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Chapitre II : Évaluation descriptive de la réplication périphérique (étude A)

6- Discussion de l’étude A : Étude de la réplication périphérique

6.2 Étude descriptive des structures spléniques

Une partie des thématiques du laboratoire consiste à mettre au point des techniques d’IHC plus sensibles que celles appliquées en routine. Ces optimisations, en cours de dépôts de brevets, reposent sur la détection des épitopes de la PrP à l’aide de prétraitements particuliers. Nos optimisations nous ont conduit à détecter chez les macaques transfusés développant une myélopathie une accumulation de PrP anormale dans le parenchyme splénique (plus précisément autour des vaisseaux). Ce marquage ectopique est également présent chez les macaques transfusés vMCJ en plus de celui retrouvé dans les structures immunitaires.

De façon générale, les techniques d’histologie ont apporté des éléments importants dans notre étude notamment en termes de localisation de la PrP et d’anatomie des structures considérées. Deux limites méritent toutefois d’être soulevées. La première est que nos résultats sont entièrement basés sur des techniques histologiques. La seconde est que les régions vasculaires sont connues pour « accrocher » de façon non spécifique de nombreux marqueurs. Néanmoins, aucune accumulation anormale de PrP n’est présente chez les macaques sains. De plus, ce marquage a été retrouvé avec plusieurs anticorps anti-PrP.

Caractérisation de la région périvasculaire accumulant anormalement la PrP

Nous avons déterminé que cette région périvasculaire est riche en fibres (déterminé grâce à une coloration à l’orcéine) et en muscles lisses (détectés par l’actine). Les colorations à l’orcéine et à l’hématoxyline-éosine nous ont également permis d’apprécier l’aspect morphologique général de cette structure.

Cette étude a été menée en utilisant des coupes histologiques en série afin de pouvoir comparer les différents marqueurs entre eux. Pour cette analyse, il aurait été plus adapté de réaliser des doubles marquages (PrPC et SMA ; PrPC et orcéine). Ces derniers permettraient également de déterminer quelles sont les cellules et structures impliquées dans l’accumulation de la PrP anormale. Cette analyse pourra être complétée par d’autres marqueurs et colorations des fibres de collagène (anticorps anti-collagène IV, colorations au Rouge Sirius ou Trichome de Masson).

Évaluation descriptive de la réplication périphérique (étude A)

139 À ce jour, peu de données sont disponibles sur les régions périvasculaires spléniques. Dernièrement, une équipe allemande a d’ailleurs découvert une nouvelle population cellulaire chez l’Homme (Steiniger et al., 2014). Leurs travaux soulignent qu’il existerait une troisième population, en plus des cellules dendritiques réticulaires et folliculaires, localisée autour des vaisseaux sanguins et marquée spécifiquement par l’anticorps CD271. Ce marqueur a été retrouvé dans la rate des macaques cynomolgus. Toutefois, il ne marquait pas spécifiquement notre région d’intérêt périvasculaire. L’année suivante, cette même équipea souligné des différences anatomiques et cellulaires majeures entre l’Homme et la souris (Steiniger, 2015). Ils ont par exemple déterminé que cette population cellulaire CD271 positive est absente chez la souris.

Nos données préliminaires soulignent que les régions périvasculaires accumulant des dépôts anormaux de PrP ne sont pas composées de structures immunitaires comme cela est classiquement connu dans le cadre d’une exposition périphérique. Cette accumulation ectopique pourrait refléter que ces structures sont capables de capter l’infectiosité en fonction de la composition de l’inoculum. Nous pouvons émettre l’hypothèse que l’infectiosité soluble (contenue dans le sang) pourrait être retenue dans les structures périvasculaires, tandis que l’infectiosité présente sous forme d’agrégats ne serait pas retenue et conduirait au développement d’une vMCJ (Comoy et al., 2017). Cette hypothèse est sous-tendue par l’implication d’une hétérogénéité de souches de prions. En effet, il est possible que certaines souches vMCJ soient composées d’un mélange de souches vMCJ « classiques » et myélopathiques. Lors d’une inoculation par voie intraveineuse, les souches myélopathiques pourraient alors « prendre le dessus » et seraient alors majoritaires. Cette hypothèse implique qu’il puisse exister une sélection des souches de prion en fonction de la voie d’inoculation. De façon plus précise, la voie intraveineuse pourrait impliquer des structures vasculaires pouvant jouer le rôle de filtre et retenir l’infectiosité en fonction des différentes formes (soluble ou agrégée).

