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4. Décrire changements en biogéographie

4.2. Décrire les changements phénologiques

4.2.1. Analyser les changements phénologiques

L’analyse en composantes principales est un outil performant pour détecter les changements phénologiques dans une série temporelle d’images de NVDI (Andrieu, 2008 C). En effet, les différentes composantes principales correspondent à un ensemble de variations spatiotemporelles. Une fois celles-ci détectées et associées à un lieu, il est possible de détecter à la fois des changements saisonniers attendus et des changements d’échelles décennales liés, par exemple, à la réaction à une perturbation environnementale. La temporalité d’une variation phénologique est recherchée en mettant en histogramme la répartition mensuelle ou annuelle des variables de forte contribution ainsi qu’en réalisant des courbes de variation dans le temps, du NDVI ou de la différence au NDVI moyen. Après avoir interprété les différentes composantes principales, les premières peuvent été utilisées dans une classification dont le résultat cartographique s’accompagne de profils temporels. Cette méthode (Figure 40) a été appliquée dans le cadre de l’ANR ECLIS au transect Bénin-Niger sur les images NOAA 1981-2006.

FIGURE 37 : ORGANIGRAMME DE LA CLASSIFICATION DES COMPOSANTES PRINCIPALES SUR SERIE TEMPORELLE DE NDVI

On y voit figure 37 transcrite, en classes, la graduation du sahélo-saharien (saison d’activité végétale à peine marquée) au guinéen (longue saison d’activité au rythme bimodal). Or, la question que nous souhaitions traiter était de l’évolution sur le long terme (à l’échelle de la fluctuation des décennies plus ou moins sèches ou humides qu’a connues l’Afrique de l’Ouest). Le début des années 1980 étant la phase la plus sèche de la période de sécheresse (Dacosta, 1992) et 2006 se situant 12 ans après la date charnière de 1994 utilisée pour caractériser le retour à des conditions plus favorables (Dai et al., 2004 ; Philippon et Fontaine, 1999 ; D’Amato et Lebel, 1998 ; Nicholson, 2005 ; Nicholson, 2001 ; Sultan et al., 2005). Pour cela, en addition des profils temporels moyens (figure 37) une méthode très simple a été appliquée : le calcul de la droite de régression linéaire pour l’ensemble des classes, sur l’ensemble de la série temporelle. La figure 38 montre le profil temporaire de la région saharo-sahélienne dont la droite de régression linéaire présente une pente quasiment nulle. La pente devient progressive pour la région sahélienne, puis encore plus nettement progressive pour atteindre sa pente maximale pour la classe soudanienne (figure 39). Les pentes des régions méridionales restent fortement positives également. Toutes les régions sauf la plus septentrionales présentent une amélioration des intensités ou longueurs des saisons végétatives comme réponses à l’amélioration des totaux pluviométriques.

FIGURE 38 : CLASSIFICATION DU TRANSECT BENIN-NIGER ET PROFILS DES CLASSES.

FIGURE 39 : SERIE TEMPORELLE ET TENDANCE DE LA CLASSE SAHARO-SAHELIENNE

Cette même méthode (figure 40) a également été employée en Côte d’ivoire dans le cadre du programme D2PCPCI. Le programme pose un certain nombre d’hypothèses dont la première est « la tendance à la conversion des forêts en savane observée depuis plusieurs décennies a été aggravée par la décennie de conflits ». Pour tester l’hypothèse d’un point de vue phénologique, j’ai proposé de cartographier la limite entre les milieux dont la végétation présente un rythme unimodal (caractéristique de la savane soudanienne) et ceux dont la végétation présente un rythme bimodal (caractéristique de la forêt guinéenne). Une analyse diachronique permettant alors de détecter, cartographier et quantifier les conversions de la forêt en savane à la condition qu’il existe un signal phénologique d’une telle conversion, hypothèse qui restait à vérifier. L’exercice a été effectué à deux échelles spatiotemporelles.

- La série temporelle NOAA (8 km ; 1981-2006) permet de tester la première affirmation de l’hypothèse sur la tendance à la conversion ainsi que de mettre en relation d’un point de vue phytoclimatiques les sites d’études entre eux de la Côte d’Ivoire au Bénin.

- La série temporelle MODIS (250m ; 2003-2014) permet de tester l’impact de la décennie de conflits armés sur la tendance à la conversion ainsi que de réaliser une cartographie à l’échelle de la Forêt classée du Haut Sassandra.

La dalle MODIS centrée sur la Côte d’Ivoire ici prise comme zone d’étude par commodité est divisée, à une exception près, en régions phénologiques compactes mais aux limites progressives dans le sens où en leur centre, elles sont très homogènes et à leurs marges comprennent de petites taches des classes voisines et présentent de petites taches dans les régions voisines de classe dominantes différente (figure 41).

La figure 42 montre les profils avec la série temporelle divisée en deux moitiés 2003-2008 (début des conflits) 2009-2014 (fin et post conflits). L’ensemble des 10 régions montre, une soit une stabilité entre les deux périodes soit, pour la période récente, un renforcement du caractère bimodal avec, dans la quasi-totalité des cas, des activités végétatives qui débutent plus tôt dans la saison, qui se terminent plus tard et avec une petite saison sèche durant laquelle l’activité végétative est plus faible. Aucune classe ne montre donc une transition d’un profil de forêt (bimodal) à un profil de savane (unimodal). La seule classe au profil nettement unimodal (classe 9) tend, au contraire à présenter une transition de l’unimodal puisqu’en 2009-2014, sa courbe présente une légère inflexion présupposant un début de ralentissement de l’activité photosynthétique lié à une petite saison sèche plus marquée. L’hypothèse « la tendance à la conversion des forêts en savane observée depuis plusieurs décennies a été aggravée par la décennie de conflits » est donc fausse au regard de cette lecture phénologique macro-régionale de la limite savane-forêt.

FIGURE 41 : CLASSIFICATION D’UNE DALLE MODIS CENTREE SUR LA COTE D’IVOIRE EN 10 CLASSES EN FONCTION DE LEUR SERIE TEMPORELLE DE NDVI