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Actions collectives, institutions et marché : des actions collectives pour encadrer les

Dans le document Liste des Acronymes et Sigles (Page 68-71)

Chapitre 2. L’économie institutionnaliste pour cerner les relations

4. VEI : la théorie institutionnaliste retenue

4.1. Actions collectives, institutions et marché : des actions collectives pour encadrer les

Analysant le rôle de l'action collective dans le fonctionnement économique, Commons (1934) définit les institutions comme des actions collectives en contrôle, libération et expansion de l'action individuelle. Ainsi, les institutions aident les individus à interagir entre eux. Cette relation de dépendance est au fondement d'une mise en évidence de la nécessité d'une forme de coercition. Les institutions sont une nécessité pour l'existence même de l'action individuelle (Barthélémy et al., 2003).

L'action collective résulte d'une coopération formelle ou informelle entre deux ou plusieurs acteurs dans le but de réaliser des objectifs communs. L'action collective apparaît comme le fondement de la coordination interne de l'institution. Elle s'exerce à travers les règles définissant les relations liées et réciproques entre individus (Palloix, 2000), régule les conflits dans les relations de transaction et la sécurisation des anticipations, réduit les incertitudes des transactions. Le principe commun des actions collectives est le contrôle plus ou moins grand, la libération et l’expansion des actions individuelles (Commons, 1934, p.70). Ce qui marque une différence fondamentale avec l’action collective qui est organisée autour de la défense des intérêts communs poursuivis par les membres (Olson, 1966 éd 1978; Hess et Ostrom, 2007).

Chaque individu institutionnalisé16 est libéré et contraint par l'action collective dont il est membre. L'individu tire sa rationalité des institutions auxquelles il participe. L'agent rationnel coordonne son action à celle des autres et ceci dans le long terme dans un environnement contingent. Le contrôle permissif et contraignant de l'action collective est permis par les

"going concerns" (lois, constitutions, etc.) ou les règles inorganisées (coutumes, tabous, etc.).

Les actions collectives regroupent tous les types de coutumes inorganisés jusqu’aux "going concerns" organisés comme la famille, les corporations, les associations de commerçants, le système de réserve, l’Etat.

L'action collective étudiée dans notre thèse concerne les groupements de producteurs de coton qui sont des groupes d’individus volontaires travaillant pour un objectif à la fois marchand et non marchand. Elle est nouée autour de la production cotonnière pour favoriser sa commercialisation.

16 Institutionalized mind

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Dans la VEI, les institutions ne sont pas simplement des actions collectives. Elles jouent surtout une fonction de contrôle légal en délimitant les champs d’actions. Ainsi, institutions et actions collectives ne sont pas à distinguer mais forment un même ensemble. La définition des institutions dans cette perspective révèle l’importance des réseaux sociaux dans la conduite des actions individuelles. Les deux, actions collectives et actions individuelles sont intrinsèquement liées. Autrement dit, les relations marchandes ne peuvent s’effectuer qu’à partir des relations non marchandes.

Les règles de fonctionnement des actions collectives définissent et délimitent les actions individuelles en précisant ce que chacun peut, ne peut, doit, ne doit, pourrait ou ne pourrait pas faire. Nous les appelons règles de fonctionnement ou "working rules" parce qu’elles sont appropriées pour indiquer le principe universel de cause, effet, objectif, commun à toutes les actions collectives (Bazzoli, 1999). L’individu peut ou ne peut pas, parce que, l’action collective dans laquelle il s’inscrit peut ou ne peut pas lui venir en aide dans certaines circonstances. Il doit ou ne doit pas, parce que, l’action collective dans laquelle il s’inscrit peut l’obliger ou le contraindre. Il pourrait, parce que, l’action collective peut l’autoriser et le protéger. Il ne pourrait pas, parce que l’action collective peut le prévenir.

En effet, les institutions structurent chaque individu en créant des relations d'ordre, en définissant les droits, l'exposition des droits aux autres individus, privilèges et responsabilités (Schmid, 1972). Elles fournissent des informations concernant les actions en définissant ce que les individus doivent ou ne doivent pas faire, ce qu'ils pourraient faire sans l'interférence avec les autres individus (permission ou liberté), ce qu'ils peuvent faire avec l'aide du pouvoir collectif (capacité et droit) et ce qu'ils ne peuvent pas attendre du pouvoir collectif dans leur comportement (incapacité et exposition).

