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La sécurité alimentaire à l'épreuve du droit international des investissements

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Academic year: 2021

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Submitted on 28 Sep 2020

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La sécurité alimentaire à l’épreuve du droit international

des investissements

Emily Madeleine

To cite this version:

Emily Madeleine. La sécurité alimentaire à l’épreuve du droit international des investissements. Droit. COMUE Université Côte d’Azur (2015 - 2019), 2019. Français. �NNT : 2019AZUR0031�. �tel-02950599�

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La sécurité alimentaire à l’épreuve du droit

international des investissements

Emily MADELEINE

GREDEG UMR 7321 – CNRS

Présentée en vue de l’obtention

du grade de docteur en droit d’Université Côte d’Azur

Dirigée par : Monsieur Jean-Baptiste RACINE, Professeur à l’Université Côte d’Azur

Soutenue le : 10 décembre 2019

Devant le jury, composé de : Monsieur Jean-Sylvestre BERGÉ Professeur à l’Université Côte d’Azur

Monsieur François COLLART DUTILLEUL Professeur émérite à l’Université de Nantes Monsieur Arnaud DE NANTEUIL Professeur à l’Université Paris-Est Créteil Madame Séverine MENÉTREY

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La sécurité alimentaire à l’épreuve du

droit international des investissements

JURY :

Directeur de la recherche :

Monsieur Jean-Baptiste RACINE, Professeur à l’Université Côte d’Azur

Rapporteurs :

Monsieur Arnaud DE NANTEUIL, Professeur à l’Université Paris-Est Créteil Madame Séverine MENÉTREY,

Professeure à l’Université du Luxembourg

Examinateurs :

Monsieur Jean-Sylvestre BERGÉ, Professeur à l’Université Côte d’Azur

Monsieur François COLLART DUTILLEUL, Professeur émérite à l’Université de Nantes

(4)

Titre : La sécurité alimentaire à l’épreuve du droit international des investissements

Résumé : Si les investissements internationaux contribuent à la réalisation de la sécurité alimentaire, ils peuvent aussi constituer une menace et une voie d’aggravation. L’étude des interactions entre la sécurité alimentaire et les investissements internationaux révèle l’existence de conflits de normes porteurs de risques alimentaires et met en lumière des déséquilibres normatifs dans le droit international des investissements. Ainsi, la mise en œuvre des droits des investisseurs est susceptible de conduire à l’exclusion de la sécurité alimentaire. A l’inverse, l’affirmation de cette dernière peut générer une altération ou une négation des droits des investisseurs. De sorte que, dans cette situation conflictuelle, les obligations alimentaires de l’État ne pourront pas être satisfaites de manière simultanée avec les obligations énoncées dans les accords d’investissements internationaux. Ces conflits normatifs interviennent comme des alarmes et renseignent d’une part, sur les déséquilibres du pouvoir de règlementation des États et des droits exclusifs des investisseurs, et d’autre part, sur l’asymétrie des droits des victimes d’insécurité alimentaire et des droits des investisseurs. L’insuffisance de prévention renforce les contrariétés de décisions et maintient l’assujettissement des États à des obligations contradictoires. Une fois analysés les conflits de normes et les risques alimentaires qu’ils génèrent, il s’avère que les tentatives de résolution de ces derniers, par le biais des techniques classiques, demeurent souvent inopérantes, rendant compte des limites du système actuel. Pour leur part, les risques, la norme et la responsabilité alimentaire restent parfois non identifiés et ne sont pas appréhendés dans leur globalité. Ces circonstances complexifient la résolution des conflits de normes. Dès lors, la thèse s’attache à démontrer que ces conflits sont susceptibles parfois d’être évités, ou réduits, puis, envisage un traitement dans la résolution de ces derniers en vue de parvenir à une articulation entre les droits des investisseurs étrangers et la protection de l’intérêt public alimentaire de l’État d’accueil de l’investissement.

Mots clés : conflits de normes, sécurité alimentaire, investissements internationaux, risques alimentaires, durabilité, accessibilité, répartition équitable, critère culturel, norme alimentaire, responsabilité alimentaire, principe de proportionnalité, principe de balancier.

Title : Food security tested by international investment law

Abstract : While international investments contribute to achieving food security, they can also be a threat and a path to aggravation. The study of the interactions between food security and international investments reveals the existence of norm conflicts carrying food risks and highlights normative imbalances in international investment law. Thus, the implementation of investor rights is likely to lead to the exclusion of food security. Conversely, the assertion of the latter may lead to an alteration or denial of investors' rights. In this situation of conflict, the food obligations of the State can not be met simultaneously with the obligations set out in the international investment agreements. These norm conflicts intervene as alarms and inform on the one hand, on the imbalances of the power of regulation of the States and the exclusive rights of the investors, and on the other hand, on the asymmetry of the rights of the victims of food insecurity and the investor rights. The lack of prevention reinforces the contradictions of decisions and maintains the subjection of States to contradictory obligations. Once analyzed the conflicts of norms and the food risks that they generate, it turns out that the attempts of resolution of these, by means of the traditional techniques, remain often inoperative, accounting for the limits of the current system. For their part, the risks, the norm and the food responsibility sometimes remain unidentified and are not apprehended as a whole. These circumstances complicate the resolution of norm conflicts. Therefore, the thesis seeks to demonstrate that these conflicts are sometimes likely to be avoided, or reduced, then, consider a treatment in the resolution of the latter in order to achieve a link between the rights of foreign investors and the protection of the food public interest of the host state of the investment. Keywords : Norm conflicts, food security, international investments, food risks, sustainability, accessibility, equitable distribution, cultural criterion, food norm, food liability, principle of proportionality, principle of pendulum.

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REMERCIEMENTS

Je tiens tout d’abord à faire part de ma profonde gratitude à M. le Professeur Jean-Baptiste Racine, qui par sa présence et ses conseils avisés, a su faire germer les raisonnements, éveiller l’esprit et accompagner l’auteure de ces lignes dans sa recherche. Son sens du dialogue m’aura permis de poursuivre des chemins inespérés. Je lui adresse mes plus sincères remerciements.

Ensuite, je souhaite remercier MM. les Professeurs Jean-Sylvestre Bergé, Arnaud De Nanteuil, François Collart Dutilleul et Mme la Professeure Séverine Menétrey pour leurs travaux respectifs. Chacun aura par ses écrits contribué à faire éclore ce travail. Qu’ils trouvent ici l’expression de ma reconnaissance.

Je remercie également ma famille, spécialement ma mère et ma sœur pour leur patiente relecture, ainsi que mes amies, Amandine, Géraldine, Julie et Nathalie, pour leur encouragement et leur confiance.

Enfin, je tiens à remercier infiniment mon compagnon Grégory pour son soutien indéfectible tout au long de ces années, et mes fils Célian et Léandre pour m’avoir donné (parfois absorbé) la force de mener jusqu’à son terme cette thèse.

