CNAM UE MVA 210 Ph. Durand Alg`ebre et analyse tensorielle Cours 6:
Formes diff´erentielles de degr´es p sur un ouvert de R
nJeudi 9 novembre 2006
1 Forme multilin´eaire alt´ern´ees dans un es- pace vectoriel de dimension finie
On se donne `a present un espace vectoriel de dimension finie not´e En. Le lien entre les formes multilin´eaires altern´ees et les formes diff´erentielles de l’analyse vient avec l’expression des formes multilin´eaires dans une base de l’espace vectoriel En.Donc, soit:
e1, e2, ..., en une base de En e∗1, e∗2, ..., e∗n une base du dual En∗
on redonne l’expression du produit tensoriel de deux formes multilin´eaires:
ϕ⊗ψ(x1, ..., xp+q) = ϕ(x1, ..., xp)ψ(xp+1, ..., xp+q) Donc par it´erations:
e∗1 ⊗e∗2⊗...⊗e∗p(x1, ...xp) = e∗1(x1)e∗2(x2)..., e∗p(xp)∀p
Dans chaque expression, xi d´esigne un vecteur de l’espace vectoriel En. L’antisym´etrisation de la formule pr´ecedente donne alors:
e∗1 ⊗e∗2⊗...⊗e∗p(x1, ...xp) = p!1 P
σε(σ)e∗1⊗e∗2⊗...⊗e∗p(xσ(1), ...xσ(p)) Il vient donc:
e∗1 ⊗e∗2⊗...⊗e∗n(x1, ...xp) = p!1 P
σε(σ)e∗1(xσ(1))e∗2(xσ(2))..., e∗p(xσ(p)) On rappelle que l’on d´efinit alors le produit ext´erieur qui v´erifie:
ϕ∧ψ = (p+q)!p!q! ϕ⊗ψ
Donc toujours par it´eration et en introduisant des formes diff´erentielles de degr´e 1:
e∗1 ∧e∗2∧...∧e∗p = p!e∗1 ⊗e∗2⊗...⊗e∗p
On en d´eduit une expression dans laquelle le ”p!” disparait:
e∗1 ∧e∗2∧...∧e∗p(x1, ...xp) = P
σε(σ)e∗1(xσ(1))e∗2(xσ(2))..., e∗p(xσ(p)) Ou en posant ρ =σ−1 :
e∗1∧e∗2∧...∧e∗p(x1, ...xp) = P
ρε(ρ)e∗ρ(1)(x1)e∗ρ(2)(x2)..., e∗ρ(p)(xp) Soit:
e∗1 ∧e∗2∧...∧e∗p(x1, ...xp) = P
ρε(ρ)e∗ρ(1)⊗e∗ρ(2)⊗...,⊗e∗ρ(p)(x1, ..., xp)
On vient donc d’exprimer le produit exterieur de p formes lin´eaires de degr´e 1 comme l’antisym´etris´e du produit tensoriel de p formes. On va pouvoir ainsi en analyse definir donc les formes diff´erentielles de degr´es p suivant ce proc´ed´e: pour calculer le produit ext´erieur de p formes il suffit d’additionner alg´ebriquement toutes les permutations du produit tensoriel des p formes, ponderer par le signe de la permutation du facteur:
e∗1 ∧e∗2∧...∧e∗p = P
σε(σ)e∗σ(1)⊗e∗σ(2)⊗...,⊗e∗σ(p)
Th´eor`eme
L’ensemble des p-formes multilin´eaires altern´ees est un espace vectoriel de dimension: Cpn, engendr´e par les ´el´ements: e∗i1 ∧e∗i2 ∧...∧e∗ip. avec 1≤i1 <
i2 < ... < ip ≤n
La demonstration (tr`es simple compte tenu de ce qui vient d’ˆetre d´evelopp´e) est laiss´ee au lecteur (curieux).
On vient de construire l’espace Λ∗p(En), en particulier aussi Λ∗p(Rn), qui nous interesse pour l’analyse vers laquelle nous revenons `a present.
2 p-formes diff´erentielles sur un ouvert de Rn
On se rappelle qu’une 1-forme diff´erentielle est une application d’un ouvert U deRn dans Λ∗1(Rn) (= Rn)∗).