Les institutions exercent un contrôle légal sur les individus et sur les biens marchands, différent du contrôle physique de l'économie classique ou hédoniste. Le contrôle légal est un contrôle physique futur qui s’opère avant que l’objet physique ne soit échangé. Le contrôle physique futur par lequel le bien est échangé du fait de sa rareté est le terrain de l’économie d’entreprise ou domestique. Les règles de fonctionnement dont découle des relations d’ordre sont continuellement changeantes dans l’histoire des institutions (Commons, 1934, p.71).

Elles diffèrent d’une institution à une autre. Malgré leur différence, elles ont la caractéristique commune d’indiquer ce que les individus peuvent, doivent, pourraient, faire ou pas faire sous l’application de sanctions collectives.

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Cette définition précise deux caractéristiques de l'action collective : l'une en tant que contrainte et l'autre comme expansion et libération de l'action individuelle. Cette caractéristique des institutions marque une distinction avec North (1990) qui l'appréhende simplement comme des règles de jeu contraignantes qui délimitent les actions des organisations. La définition des institutions au sens de la VEI présente un grand intérêt pour notre démarche analytique. A notre connaissance, aucune étude n’a encore investi ce champ pour comprendre la dynamique des relations non marchandes et des relations marchandes des acteurs du système coton et comment leur articulation joue sur la coordination et le contrôle légal des acteurs au Bénin. Elle est aussi pertinente parce qu’elle met en balance comment les relations marchandes se réalisent de manière institutionnelle et s’inscrivent dans des relations non marchandes. C’est l’originalité de notre thèse.

L’analyse par la VEI et spécifiquement celle de Polanyi rejette l’autorégulation marchande et met en évidence le rôle structurant des règles et institutions qui orientent et accompagnent de manière indissociée les actions individuelles qui peuvent être de type marchand ou non marchand. Dépendre alors de la seule autorégulation marchande pour assurer la coordination économique serait vecteur de dysfonctionnements et de crises. L'action économique se déploie dans un environnement humain de contingence, de pluralité d'actions et d'acteurs en interaction (Postel, 2008a).

Il n'existerait pas de marché sans institutions ou institutions de marché (Barthélemy, 2008;

Banque mondiale, 2002; 2005; Fafchamps, 2005; 2008; Maucourant, 2007b). Les marchés fonctionnent avec des règles de fonctionnement qui dictent les normes de conduite des agents économiques. Les marchés (seuls) sont incapables de s’autoréguler du fait des imperfections et défaillances (Stiglitz, 2006). Des formes d’actions collectives, étatiques ou non, se doivent alors d’aider les marchés à fonctionner dans les situations d’imperfection. Ainsi, le marché ne serait pas un état stationnaire de confrontation entre offre et demande de biens et services marchands, d’allocation de ressources marchandes rares, mais comme un processus dynamique institutionnalisé et créatif. Le marché est une construction sociale, une institution qui fonctionne sur la base de règles collectives élaborées par les acteurs et acceptées comme telles par tous (Maucourant, 2007b; Hodgson, 1998). Ces considérations conduisent à revenir sur les hypothèses et développements de Polanyi (1944 éd 1983) sur la place du marché et des relations sociales dans le fonctionnement et l’organisation économique.

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Les règles de fonctionnement des actions collectives délimitent le champ d'actions de chaque acteur, ordonne les comportements et les relations économiques et sociales. La coutume et le droit, la magie et la religion induisent de concert, l’individu à se conformer à des règles de comportement qui lui permettent en définitive de fonctionner dans le système économique (Polanyi, op. cit.). Dans l’approche de la VEI, le marché implique des normes sociales, des coutumes, des relations d’échange institutionnalisées. Le marché et les relations marchandes induisent des règles complexes (Hodgson, op. cit.).

Les institutions, niveau supérieur de coordination entre individus fournissent les règles en vue de réaliser des objectifs communs (Commons, 1934). Le passage du niveau supérieur des institutions au niveau le plus élémentaire nous semble plus pertinent pour restituer les dynamiques institutionnelles et d’actions collectives des producteurs de coton pour le processus de production de coton et de répartition des ressources face à la libéralisation. Cela nous permet ensuite de caractériser les transactions entre producteurs de coton et les relations de conflits et de coopération qui en résultent. Nous choisissons le niveau élémentaire d'analyse de relations économiques pour ensuite étudier leur mode et degré d'articulation et d'hybridation dans le temps.

4.2. Transaction : de l’échange physique des commodities au transfert légal

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