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PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

I. ANNUAIRES, RECUEILS, REVUES

AFDI Annuaire français de droit international AJDA Actualité juridique Droit administratif AJIL American Journal of International Law

BYBIL British Yearbook of International Law

Cah. Arb. Les cahiers de l’arbitrage


CUP Cambridge University Press

D. Recueil Dalloz


EJIL European Journal of International Law

Gaz. Pal. Gazette du Palais

Harvard ILJ Harvard International Law Journal


I.C.L.Q. International and Comparative Law Quarterly


ICSID Rev. ICSID Review – Foreign Investment Law Journal International

J.Cl. Juris-classeur


JCP Juris-classeur périodique


JDI Journal du droit international (Clunet)


J.Int’l Arb Journal of International Arbitration

LGDJ Librairie général de droit et de jurisprudence

OUP Oxford University Press

P.U.A.M Presse universitaires d’Aix- Marseille P.U.F.
 Presses Universitaires de France


RCADI Recueil de cours de l’Académie de droit international

Rev.arb. Revue de l’arbitrage


Rev. crit. DIP Revue critique de droit international privé RIDE Revue internationale de droit économique RGDIP Revue générale de droit international public
 RTD civ. Revue trimestrielle de droit civile


RTD com. Revue trimestrielle de droit commercial RTD eur. Revue trimestrielle de Droit européen

TDM Transnational Dispute Management

II. ORGANISATIONS INTERNATIONALES, JURIDICTIONS, SIGLES

ALENA Accord de libre-échange nord-américain

CADHP Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples CCI Chambre de commerce internationale

CDI Commission du droit international des Nations Unies

C. Cass. 
 Cour de cassation


CEDH. Cour Européenne des Droits de l’Homme


CE Conseil
d’Etat

CIDH Commission interaméricaine des droits de l'homme

(7)

CNUCED Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement


CNUDCI Commission des Nations unies pour le droit commercial international

CPA Cour permanente d’arbitrage

CPI Cour pénale internationale


CPJI. Cour permanente de justice internationale CJCE devenue CJUE
 Cour de justice de l’Union européenne


CIJ
 Cour internationale de Justice

CIRDI Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements

CSA Comité de la sécurité alimentaire mondiale

FAO Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture/Food and Agriculture Organisation FIDA Fonds international de développement agricole

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques OIT Organisation internationale du travail

O.M.C/W.T.O Organisation mondiale du commerce / World Trade Organisation

ONG
 Organisation non gouvernementale

ONU Organisation des Nations-Unies


PAM Programme alimentaire mondial

SFDI Société française pour le droit international

UE Union Européenne

III. AUTRES ABREVIATIONS

al. alinea


art. article


fasc. fascicule

ibid ibidem (au même endroit)


id. idem


in dans


op. cit précédemment cité


Rés. résolution


s. suivant


spéc. spécialement


v ou voy. voir


vol. volume


(8)

SOMMAIRE

INTRODUCTION

Introduction ... p. 9 §1. La diversité des interactions ... p. 13 §2. Le prisme des conflits de normes ... p. 25 §3. La permanence du phénomène ... p. 33

Première Partie

L’EXISTENCE DES CONFLITS NORMATIFS ENTRE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET LES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX ... p. 39

Titre 1. La révélation des déséquilibres normatifs entre la sécurité alimentaire et

les investissements internationaux : le diagnostic des conflits de normes ... p. 41 Chapitre 1. L’analyse étiologique des conflits normatifs : les causes ... p. 42 Chapitre 2. L’analyse sémiologique des conflits normatifs : les symptômes ... p. 103

Titre 2. La généralisation des risques alimentaires dans la pratique des tribunaux

arbitraux d’investissements : le pronostic des conflits de normes ... p. 167 Chapitre 1. L’identification des conflits normatifs porteurs de risques alimentaires quantitatifs p. 169 Chapitre 2. L’identification des conflits normatifs porteurs de risques alimentaires qualitatifs .. p. 225

Deuxième Partie

LA RESOLUTION DES CONFLITS NORMATIFS DE LA SÉCURITÉ ALIMENTAIRE ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX ... p. 287

Titre 1. La norme alimentaire dans le droit international des investissements :

le balancier des normes ... p. 289 Chapitre 1. L’exigence d’une élévation de la norme alimentaire dans le droit international

des investissements ... p. 291 Chapitre 2. L’exigence d’une adaptation de la norme alimentaire dans le droit international

des investissements ... p. 343

Titre 2.- La responsabilité alimentaire dans le droit international des investissements :

le balancier des responsabilités ... p. 399 Chapitre 1. Les voies d’amélioration de la responsabilité alimentaire des opérateurs publics ... p. 401 Chapitre 2. Les voies d’admission d’une responsabilité alimentaire des opérateurs privés ... p. 441

CONCLUSION GÉNÉRALE ... p. 503 BIBLIOGRAPHIE ... p. 509 INDEX ... p. 561 TABLE DES MATIÈRES ... p. 565

(9)

A Mme la Professeure Laurence Boy et Me Marc Mamillo qui tous deux ont respectivement guidé mes premiers

pas dans la recherche et dans la pratique juridique.

(10)

INTRODUCTION

« Tout dans la vie sociale est affaire d’équilibre entre éléments contradictoires1 ».

1. L’essor des traités bilatéraux d’investissement au nom de la libéralisation ces dernières années a conforté l’idée d’un développement économique qui serait bénéfique aux États. Pourtant, ce modèle soulève des questions2 et a commencé à être remis en cause3. L’application de ce système lors de ces dernières décennies n’a pas permis l’éradication de l’insécurité alimentaire qui demeure omniprésente et détient de multiples visages. Du Nord au Sud, la quantité ou la qualité des denrées alimentaires restent préoccupantes. En 2018, le bilan de la sécurité alimentaire dans le monde révélait que le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation avait augmenté passant de 777 millions en 2015 à 821 millions en 2017, soit l’équivalent d’une personne sur neuf dans le monde4. L’inégalité de la répartition des denrées et des ressources, les barrières d’accès économiques et physiques, la généralisation des investissements agricoles à grande échelle, la détérioration de l’environnement, l’usage immodéré des pesticides, la circulation et le déversement de déchets toxiques désignent autant de facteurs divers d’insécurité alimentaire que le droit ne parvient pas à saisir avec satisfaction dans le droit international des investissements. Dès lors, si les opérations d’investissement sont

1

M. HAURIOU, La science sociale traditionnelle, Larose, 1896, p. 385.

2

Parmi de nombreux écrits, notons : M. SORNARAJAH, The international Law on Foreign Investment, Cambridge University Press, 4è éd., 2017, p. xiii ; O. DE SCHUTTER, J. SWINNEN and J. WOUTERS, Foreign Direct Investment

and Human development, The law economics of international investment agreements, Routledge, 2016 ; J.-W.

SALACUSE and N.-P. SULLIVAN, « Do BITs Really Work ?: An evaluation of Bilateral Investment Traites and Their Grand Bargain », Harvard International Law Review 46, 2005, pp. 67-130 ; L. SPESS, « Do Bilateral Investment Treaties Increase Foreign Direct Investment to Developing countries ? », (10) World development 1567, 2005 ; W. BEN HAMIDA, « La prise en compte de l’intérêt général et des impératifs de développement dans le droit des investissements»,

JDI. 2008, pp. 999-1033.

3

Cette remise en cause a atteint son paroxysme lors de la dénonciation de la Convention pour le Règlement des Différends relatifs aux Investissements entre Etats et Ressortissants d’autres Etats (CIRDI) par la Bolivie (2007), l’Equateur (2010), et le Venezuela (2012). A ce sujet, voy. p. ex : W. BEN HAMIDA, « La dénonciation de la convention CIRDI » in F. HORCHANI (dir.), CIRDI, 45 ans après, Bilan d’un système, Pedone, 2011 ; J. CAZALA, « La dénonciation de la convention de Washington établissant le CIRDI, AFDI, 2012, pp. 551-565 ; E. GAILLARD, « L’avenir des traités de protection des investissements » in Ch. LEBEN (dir.) Droit international des investissements et de l'arbitrage

transnational, Pedone, 2015, p. 1027.

4

Rapport FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF, L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2018.

