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L'APPELLATION DE « FORMATION HUMAINE » DANS LES ÉCOLES D'INGÉNIEURS

Denîs LEMAÎTRE*

Résumé Lapréoccupation de formerlesélèves-ingénieurs sur leplanhumain estde plusenplusvisible. Pourautant, « cetteformation humaine» des ingénieurs, conçue différemmenten fonction des écoles, ne va pas desoi. Elle constitue unesortede nébuleusedisciplinaireparmi

lesactivitésnonscientifiqueset techniques. Leproblèmeestdesavoir sil'on peuten définirla matice disciplinaire. L'étudeprésentée ici s'appuiesur une analyse del'existant: ceque les écoles disent de leursenseignementsenformationhumaine dans leurs documents de présentation (plaquettespromotionnelles). Les intitulés de cours etles commentaires sontanalysés enfonctiond'unmodèlequi rendcompte des différents types d'activités demandées aux ingénieurs. Il ressort de l'étude que ces enseignements obéissent essentiellement à une viséepragmatiqueetconsistentsurtoutenlatransmissiond'outilsper¬

mettantauxélèves de s'insérer danslesinteractions sociales,ou tout au plus de comprendre leur environnement. En considérantl'image de l'hommequ'ellepeutvéhiculer,il restepeut-êtreà donneràcette forme d'enseignementd'autesambitions.

Abstact The concern with taming student engineers in the human field is getting moreandmoreobvious.Nevertheless, this "humantraining"

of

engineersisconceiveddifferentlyaccordingtothedifferentschools and it is not self-evident. It constitutes a loose conglomeration

of

subjects among the non-scientific and non-technicalactivities. The

problem is toknowwhetherone can defineits main field. Thisstudy isbased on an analysisoftheexistingdata:what engineeringschools

41

* - DenisLemaître, ENSIETA(dép.Formationhumaine),Brest.

Pages 41-50 RECHERCHEetFORMATION N° 29 - 1998

ROLE, PLACE

ET

SIGNIFICATION

DES ENSEIGNEMENTS DÉSIGNÉS SOUS

L'APPELLATION

DE «

FORMATION HUMAINE

»

DANS

LES

ÉCOLES D'INGÉNIEURS

Denîs LEMAÎTRE*

Résumé Lapréoccupation de formerlesélèves-ingénieurs sur leplanhumain estde plusenplusvisible. Pourautant, « cetteformation humaine» des ingénieurs, conçue différemmenten fonction des écoles, ne va pas desoi. Elle constitue unesortede nébuleusedisciplinaireparmi

lesactivitésnonscientifiqueset techniques. Leproblèmeestdesavoir sil'on peuten définirla matice disciplinaire. L'étudeprésentée ici s'appuiesur une analyse del'existant: ceque les écoles disent de leursenseignementsenformationhumaine dans leurs documents de présentation (plaquettespromotionnelles). Les intitulés de cours etles commentaires sontanalysés enfonctiond'unmodèlequi rendcompte des différents types d'activités demandées aux ingénieurs. Il ressort de l'étude que ces enseignements obéissent essentiellement à une viséepragmatiqueetconsistentsurtoutenlatransmissiond'outilsper¬

mettantauxélèves de s'insérer danslesinteractions sociales,ou tout au plus de comprendre leur environnement. En considérantl'image de l'hommequ'ellepeutvéhiculer,il restepeut-êtreà donneràcette forme d'enseignementd'autesambitions.

Abstact The concern with taming student engineers in the human field is getting moreandmoreobvious.Nevertheless, this "humantraining"

of

engineersisconceiveddifferentlyaccordingtothedifferentschools and it is not self-evident. It constitutes a loose conglomeration

of

subjects among the non-scientific and non-technicalactivities. The

problem is toknowwhetherone can defineits main field. Thisstudy isbased on an analysisoftheexistingdata:what engineeringschools

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* - DenisLemaître, ENSIETA(dép.Formationhumaine),Brest.