De mˆeme une 0-forme sur un ouvert U deRn) est simplement une fonction:
c’est `a dire une application de U dans Λ∗0(Rn) ( =R), plus g´en´eralement :
D´efinition
Une p-formes diff´erentielles d´efinie sur un ouvert U de Rn est une applica- tion de U dans Λ∗p(Rn). Si cette application est de classe Cr on dit que la p-formes diff´erentielles est de classe Cr. On peut l’exprimer dans la base des e∗i1 ∧e∗i2 ∧...∧e∗ip. avec 1≤i1 < i2 < ... < ip ≤n Alors:
x ∈ U 7→P
1≤i1<i2<...<ip≤nωi1,...,ip(x)e∗i
1 ∧e∗i
2 ∧...∧e∗ip
On a coutume en analyse, de noter e∗iq par dxiq: x ∈ U 7→P
1≤i1<i2<...<ip≤nωi1,...,ip(x)dxi1 ∧dxi2 ∧...∧dxip L’espace des p-formes diff´erentielles est not´e: Ωp(U)
Dans la litt´erature on utilise l’une ou l’autre de ces notations. On a in- troduit le produit exterieur de deux p-formes lin´eaires. On transpose di- rectement cette notion en analyse et on obtient le produit exterieur de deux
formes diff´erentielles posons:
ω(x) =P
1≤i1<i2<...<ip≤nωi1,...,ip(x)dxi1 ∧dxi2 ∧...∧dxip une p-forme ω0(x) =P
1≤j1<j2<...<jq≤nωj01,...,jq(x)dxj1 ∧dxj2 ∧...∧dxjq une q-forme
D´efinition: produit ext´erieur
Soitω, ω0 respectivementpetqformes d´efinie sur U on sait d´efinir en chaque point x de l’ouvert U ω(x) ∧ ω0(x) on d´efinie ainsi le produit ext´erieur de deux formes diff´erentielles.
2.1 D´erivation ext´erieure
On suppose sauf avis contraire que tous les objets d´efinies sont C∞. Nous avons une application naturelle:
Ω0(U) = C∞(U) −→d Ω1(U)
L’application d est la d´erivation. Existe t’il un prolongement naturelle de cette application aux forme de degr´e quelconque? la reponse est oui. Cela permet de d´efinir ce qu’on appelle le complexe de De Rham:
D´efinition : Complexe
On appelle complexe une suite d’espaces vectorielsEi (ou plus g´en´eralement de modules Mi) muni d’une application d de Ei dans Ei+1 pour tout i telle que d◦d = 0 On note souvent le schema d’un complexe:
E1 −→d E2 −→...d −→d En
La notion de complexe est une notion tr`es g´enerale et le point de depart d’une th´eorie math´ematique app´ell´e alg`ebre homologique.
Th´eor`eme et d´efinition
Il existe une unique application d appell´ee d´erivation exterieure et qui pro- longe la d´erivation naturelle aux formes diff´erentielles. v´erifiant:
1) La restriction de d `a Ω1(U) est une application lin´eaire.
2) ∀ α ∈ Ωp(U), ∀β ∈ Ωq(U), dα ∧ β = dα ∧ β +(−1)p α ∧ dβ 3) d◦d = 0
D´emonstration
1) Prouvons l’unicit´e et posons:
ω(x) =P
1≤i1<i2<...<ip≤nωi1,...,ip(x)dxi1 ∧dxi2 ∧...∧dxip une p-forme Alors:
dω(x) =P
1≤i1<i2<...<ip≤nd(ωi1,...,ip(x)dxi1 ∧dxi2 ∧...∧dxip) en utilisant l’axiome 1 de lin´earit´e soit:
d ω(x) =P
1≤i1<i2<...<ip≤nd(ωi1,...,ip(x))dxi1 ∧dxi2 ∧...∧dxip
+ P
1≤i1<i2<...<ip≤nωi1,...,ip(x)d(dxi1 ∧dxi2 ∧...∧dxip)
Le dernier terme est nulle par it´eration `a cause de d2 = 0 et les termes d(ωi1,...,ip(x))dxi1∧dxi2∧...∧dxip sont des diff´erentielle au sens usuelle. d’ou l’unicit´e de l’ecriture du premier terme (decomposittion dans une base).
On a prouver que si d existe, elle est unique:
2) Existence:
Il suffit de regarder ce qui se passe pour des monˆomes posons:
ω(x) = g(x)dxi1 ∧dxi2 ∧...∧dxip une p-forme.
