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Analyses AFM in situ des premiers instants de la croissance

Chapitre 3 Croissance des oxydes de fer

3.7 Impact de la température

3.7.3 Analyses AFM in situ des premiers instants de la croissance

Afin d’analyser comment le paramètre « température » influence la croissance et donc la morphologie et la structure des films, nous avons observé par AFM in situ, les premiers instants de la croissance des films étudiés dans le paragraphe précédent (T=500, 550 et 600°C ; P=6,5 mbar, PO2=3,3 mbar, f=1 Hz). Les paramètres dont nous tenons compte pour

analyser les images AFM sont les suivants :

- temps de retard à la nucléation : on considère qu’il y a nucléation à partir du moment

où on voit la présence de grains par AFM, cela ne signifie pas pour autant qu’il n’y avait pas de matière avant cet instant: selon la taille et la répartition des grains, il peut être plus difficile de détecter certaines morphologies de nucléation. Par exemple, si il y a nucléation d’îlots de très petites dimensions (H<1nm), répartis de façon homogène en surface, il sera difficile de les détecter, alors que des grains de dimensions équivalentes mais qui n’apparaissent qu’en certains points du substrat seront plus facilement détectés (voir Figure 3.7.4).

- hauteur des îlots à la nucléation et évolution de la hauteur en fonction du nombre

d’injections.

- densité des îlots à la nucléation et évolution de la densité en fonction du nombre

d’injections. La densité est estimée en comptant les îlots pour une surface de 200nm*200nm.

Figure 3.7.4 : Détection du moment de la nucléation : à cause du rayon de courbure de la pointe AFM, il est plus facile de détecter la présence de grains s’ils sont isolés les uns des autres

T=500°C

La Figure 3.7.6 présente les images AFM de la croissance de γ-Fe2O3 texturée <001> à une

température de 500°C. Ces images montrent que lors des premiers instants de croissance, il y a nucléation et croissance de petits grains, répartis de façon homogène en tout point de la

surface. Ils ont une hauteur de 0,4 – 0,5 nm, ce qui équivaut à ½ maille de γ-Fe2O3 et

recouvrent complètement la surface du substrat.

L’apparition de ces grains en surface du substrat n’est pas immédiate. On observe un retard à la nucléation équivalent à l’injection d’une cinquantaine de gouttes. Ce retard a la nucléation pour les basses température est un phénomène courant pour les procédés de dépôts CVD [EPL1993, KRO2000, ROB2004]. Il est lié à une faible vitesse de réaction chimique, qui limite la chemisorption des espèces en surface du substrat. La taille des îlots augmente de façon très progressive (1,2 - 1,6 nm pour 90 injections, 2,7 - 6 nm, pour 150 injections et 4 - 6,7 nm pour 240 injections). Au bout de 150 gouttes injectées, la densité d’îlots est maximale et elle commence à décroître (l’évolution de la densité est représentée sur la Figure 3.7.12 page 125). Même si il est difficile d’évaluer la densité d’îlots en dessous de 90 injections, elle semble très proche de la densité maximale dès la nucléation (soit une densité proche de 6.1011 îlots

par cm2). L’augmentation de la taille des îlots accompagnée d’une diminution de leur densité

indique un phénomène de coalescence des îlots.

Du fait de l’important décalage de paramètre de maille entre γ-Fe2O3 et SrTiO3 (f ∼ 7%), on

attend un mode de croissance 3D. Cependant, on observe ici qu’il y a dans un premier temps formation d’une couche de mouillage, qui semble couvrir la surface du substrat de façon homogène. Il y a ensuite croissance d’îlots d’une hauteur correspondant à plusieurs mailles de

γ-Fe2O3. On visualise la formation de ces îlots à partir de 90 injections. Ils coalescent ensuite

lors de leur croissance. On remarque sur l’image MET correspondant à ce même film (Figure 3.7.5) que le film a en fait une structure cristalline homogène sur des zones de quelques centaines de nanomètres (très supérieures à la dimension des îlots qui n’est que de l’ordre de la dizaine de nanomètres). On ne distingue plus différents grains (même au niveau de l’interface film / substrat). Il semble que chaque grain est orienté dans une direction cristalline favorisée par le substrat, suffisamment proche de celle du grain voisin pour que lors de la coalescence des grains, le raccord entre les mailles cristallines se fasse sans joint de grain, ni défauts de microstructure. Ce même type d’observations a été effectué pour la croissance d’îlots de germanium sur substrat (001) silicium oxydé [BOU2005].

Figure 3.7.5: image MET pour le film dont le démarrage de croissance est étudié par AFM sur la Figure 3.7.6. Température de croissance 500°C

Figure 3.7.6: Images en AFM contact des premiers stades de croissance de Fe2O3 à T=500°C ; a) substrat STO

T=550°C

La Figure 3.7.7 rappelle la morphologie du film obtenu à une température de croissance de 550°C (coupe MET) ; la Figure 3.7.8 présente les images AFM des premiers instants de croissance de ce même film (croissance de la phase γ-Fe2O3 et simultanément de la phase α-

Fe2O3).