Pages 41-50 RECHERCHEetFORMATION N° 29 - 1998

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Rôle,place etsignificationdesenseignementsdésignés sousl'appellationde«formationhumaine»

sayabouttheir human training teachingintheirdocumentsofpresen¬

tation (promotionalleaflets). The titles ofcourses andthe comments are analysed accordingto amodel which accounts forthedifferent types

of

activités the engineers are assigned. This study shows that this teaching essentially complies with pragmatic aims and mainly consists in thetansmissionoftools allowingthe studentsto integrate into the social interactions or atthe very most to understand their environment. While taking into account the image of man it can convey, thereprobablyremains to givethis form

of

teachinghigher ambitions.

La préoccupation de préparerles élèves-ingénieurs aux réalités humaines del'en¬

treprise n'est pas nouvelle. Mais ce thème connaît aujourd'hui un certain regain d'actualité. Cequi est nouveau, c'estla convocationplusexplicite de la dimension humaine dans ladéfinitiondecesenseignements. Dansbien des cas cene sont plus seulement la « communication » ou les « techniques d'expression » que l'on enseigne, mais les « humanités », les « sciences humaines », les « relations humaines ». Cette référence insistante à l'humain donne évidemmentà cetype de formation unedimension autre quecelledestechniquesd'expressionetdecommu¬

nication.Au-delàdesimplessavoir-faire professionnels, ellelaissesupposerun pro¬

jetdeformationqui reposeraitsur desconceptionsfondamentalesdel'hommeetde lasociété.

La «

formation humaine

»

dans les écoles d'ingénieurs

Pourautant,à l'examenrapidedescursusproposés,cesconceptionsnesontpasévi¬

dentes. LorsducolloquedesGrandesÉcoles surlesHumanitésparexemple(1996), desfracturesassez nettessontapparuesentred'uncôté desconceptionsfranchement utilitaires centréessur lemétier, et del'autredes conceptionsplutôtencyclopédistes axéessurlaculturegénérale. Ledomainequinousoccupe,enmargedesenseigne¬

ments scientifiques ettechniques, offreilestvrai l'image d'unecertaine confusion.

Ony rencontredestechniquesd'expression,de la commun/caf/on,dumanagement, delapsychologie, dessciences sociales,dela culturegénérale (philosophie,lettres, épistémologie, histoire...), dela pratiqueartistique, de\'éthique. Cet enseignement recoupe parfois les langues vivantes, les activitéssportives, le droit, l'économie, la connaissance de l'entreprise. Le plus souvent, ilestmis en@uvrede manièretrans¬

versale, à travers des tnèmes comme ledéveloppementpersonnel, ou des activités comme la recherched'emploi ou l'exploitation des stages en entreprise. La

forma-RECHERCHEet FORMATION N° 29 - 1998

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Rôle,place etsignificationdesenseignementsdésignés sousl'appellationde«formationhumaine»

sayabouttheir human training teachingintheirdocumentsofpresen¬

tation (promotionalleaflets). The titles ofcourses andthe comments are analysed accordingto amodel which accounts forthedifferent types

of

activités the engineers are assigned. This study shows that this teaching essentially complies with pragmatic aims and mainly consists in thetansmissionoftools allowingthe studentsto integrate into the social interactions or atthe very most to understand their environment. While taking into account the image of man it can convey, thereprobablyremains to givethis form

of

teachinghigher ambitions.

La préoccupation de préparerles élèves-ingénieurs aux réalités humaines del'en¬

treprise n'est pas nouvelle. Mais ce thème connaît aujourd'hui un certain regain d'actualité. Cequi est nouveau, c'estla convocationplusexplicite de la dimension humaine dans ladéfinitiondecesenseignements. Dansbien des cas cene sont plus seulement la « communication » ou les « techniques d'expression » que l'on enseigne, mais les « humanités », les « sciences humaines », les « relations humaines ». Cette référence insistante à l'humain donne évidemmentà cetype de formation unedimension autre quecelledestechniquesd'expressionetdecommu¬

nication.Au-delàdesimplessavoir-faire professionnels, ellelaissesupposerun pro¬

jetdeformationqui reposeraitsur desconceptionsfondamentalesdel'hommeetde lasociété.