Ainsi, les structures périvasculaires, décrites dans nos travaux comme accumulant la PrP anormale, pourrait piéger l’infectiosité soluble contenue dans les dérivés sanguins.

Comparaison de rates de différentes espèces

Une autre partie de mon travail a été de déterminer si cette structure périvasculaire existe dans d’autres modèles. À terme, l’objectif était de confirmer ou infirmer si le syndrome myélopathique est spécifique au macaque ou si ces structures pourraient également être impliquées dans d’autres modèles et notamment chez l’Homme.

Notre étude descriptive met en évidence des organisations différentes de la pulpe blanche et rouge dans les modèles expérimentaux étudiés (souris, chèvre, vache, mouton, babouin, macaques, lémurien et humain). Ces disparités anatomiques laissent sous-entendre des différences physiologiques fonctionnelles. Cependant, l’ensemble des espèces étudiées présentent les structures périvasculaires accumulant anormalement la PrP chez les macaques transfusés (vMCJ et myélopathiques). Une analyse plus approfondie est nécessaire afin de comprendre la fonctionnalité de ces structures et étendre ces données en termes d’implication dans la réplication périphérique de l’agent du prion. En perspectives, il faudrait élargir cette étude à d’autres organes lymphoïdes (notamment amygdales et appendices), afin de pouvoir le cas échéant réaliser des études de prévalence ante mortem chez l’Homme (c’est un des objectifs du projet ANR « UnmaskingBloodPrions »). En effet, les études chez l’Homme sont réalisées à partir de pièces post- opératoires telles que les amygdales et l’appendice.

Évaluation descriptive de la réplication périphérique (étude A)

140 Néanmoins se pose la question de l’expression physiologique de la PrPC dans ces différentes structures de la rate. En effet, on peut émettre l’hypothèse qu’en fonction des structures spléniques étudiées (pulpe blanche, rouge), différents niveaux d’expression de la PrPC soient impliquées dans la réplication de la PrP anormale. Dans ce sens, les travaux de Kim et ses collaborateurs ont déterminé que les souris humanisées (Tg650) ne sont pas le meilleur modèle dans l’étude de la réplication périphérique (Kim et al., 2016). Cet article souligne également l’implication de la PrPC dans l’organisation anatomique de la rate en comparant différentes lignées murines. Dans cette hypothèse il faudrait analyser et déterminer les modèles présentant des répartitions de la PrPC proches de celles observées dans les structures spléniques humaines. Ces différences anatomiques et physiologiques pourraient suggérer que l’étude de la réplication périphérique dans les maladies à prions chez la souris n’est pas la plus pertinente pour étudier les mécanismes physiopathologiques humains (Steiniger et al., 2015), et être éventuellement un élément expliquant pourquoi le syndrome myélopathique aurait été mis en évidence chez le macaque cynomolgus et pas précédemment dans d’autres modèles expérimentaux.

Ainsi, nos données sous-tendent notre hypothèse d’une réplication périphérique en dehors des mécanismes connus et que la réplication périphérique précoce conduise soit à une vMCJ soit à des syndromes myélopathiques en fonction de l’inoculation de souches solubles ou agrégées et des structures impliquées (immunitaires versus non immunitaires). Une étude mécanistique est donc nécessaire afin de mieux comprendre ces différences et souligner le risque en termes de santé publique.

Mise en place d’un modèle organoïde d’infection en 3D (étude B)

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Chapitre III : Mise en place d’un modèle organoïde

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