Renforcer la résilience face aux changements climatiques pour la sécurité alimentaire et la nutrition. Rome, FAO, 2018,

p. 12 ; Rapport FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF, L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde

(11)

susceptibles de contribuer à l’amélioration de la sécurité alimentaire, elles constituent dans le même temps une menace et une voie d’aggravation.

2. L’apparition de nouveaux accords internationaux d’investissement a consolidé l’hostilité à l’égard du modèle bilatéral des traités d’investissement traditionnel et mis l’accent sur un renforcement du droit de réglementation des États menacé jusqu’alors par les droits substantiels des investisseurs. Des accords contemporains ont émergé tels que ceux conclus entre l’Union européenne et le Canada (CETA)5ou encore le Japon (JEFTA)6. Ces accords cristallisent les oppositions au règlement des différends fondé sur l’arbitrage Etat-investisseur prévu dans les traités d'investissement7. Le manque de transparence, d’indépendance des arbitres et le caractère excessivement élevé des sommes allouées restent régulièrement mis en avant dans l’arbitrage8. La spécificité de l’arbitrage Etat-investisseur accentue cette répulsion particulièrement parce qu’il traite de litiges susceptibles de mettre en danger le pouvoir de réglementation étatique destiné à des politiques d’intérêt public. La Commission européenne9, suivie de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans l’arrêt Achméa du 6 mars 201810 a sonné le glas de l’arbitrage d’investissement intra-communautaire. Dans sa décision, la CJUE a prononcé l’incompatibilité du droit de l’Union européenne et de l’arbitrage État-investisseur dans les traités bilatéraux

5

Accord économique et commercial global entre le Canada, d’une part, et l’Union européenne et ses États membres, d’autre part (AECG ou dénommé ci-après CETA comme dans sa version anglaise), Journal Officiel de l’Union européenne n° L 11 du 14 janvier 2017, signé le 30 octobre 2016. Son application provisoire a pris effet le 21 septembre 2017 mais ne concernait pas le Chapitre 8 portant sur l’investissement. L'accord entrera en vigueur à la condition que tous les États membres de l'UE le ratifient. Le 30 avril 2019, la CJUE a déclaré que le mécanisme envisagé destiné à remplacer l’arbitrage Etat-Investisseur par un tribunal permanent était compatible avec le droit de l’Union. V. Communiqué de presse n° 52/19, Luxembourg.

6

Accord de partenariat économique UE-Japon dénommé JEFTA dans sa version anglaise « Japan-EU free trade agreement » entré en vigueur le 1er février 2019. Voy. Décision (UE) 2018/1907 du Conseil du 20 décembre 2018 relative à la conclusion de l'accord publiée au Journal Officiel de l’Union européen n°L 330 du 27 décembre 2018.

7

J. PAULSSON, « Arbitration Without Privity », ICSID Rev., Vol. 10, Issue 2, 1995, pp. 232-257 ; E. GAILLARD, « L’arbitrage sur le fondement des traités de protection des investissements », Rev. arb., 2003, pp. 853-875 ; W. BEN HAMIDA, L' arbitrage transnational unilatéral : réflexions sur une procédure réservée à l'initiative d'une personne

privée contre une personne publique, thèse, Paris II, 2003.

8

Sur le développement d’une exigence de transparence dans l’arbitrage, voy. B. FAGE, « La confidentialité de l'arbitrage à l'épreuve de la transparence financière », Rev. arb., 2000, p. 5 ; W. BEN HAMIDA et T. CLAY, L’argent dans

l’arbitrage, Lextenso, 2013. Sur la transparence et la confidentialité de la procédure difficilement compatible avec le

caractère public du différend dans l’arbitrage d’investissement et la remise en cause d’actes de puissance publique, voy. S. HAMAMOTO, « Le Règlement de la CNUDCI sur la transparence dans l'arbitrage entre investisseurs et États fondé sur des traités et la Convention de Maurice sur la transparence - Commentaire article par article, JDI n° 1, Janvier 2016, doctr. 1 ; Sur le principe de confidentialité, voy. p. ex. E. GAILLARD, « Le principe de confidentialité dans l'arbitrage international », D. 1997, chron. p. 153 ; E. LOQUIN, « Les obligations de confidentialité dans l’arbitrage », Rev. arb., 2006, p. 323. Sur les conflits d’intérêts et l’indépendance des arbitres, voy. D. COHEN, « Indépendance des arbitres et conflits d’intérêts », Rev. arb., 2011, p. 611; Pour un exemple emblématique des sommes allouées et des enjeux financiers de la discipline. Voy. CPA, (CNUDCI), Yukos Universal Limited (Isle of Man) c. Russie, aff. n° AA 227, sentence finale, 18 juin 2014.

9

Communiqué de presse de la Commission européenne du 18 juin 2015 : « La Commission demande aux États membres de mettre fin à leurs accords bilatéraux d'investissement intra-EU ».

10

(12)

d’investissement intra-communautaire11. Néanmoins, la portée de l’affaire Achméa dans la pratique des tribunaux arbitraux d’investissement apparaît variable. C’est ainsi qu’en dépit de la décision de la CJUE, un tribunal du Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI) a reconnu sa compétence et prononcé la violation de la clause d’expropriation du traité bilatéral d’investissement (TBI) France-Hongrie12. Dans une autre affaire, un tribunal CIRDI considérait déjà que l’affaire Achméa n’avait pas d’incidence sur la procédure arbitrale, cette dernière étant fondée sur le traité de la Charte de l’énergie (TCE), auquel l’Union européenne est partie13. Pour autant, le 15 janvier 2019, vingt-deux Etats membres se sont engagés à la lumière de l’arrêt Achméa à résilier l’ensemble des traités bilatéraux d'investissement conclu entre eux14.

3. Chemin faisant, l’Union européenne procède à une reconfiguration de son droit des investissements susceptible de bouleverser l’architecture internationale de la discipline15. A titre d’illustration, le CETA16 instaure un tribunal permanent chargé de statuer sur les litiges entre

11

Voy p. ex. E. GAILLARD, « L'affaire Achmea ou les conflits de logiques », Rev. crit. DIP 2018. 616 ; L. D’ AVOUT et S. BOLLÉE, D. 2018. 1934 ; J. CAZALA, « L’incompatibilité avec le droit de l'Union européenne du système d'arbitrage investisseur-État contenu dans un traité bilatéral d'investissement intra-UE », RTD eur. 2018. 597 ; Chronique de jurisprudence de la CJUE, P. BONNEVILLE, E. BROUSSY, H. CASSAGNABÈRE ET C. GÄNSER, AJDA 2018. 1026 ; S. LEMAIRE, Chronique de jurisprudence arbitrale en droit des investissements, Rev. arb., 2018. 424; JDI 2018. 903, note Y. NOUVEL ; C. NOURISSAT, « La clause d’arbitrage contenue dans un traité bilatéral d’investissement n’est pas compatible avec le droit de l’Union européenne », Procédures 2018, nº 5 p.18; M. LAAZOUZI, « L'autonomie de l'ordre juridique de l'Union européenne contre l'arbitrage d'investissement intra-européen », Annuaire de droit de l'Union

européenne, 2018, n°2, pp. 217-224; G. CARDUCCI, « A State's Capacity and the EU's Competence to Conclude a

Treaty, Invalidate, Terminate – and "Preclude" in Achmea – a Treaty or BIT of Member States, a State's Consent to be Bound by a Treaty or to Arbitration, under the Law of Treaties and EU Law, and the CJEU's Decisions on EUSFTA and Achmea. Their Roles and Interactions in Treaty and Investment Arbitration », ICSID Rev., Spring 2018, Vol. 33 Issue 2, pp. 582-619; B. HESS « The Fate of Investment Dispute Resolution after the Achmea Decision of the European Court of Justice », Max Planck Institute Luxembourg for Procedural Law Research Paper Series, 2018(3), mars 2018 ; A. BILANOVÁ et J. KUDRNA, « Achmea: The End of Investment Arbitration as We Know It? », European Investment

Law and Arbitration Review, Vol. 3, Issue 1, 2018.

