Conclusion
Nous voici au terme de notre longue balade intellectuelle. Au moment de rédiger le mot de la fin, nous sommes partagé entre la joie d’en avoir fini avec une quête de longue haleine et l’amertume de n’avoir, peut-être, pas poussé l’audace plus loin.
Que conclure ?
Nous voudrions d’abord noter que la question terminologique constitue un casse-tête consécutif, pour une grande part, à la forte pression de la tradition sur les pratiques grammaticales.
Les concessions faites à l’usage sont telles que toute tentative d’innovation est suspecte
1. Les exemples sont légion : Girard, Lévizac, Sicard, Domergue, Butet
2, etc. subirent tous, à tort ou à raison, les feux nourris de la critique à cause de leur engagement terminologique. Les détracteurs avaient pour noms : Voltaire, Du Marsais, Condillac, Roederer et Brunot.
Voltaire (cité par Brunot, 1905-1953, tome VI, 1
efascicule, p. 902 )
recommanda même le boycott de la nouvelle grammaire de Girard :
Je recommande, écrivit-il, sur-tout aux jeunes de ne pas lire la nouvelle grammaire de sieur abbé Girard ; elle ne feroit qu’embarrasser l’esprit, par les nouveautez difficiles dont elle est remplie ; et sur-tout elle serviroit à corrompre le stile.
Roederer ne fut pas plus tendre à l’endroit de Domergue. En somme, les attaques à l’endroit des « néologismes grammaticaux » constituent, dans l’histoire de la grammaire, une réalité permanente.
A la fin des années 60 et au début des années 70, Georges Galichet tournait en dérision la terminologie en usage en grammaire générative et transformationnelle, tandis que, plus près de nous, Marc Wilmet (1992) s’insurgeait contre ceux qui accusent les linguistes de « jargonner ».
En ce qui nous concerne, nous avons estimé dans cette thèse que la création terminologique est à la fois nécessaire et possible. Elle devrait conduire, comme nous l’avons postulé au § 3.2.2.1, à l’émergence d’une nomenclature explicative.
D’ailleurs, des modèles de terminologie « parlante » existent : nous avons cité les travaux de Guillaume, Damourette et Pichon, Yvon, Wilmet.
1
Les nouveaux termes acceptés presque unanimement sont rares, il faudrait les chercher du côté des linguistes d’obédience générative et transformationnelle : SN, SV, Sadj, SP, GN, GV, etc.
2