A la nucléation, les grains ont une hauteur comprise entre 1,8 nm et 4,6 nm (soit plusieurs mailles cristallines aussi bien si on considère la maille de γ-Fe2O3 que celle de α-Fe2O3) et ils

sont isolés les uns de autres. Il semble en conséquence que la croissance soit tridimensionnelle, sans recouvrement préalable de la surface par une monocouche d’oxyde de fer.

Contrairement aux observations effectuées à 500°C, il n’y a pas de retard à la nucléation. En outre, la densité de nucléation est inférieure à celle observée à T=500°C. Avec l’augmentation de la température, la chemisorption des espèces est plus rapide. D’autre part, la longueur de diffusion Ls des espèces augmente, ce qui favorise la rencontre entre deux espèces en surface et en conséquence la formation d’îlots de grande dimension (le coefficient de diffusion surfacique Ds et donc la longueur de diffusion Ls sont proportionnels à exp(-E/T) ; voir Annexe 9). Pour ces mêmes raisons, on observe aussi que la taille des îlots augmente plus rapidement qu’à T=500°C (voir Figure 3.7.12-b).

Au bout de 50 gouttes injectées, on observe en outre l’apparition de grains de plus grande dimension que les îlots (H∼15 nm). Il est difficile de dire si ces structures résultent de l’agglomération de plusieurs îlots, ou si elles avaient déjà été nuclées à N<50 gouttes (on ne sonde pas forcément la même zone entre deux images effectuées à N1 ≠ N2), néanmoins, sur

la photo f de la Figure 3.7.8, il semble qu’une structure soit en fait constituée d’un amas d’îlots (voir le profil de hauteur de la Figure 3.7.8-f). Nous pensons que lorsque les îlots ont atteint une taille critique, la croissance se poursuit par la formation de ces structures qui résulte d’une coalescence des îlots inférieurs et de la nucléation de nouveaux îlots.

Figure 3.7.7: image MET pour le film dont le démarrage de croissance est étudié par AFM sur la Figure 3.7.8 ci- après.

Figure 3.7.8 : Images des premiers stades de croissance de Fe2O3 à 550°C ; a) substrat STO, b) 5 gouttes injectées,

T=600°C

A cette température, les analyses de la structure cristalline indiquent aussi qu’il y a formation des phases α-Fe2O3 et de γ-Fe2O3, comme à 550°C. L’image MET de la Figure 3.7.9 rappelle la

morphologie du film au bout de 1500 injections, constitué de grains de hauteur comprise entre 50 et 70 nm.

Les images AFM des premières étapes de croissance révèlent une nucléation très rapide, sans temps de retard. Pour une seule injection, il y a croissance de grains d’environ 5-7 nm de haut. Pour deux gouttes injectées, les grains présentent déjà une hauteur d’environ 15 nm. A cette température, la nucléation n’est plus statistique, et l’image AFM de la Figure 3.7.10 – c met en évidence une nucléation préférentielle au niveau des bords de marche. Simultanément, on observe la formation de grain de plus petites dimensions (entre les gros grains). La densité de nucléation est bien plus faible qu’à 500 ou 550°C mais les grains ont une dimension plus importante (H=15 nm pour 2 gouttes injectées et H=40 nm pour 150 gouttes injectées). La hauteur et la densité des grains de plus petite dimension augmentent régulièrement entre 5 et 50 injections.

La nucléation très rapide de grains de tailles importantes, qui sont isolés les uns des autres est liée à une mobilité de surface très élevée à 600°C. En effet, contrairement à ce qui a été observé à T=500°C et T=550°C, on observe à 600°C une nucléation préférentielle au niveau des bords de marche : cela signifie que la longueur de diffusion des espèces adsorbées Ls est supérieure à la distance entre deux marches atomiques (il est énergétiquement favorable pour une espèce de migrer vers un bord de marche).

La forme des grains nucléés semble facettée. Pour une goutte injectée, le grain nucléé présente une forme carrée (voir Figure 3.7.10-b) et pour 2 injections (Figure 3.7.10-c), on distingue deux grains carrés. Les orientations de ces grains par rapport aux bords de marche semblent bien définies. Les bords de marches de STO correspondent à une orientation cristalline selon la direction <100>. Les structures sont orientées à 65° et à 25° des bords de marches, ce qui peut correspondre aux directions cristallines <120> et <210> (cos(65)~

vr

100

•vr

120). Cette formation de grains facettés coïncide avec les observation MET effectuées sur ce même film (Figure 3.7.9).

Figure 3.7.10 : Images des premiers stades de croissance de Fe2O3 à 600°C ; a) substrat STO vierge,