apparition d’un phénomène qui se veut contingent et de mettre en place une expérimentation pour le reproduire. L’expérimentation apportera alors la preuve de la manière dont le phénomène se réalise. L’essentiel du discours enseignant alterne donc entre la découverte, la monstration (avec l’utilisation fréquente des verbes voir, regarder et montrer) et l’action en rapport avec la réalisation de l’expérience (avec l’utilisation du verbe faire). L’observation des discours produits par les élèves lors des séances de classe est alors nécessaire pour montrer les effets des discours des enseignants sur les apprentissages des élèves.

vo ir - m o n trer - re gard er

- tu as voir c’que ça donne (01)

- est-ce qu’on la voit (41) - tu la vois la fumée ? (43)

- on f’ra des expériences mardi prochain/on verra/ on voit des choses mais attention la vapeur d’eau on ne la voit pas elle est invisible (47)

- on va voir s’il sèche un peu (100)

- ah oui/ eh bien va r’garder si ça a changé là-bas (104) - faudrait la gouter pour voir (108) - tu peux aller voir la température dans la boite (121)

- SAC tu vas voir GAS tu vas lui montrer la marque qui est tracée (123) - pour voir si elle s’est vraiment évaporée (161)

- l’eau liquide/on voit qu’elle part quand elle est dans les T-shirts/c’est c’qu’on a vu/ on a vu que c’est assez lent (163) - c’qu’on va essayer de voir de montrer/où est-ce que t’as vu ça (196) - oui elle va se transformer en vapeur/on va voir/ avant de voir ça (208)

- je vais vous montrer / alors on va r’garder (216)

faire

- alors/on verra on f’ra l’expérience mardi on f’ra des expériences mardi prochain (47) - comment est-ce qu’on pourrait faire (163)

- comme tu sais déjà tout on n’a même pas besoin de l’faire (196) - j’vous ai dit tout à l’heure qu’on allait faire une expérience qui est un peu dangereuse puisque/on va:/faire chauffer de l’eau comm’ pour faire des pâtes (208) - donc/je vais faire chauffer de l’eau (214)

- on va faire quelques mesures/ c’qui est important aujourd’hui c’est de faire un VRAI schéma/ pour faire mieux aujourd’hui (216)

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Chapitre 19 : Analyse des discours d’élèves : positionnement

énonciatif et construction des savoirs en sciences

Dans le cadre de l’activité scientifique scolaire et de la construction de savoirs scolaires d’ordre scientifique, il s’agit, d’un point de vue épistémologique, d’amener les élèves à élucider un problème, ou à questionner un élément posé comme faisant obstacle à leurs représentations. La mise en œuvre d’un discours argumentatif et explicatif engage alors les élèves à une prise de position par rapport à la validité des raisonnements de leurs pairs.

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