12

CIRDI, UP (ex Le Chèque Déjeuner) and C.D Holding Internationale c. Hongrie, aff. n°ARB/13/35, sentence du 09 octobre 2018.

13

CIRDI, Masdar Solar & Wind Cooperatief U.A. c. Espagne, aff. n°ARB/14/1, sentence du 16 mai 2018 spec. § 679. Cette interprétation a été confirmée dans l’affaire CIRDI, Vattenfall c. Allemagne, n°ARB/12/12, sentence du 31 aout 2018 spec. § 154 et § 232. Le tribunal arbitral CIRDI a peu après ces affaires affirmé sa position en regard de l’affaire Achméa et son indépendance, voy. Aussi CIRDI, Sodexo Pass International SAS c. Hongrie, aff. n°ARB/14/20, sentence du 28 janvier 2019.

14

Déclaration des représentants des gouvernements des États membres relative aux conséquences juridiques de l’arrêt

Achmea rendu par la Cour de justice et à la protection des investissements dans l’Union européenne, 15 janvier 2009,

disponible en ligne le site de la Commission européenne. La Suède, le Luxembourg, la Slovénie, Malte et la Finlande n'ont pas signé la déclaration.

15

Voy. p. ex. la communication présentée par l’Union européenne et ses États membres au Groupe de travail III de la CNUDCI portant sur la mise en place d’un mécanisme permanent de règlement des différends internationaux en matière d’investissements, A/CN.9/WG.III/WP.159/Add.1, le 18 janvier 2019.

16

D’autres accords prévoient également l’intégration de ce nouveau mode de règlement des différends. Voy. Accord de partenariat économique entre le Mexique et l’Union européenne conclu le 21 avril 2018, en cours de négociation ; Accord de libre-échange et accord sur la protection des investissements entre Singapour et l’Union européenne signés le 19 octobre 2018 et validés par le Parlement européen le 13 février 2019. Ce dernier accord remplace douze traités bilatéraux d'investissement conclus entre les États membres de l'UE et Singapour.

(13)

investisseurs étrangers et États hôtes au nom de la confiance mutuelle et de la cohérence de l'ordre juridique européen17. Si les difficultés de son articulation avec le droit européen et international sont d’ores et déjà soulevées18, la vertu de cet accord a été mise en lumière pour métamorphoser le mécanisme de règlement des différends et rééquilibrer la matière19. Ce dynamisme du droit international des investissements s’inscrit dans la ligne d’une réforme qui tend à « une réhabilitation du pouvoir normatif de l’Etat20 ». Sous l’angle de cette étude, la mise en oeuvre d’un nouveau mécanisme de règlement des différends appelle à la prudence. L’amélioration du traitement de la sécurité alimentaire dans le champ des investissements internationaux par ce biais et par un renforcement du pouvoir de réglementation des États pourrait ne constituer qu’un trompe-l’oeil. C’est ainsi qu’une refonte vers une meilleure prise en compte de l’intérêt public dans le droit international des investissements et plus spécifiquement l’arbitrage d’investissement nécessite moins de remplacer les acteurs et de changer le décor que de procéder à un véritable rééquilibrage des normes21.

4. La thèse s’attache dans ce contexte à étudier les interactions de la sécurité alimentaire et des investissements internationaux. L’analyse de leurs rencontres, des lois, et de la jurisprudence révèle l’existence de conflits de normes porteurs de risques alimentaires alarmants sur les déséquilibres normatifs entre le droit international des investissements et le droit international de l’alimentation. Partant, il convient d’introduire l’étude en se penchant sur la généralisation des contacts entre la sécurité alimentaire et les investissements internationaux. L’appréciation du sens de chacune de ces disciplines constitue un épanchement nécessaire si l’on désire saisir la portée de leurs croisements (§1). Puis, il s’agira de démontrer que l’approche des conflits de normes constitue une entrée éclairante permettant l’appréhension des déséquilibres, des risques et des effets négatifs de ces chevauchements (§2). L’observation des croisements renseigne sur la permanence du phénomène des interactions disciplinaires susceptibles de conduire à des conflits de normes sans véritable prise en

17

Sur ce point, voy. C. KESSEDJIAN et L. VANHONNAEKER, « Les différends entre investisseurs et États hôtes par un tribunal arbitral permanent. L'exemple du CETA », RTD eur. 2017. 633. Notons que le 30 avril 2019, la CJUE a entériné le mécanisme d’arbitrage Etat-investisseur et annoncé que le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États prévu par le CETA était compatible avec le droit de l’Union. V. Communique de presse n° 52/19, CJUE, Luxembourg, le 30 avril 2019.

18

A. DE NANTEUIL, « Les mécanismes permanents de règlements des différents, une alternative crédible à l’arbitrage d’investissement ? JDI. 2017-1, doctr. 2.

19

Y. NOUVEL, « L’accord économique et commercial global entre l'Union européenne et le Canada (CETA) », D. 2016. 2616.

20

L’expression est empruntée à S. ROBERT-CUENDET dans son son article intitulé « Crise ou renouveau du droit des investissements internationaux, Réflexions sur l’objet des mécanismes de protection des investisseurs étrangers »,

RGDIP. 2016-3, p. 562.

21

V. PIRONON, « Faut-il se méfier de l’arbitrage entre États et investisseurs étrangers ? Libres propos à partir de l’article 15 de l’accord franco-colombien sur l’encouragement et la protection réciproques des investissements, in Mélanges en

l’honneur de François Collart Dutilleul, Dalloz, 2017, p. 641. L’auteur précise qu’il ne serait pas efficace de transférer

(14)

compte de leur gravité ni des risques d’un phénomène de contagion (§3).

§1. La diversité des interactions

5. La généralisation des rencontres entre la sécurité alimentaire et les investissements internationaux s’inscrit dans une dynamique globale, celle de la multiplication des interdépendances disciplinaires, amplement identifiées entre les droits de l’Homme et les investissements internationaux ces dernières années22. Le professeur Charles Leben a précisé que « ces deux disciplines qu’on imaginait sans rapport, tout à coup se rencontrent, se percutent même, chacune étant contrainte à prendre en compte l’autre23 ». Les premières rencontres entre le droit de l’alimentation et le droit international des investissements se sont déroulées sous le prisme des droits de l’Homme : le droit de propriété des investisseurs face aux droits à l’eau et à l’alimentation des populations. La relation des investissements internationaux et des droits de l’Homme n’est pas si récente. En 1948, la Charte de la Havane24, avortée, comprenait déjà des chapitres sur le régime des investissements internationaux mais il faudra attendre les années 1970 pour percevoir une volonté

22

Parmi les nombreuses études sur le sujet, voy. W. BEN HAMIDA et F. COULÉE, Convergences et contradictions du

droit des investissements et des droits de l’Homme : Une approche contentieuse, Pedone, 2017 ; Y. RADI, Research Handbook on Human Rights and Investment, Edward Elgar Publishing, 2018 ; P. KAHN, « Droit de l’investissement et

droits de l’Homme » §§ 95-109 in F. HORCHANI (dir.), Où va le droit des investissements ? Désordre normatif et

recherche d’équilibre, Pedone, 2006; L.-E PETERSON and K.R. GRAY, « International Human Rights in Bilateral

Investment Treaties and in Investment Treaty Arbitration », International Institute for Sustainable Development, April 2003 ; J. CAZALA, « Protection des droits de l’homme et contentieux international de l’investissement », Cah. arb., Paris Journal of International Arbitration, 2012, n° 4, pp. 899-906 ; O. DANIC, « Droit international des investissements, droits de l’homme, droit de l’environnement », Chapitre 14, in Ch. LEBEN, Droit international des investissements et de

l'arbitrage transnational, Pedone, 2015; L. LIBERTI, « Investissements et droit de l’homme », in Ph. KAHN et Th.