La «

formation humaine

»

dans les écoles d'ingénieurs

Pourautant,à l'examenrapidedescursusproposés,cesconceptionsnesontpasévi¬

dentes. LorsducolloquedesGrandesÉcoles surlesHumanitésparexemple(1996), desfracturesassez nettessontapparuesentred'uncôté desconceptionsfranchement utilitaires centréessur lemétier, et del'autredes conceptionsplutôtencyclopédistes axéessurlaculturegénérale. Ledomainequinousoccupe,enmargedesenseigne¬

ments scientifiques ettechniques, offreilestvrai l'image d'unecertaine confusion.

Ony rencontredestechniquesd'expression,de la commun/caf/on,dumanagement, delapsychologie, dessciences sociales,dela culturegénérale (philosophie,lettres, épistémologie, histoire...), dela pratiqueartistique, de\'éthique. Cet enseignement recoupe parfois les langues vivantes, les activitéssportives, le droit, l'économie, la connaissance de l'entreprise. Le plus souvent, ilestmis en@uvrede manièretrans¬

versale, à travers des tnèmes comme ledéveloppementpersonnel, ou des activités comme la recherched'emploi ou l'exploitation des stages en entreprise. La

forma-RECHERCHEet FORMATION N° 29 - 1998

DenisLEMAÎTRE

tion humaine(1) ressemble donc plutôt à une nébuleusedisciplinaire. Toutce que l'on peuten dire, d'emblée, c'est qu'elle recouvredes activitésnon scientifiqueset techniques,quide manière transversale développentdescompétencesrelevantde la personne,etplutôt dansledomainede lapensée etde lacommunication humaine.

Unpeu plusdedeuxcenttrenteécoles,dépendant de différents ministères,collecti¬

vités localesou organismesprivés, sontaujourd'hui habilitées àdélivrerlediplôme d'ingénieur. Leurdiversité n'aideguère à unifier ces pratiques. Entre les grandes écolesissuesdu projet encyclopédiquedesLumières, lesécoles issuesde la Révolu¬

tion industrielle,lesécoles crééesdepuis la dernière guerreautour de métiers nou¬

veaux, lesformations universitaires etlesnouvellesformations d'ingénieurs(forma¬

tions en alternance),avec leursniveauxd'exigence efleursmodes de recrutement, les projets éducatifs etlesobjectifs de la formation humaine varient considérable¬

ment.

Les contenus du métier d'ingénieur ne donnent pas davantage d'éclaircissements définitifs :onytrouveunegrandediversité,tant danslesdomainesd'activités (tra¬

vauxpublics, chimie, informatique,textiles,agronomie,etc.), quedanslestypesde métiers(logistique, maintenance, assurance-qualité,études,recherche et développe¬

ment, fabrication,etc.).

Il paraîtdoncparticulièrementdifficilededéfinirla formation humaine àpartirdes seulscontenusde cours, ou des activitésdumétierd'ingénieur.Si l'on veutpouvoir cerner cet enseignement, il faut donc aller en amont, tenter d'en identifier la

«matricedisciplinaire»(2). Ladémarchede l'étudeprésentéeici(3) estderecher¬

cher ceprincipe fondateur autour del'image de l'homme et de l'ingénieur qu'est censéevéhiculer laformafion humaine. Formerlesélèves-ingénieursàdesméthodes depensée, à desfaçonsd'êtreetde communiquer, supposedesreprésentations de

4*

l'homme, deson rapportàla technique, dansl'entreprise et dans la sociétéengéné¬

ral.Demêmequ'il existe des sciences del'ingénieurquisontuneapplication parti¬

culière des scienceset des techniques,existe-t-il donc des sciences humaines pour l'ingénieuravecleurprojet spécifique?Autourde quelle conception del'homme et del'ingénieur peuvent-elles seconstruire? Etpour répondre à quels besoinsspéci¬

fiques del'évolution sociale?

