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service de l'eau potable : fondements et limites

3. Le programme d'investissement de la SONEDE dans le 11ème plan

3.3. Amélioration de la salinité des eaux

Les nappes souterraines du sud tunisien, unique ressources conventionnelles en eau potable pour les villes du sud, sont caractérisées par leur forte salinité. La SONEDE et selon une logique de réduction maximale des écarts de différence dans la qualité de service entre les citoyens, a instauré un programme national d'amélioration de la qualité d'eau. Ce programme vise à distribuer une eau potable de salinité inférieure à 1,5 g/l sur tout le territoire tunisien. Pour cela, le programme a été subdivisé en deux phases. La première phase consiste à améliorer la qualité des eaux distribuées dans les régions où elle dépasse 2 g/l pour les ramener à moins de 1,5 g/l. Elle concerne la construction de dix stations de dessalement d'eau

saumâtre d'une capacité totale de 36 200 m3/j. Ces stations seront réparties dans les gouvernorats de Gafsa, Tozeur, Kébili, Gabes et Medenine. La deuxième phase vise à réduire la salinité de l'eau distribuée à toute la population en dessous du seuil de 1,5 g/l. Elle comporte la construction de 8 stations de dessalement d'une capacité totale de 40 000 m3/j desservant des localités situées dans les cinq gouvernorats de Gafsa, Tozeur, Kebili, Sidi Bouzid et Medenine.

La salinité exprime la teneur en sels dissous dans l'eau. Elle affecte uniquement le goût de l'eau. L'acceptation du goût de l'eau varie largement en fonction de la forme des chlorures présents, par exemple NaCl, KCl, ou CaCl2. Les recommandations pour la qualité des eaux de boisson de l'Organisation Mondiale de la Santé confirment l'absence d'effet associé à une salinité élevée dans l'eau sur la santé196. La norme tunisienne, NT 09.14 relative à la qualité des eaux de boisson indique que la salinité peut atteindre 2,5 g/l. Elle ne fixe pas pour autant une valeur de concentration comme seuil limite à ne pas dépasser197.

La préoccupation de réduire la salinité de l'eau n'est donc absolument pas reliée à des impératifs de santé ou à des obligations de respect de normes. Il s'agit purement d'un objectif d'équité sociale entre usagers en cherchant à rapprocher au maximum le service délivré. Néanmoins, comme nous l'avons discuté dans la première partie de ce travail, une égalité de traitement n'équivaut pas obligatoirement à une prestation similaire pour tous les citoyens. L'amélioration de la qualité d'eau peut en effet conduire à une augmentation importante dans les tarifs. La population bénéficiaire pourrait alors faire le choix de renoncer à l'amélioration

196

Thompson T., Fawell J., Kunikane S., Jackson D., Appleyard S., Callan Ph., Bartram J., Kingston Ph. (2007),

"Chemical safety of drinking-water : Assessing priorities for risk management", Publication de l'Organisation

Mondiale de la Santé, 142 pp.

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de la salinité et préférer d'autres alternatives telles que l'achat d'eau en bouteille, l'installation d'adoucisseurs pour la boisson, etc.

Le coût de production d'un mètre cube dessalé dépend bien sûr de la salinité initiale de l'eau brute mais également de la capacité de production de l'unité de dessalement. Nous avons repris dans le tableau suivant des ordres de grandeur des coûts de dessalement pour diverses capacités de production.

Tableau 16 : Estimation du coût de dessalement en $/m3 Capacité m3/j Eau de mer Eau saumâtre

4 000 1,300 0,700 8 000 0,900 0,400 15 000 - 0,554 20 000 0,700 0,250 30 000 - 0,246 40 000 0,650 0,220 60 000 0,600 0,200 Source : Kamel, 2008

Le programme d'amélioration de la qualité d'eau dans les régions tunisiennes prévoit l'installation de petites unités de dessalement à faible capacité de production journalière198. Le coût de dessalement dans ces unités se situerait en conséquence dans la tranche des prix la plus élevée. Il serait de l'ordre de 0,7 $/m3 soit environ 1 DT/m3 199. Ce coût, qui ne concerne

198

En effet, la première tranche prévoit la construction de 10 stations pour une production totale de 36 200 m3/j, soit une capacité moyenne de 4 000 m3/j. Pour la deuxième phase, il est prévu de construire 8 stations dont 4 peuvent être regroupées en une seule selon les résultats des études technico-économiques qui seront développées ultérieurement. Ce qui voudrait dire que pour une capacité totale de 40 000 m3/j, on aurait des stations d'une capacité de l'ordre de 5 000m3/j avec éventuellement une station plus importante.