WALDE (dir.), Les aspects nouveaux du droit des investissements internationaux, Martinus Nijhoff Publishers, 2007, Chapitre 16, pp. 791-852 ; A. PELLET, « Notes sur la ‘fragmentation’ du droit international: Droit des investissements internationaux et droits de l’homme », in Unity and Diversity in International Law. Essays in Honour of Professor

Pierre-Marie Dupuy, Martinus Nijhoff Publishers, Leiden/Boston, 2014, pp. 757-784; O. DE SCHUTTER, « Foreign

Investment, Human Development and Human Rights: Framing the Issues», Rights & International Legal Discourse, 3(2), 2009, 137-176; F. HORCHANI, « Les droits de l'homme et le droit des investissements internationaux », in L.BOY, J.-B RACINE & F. Siiriainen (dir.), Droit économique et droits de L'homme, Bruxelles, 2009, pp. 139-166 ; D.-C. OLARTE BACARES, L’articulation du droit international des investissements et des droits de l’homme : le cas de

l’Amérique latine, Thèse Paris I, 2015 ; J. WOUTERS, N. HACHEZ, «When Rules and Values Collide: How Can a

Balanced Application of Investor Protection Provisions and Human Rights Be Ensured » , Human Rights & International

Legal Discourse, 3(2), 2009, pp. 301-344; B. SIMMA, T. KILL, « Harmonizing Investment Protection and International

Human Rights: First Steps towards a Methodology », in International Investment Law for the 21st Century: Essays in

Honour of Christoph Schreuer, Oxford/New York, Oxford University Press, 2009, pp. 678-707; P.-M. DUPUY, F.

FRANCIONI, & E.-U. PETERSMANN (eds.), Human Rights in International Invesment Law and Arbitration, Oxford/New York, Oxford University Press, 2009, XLVIII-597 ; P.-M. DUPUY, J. VINUALES, « Human Rights and Investment Disciplines : integration in progress » in M. BUNGENBERG, J. GRIEBEL, S. HOBE et A. REINISCH,

International Investment Law, Baden Baden, Beck/hart/Nomos, 2015, pp. 1739-1767.

23

L’expression est de Charles Leben à propos des rencontres entre les droits de l’Homme et les investissements internationaux. Elle est transposable aux rencontres entre la sécurité alimentaire et les investissements internationaux. Ch. LEBEN, Introduction, in W. BEN HAMIDA et F. COULÉE, Convergences et contradictions du droit des investissements

et des de l’Homme : Une approche contentieuse, Pedone, 2017, p. 37.

24

Sur la question. Voy. F. COLLART DUTILLEUL, La Charte de la Havane, Pour une autre mondialisation, Dalloz, 2018.

(15)

des syndicats, de quelques Etats et de certaines organisations internationales d’encadrer les activités des sociétés transnationales25. La Charte de la Havane appréhendait déjà les rapports épineux entre les États et les investissements internationaux en mentionnant qu’un État était en droit de décider des conditions26 par lesquelles l’investissement étranger serait mis en œuvre sur son territoire. En effet, une opération d’investissement a lieu sur un territoire et a des effets positifs ou négatifs qui rejaillissent sur les populations locales, dès lors, la réalisation de l’investissement peut conduire a une violation des droits de l’Homme27, et plus spécifiquement à des atteintes graves à l’encontre de la sécurité alimentaire.

6. La multiplicité des interactions. Dans cette étude, le droit international des investissements désigne l’ensemble des règles juridiques relatives aux investissements internationaux28. En parallèle, le droit de l’alimentation renvoie à l’ensemble des règles juridiques afférentes à la sécurité alimentaire. Les formes d’interactions entre les investissements internationaux et la sécurité alimentaire sont loin d’être homogènes. Au contraire, elles demeurent marquées par leur diversité et « il n’existe pas un ‘‘droit des interactions’’ » apte à livrer un ensemble construit de solutions29 ». Dans la célèbre affaire Aguas Argentinas c. Argentine30, l’Etat invoquait l’état de nécessité afin de justifier la rupture brutale d’un contrat de concession conclu avec des investisseurs. Le droit d’accès à l’eau de sa population entrait en contradiction avec le droit de propriété des investisseurs. Dans une autre affaire, le Zimbabwe entendait ne pas indemniser des investisseurs, propriétaires terriens, expropriés au nom d’une réforme agraire justifiée par le droit d’accès à la terre et l’injustice de répartition des terres héritées pendant l’ère coloniale31. Puis que penser du refus

25

A.-A FATOUROS, « Problèmes et méthodes d’une réglementation des entreprises multinationales », JDI. 1974/3 pp. 496-521; A.-A. FATOUROS, « Le Projet de code international de conduite sur les entreprises multinationales : essai préliminaire d’évaluation », JDI. 1980/1, pp.5-47 ; A. VEILLEUX et R. BACHAND, « Droits et devoirs des investisseurs : Existe-t-il un espace juridique transnational ? », Groupe de recherche sur l’intégration continentale, Continentalisation Cahier de recherche 01-13 spec. p. 10 et pp. 9-12 ; G. CAIRE, « Codes de conduite : multinationales et acteurs sociaux »,

Revue d'économie industrielle, Vol 22, n°1, 1982, p.1 ; S. MANCIAUX, « L’implication d’investisseurs étrangers dans certaines violations des droits de l’Homme », in E. DOCKES (dir.), Au coeur des combats juridiques, Pensées et témoignages de juristes engagés, Dalloz, 2007, p. 355 ; Pour la volonté de certaines organisations internationales d’encadrer les activités de certaines sociétés transnationales. Voy. p. ex. OCDE, Principes Directeurs à l’intention des entreprises multinationales, 1976 ; OIT, Déclaration de principes tripartite sur les entreprises multinationales et la politique sociale, 1977; CNUCED, Code de la CNUCED sur les pratiques commerciales restrictives, 1980.

26

Article 12 c) literia ii) Charte de la Havane instituant une Organisation internationale du commerce, 24 mars 1948, Acte final, E/CONF.2/78.

27

S. MANCIAUX, « L’implication d’investisseurs étrangers dans certaines violations des droits de l’Homme », in E. DOCKES (dir.), Au coeur des combats juridiques, Pensées et témoignages de juristes engagés, Dalloz, 2007, p. 358.

28

Dans le cadre de cette recherche, les termes « droit international des investissements » sont similaires aux termes « droit des investissements internationaux » et « droit des investissements étrangers ». Sur ce point, infra n°10.

29

J.-S. BERGÉ, « Interactions du droit international et européen, Approche du phénomène en trois étapes dans le contexte européen », JDI 2009, n° 3, chron. 4.

30

CIRDI, Suez, Sociedad General de Aguas de Barcelona, S.A.and Vivendi Universal, S.A. c. Argentine aff. n°. ARB/03/19, Décision sur la responsabilité, 30 juillet 2010.