η(x) = h(x)dxj1 ∧dxj2 ∧...∧dxjq une q-forme:
d(ω(x)∧η(x)) = d(g(x)h(x) (dxi1 ∧...∧dxip)∧(dxj1 ∧...∧dxjq)) = (∂x∂
1(gh)dx1+...+ (∂x∂
n(gh)dxn)∧(dxi1 ∧...∧dxip)∧(dxj1 ∧...∧dxjq)
= Σk(∂x∂g h(dxk∧ dxi1 ∧...∧dxjq) + Σk(∂x∂hg(dxk∧dxi1 ∧...∧dxjq) =
Σk(∂x∂g
kdxk∧ (dxi1 ∧...∧dxip)∧η + Σk∂x∂h
k(dxk∧ω∧(dxj1 ∧...∧dxjq)) Attention : maintenant faire passer dxk a travers ω d’o`u le (-1)k : Σk(∂x∂g
kdxk∧ (dxi1∧...∧dxip)∧η + Σk(−1)p(ω∧∂x∂h
kdxk∧(dxj1 ∧...∧dxjq)) Ce qui prouve la deux`eme assertion. La troisi`eme est bien sur une conse- quence du lemme de schwarz.
2.2 Complexe de De Rham (suite)
On a maintenant tout ce qu’il faut pour d´efinir un complexe : -Une suite d’espaces vectoriels: les Ωp(U)
-Une derivation: La d´erivation exterieure d´efinie plus haut.
En dimension n le complexe de De Rham se note:
Ω0(U) = C∞(U) −→d Ω1(U) −→d ...−→d Ωn(U)−→d 0
Exemples
-Complexe de De Rham d’un ouvertU deR2 avec les notations ”consacr´ees”:
Ω0(U) = C∞(U) Grad−→ Ω1(U)−→Rot Ω2(U) −→ 0
-Complexe de De Rham d’un ouvertU deR3 avec les notations ”consacr´ees”:
Ω0(U) = C∞(U) Grad−→ Ω1(U)−→Rot Ω2(U) −→Div Ω3(U) −→ 0
2.3 Formes exactes, formes ferm´ees cas g´en´eral
On peut donc donner une d´efinition g´en´erale pour les formes exactes et les formes ferm´ees:
D´efinition
-Une forme de degr´e k est exacte si elle est dans l’image par d = dk−1 de l’espace vectoriel des formes de degr´e k−1
-Une forme de degr´ek est ferm´ee si elle appartient au noyau de l’application lin´eaire d = dk de l’espace vectoriel des formes de degr´e k dans l’espace vectoriel des formes de degr´ek+ 1
Remarque
Dire que pour un ouvert U, toute forme ferm´ee de degr´e k est exacte, c’est dire que Kerd ⊂ Imd, comme par ailleurs Imd ⊂ Kerd (par d2 = 0);on d´eduit:
Kerd = Imd.
De mani`ere g´en´erale quand un complexe v´erifie cette propri´et´e on dit qu’il sagit d’un complexe exacte. Le d´efaut d’exactitude d’un complexe est mesur´e par la non vacuit´e des espaces vectoriels quotients:
Hk(U) = Ker(dk)/Im(dk−1)
Les groupes Hk(U) mesure l’existence de ”topologie non triviale” (dans le cas des p-formes de cohomologie).
-On montre par exemple, que sur un ouvert ´etoil´e dimHk(U) = 1 Ce qui traduit l’existence d’une seule composante connexe et les groupes de coho- mologie sup´erieurs sont tous nuls traduisant la retraction de l’ouvert sur un point.
-On montre par exemple que sur l’ ouvert R2 - (0,0) le premier groupe de cohomologie est de dimension 1 ce qui traduit l’existence d’un trou.
2.4 Epilogue
Pour ˆetre tout `a fait complet disons que l’on peut construire une th´eorie duale: l’homologie singuli`ere. et cette dualit´e rend hommage a Poincar´e c’est la formule de stoke ou dualit´e de Poincar´e:
l’int´egrale d’une forme diff´erentielleω´evalu´ee sur le bord d’un domaine com- pacte D est l’integrale de dω ´evalu´ee a l’int´erieur:
R
∂Dω = R
Ddω