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3.2. La formation de l’identité : de la théorie eriksonienne aux considérations

3.2.3. Approches néo-eriksoniennes : pour une conception dynamique et contextuelle de

3.2.3.1. Précision des processus d’exploration, d’engagement et des statuts identitaires Les modèles néo-eriksonniens se sont attachés à approfondir l’étude de la formation de l’identité en se centrant tout d’abord sur la précision de l’exploration et de l’engagement, désormais perçus comme de véritables processus multidimensionnels témoins de la construction identitaire (Berman, Schwartz, Kurtines & Berman, 2001 ; Grotevant, 1987). Cette précision des processus de base permet alors d’envisager de façon plus fine les mécanismes qui se jouent dans la formation de l’identité. L’exploration et l’engagement ont ainsi été subdivisés en deux formes chacun soit, l’exploration de surface et l’exploration en profondeur pour le premier (Meeus, 1996), puis l’engagement et l’identification à l’engagement pour le second (Grotevant, 1987). Chacune de ces formes apparaît étroitement associées et interdépendantes (Luyckx, Goossens, Soenens, & Beyers, 2006).

Les statuts en eux-mêmes ont également fait l’objet de discussions permettant l’identification de nouvelles sous-catégories de statuts, notamment pour la forclusion et la diffusion (Barbot, 2008). Le statut de forclusion identitaire a été divisé en deux formes soit, la forclusion classique, telle que Marcia (1966) la définit, et la forclusion développementale (Archer & Waterman, 1990). De même, le statut de diffusion identitaire a été divisé en deux formes soit, la diffusion classique, telle que définit dans le paradigme de Marcia, et la diffusion insouciante. Ces deux formes de diffusion se distinguent par les niveaux d’ajustement psychosocial qu’elles entrainent (Luyckx, Goossens, Soenens, & Beyers, 2006).

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3.2.3.2. Spécificité des statuts identitaires selon les domaines d’engagement

Un autre point de discussion concerne la spécificité des statuts identitaires selon les domaines d’engagement qui peuvent différer d’un domaine de vie à l’autre et ce, tout au long du développement (Barbot, 2008 ; Goossens, 2001).

En observant la dynamique de l’exploration et de l’engagement, les travaux remettent en question l’aspect continu du développement identitaire préférant parler de transitions identitaires multiples. Les nombreuses situations auxquelles sont confrontés les individus et qui nécessitent, chacune, des engagements spécifiques, amènent effectivement à considérer la présence de variations, en termes de progressions et de régressions, dans l’un ou l’autre des différents statuts identifiés (Barbot, 2008 ; Berzonsky & Adams, 1999 ; Bosma, 1994).

L’ensemble des éléments ainsi considérés va principalement remettre en cause l’idée d’une séquence développementale linéaire de la formation identitaire (Waterman, 1999) tout en mettant à jour l’existence d’une véritable diversité dans les trajectoires individuelles, témoignant ainsi de la dynamique (versus stabilité ; continuum) réelle de la formation de l’identité tout au long de la vie (Bardou & Oubrayrie-Roussel, 2014 ; Meeus, 1996). Penser le développement identitaire en termes de dynamique permet également de considérer le rôle de l’environnement comme l’illustre Coleman (1980) dans sa théorie focale du développement. Les crises ou problématiques que rencontre le jeune et leur résolution ultérieure s’inscrivent ici sur une durée propre à chacun faisant qu’elles n’interviennent pas forcément au même moment dans le développement selon les relations et les expériences vécues au sein de contextes différenciés.

3.2.3.3. Modèles en double-cycle et tridimensionnel de la formation identitaire

Afin de décrire plus précisément les statuts identitaires deux nouveaux modèles se sont développés, proposant de considérer les deux processus de base initialement identifiés (exploration, engagement) dans un ensemble plus large de processus identitaires spécifiques (Luyckx, Klimstra, Schwartz, & Duriez, 2013).

Le premier modèle, dit à double cycle de la formation de l’identité, a été développé par Luyckx et ses collaborateurs (Luyckx, Goossens, Soenens, Beyers & Vansteenkiste, 2005 ; Luyckx, Goossens, Soenens & Beyers, 2006 ; Luyckx et al., 2008 ; Zimmermann, Lannegrand-Willems,

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Safont-Mottay, & Cannard, 2015). L’exploration et l’engagement, imbriqués à l’intérieur de deux cycles, sont ici subdivisés en cinq processus considérés comme interdépendants (Schwartz et al., 2011).

▪ Le premier cycle, d’engagement, est celui où les engagements se forment suite à

l’exploration de différentes alternatives qui s’offrent à soi. Il comprend l’exploration de surface, telle qu’initialement définie par Marcia (1966) et l’engagement qui correspond au fait de prendre une décision personnelle relativement aux diverses options explorées.

▪ Le second cycle, d’évaluation des engagements, correspond à l’évaluation de ces

engagements suite à une phase de réflexion approfondie. Il comprend l’exploration en profondeur qui correspond à une analyse plus large des possibilités offertes et l’identification à l’engagement qui rend compte d’un choix personnellement élaboré et justifiable.

▪ Dans une extension de leur propre modèle, les auteurs ont également introduit une nouvelle

forme d’exploration, ruminative, caractérisée par une forte indécision résultant de l’incertitude à s’engager malgré de multiples phases d’exploration (Luyckx, Schwartz, Goossens, Beyers, & Missotten, 2011).

Le développement identitaire se réalise ici au regard d’un premier cycle de formation des engagements, pouvant être altéré par cette forme spécifique d’exploration dite ruminative, avant que ne puisse se former le second cycle d’évaluation aboutissant à une identification aux engagements (Lannegrand-Willems & Perchec, 2017). Par l’analyse des processus impliqués, les études menées à partir de ce modèle permettent de retrouver les quatre statuts identitaires initialement présentés par Marcia (1966) et d’en décrire de nouveaux (Luyckx, Klimstra, Schwartz, & Duriez, 2013 ; Schwartz et al., 2011).

Le second modèle, dit tridimensionnel, a été développé par Crocetti et ses collaborateurs (2008). Il postule de l’existence de trois processus, en continuelle interaction (engagement, reconsidération de l’engagement, exploration en profondeur), pour expliquer le développement identitaire. Ici, et contrairement à ce qui est avancé par le modèle à double-cycle (Luyckx et al., 2005, 2006, 2008) et du paradigme de Marcia (1966), aucune phase d’exploration ne prévaut aux engagements. En effet dans ce modèle, les engagements, qui découlent des identifications de l’enfance, sont d’emblée présents et font l’objet de remise en question amenant à les reconsidérer avant de permettre un engagement quelconque. La reconsidération des engagements existants

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permet aussi de les considérer afin d’être en mesure de les comparer à d’autres options potentiellement pertinentes. Suite à cette phase, l’exploration en profondeur, en écho au modèle de Luyckx et ses collaborateurs, va finalement permettre à chacun de s’engager dans des choix qui lui sont propres et qu’il pourra personnellement justifier (Lannegrand-Willems & Perchec, 2017).

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