31

(16)

d’autorisation par un État d’une licence d’exploitation minière en vertu du droit à l’eau et à l’environnement de sa population qui se retrouve traduit devant le CIRDI au nom d’une atteinte aux droits des investisseurs32? Si la littérature sur la sécurité alimentaire33 a fleuri ces dernières années, tout comme celle des investissements internationaux34, en revanche, les convergences entre ces deux domaines ont fait l’objet de peu d’études jusqu’alors35. Pourtant, ils n’ont cessé de se rencontrer et leurs chevauchements imprévus génèrent un grand nombre d’incertitudes.

7. Les interdépendances disciplinaires. Le contentieux arbitral absorbe en grande partie le droit international des investissements dont les règles substantielles se fondent principalement sur des accords d’investissements. Or, d’autres normes extérieures « s’entremêlent36 » et interviennent dans

32

CIRDI, Pac Rim Cayman LLC c. Le Salvador, aff. n°ARB/09/12, sentence du 14 octobre 2016.

33

Parmi les nombreux écrits, voy. par ex. P. ALSTON, K. TOMASEVSKI (ed.), The Right to Food, Martinus Nijhoff Publishers, 1984 ; A. MAHIOU et F. SNYDER (dir.), La sécurité alimentaire - Food Security and Food Safety, Martinus Nijhoff, Leiden, Boston, 2006 ; J. BOURRINET et F. SNYDER, La sécurité alimentaire dans l'Union européenne,

Travaux du CERIC, Bruylant, 2003 ; F. COLLART DUTILLEUL, Le droit agroalimentaire en Europe, entre harmonisation et uniformisation, in Indret, Revista para el analysis del derecho, disponible sur le site www.indret.com ;

F. COLLART DUTILLEUL (dir.), Penser une démocratie alimentaire, Programme Lascaux, Inida, vol 1 en 2013 et vol 2 en 2014. ; F. COLLART DUTILLEUL, J.-P. BUGNICOURT (dir.), Dictionnaire juridique de la sécurité alimentaire

dans le monde, Larcier, 2013 ; F. COLLART DUTILLEUL et P. NIHOUL, Code de droit européen de l’alimentation,

Bruyant, 2012 ; F. COLLART DUTILLEUL et L. BOY, « La régulation communautaire et international des aliments », Les dossiers de la RIDE, ed Boeck, dossier n°1, 2007 ; G. PARENT (dir.), Production et consommation durables : de la

gouvernance au consommateur-citoyen, Actes du colloque international du CEDE, Québec, Yvon Blais ; S. MAHIEU, Le droit de la société de l’alimentation, vers un nouveau modèle de maîtrise des risques alimentaires et technologiques en droit communautaire et international, Larcier, 2007 ; OCDE, Sécurité alimentaire mondiale, Défis pour le système agricole et agro-alimentaire, Rapport OCDE, 2013 ; FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF, L’État de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2017. Renforcer la résilience pour favoriser la paix et la sécurité alimentaire Rome, Rapport FAO, 2017. Pour des exemples de thèses Voy. Par.ex. C. GOLAY, Droit à l'alimentation et accès à la justice, Thèse, Bruylant, 2011 ; M.-A. NGO, La qualité et la sécurité des produits agro-alimentaires, Approche juridique,

Thèse, Nice, L’Harmattan, 2006.

34

Parmi les nombreux écrits, voy. par ex. Ch. Leben (dir.), Droit international des investissements et de l'arbitrage

transnational, Pedone, 2015 ; A. DE NANTEUIL, Droit international des investissements, Pedone, 2017 ; R. DOLZER,

C. SCHREUER, Principles of International Investment Law, Oxford University Press, 2012 ; E. GAILLARD, La

jurisprudence du CIRDI, Pedone, Vol 1, 2004 et Vol 2, 2009 ; C. KESSEDJIAN et Ch. LEBEN (dir.), Le droit européen

et l’investissement, LGDJ, Panthéon-Assas, 2009 ; C. SCHREUER, L. MALINTOPPI, A. REINISCH, A. SINCLAIR,

The ICSID Convention : A Commentary : A Commentary on the Convention on the Settlement of Investment Disputes between States and Nationals of Other States, Cambridge University Press, 2009 ; M. BUNDEBERG, J. GRISEL, S.

HOBE et A. REINISCH, International Investment Law, Baden Baden, Beck/hart/Nomos, 2015 ; J. CRAWFORD, R. D. BISHOP, W. M. REISMAN, Foreign Investment Disputes : Cases, Materials and Commentary, Kluwer Law International, 2014 ; Z. DOUGLAS, J. PAUWELYN, J. E. VIÑUALES, The Foundations of International Investment

Law : Bringing Theory into Practice, Oxford University Press, 2014 ; J. W. SALACUSE, The Law of Investment Treaties,

Oxford University Press, 2015 ; J.-E. ALVAREZ (Ed.), International Investment Law, Leiden ; Boston : Brill/Nijhoff, 2017 ; Pour des exemples de thèses, Voy. par ex. S. MANCIAUX, Investissements étrangers et arbitrage entre États et

ressortissants d'autres États : 25 années d'activité du Centre international pour le règlement des différents relatifs aux investissements, Thèse, Dijon, 1998 ; A. DE NANTEUIL, L’expropriation indirecte en droit international de l’investissement, Thèse, Paris, 2014; O. DANIC, L'émergence du droit international des investissements : contribution des traités bilatéraux d'investissement et de la jurisprudence du CIRDI, Thèse, Paris, 2012.

35

Voy. par ex. en France : F. COLLART DUTILLEUL, « Investissements internationaux et accaparement des terres : la recherche d’un équilibre », in F. COLLART DUTILLEUL (dir.), Penser une démocratie alimentaire, Programme Lascaux, Inida, vol, 2013, p. 83; S. MANCIAUX, « Les règles du droit des investissements internationaux s'opposent-elles aux politiques de sécurité alimentaire ? », RIDE, vol. t. xxvi, no. 4, 2012, pp. 49-62.

36

P. JACOB, « La place des normes externes dans le contentieux de l’investissement », in S. ROBERT-CUENDET (dir.)

(17)

la sphère des investissements internationaux poussant l’arbitre, malgré lui, à décider de leur degré d’intégration et de l’intensité de leur considération. D’une part, la sécurité alimentaire a rencontré à de multiples reprises les investissements internationaux avec plus ou moins de succès s’agissant de sa réalisation. D’autre part, le droit international de l’environnement, le droit international des droits de l’Homme, le droit international pénal, le droit international public, le droit du commerce international, demeurent autant de domaines juridiques susceptibles de croiser les investissements internationaux et de mettre en scène des problématiques associées à la sécurité alimentaire. La mutation d’un système asymétrique vers un système plus équilibré suggère des impulsions normatives dans l’architecture juridique internationale par une considération des interdépendances disciplinaires.

8. Définition de la sécurité alimentaire 37. La Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale, lors du sommet mondial de l'alimentation de 1996 a précisé que celle-ci existe lorsque tous les êtres humains ont, à tout moment, un accès physique et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active38. Cette définition évolutive s’inspire de celle proposée par la Conférence mondiale de l’alimentation tenue en 197439 et réaffirme les objectifs en regard de la généralisation de l’insécurité alimentaire et du défaut de réalisation de ces derniers. La sécurité alimentaire vise autant le droit à l’alimentation que le droit à l’eau. Ce dernier consiste en un approvisionnement suffisant, physiquement accessible et à un coût abordable, d’une eau salubre et de qualité acceptable pour les usages personnels et domestiques de chacun40. La définition de 1996 a conforté les textes internationaux reconnaissant le droit à l’alimentation. La DUDH41 et le PIDESC42 ont consacré le droit à un niveau de vie suffisant43 englobant le droit d’être à l’abri de la

37

Pour une définition approfondie de la sécurité alimentaire. Voy. le texte de G. PARENT et S. MORALES in F. COLLART DUTILLEUL (dir.), Dictionnaire juridique de la sécurité alimentaire dans le monde, Larcier, 2013, pp. 618-619.