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déjà que le dessalement et ne tient pas compte du coût de la mobilisation de la ressource, dépasse de loin le coût national moyen de production200. En se référant aux coûts moyens de production dans les districts concernés par le programme d'amélioration de la qualité d'eau, ce coût demeure très élevé. Il dépasse même le coût de revient pour la totalité des districts à l'exception du gouvernorat de Médenine.

Tableau 17 : Coût de revient et de production201 de l'eau dans les districts concernés par le programme de l'amélioration de la qualité

District Volume vendu (1000 m3) Coût moyen de production /m3 Coût moyen de revient /m3 Coût moyen facturé /m3 Résultat analytique de gestion (DT) Gafsa 8 187 N I* 702 483 - 1 524 252 Tozeur 3 485 N I 535 504 - 38 436 Kébili 4 309 N I 488 470 66 647 Sidi Bouzid 4 755 81 665 471 - 733 233 Medenine 8 318 519 1 345 525 - 6 600 880 Gabes 22 083 175 452 554 2 450 172 Total/Moyenne 51 137 243 666 520 - 6 379 982

* Non informé : Système de production local et absence de comptabilité analytique

Source : SONEDE, 2008b

Le volume qui sera produit par les 18 unités de dessalement sera de l'ordre de 27,8 millions de m3/an, ce qui représente environ la moitié du volume actuellement distribué dans les 7 districts concernés. Le surcoût engendré par l'installation des usines de dessalement

200

Le coût national moyen de production est estimé en 2007 à 151 millimes.

201

Le rapport de la comptabilité analytique (SONEDE, 2008b) présente le montant global des coûts de production par district. Pour le ramener au m3 nous avons considéré ici les volumes vendus et donc facturés et non pas aux volumes produits.

correspondra au produit du coût de dessalement par le volume d'eau dessalée202. En considérant un coût de dessalement d'environ 1 DT/m3, le surcoût serait de l'ordre de 27,8 millions de DT. Ce surcoût viendra s'ajouter au déficit déjà enregistré dans les comptes de gestion de l'entreprise203.

Selon la politique suivie actuellement par la SONEDE, ces surcoûts seront répercutés sur le tarif204. Néanmoins, l'augmentation tarifaire ne pourra pas à elle seule rattraper indéfiniment l'augmentation des coûts de production. D'autant plus que toutes les autres composantes du programme d'investissement nécessitent également une augmentation dans les tarifs. Il est donc clair que le programme d'amélioration de la qualité des eaux viendra compromettre sérieusement les équilibres financiers de la SONEDE dans les années à venir si celle-ci maintient la même politique de développement et le même système tarifaire.

202

Le coût de dessalement vient en effet s'ajouter aux autres coûts de mobilisation et de production d'eau : achat d'eau, énergie, frais de personnel, amortissement,… Le seul gain dans le coût de production pourrait se réaliser par rapport aux produits chimiques étant donné que tout le traitement s'effectuerait dans l'unité de dessalement et donc serait comptabilisé dans le coût de dessalement. Cependant, ce coût est tellement faible, il est de 11 millimes le m3, que nous avons décidé de le négliger pour maintenir la dimension d'ordre de grandeur dans nos calculs.

203

Le résultat analytique de gestion de l'entreprise pour l'année 2007 était de – 4,54 millions de DT. Pour les districts concernés par le programme de dessalement, il était de – 6, 37 millions de DT.

204

Ramené au volume vendu annuellement, le surcoût serait de 80 millimes le m3correspondant à 15% du prix moyen facturé. Autrement dit, il faudra opérer à une augmentation de 15% du tarif national pour rattraper le seul surcoût engendré par le programme d'amélioration de la qualité d'eau dans le sud.

3.4. Dessalement des eaux de mer pour l'augmentation de

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