1 - « formation humaine » estretenue ici comme termegénérique, dans la mesure où il contientleconceptpertinentde «formation », à la différence del'appellation « sciences humaines », etqu'ilestmoinsconnoteque«humanités»

2 - Michel Develaydésigneainsi «leprinciped'intelligibilitéd'une discipline donnée», le

«moule (...) creusetqui constitueraitlefondementde ladiscipline,sonessence»,l'« idéecen¬

trale (qui) constituel'épine dorsale decetenseignement»(Del'apprentissageà l'enseigne¬

ment. Pour uneépistémologiescolaire,Paris,ESFéditeur, 1992,pp.43-44et p.61).

3 - DenisLemaître,Imagedelaformationhumainedanslesécolesd'ingénieurs :concep¬

tionsanthropologiques,éthiquesetculturelles,DEA en Sciencesdel'éducation, Universitéde Nantes, 1997.

RECHERCHEet FORMATION N"29 - 1998 DenisLEMAÎTRE

tion humaine(1) ressemble donc plutôt à une nébuleusedisciplinaire. Toutce que l'on peuten dire, d'emblée, c'est qu'elle recouvredes activitésnon scientifiqueset techniques,quide manière transversale développentdescompétencesrelevantde la personne,etplutôt dansledomainede lapensée etde lacommunication humaine.

Unpeu plusdedeuxcenttrenteécoles,dépendant de différents ministères,collecti¬

vités localesou organismesprivés, sontaujourd'hui habilitées àdélivrerlediplôme d'ingénieur. Leurdiversité n'aideguère à unifier ces pratiques. Entre les grandes écolesissuesdu projet encyclopédiquedesLumières, lesécoles issuesde la Révolu¬

tion industrielle,lesécoles crééesdepuis la dernière guerreautour de métiers nou¬

veaux, lesformations universitaires etlesnouvellesformations d'ingénieurs(forma¬

tions en alternance),avec leursniveauxd'exigence efleursmodes de recrutement, les projets éducatifs etlesobjectifs de la formation humaine varient considérable¬

ment.

Les contenus du métier d'ingénieur ne donnent pas davantage d'éclaircissements définitifs :onytrouveunegrandediversité,tant danslesdomainesd'activités (tra¬

vauxpublics, chimie, informatique,textiles,agronomie,etc.), quedanslestypesde métiers(logistique, maintenance, assurance-qualité,études,recherche et développe¬

ment, fabrication,etc.).

Il paraîtdoncparticulièrementdifficilededéfinirla formation humaine àpartirdes seulscontenusde cours, ou des activitésdumétierd'ingénieur.Si l'on veutpouvoir cerner cet enseignement, il faut donc aller en amont, tenter d'en identifier la

«matricedisciplinaire»(2). Ladémarchede l'étudeprésentéeici(3) estderecher¬

cher ceprincipe fondateur autour del'image de l'homme et de l'ingénieur qu'est censéevéhiculer laformafion humaine. Formerlesélèves-ingénieursàdesméthodes depensée, à desfaçonsd'êtreetde communiquer, supposedesreprésentations de

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l'homme, deson rapportàla technique, dansl'entreprise et dans la sociétéengéné¬

ral.Demêmequ'il existe des sciences del'ingénieurquisontuneapplication parti¬

culière des scienceset des techniques,existe-t-il donc des sciences humaines pour l'ingénieuravecleurprojet spécifique?Autourde quelle conception del'homme et del'ingénieur peuvent-elles seconstruire? Etpour répondre à quels besoinsspéci¬

fiques del'évolution sociale?