38

Déclaration de Rome sur la sécurité alimentaire mondiale, Sommet mondial de l’alimentation, 13 au 17 novembre 1996, Rome, Italie.

39

La Conférence Mondiale de l’alimentation, regroupant différents gouvernements avait affirmé que « Chaque homme,

femme et enfant a le droit inaliénable d’avoir à manger et ne doit pas souffrir de malnutrition afin de se développer pleinement et de conserver ses facultés physiques et mentales ».

40

Comité des droits économiques, sociaux et culturels. Vingt-neuvième session (2002), Observation générale n°15 : le droit à l’eau, Doc. ONU HRI/GEN/1/Rev. 7, p. 116, §2 ; Voy. sur la question. P.-M. DUPUY, « Le droit à l’eau, un droit international ? », EUI Working Paper Law, n°2006/6, en ligne : http://cadmus.iue.it.

41

La Déclaration universelle des droits de l'Homme (DUDH), adoptée par l'Assemblée générale des Nations unies le 10 décembre 1948.

42

Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC), adopté et ouvert à signature le 16 décembre 1966 par l’Assemblée générale des Nations Unies.

43

Article 25.1 de la Déclaration universelle des Droits de l’Homme (DUDH) : 1. Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l'alimentation, l'habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité, de veuvage, de vieillesse ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.

(18)

faim et le droit à une nourriture suffisante. Preuve de son caractère évolutif, certains désirent ajouter à la définition celle de sécurité nutritionnelle. Cette dernière ne comprend pas seulement l’alimentation mais également « les usages en matière de soins, de santé et d’hygiène44 ». L’affirmation que tout le monde a le droit à une alimentation semble facile45. En effet, de nombreux textes et déclarations reconnaissent ce droit. Pourtant, sa mise en oeuvre recouvre de nombreuses difficultés.

9. Spécificité agricole. De manière générale, l’idée que les produits agricoles puissent ne pas être des produits comme les autres apparaît être relativisée dans la sphère des investissements internationaux. La spécificité agricole devrait naturellement tenir au caractère vital de ces derniers mais cette spécificité reste insuffisamment prise en compte dans les échanges commerciaux, notamment dans le cadre des négociations commerciales agricoles ayant eu lieu au sein de l’Organisation mondiale du commerce (OMC). L’effet « boule de neige » sur les investissements internationaux est palpable. Pourtant, la sphère non commerciale a saisi depuis fort longtemps la spécificité agricole. L’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a prévenu des risques liés à une insuffisance de prise en compte de la spécificité agricole par le système commercial. Ainsi, cette insuffisance de considération de la spécificité agricole contribue à renforcer sous toutes ces formes l’insécurité alimentaire dans les investissements internationaux.

10. Définitions incertaines de la notion d’investissement. « Incertaine 46 » et « introuvable47 », la définition de l’investissement tourmente le droit international en demeurant obscure. Le caractère brumeux lié à la définition de l’investissement trouve son explication dans la volonté constante de conserver la flexibilité nécessaire au bon fonctionnement de la discipline. Mais bien que la flexibilité demeure fonctionnelle, « l’inflation définitionnelle 48 » rattachée à l’investissement international présente des risques quant à la lisibilité et la prévisibilité du droit. A l’origine, le droit des investissements internationaux s’est construit sous l’influence de droits fondamentaux, notamment les droits fondamentaux des étrangers, à travers le droit pour toute

44

La sécurité nutritionnelle désigne « la situation dans laquelle on a à la fois un accès sans danger à une alimentation nutritive appropriée, d'une part, et, d'autre part, un environnement sanitaire et des services de santé et de soin adéquats, qui assurent une vie saine et active pour toute la famille ». Voy. Rapport FAO, FIDA, OMS, PAM et UNICEF, L’État

de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde 2018. Renforcer la résilience face aux changements climatiques pour la sécurité alimentaire et la nutrition. Rome, FAO, 2018, p. 175.

45

H. THOOLEN, in P. ALSTON, K. TOMASEVSKI (ed.), The Right to Food, Martinus Nijhoff Publishers, 1984, p. 5.

46

S. MANCIAUX, CIRDI - Chronique des sentences arbitrales, Journal du droit international (Clunet) n° 2, Avril 2011, chron. 5, §7.

47

A. DE NANTEUIL, Le droit international des investissements, Pedone, 2017, p. 165.

48

(19)

personne d’exercer une activité économique49. Sous l’angle de l’investisseur, le projet d’investir réside dans l’idée d’une « pulsion créatrice50 », guidé par une volonté de succès et d’enrichissement personnel. Sous le prisme de l’État, l’objectif d’enrichissement perdure mais vise, en principe, le bien-être de sa population et le développement économique51. Au-delà des divers points de vue, chaque Etat apporte sa propre définition de l'investissement. Celles-ci vont être envisagées en fonction des buts visés et des instruments pris en considération. A l’échelle internationale, les différents termes pour appréhender la matière encadrant les investissements se rejoignent et démontrent une certaine autonomie de ce droit. Depuis ces dernières années, cet ensemble de règles devient une branche de droit et se retrouve à travers des appellations non définies comme droit des investissements internationaux ou droit des investissements étrangers. Bien que les termes de droit international des investissements soient retenus, cette étude ne porte pas sur les divergences sémantiques de l’appellation de la matière regroupant les règles applicables aux investissements internationaux. Le développement important des traités bilatéraux d’investissement a permis de faire émerger un droit international des investissements sans qu’un consensus autour de la notion d’investissement ne se dessine.

11. L’absence de consensus sur la notion d’investissement. La définition de l’investissement international et les conditions de caractérisation d’une situation comme relevant d’une opération d’investissement demeurent cruciales. De là découle l’ensemble des protections juridiques réservées aux droits des investisseurs. Malgré le développement et les succès du droit international des investissements, un consensus sur la définition et les conditions des investissements internationaux n’existe pas, tant parce qu’ils recouvrent des notions des plus diverses que par la multiplicité des approches dont ils font l’objet. La définition est caractérisée par une multiplicité d’expressions internes et internationales variant selon le domaine économique, comptable, ou encore juridique. La dimension économique permet d'avoir un socle de définitions enrichissant la matière et apparaît plus précise que la dimension juridique. Par exemple, la distinction entre l’investissement de

49

D. CARREAU, P. JUILLARD, Droit international économique, Précis Dalloz, 5è ed., 2013, p. 433.

50

G. THULLIER et Y. GAILLARD, « Qu’est ce qu’un investissement ? », Revue économique, vol. 19, n° 4, 1968, p. 615 : « L’investissement c’est aussi un besoin propre, c’est une pulsion créatrice, en même temps qu’un choix volontaire,

reposant sur des idées rationnelles. Le projet d’investir par définition même, appartient à l’imaginaire. Dans la décision de l’entrepreneur, il existe, quels que soient les mobiles, une spéculation au sens étymologique du terme : l'entrepreneur se nourrit toujours peu ou prou de rêve, qu’il s’agisse de ses moyens financiers ou du succès technologique ».

51

Voy. à ce sujet. S. LALANI and R. POLANCO LAZO (eds), The role of the State in Investor-State Arbitration, Brill Nijhoff, Leiden/Boston, 2015. La question centrale est de parvenir à équilibrer la nécessité de développement économique de l’État par la dynamique des investissements internationaux tout en ne compromettant pas avec ses valeurs sociales, telles que la protection de l’environnement, plus largement le respect des droits de l’Homme et plus spécifiquement concernant notre étude, la sécurité alimentaire.