1 - « formation humaine » estretenue ici comme termegénérique, dans la mesure où il contientleconceptpertinentde «formation », à la différence del'appellation « sciences humaines », etqu'ilestmoinsconnoteque«humanités»

2 - Michel Develaydésigneainsi «leprinciped'intelligibilitéd'une discipline donnée», le

«moule (...) creusetqui constitueraitlefondementde ladiscipline,sonessence»,l'« idéecen¬

trale (qui) constituel'épine dorsale decetenseignement»(Del'apprentissageà l'enseigne¬

ment. Pour uneépistémologiescolaire,Paris,ESFéditeur, 1992,pp.43-44et p.61).

3 - DenisLemaître,Imagedelaformationhumainedanslesécolesd'ingénieurs :concep¬

tionsanthropologiques,éthiquesetculturelles,DEA en Sciencesdel'éducation, Universitéde Nantes, 1997.

RECHERCHEet FORMATION N"29 - 1998

Rôle,place etsignification des enseignementsdésignés sousl'appellationde«formation humaine»

Lepremierobjectifa étédedégagerunmodèlequi rende effectivement comptedes activités del'ingénieurdans ledomainedes relations humainesetdela pensée, à partir de l'histoire du métier, de l'analyse des compétences évoquées, et d'une réflexionsurlestâchesintellectuellesquilui sont demandées. Lemodèleainsi conçu exprimeles capacitésfondamentalescensées recouvrirtous lestypes d'actions que l'on demandeà l'ingénieur, etdéfinirlesaxesdesa formation sur leplan humain.

Chaquecapacité ainsiidentifiée correspondà uneviséed'ordregénéral, qui signi¬

fiecequel'on veut que l'ingénieursoitsocialement,ettraduitainsi les représenta¬

tionsqui circulentsur le métier.Volontairement, cemodèlenecerne quedes compé¬

tences liées aux activités professionnelles. Il part de l'hypothèse que la formation humaineestsurtout asservieauxbesoinsdel'entreprise.Maiscemodèledoitnéan¬

moins permettre, le cas échéant, defaire ressortir d'autres ambitions éventuelles contenuesdans laformation humaine,d'ordreplushumaniste.

Lesquatre capacités identifiées etleursviséescorrespondantessontlessuivantes :

a)Capacitéd'intervention: viséepragmatique

Dans ledomainedes relations humaines, c'estcettecapacité quel'ingénieur mobi¬

lisepourentrerdansl'action,semettre autravailaveclesautres,mettreenapplica¬

tionsesconnaissances sur lemanagementpourmotiver les équipesetlesfairetra¬

vaillerde la meilleure façon possible. Ilestdansunedémarchepragmatique ausens où il calcule ses actions en fonction des résultats escomptés, des interactions pos¬

sibles. Ilestobligé desedemandersanscesse «dans l'interaction sociale,si jefais cela, qu'est-ce que jevais produire commeréactions chez autrui? » (4). Dans les écoles, cette capacité est développée à travers toutes les activités relevant d'une confrontation au réel, notamment lorsdes stages, ou de toutes lessituations d'ap¬

prentissagevisant letravailenéquipe, l'aptitudeàcommuniquer. Ellecorrespondà

44 une visée pragmatique de la formation des ingénieurs, au sens où celui-ci est vu commecadre deterrain, gestionnairedesréalitéssociales.

b) Capacité dethéorisation: viséeanalytique

Cette capacitéconsisteà pouvoircomprendre (saisirensemble) laréalité complexe desrelations humainesau seinde l'entreprise,c'est-à-dire à «construireune repré¬

sentation » (5). Il peuts'agirde la transposition d'une situation donnée dans une structuredéjà connue. Unévénementsurvenu dans lavie dugroupe peut ainsi être rapportéàdesconnaissancesacquises, des schémaspréconçus.Maisil peuts'agir aussi delacapacitéàélaborerdesoi-même un schémad'interprétationpourrepré¬

sentertoutunréseaude relations inédit.Ausein desécoles, cettecapacitéestdéve¬

loppéeautraversde touteslesactivités deréflexionsurlasociété et surl'homme,ins¬

tituant des cadres théoriques qui permettent ensuite de bâtir des repères et de produiredusavoirsur lemanagement.Ellecorrespondà une viséeanalytique dans

4 - PhilippeMeirieu,Apprendre...oui,maiscomment?Paris,ESFéditeur, 1987,p. 112.