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portefeuille et l’investissement direct étranger n’existe pas dans les accords d’investissement52. S’agissant de la dimension juridique, la doctrine a largement contribué à l’éclaircissement de la notion d’investissement international 53 . A ce titre, le Professeur Arnaud De Nanteuil a défini l’investissement comme « l’engagement d’une somme d’argent sur une certaine durée aux fins de dégager un bénéfice ou un profit sous réserve du risque économique que présente naturellement une telle opération54 ». Pour autant, l’absence de consensus sur la notion d’investissement et la flexibilité nécessaire attachée aux investissements internationaux ne doivent pas autoriser une protection non désirée des opérations que les Etats souhaitaient préalablement exclure du champ d’application du traité.

12. Les tâtonnements jurisprudentiels. L’application du droit par les tribunaux arbitraux reste loin de constituer un corps homogène, l’existence d’une jurisprudence arbitrale propre a même fait l’objet d’oppositions55. Pour autant, la jurisprudence arbitrale constitue une véritable source du

52

L’investissement direct peut être défini en fonction de sa qualité « d’intérêt durable », de cette façon l’investissement direct est « un type d’investissement transnational effectué par le résident d’une économie (« l’investisseur direct ») afin

d’établir un intérêt durable dans une entreprise (« l’entreprise d’investissement direct ») qui est résidente d’une autre économie que celle de l’investisseur direct », in Rapport de l’OCDE, Définition de référence de l’OCDE des investissements directs internationaux, 4éd., 2008, p. 17. L’investissement de portefeuille visent à investir dans des

actions ou obligations d'entreprises, très souvent, l’investissement se fait à court terme dans le but d’obtenir un rendement élevé. Ces deux approches de l’investissement se différencie car l’une définit l’investissement « en fonction de l'entreprise » c’est l'investissement direct, et l’autre « en fonction des actifs », c’est l’investissement de portefeuille. Voy. OCDE, Rapport sur la définition de l'investissement et de l’investisseur, Groupe de négociation de l’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI), du 19 octobre 1995, p. 2.

53

Voy. parmi une littérature abondante p. ex. J. ASMUS BISCHOFF and R. HAPP, « The Notion of Investment », in M. BUNGENBERG, J. GRIEBEL, S. HOBE and A. REINISCH (eds), International Investment Law, Baden Baden Nomos, 2015, p. 495 ; J.-W. SALACUSE, The Law of Investment treaties, Oxford University Press, 2015, spec. pp. 1-45 ; E. GAILLARD, « Reconnaître ou définir ? Réflexions sur l'évolution de la notion d'investissement dans la jurisprudence du CIRDI » in J.-M. SOREL (dir.), Le droit international économique à l'aube du XXIe siècle. En hommage aux professeurs

Dominique Carreau et Patrick Juillard, Pedone, 2009, pp. 17-32 ; S. MANCIAUX , « The notion of Investment : New

controversies », Journal of World Investment and Trade, n° 6, déc. 2008, n°4, pp. 443-466 ; P. KHAN, « Les investissements internationaux, nouvelles donnes, vers un droit transnational de l’investissements », in P. KAHN et T.-W. WALDE, Les aspects nouveaux du droit des investissements internationaux, Leiden Nijhoff, 2007, spec. sur la définition de l’investissement pp. 17-31 ; J. MATRINGE, « La notion d’investissement » in Ch. LEBEN (dir.), Droit

international des investissements et de l'arbitrage transnational, Pedone, pp. 135-160, 2015 ; F. YALA, « La notion

d’investissement dans la jurisprudence du CIRDI : actualité d’un critère de compétence controversé (les affaires Salini, SGS, et Mihaly) », in Ch. LEBEN (dir.), Le contentieux arbitral transnational relatif à l’investissement, Nouveaux

développements, LGDJ, 2006, pp. 281-306.

54

A. DE NANTEUIL, Le droit international des investissements, Pedone, 2017, p. 182.

55

Voy. Par ex. parmi une littérature fournie sur la question : C. SCHREUER & M. WEINIGER, « A Doctrine of Precedent ? », in P. MUCHLINSKI, F. ORTINO & C. SCHREUER (ss dir.), The Oxford Handbook of International Investment

Law, Oxford UP, 2008, pp. 1188-1206 ; C. KESSEDJIAN, « To Give or Not to Give Precedential Value to Investment

Arbitration », in R. P. ALFORD & C. A. ROGERS (ss dir.), The Future of Investment Arbitration, Oxford UP, 2009, pp. 43-68 ; D. DI PIETRO, « The Use of Precedents in ICSID Arbitration : Regularity or Certainty ? », International

Arbitration Law Review, 2007, pp. 92-103 ; Z. DOUGLAS, « Can a Doctrine of Precedent be Justified in Investment

Treaty Arbitration ? », ICSID Review : Foreign Investment Law Journal, 2010/1, pp. 104-110 ; J. PAULSSON, « The Role of Precedent in Investment Arbitration », in K. Yannaca-Small (ss dir.), Arbitration under International Investment

(21)

droit international des investissements56. Les tribunaux arbitraux d’investissement apparaissent « dynamiques » et de « créatifs serviteurs57» du droit international public. L’un de leurs principaux visages transparaît sous l’égide du CIRDI 58 . « Interprète incontournable de la norme internationale59 », le CIRDI n’a pas défini dans sa convention la notion d’investissement, la logique étant de ne pas enfermer les investissements dans un cadre rigide, cette notion reposait alors sur une conception subjective. Chemin faisant, les tribunaux arbitraux ont dû appréhender la notion d’investissement.

13. Peu à peu, la volonté d’une approche objective est apparue. Il n’existe pas en la matière de cohérence. De façon progressive, un droit prétorien est en construction. Dans la célèbre affaire Salini c. Maroc60, le tribunal arbitral a décidé que l’investissement reposait sur un apport, une certaine durée d’exécution, et une participation au risque de l’opération. Ces critères ont communément été désignés comme les critères Salini. Un quatrième critère a été souligné, le critère facultatif de contribution de l'investissement au développement économique de l’Etat d’accueil. Il a été repris certaines fois, mais de manière générale, l’idée n’a pas fait pas l’unanimité. Ceci étant, la conception Salini a eu une influence dans la sphère des investissements, et il n’était pas impensable de croire que la conception objective avait triomphé. Toutefois, dans l’affaire Biwater Gauff c. Tanzanie61, le tribunal arbitral a adopté une conception libérale de la définition en prenant de la distance avec le test Salini et en soulignant que même si les critères Salini n’étaient pas remplis, cela ne serait pas suffisant pour écarter la compétence du tribunal62. Dans l’affaire Joy Mining c. Egypte63, les arbitres ont estimé que les parties n’avaient pas une liberté absolue. Les parties souhaitant donner compétence au CIRDI par le biais d’un contrat ou d’un traité qualifié d'investissement, ne le peuvent pas, toutes les fois où la compétence ne répondrait pas aux conditions telles que définies dans l’article 25 de la Convention CIRDI64. Sous cet angle, seul le tribunal détient le pouvoir de se prononcer sur ce qu’est ou devrait être un investissement.

56

M. AUDIT, « La jurisprudence arbitrale comme source du droit international des investissements », in Ch. LEBEN (dir.), Droit international des investissements et de l'arbitrage transnational, Pedone, pp.119-134, 2015.

57

A. DE NANTEUIL, « L’application du droit international public dans l’arbitrage transnational », RGDIP. 2014/1, p. 69.

58

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