5 - Jean-François Richard,Lesactivités mentales, Paris,Armand Colin,1995,p. 97.

RECHERCHEet FORMATION 29 - 1998

Rôle,place etsignification des enseignementsdésignés sousl'appellationde«formation humaine»

Lepremierobjectifa étédedégagerunmodèlequi rende effectivement comptedes activités del'ingénieurdans ledomainedes relations humainesetdela pensée, à partir de l'histoire du métier, de l'analyse des compétences évoquées, et d'une réflexionsurlestâchesintellectuellesquilui sont demandées. Lemodèleainsi conçu exprimeles capacitésfondamentalescensées recouvrirtous lestypes d'actions que l'on demandeà l'ingénieur, etdéfinirlesaxesdesa formation sur leplan humain.

Chaquecapacité ainsiidentifiée correspondà uneviséed'ordregénéral, qui signi¬

fiecequel'on veut que l'ingénieursoitsocialement,ettraduitainsi les représenta¬

tionsqui circulentsur le métier.Volontairement, cemodèlenecerne quedes compé¬

tences liées aux activités professionnelles. Il part de l'hypothèse que la formation humaineestsurtout asservieauxbesoinsdel'entreprise.Maiscemodèledoitnéan¬

moins permettre, le cas échéant, defaire ressortir d'autres ambitions éventuelles contenuesdans laformation humaine,d'ordreplushumaniste.

Lesquatre capacités identifiées etleursviséescorrespondantessontlessuivantes :

a)Capacitéd'intervention: viséepragmatique

Dans ledomainedes relations humaines, c'estcettecapacité quel'ingénieur mobi¬

lisepourentrerdansl'action,semettre autravailaveclesautres,mettreenapplica¬

tionsesconnaissances sur lemanagementpourmotiver les équipesetlesfairetra¬

vaillerde la meilleure façon possible. Ilestdansunedémarchepragmatique ausens où il calcule ses actions en fonction des résultats escomptés, des interactions pos¬

sibles. Ilestobligé desedemandersanscesse «dans l'interaction sociale,si jefais cela, qu'est-ce que jevais produire commeréactions chez autrui? » (4). Dans les écoles, cette capacité est développée à travers toutes les activités relevant d'une confrontation au réel, notamment lorsdes stages, ou de toutes lessituations d'ap¬

prentissagevisant letravailenéquipe, l'aptitudeàcommuniquer. Ellecorrespondà

44 une visée pragmatique de la formation des ingénieurs, au sens où celui-ci est vu commecadre deterrain, gestionnairedesréalitéssociales.

b) Capacité dethéorisation: viséeanalytique

Cette capacitéconsisteà pouvoircomprendre (saisirensemble) laréalité complexe desrelations humainesau seinde l'entreprise,c'est-à-dire à «construireune repré¬

sentation » (5). Il peuts'agirde la transposition d'une situation donnée dans une structuredéjà connue. Unévénementsurvenu dans lavie dugroupe peut ainsi être rapportéàdesconnaissancesacquises, des schémaspréconçus.Maisil peuts'agir aussi delacapacitéàélaborerdesoi-même un schémad'interprétationpourrepré¬

sentertoutunréseaude relations inédit.Ausein desécoles, cettecapacitéestdéve¬

loppéeautraversde touteslesactivités deréflexionsurlasociété et surl'homme,ins¬

tituant des cadres théoriques qui permettent ensuite de bâtir des repères et de produiredusavoirsur lemanagement.Ellecorrespondà une viséeanalytique dans

4 - PhilippeMeirieu,Apprendre...oui,maiscomment?Paris,ESFéditeur, 1987,p. 112.

5 - Jean-François Richard,Lesactivités mentales, Paris,Armand Colin,1995,p. 97.

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